Les très-graves erreurs de l'abbé Gleize,
porte-plume théologique de la Fsspx, 
et de l'abbé Pagliarani,
actuel Supérieur général de ladite Fsspx, 
quant à leur exposé sur le Magistère ordinaire
& universel de l'Église et son infaillibilité inhérente
 
 
 
"Or voici quel est le jugement : la lumière est venue dans le monde,
et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière,
parce que leurs œuvres étaient mauvaises.
Car quiconque fait le mal hait la lumière, et ne vient point à la lumière,
de peur que ses œuvres ne soient condamnées.
Mais celui qui agit selon la vérité vient à la lumière,
afin que ses œuvres soient manifestées,
parce que c'est en Dieu qu'elles sont faites"
(Jn III, 19-21)
           
        Qu'est-ce qui m'a poussé seulement les jours derniers et pas avant à feuilleter d'abord très-rapidement et comme pressé, puis, au fil de ma lecture, à éplucher de plus en plus attentivement et méticuleusement, les archives du Courrier de Rome, organe de presse de la Fraternité sacerdotale saint Pie X de Mgr Lefebvre ? Dieu le sait je ne sais, comme dirait saint Paul. C'était donc le moment où je devais le faire, je suppose.
           
        Les voies de Dieu sont vraiment impénétrables, insondables, elles se manifestent par le Saint-Esprit qui mène nos âmes par où Il veut, quand Il veut et où Il veut. "Le vent souffle où il veut ; et tu entends sa voix, mais tu ne sais ni d'où il vient, ni où il va : il en est ainsi de tout homme qui est né de l'Esprit" (Jn III, 8). Dans cet enseignement lapidaire et magistral à Nicodème, Jésus, maître de Vérité, Vérité Lui-même, ne prend évidemment pas le vent par hasard. Il est assimilé dans la Sainte-Écriture au Saint-Esprit Lui-même : "Vous [ô Seigneur mon Dieu] marchez sur les ailes des vents ; et faites de vos Anges, des vents" (Ps CIII, 3-4). Et bien sûr, la Pentecôte vérifie cette assimilation : "Lorsque le jour de la Pentecôte fut arrivé, ils étaient tous ensemble dans un même lieu. Tout à coup il se produisit, venant du Ciel, un bruit comme celui d'un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis" (Act II, 1 & 2). 
           
        ... Pourquoi ne pas vous le dire, ami lecteur ? Cette assimilation du vent au Bon Dieu, au Saint-Esprit, m'avait marqué, lorsque, sur ma désormais lointaine vingtaine d'âge, je composais quelques poèmes... Avant de rentrer dans ce nouvel article qui va être technique, pointu et aride, je crois bon et ne résiste d'ailleurs pas au plaisir de vous partager celui intitulé Aux vents :
 
Le Saint-Esprit, souffle de vie,
Colombe de Dieu qui ravit,
Des artistes, Seigneur sublime,
Habite en ces vents que j'entends.
Sa douce Force les anime,
Et c'est bien Lui qui est présent.
 
Vents, bruissements, chuchotements,
Doux zéphirs, souffles violents,
Vents impétueux, brises chaudes,
Et même vents froids qui maraudent,
Tempêtes et vents mélodieux,
Révèlent l'Espace de Dieu.
 
Bruits humains qui êtes si vains,
Même toi, belle voix humaine,
Taisez-vous donc, vous n'êtes RIEN !
Rentrez en vos pauvres domaines !
Place nette à ce qui est pur,
Aux vents qui ont, de Dieu, l'allure !
 
Faites silence à bon escient.
La Force qui me rend patient
C'est Lui qui me dit en silence :
"Je Suis", dans ces vents qui balancent.
Il m'apporte Consolation,
Tendres', Amour, Jubilation...
 
Inclinez-vous en votre cœur ;
Abaissez-vous avec bonheur.
Vous adorerez comme moi
L'Esprit de Vie, le Cœur du Roy,
Dans ces vents qui vont doucement,
Ou bien qui se ruent bruyamment.
 
... Ô vents qui êtes en tous lieux !
Que donc mes oreilles saisissent
Vos enseignements merveilleux !
Ceux que vous laissez sans malice
Mais... si vittt', et comme en passant,
Sans jamais y mettre l'accent !
 
           
        Bon. J'espère que vous vous êtes un peu envolés au Ciel. Cela va nous être utile, car nous devons redescendre maintenant dans ce très-bas monde, où il nous faut sans cesse ferrailler sans relâche en des combats âpres et difficiles, implacables et rugueux, dans des prés carrés qu'il ne nous est pas permis de quitter de par Dieu, la Foi étant en cause (c'est-à-dire la Gloire de Dieu et notre salut à tous), en faisant cependant grande attention de ne pas blesser les personnes des errants engagés dans de mauvaises voies, souvent du reste des frères de combat, et plus souvent encore d'excellente et très-bonne volonté, la Charité de la Vérité incluant à égalité la Vérité de la Charité.
           
        Et là...
           
        Le lyrisme ne trouve plus place première,           
        Comme, entre frères, aux si bons jours d'hier [avant Vatican II, pardi...!].
           
        (Rien que de citer des vers actionne en moi le déclic poétique, Dieu m'en pardonne... et mon lecteur aussi ! Mais après tout, l'art poétique n'est-il pas d'enjoliver ce qui n'est pas joli...?)
 
cerveau feminin
 Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
           
        Dans les archives du Courrier de Rome, qui, sur leur site Internet, vont de 2005 à nos jours, j'ai été interpellé et me suis occupé principalement des articles qui traitent du Magistère ordinaire & universel et de son infaillibilité inhérente, parce qu'ils nous disent avec précision comment les lefébvristes le conceptualisent (très-mal). Mais, à visiter en mode hélico le Courrier de Rome, je crois utile de faire une remarque préliminaire. Dans le temps jadis, "le vieux-vieux temps" (Henri Pourrat), il y avait une revue ecclésiastique de grand renom, L'Ami du clergé, dont les rédacteurs moulaient la doctrine en de savants articles sur quelque point donné de théologie, de droit canon ou d'histoire religieuse. C'était fort utile pour les abonnés qui recevaient chaque semaine leur livraison, ceux-ci étant souvent des curés de paroisse campagnarde, qui, vaquant aux sollicitudes pastorales pratiques, n'avaient pas le temps ni surtout les moyens d'approfondir certains points délicats qu'ils avaient besoin de résoudre. Il y avait tout un système de questions-réponses, où les rédacteurs savants et bien catholiques de L'Ami du clergé répondaient aux questions que leur posaient par écrit les prêtres abonnés. La collection complète va des années 1878 à 1969, j'ai quant à moi les années 1895 à 1936 (cf. https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Ami_du_clerg%C3%A9).
           
        Je pense que le Courrier de Rome a eu un peu cette ambition de remplir le même rôle que L'Ami du clergé, mais hélas, on est obligé, en les lisant, de constater qu'il le fait à usage et application interne, exclusivement ad usum des seuls membres de la Fsspx ou sympathisants, car les articles débitent à satiété et même ad nauseam, non pas forcément la doctrine catholique basée sur la Foi, mais trop souvent les opinions erronées, partisanes et prophétiquement obscurantistes, de leurs thèses lefébvristes hétérodoxes, prétendant rendre le compte définitif de "la crise de l'Église" mais en fait n'en rendant nullement compte, laissant au contraire le lecteur dans la bouteille à l'encre ou l'usine à gaz, à la sortie desquelles l'intelligence de la Foi n'est nullement satisfaite mais au contraire fort obscurcie. La vraie Foi pure, intègre (et non intégriste), ouverte au sens apocalyptique et eschatologique, n'y trouve vraiment pas son compte. Encore qu'il serait fort injuste de ne pas rajouter que, abstraction faite de "la crise de l'Église" et de sa théologie, on puisse y trouver des articles très-intéressants.
           
        Les articles que j'ai retenus au fil de ma lecture et qui, quant au Magistère ordinaire & universel doté de l'infaillibilité, appellent vraiment de sérieux et fort graves rectificatifs pour être recadrés comme il faut dans la chasteté doctrinale de la Foi catholique, sont les suivants : À propos de saint Vincent de Lérins, abbé Gleize, février 2008 ; L'effritement de l'Autorité du Concile, abbé Pagliarani, mars 2008 ; L'état de nécessité, abbé Gleize, juillet-août 2008 ; Actualité de Franzelin, abbé Gleize, novembre 2008 ; Pour une juste réévaluation de Vatican II : la Tradition et le Magistère clairement définis, abbé Gleize, mai 2009 ; Du Magistère vivant et de la Tradition - Pour une "réception thomiste" de Vatican II ?, abbé Gleize, juillet-août 2009 ; L'Autorité du Concile Vatican II, abbé Gleize, septembre 2009. Je vais arrêter là bien sûr, car ce petit corpus doctrinal suffit à bien délimiter et comprendre toute la pensée lefébvriste hétérodoxe, les autres articles qu'on trouve dans les années suivantes des archives du Courrier de Rome ne faisant que répéter la mauvaise doctrine y professée, n'en étant qu'une resucée repetita bis, et parfois ter ou quater.
           
        Cependant, je n'aurai garde d'oublier l'article de mai 2011 du Courrier de Rome, titré Fraternité sacerdotale saint-Pie X district d'Italie ― Réponse au Rev. P. Cavalcoli O.P., non-signé, dont je m'étais occupé à fond fin 2011. Cet article prétendait réfuter les justes critiques que ce dominicain italien faisait au positionnement pseudo-théologique des lefébvristes pour expliquer "la crise de l'Église", mais c'étaient leurs soi-disant réfutations à eux, toutes étant fausses et même hérétiques, qui avaient bougrement besoin d'être réfutées, ce que je fis avec soin dans un grand article, sans leur permettre aucune échappatoire, en les suivant ligne après ligne dans le texte de ce n° 344 du Courrier de Rome. C'est principalement de cet article que je fis la page de réfutation du lefébvrisme mis à demeure sur mon site, qui y figure donc depuis plus de douze ans (cf. https://www.eglise-la-crise.fr/index.php/fr/13-la-passion-de-l-eglise/8-refutation-de-la-these-lefebvriste). Pour autant de ce travail de fond qui n'est nullement dépassé, je vais d'ailleurs en reprendre quelques parties pour les présentes, il ne me semble pas du tout inutile de redire à nouveau, sous l'angle nouveau des susdits articles du Courrier de Rome, toute la très-griève hétérodoxie de la position théologique lefébvriste dans "la crise de l'Église".
           
        C'est ce à quoi je vais m'employer maintenant, dans ce nouvel article.
           
        Je vais d'abord mettre en clair et synthétiquement, en des mots lapidaires, la thèse que les lefébvristes croient pouvoir professer pour expliquer "la crise de l'Église" et la vivre catholiquement. Puis, ensuite, je vais montrer l'hétérodoxie viscérale des principales propositions qui en sont les clefs majeures, ce qui va montrer son inanité complète et malheureusement son hérésie radicale, qui sera l'ecclésiovacantisme, c'est-à-dire inexister radicalement l'Église du présent, thèse bien autrement grave que le simple sédévacantisme qui l'est moult déjà, se contentant pour sa part, quant à lui, d'inexister le pape actuel...
           
        Thèse lefébvriste. ― Le Magistère ordinaire & universel de l'Église n'est pas acté à Vatican II, car il ne peut être mis en œuvre que dans la dispersion épiscopale universelle ; dès lors que les évêques sont rassemblés, ils ne sont plus les sujets dudit Magistère ordinaire & universel ; pour cette seule raison, la Liberté religieuse par exemple ne saurait donc être un acte dudit Magistère ordinaire & universel infaillible. En outre, l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel n'est jamais doté de l'infaillibilité, seul l'ensemble des actes de ce Magistère posés au fil du temps sur un même point de doctrine, est infaillible. Comme par ailleurs, le mode magistériel extraordinaire dogmatique n'a pas été employé, par volonté expressément formulée par les papes de Vatican II, les actes de ce Concile ne pourraient donc ressortir, théoriquement, que du Magistère authentique de l'Église, de soi non-infaillible. Enfin, comme les doctrines exprimées à Vatican II sont au moins favens hæresim si pas hérétiques, en tous cas en non-adéquation certaine avec la Foi et la Tradition doctrinale, elles ne peuvent donc jamais avoir été l'expression d'un vrai Magistère ecclésial, car c'est le criterium doctrinal, et lui seul, qui décide si le Magistère est acté ou bien non. Vatican II n'est en fait, théologiquement, qu'un Magistère authentique de soi non-infaillible ; du reste, ce n'est même pas le cas, car s'il l'était, il obligerait encore le fidèle d'assentir aux doctrines hérétiques qu'on y trouve. En conclusion, autant par la forme que par le fond, nous nous trouvons donc à Vatican II avec un non-Magistère. Une génération ecclésiale universelle donnée de "membres enseignants" avec le pape légitime actuel a eu beau se réunir comme, à beaucoup près, elle ne s'était jamais réunie aussi nombreuse auparavant depuis les assises de l'Église, elle n'a cependant pas manifesté le Magistère de l'Église catholique. Ainsi donc, Vatican II n'exprimant qu'un non-Magistère, la Constitution divine de l'Église n'en est atteinte d'aucune manière, et la solution viendra lorsqu'un bon pape envoyé par la Miséricorde de Dieu permettra de reprendre l'intégralité de la Foi. Demain, la Chrétienté, comme disait feu Dom Gérard du Barroux...
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
            
        1/ "Le Magistère ordinaire & universel de l'Église n'est pas acté à Vatican II, car il ne peut être mis en œuvre que dans la dispersion épiscopale universelle".
           
        Franchement, je suis et reste ébahi, stupéfait, et cela dure depuis vingt ans pour le moins, de devoir constater que des prêtres présumés intelligents, savants, sérieux, aient pu s'appuyer sur un raisonnement aussi insensé, aussi fou, que celui-là, sans en prendre le moins du monde conscience. Sur le sujet, la question primordiale de fond, questio magna, est en effet celle-ci : Depuis quand un lieu théologique, comme l'est suprêmement le Magistère ordinaire & universel, peut-il avoir pour fondement et base juste un... accident, comme l'est la dispersion épiscopale universelle ? Un lieu théologique, comme l'est le Magistère ordinaire & universel, ne peut bien évidemment avoir un accident comme fondement essentiel, mais seulement une substance. Or, les lefébvristes qui nous disent que la dispersion épiscopale universelle est le fondement dudit Magistère ordinaire & universel, à son seul défaut en effet, professent-ils, il n'y aurait pas de Magistère ordinaire & universel, le basent donc sur un accident, ce qui montre toute la fausseté de leur raisonnement, dès les prolégomènes. Ce n'est même plus la théologie mais la métaphysique élémentaire qui invalide complètement leur raisonnement.
           
        Pour le dire dès ici sans tarder, ce qui fonde premièrement et in capite le Magistère ordinaire & universel, ce sont des formes vivantes, les évêques d'une génération ecclésiale donnée una cum le pape actuel, dans n'importe quel mode d'exercice, soit rassemblé soit dispersé. Et ces formes vivantes dotés de l'Autorité divine, qui sont toute la substance du Magistère ordinaire & universel, se mettent en branle et posent l'acte spécifique du Magistère ordinaire & universel, à savoir, l'enseignement doctrinal simple et inchoatif, dit dangereusement non-définitif en nos temps modernes. La substance du Magistère ordinaire & universel, c'est donc 1) des personnes vivantes, 2) qui posent l'acte spécifique au Magistère ordinaire & universel. Lequel est un enseignement fragmenté débité par les "membres enseignants" aux "membres enseignés" selon les besoins et désirs spirituels d'une génération ecclésiale donnée, sous l'inspiration du Saint-Esprit, lequel enseignement particulier et fragmenté, épousant au fil des siècles d'autres enseignements inchoatifs de même nature sur le même point de doctrine, va finir par aboutir à ce que le bénédictin Dom Paul Nau appelle une sententia finalis terminativa, c'est-à-dire une définition dogmatique aux termes théologiquement achevés. J'ai ici bien résumé in globo le fondement substantiel du Magistère ordinaire & universel, et il serait vraiment bon que les lefébvristes en apprennent bien la leçon : un enseignement ordinaire simple et inchoatif délivré à l'universalité des fidèles par les évêques una cum le pape actuel d'une génération ecclésiale donnée, quelque soit le mode, rassemblé ou dispersé, dans lequel ils se situent pour le faire. Rien à voir, cette fois-ci, avec un accident, par définition non-substantiel. Nous sommes là les pieds dans le roc d'une substance.
           
        C'est seulement par antonomase que Pie IX, Vacant, etc., dénomment le Magistère ordinaire & universel, "les évêques dispersés", autrement dit par sa manière commune, habituelle et ordinaire d'exister, laquelle n'est, il est capital de le bien comprendre, qu'un de ses caractères accidentels dominants mais nullement substantiel. L'antonomase est une figure de style qui décrit un être par un caractère dominant de ce qu'il est, une image qui frappe, mais qui n'est pas sa substance. Je vais en prendre trois exemples pratiques, qui nous aideront à le bien comprendre. Appeler Harpagon quelqu'un d'avare, selon le nom consacré à l'avare par Molière dans sa pièce de théâtre, c'est le dénommer selon son (vilain) trait de caractère dominant ; en résulterait-il, je vous prie, que si ce quelqu'un se convertissait et cesserait d'être avare et donc Harpagon, il cesserait par le fait même d'exister ? Bien sûr que non, n'est-ce pas. Car cette appellation antonomastique basée sur son caractère dominant ne touche pas à la substance métaphysique de ce qu'il est. Il est un être humain et il continuera bien évidemment à être un être humain s'il cesse d'être avare. Second exemple. Je m'appelle Vincent Morlier, en tant qu'organiste j'ai tenu deux petites tribunes d'orgue chez les tradis. Supposons un fidèle qui ne me connaît pas personnellement, il ne sait de moi que ce qu'il me voit faire tous les dimanche à la messe dans ma fonction d'organiste, et tout naturellement, lorsqu'il parle de moi, il m'appelle "l'organiste" ; en résulterait-il, je vous prie, que si je cessais ma fonction d'organiste, je cesserai d'exister ? Évidemment non, là encore. Ce serait faire consister la substance métaphysique de ma très-auguste et respectable personne par un pur accident, ce qui est une folie totale.
           
        Mais prenons maintenant par le bras Grosjean, l'innocent du village, donnons-lui un sucre d'orge pour nous concilier ses bonnes grâces et menons-le devant un troupeau de vaches bien grasses et bien nourries, et là, on lui demande : Que vois-tu, Grosjean ? ― Des vaches, répond-il ; puis, on le mène quelques haies et talus plus loin devant un autre troupeau de vaches, mais, cette fois-ci, celles-ci sont toutes maigres, leurs os saillant sous la peau, et on lui pose la même question : Que vois-tu, Grosjean ? ― Là, il répond : Ah !, ce ne sont plus des vaches car elles sont maigres. Grosjean, mais lui c'est normal parce qu'il est idiot, a conceptualisé l'être substantiel de la vache dans un accident, consistant en ce qu'elle soit grasse et bien nourrie : donc, pour lui, si la vache est maigre, ce n'est plus une vache. Le problème, c'est qu'avec le Magistère ordinaire & universel, le lefébvriste nous régale sans sucre d'orge de la même bougre bêtise. Il s'est imaginé que ce qui caractérise substantiellement le Magistère ordinaire & universel, c'est uniquement les évêques dispersés, qui n'est pourtant qu'un mode purement accidentel. Si les évêques sont rassemblés, quoiqu'étant toujours les mêmes et substantiels sujets du Magistère ordinaire & universel habilités à en poser l'acte spécifique, qui est l'enseignement doctrinal quotidien simple et inchoatif, alors, là, les lefébvristes osent soutenir qu'ils... n'existent plus en tant qu'acteurs du Magistère ordinaire & universel !!
           
        Or, Pie IX, Vacant et les autres théologiens qui appellent le Magistère ordinaire & universel par son mode d'exister le plus commun, habituel et ordinaire, à savoir la dispersion épiscopale universelle, n'ont pas du tout prétendu, comme veulent le croire les lefébvristes, donner par cette appellation antonomastique, une substance à cette manière dispersée d'exister du Magistère ordinaire & universel, ils ont simplement appelé le Magistère ordinaire & universel par son caractère dominant et habituel d'existence, par une antonomase qui est toujours un accident. Ce qui signifie que non seulement cette appellation antonomastique ne révèle pas ce qu'est la substance du Magistère ordinaire & universel, mais qu'en plus, l'être substantiel du Magistère ordinaire & universel n'en dépendant nullement, le Magistère ordinaire & universel peut très bien exister et se manifester d'autres manières. Car je le rappelle encore, les lefébvristes montrant hélas qu'ils ont besoin d'en bien apprendre et retenir la leçon, la substance du Magistère ordinaire & universel, c'est des personnes vivantes posant l'acte spécifique du Magistère ordinaire & universel, à savoir l'enseignement doctrinal simple. Elles peuvent donc très-bien, ces personnes vivantes du Magistère ordinaire & universel qui sont les évêques et le pape actuel d'une génération ecclésiale donnée, poser l'acte spécifique du Magistère ordinaire & universel lorsque, au contraire d'être dispersées, elles sont réunies et rassemblées en un même lieu, dans le cadre d'un concile œcuménique.
           
        Quand bien même, on n'a aucune peine à le concéder, ce dernier cas de figure n'est pas ordinairement envisageable, c'est vraiment une anormalité (mais pas une impossibilité, sur le plan théologique). Les évêques rassemblés en concile œcuménique en effet, peuvent théologiquement, aussi bien que ceux dispersés dans l'orbe catholique, mettre en œuvre le Magistère ordinaire & universel, quoique ce soit un grand désordre, un désordre effectivement enregistré à Vatican II (... dans lequel il n'y a que du désordre), car les conciles œcuméniques, en principe, ne doivent acter que des actes du Magistère dogmatique extraordinaire. Mais il n'est théologiquement pas impossible du tout que le Magistère ordinaire & universel puisse être acté par les évêques rassemblés, quand bien même c'est un désordre.
           
        C'est pourquoi, donc, on voit par la suite des temps après Vatican 1er, les théologiens sérieux gommer de plus en plus cette négative et accidentelle façon d'appeler le Magistère ordinaire & universel de façon antonomastique, "les évêques dispersés", car cette appellation induit beaucoup en erreur si on a l'inintelligence grande de la prendre pour une substance comme le font les lefébvristes. À leur décharge, on peut comprendre qu'ils ont sans doute été poussés à cela par réaction passionnelle et dialectique contre des ennemis de la Foi qui voulaient les obliger à l'obéissance aux décrets hérétiques de Vatican II. Mais maintenant, il faut qu'ils se sortent de leur erreur dont on va voir qu'elle les mène dans une hérésie aussi grave, quoique de toute autre nature, que celle, moderniste, des ennemis de la Foi qui les persécutent. Il faut donc que les lefébvristes en reviennent tout naturellement, sous l'inspiration du Saint-Esprit, à bien repositionner le Magistère ordinaire & universel dans son fondement substantiel, à savoir : 1) les sujets et 2) l'objet, tous deux composant la substance du Magistère ordinaire & universel, c'est-à-dire 1) les évêques una cum le pape actuel d'abord, et 2) l'acte idoine que ces formes vivantes posent, "proposent à croire" comme dit judicieusement Pie IX dans Dei Filius (car la formule révèle que cet acte ne peut être posé que dans le Magistère du présent, la proposition de la croyance aux fidèles en effet ne peut être acté que par des formes vivantes), à savoir le simple enseignement doctrinal inchoatif, enseignement qui se débite de générations ecclésiales en générations ecclésiales. Et qu'ils ne le basent plus sur un mode d'existence et d'agir purement accidentel.
           
        Malheureusement, les lefébvristes ne l'ont pas compris et en sont restés à conceptualiser premièrement le Magistère ordinaire & universel par un simple accident d'icelui, reprochant même, dans leur aveuglement complet et d'une inintelligence rare, à ceux qui, dans une intelligente démarche théologique quant à eux, sont sortis de l'accident pour appréhender le fondement substantiel du Magistère ordinaire & universel, de ne pas en rester à... l'accident, comme on voit l'abbé Gleize le faire sans vergogne avec l'abbé Lucien dans L'autorité du concile Vatican II, le porte-plume théologique de la Fsspx endossant sans trop de complexe l'habit du donneur de leçons, sa leçon consistant à vouloir faire d'un accident une substance, alors que c'est lui, porte-plume lefébvriste privilégiant l'accident sur la substance, qui doit en recevoir une, de magistrale leçon, précisément sur le sujet sur lequel il prétend donner leçon.
 
        S'il avait eu l'humilité d'écouter l'abbé Lucien, il l'aurait apprise de lui, car ici, sur ce sujet précis, il a les pieds bien dans la doctrine catholique, tout particulièrement quant à conceptualiser théologiquement le qualificatif "universel" de manière substantielle et non point accidentelle... contrairement à l'abbé Gleize qui raconte n'importe quoi dans le n'importe quoi sur "l'universel", en prenant un accident pour une substance (certes, il faut hélas préciser que si le bon positionnement de l'abbé Lucien quant à la définition qu'il professe du Magistère ordinaire & universel est resté pérenne et identique à lui-même depuis le début de "la crise de l'Église", il en a malheureusement changé du tout au tout l'application, dans un virage radical sur lui-même à 180°, quand il a rejoint les "ralliés" : invoquant au tout début l'infaillibilité du Magistère ordinaire & universel appliqué au décret vaticandeux de la Liberté religieuse pour cautionner la thèse sédévacantiste -puisque ledit décret, hérétique, est doté de par ce Magistère de l'infaillibilité, alors cela signifie que le pape qui l'a promulgué n'a plus la forme d'un vrai pape, thèse guérardienne semi-sédévacantiste-, il l'invoque maintenant pour professer, ... à combien tort !, que la doctrine de la Liberté religieuse ne saurait point être une hérésie, tombant là de Charybde en Scylla, rejetant la peste pour embrasser le choléra ; il n'a pas pris en compte l'existence d'une troisième solution, la seule vraie, pour expliquer dans la Foi comment il se fait bien que Dignitatis Humanæ Personæ puisse être effectivement un décret doté de l'infaillibilité, ce qui est vrai, alors qu'il a comme objet une doctrine hérétique, ce qui est tout aussi vrai... solution catholique que je vais exposer en finale).
               
        Par ailleurs, dans cet article, l'abbé Gleize "oublie" un mode très-important de l'infaillibilité ecclésiale lorsqu'il les liste, mode qui aurait pu l'éclairer sur le vrai sens du mot "universel". Il en voit seulement trois, à savoir 1/ le pape faisant seul une déclaration dogmatique définitionnelle, 2/ le pape faisant cette même déclaration dogmatique non plus seul mais avec tous les évêques en union morale avec lui (et pas obligatoirement rassemblés dans une aula conciliaire, comme veut le croire l'abbé Gleize ― sur le plan théologique en effet, on pourrait tout-à-fait bien supposer, quoique sur le plan humain ce serait évidemment très-difficile à réaliser, le pape faisant une proclamation dogmatique extraordinaire avec tous les évêques dans leur mode de dispersion universelle, chaque évêque dans son diocèse faisant la proclamation dogmatique en même temps que le pape à Rome la ferait -il faudrait évidemment bien régler les pendules et les fuseaux horaires !-... Bien qu'il ne soit pas là question d'infaillibilité, la chose n'a-t-elle pas été demandée par la Vierge de Fatima pour faire la Consécration de la Russie ?), 3/ le pape et les évêques cum Petro et sub Petro faisant ensemble un simple enseignement doctrinal inhérent au Magistère ordinaire & universel... rassemblés ou dispersés, contrairement à ce que veut croire notre porte-plume lefébvriste. Mais donc, disais-je, notre porte-plume "oublie" le 4/, à savoir le pape actant tout seul le Magistère ordinaire & UNIVERSEL, dans son enseignement ordinaire quotidien, chaque jour que Dieu fait, singulis diebus, du haut de sa cathèdre romaine, mode qu'a magnifiquement développé en son temps Dom Paul Nau en deux articles très-savants et très-riches parus dans la Revue thomiste. Or, je viens de mettre le mot en majuscules, si le pape, lorsqu'il met en œuvre ce quatrième mode de l'infaillibilité est "virtuellement universel", selon le mot d'un certain P. Congar rapporté par Dom Paul Nau, cela signifie évidemment que la note d'universalité n'a rien à voir avec la dispersion épiscopale universelle. Est-ce pour cela que le porte-plume théologique de la Fsspx a fait l'impasse sur ce quatrième mode...? A-t-il "oublié" que Vacant, qu'il aime énormément au point tout-de-même excessif de faire de son article sa bible sur le sujet de l'infaillibilité ecclésiale, évoque en finale d'icelui l'emploi de l'infaillibilité du mode ordinaire & universel par le pape seul, d'une manière vraiment très-inspirée, car il écrit en 1887 et à cette époque presque immédiatement post-Vatican 1er, la notion n'était pas encore dégagée en Église ?
           
        Or, il me semble que c'est vraiment le moment de rappeler que les évêques rassemblés autour du pape participent ipso-facto à l'infaillibilité ordinaire du pape. C'est ce qu'un certain... Marcel Lefebvre apprenait lorsque, jeune encore et simple potache, il étudiait sa théologie à Rome : "Marcel Lefebvre s'inscrivit le 2 novembre 1925 au «cours majeur» de théologie de la Grégorienne. (…) Le cours insistait sur l'existence d'un magistère visible et vivant (à l'encontre du sola scriptura de Luther), sur l'infaillibilité du pape parlant ex cathedra et sur celle des conciles œcuméniques «qui participent à l'infaillibilité ordinaire du Souverain Pontife»" (Marcel Lefebvre, une vie, Bernard Tissier de Mallerais, p. 53). Or, qui sont les membres actifs des conciles œcuméniques ? Les évêques rassemblés. Et donc, ils participent à l'infaillibilité ordinaire du pape actuel. C'est très-bien dire, dans un raccourci lapidaire et complet, que les évêques cum Petro et sub Petro peuvent tout-à-fait, rien ne s'y oppose, poser des actes du Magistère ordinaire & universel dans le cadre d'un concile œcuménique, quoique ce soit un désordre.
           
        Quel dommage que Mgr Lefebvre puis ses fils spirituels n'aient pas retenu la bonne leçon qu'il avait apprise en 1925...!!
               
        D'autre part, Dom Paul Nau souligne très-bien l'importance essentielle et capitale du criterium d'universalité inhérent au mode magistériel ordinaire & universel employé par le pape seul, et il nous permet au passage de voir en quoi consiste exactement cette note en théologie en relation avec le charisme d'infaillibilité, et c'est peu dire que ça n'a rien à voir avec la dispersion épiscopale universelle. Il commence par nous dire qu'un enseignement doctrinal à l'Église universelle ne saurait être erroné, puis, continue : "Si une erreur en effet se glissait dans une proposition faite à un groupe restreint, elle n'égarerait pas nécessairement la Foi du fidèle. L'objet formel de celle-ci n'est pas la proposition particulière, mais «la Vérité première manifestée par l'enseignement de l'Église». C'est à la vérité proposée à l'Église universelle que le fidèle adhère. Mais contre une défaillance de cette proposition universelle il ne resterait plus aucun recours, les croyants seraient nécessairement égarés, et par l'autorité même qui leur parle au nom du Christ. L'erreur ne peut donc, sans faire mentir les Promesses divines, se glisser dans un enseignement donné à la totalité de l'Église [= universel ; nous avons là, la définition du terme "universel" appliqué au charisme de l'infaillibilité ecclésiale, sur le plan théologique, elle est celle à laquelle adhérait l'abbé Lucien et à laquelle doit adhérer tout bon catholique, y compris bien sûr le lefébvriste ; mais Dom Paul Nau poursuit son explication, continuons à le lire avec soin :]. Mais cette totalité, il est deux manières de la rejoindre : ou bien parce que tous les maîtres, enseignant chacun en vertu de sa mission limitée sa part du troupeau, se trouvent dans un enseignement concordant (c'est le cas des évêques pasteurs de leurs diocèses) ; ou bien parce qu'il procède d'un maître dont la mission embrasse toute l'Église (c'est le cas du souverain pontife ou des évêques agissant collégialement avec lui [… comme dans la Liberté religieuse de Vatican II, par exemple…])" (Nau, 1962, pp. 372-373).
               
        "D'après ces Promesses [du Christ], la garantie [d'infaillibilité] n'est pas promise inconditionnellement à l'autorité suprême, mais seulement à celle-ci dans sa relation à l'Église universelle, seule bénéficiaire des Promesses divines [d'infaillibilité]. (…) Les textes scripturaires qui nous témoignent de cette dernière [l'expression formelle de la volonté du Christ concernant le charisme d'infaillibilité], nous montrent ce privilège, non pas attaché à l'autorité suprême comme telle, mais à la relation de cette dernière à l'Église universelle, dont il a pour but de conserver la Foi dans son unité et son intégrité" (Nau, 1962, pp. 362 & 389-390).
           
        Il est évident qu'ici Dom Paul Nau donne la véritable définition du mot "universel" caractérisant le Magistère infaillible, et que celle-ci a trait au sens générique et nullement à la dispersion épiscopale universelle.
               
        Enfin, autre aspect très-important de la question, le qualificatif "universel" ne s'applique pas seulement aux "membres enseignants" mais aussi aux "membres enseignés" : un acte doctrinal du Magistère ordinaire & universel est infaillible non pas seulement parce que l'universalité au moins morale des membres enseignants una cum le pape le professe, mais aussi parce qu'il s'adresse à l'universalité des fidèles, et que celle-ci pose subséquemment l'acte de croyance. Un auteur, cité par Dom Paul Nau, a fort bien résumé cette question qui a une importance certaine, je le cite pour conclure : "Le premier schéma de la constitution De Ecclesia et celui de la Constitutio dogmatica secunda se sont placés, à juste titre, au point de vue de l'Église, et de l'Église Universelle, sans autre distinction. C'est en effet l'Église tout entière [= universelle] qui est l'objet de la promesse indéfectible et le bénéficiaire de l'assistance du Dieu fidèle. L'infaillibilité de l'Église n'est pas autre chose que le fruit de cette fidélité divine et de cette assistance efficace, que ne peut compromettre la faillibilité propre de la créature. Chacun des membres de l'Église croyante ou enseignante peut faillir, quand on le considère comme «personne privée». Mais lorsque l'Église, croyante ou enseignante, s'engage universellement dans la profession de sa Foi ou dans l'enseignement de cette même Foi, nous ne sommes plus en présence de personnes privées, mais de l'Église même du Christ, que le Seigneur tient fermement sur le chemin de la Vérité. C'est pourquoi la profession de Foi de l'Église Universelle [par les "membres enseignés"], aussi bien que l'enseignement de l'Église Universelle [par les "membres enseignants"], sont garantis tous deux de l'erreur. Le critère de l'infaillibilité est donc, dans chaque cas, l'universalité [= au sens de totalité de l'Église, qui n'a rien à voir avec la dispersion épiscopale universelle], comme le soulignait opportunément la Constitutio secunda, et cette universalité se réalise lors même qu'intervient le pape seul, car il enseigne alors comme le «pasteur et le docteur de tous les chrétiens», ainsi que l'a défini la Constitutio dogmatica prima" (A. Chavasse, L'ecclésiologie au concile du Vatican, dans RevSR, 1960, nn. 124-126, pp. 233-245 -p. 245-, cité par Nau, 1962, note 5 des pp. 362-363).
           
        Conceptualiser le Magistère ordinaire & universel par une antonomase accidentelle est donc une profonde erreur, métaphysique même avant d'être théologique. Si on la suit sans se rectifier, comme le font les lefébvristes, elle crée une autre erreur sur le concept "universel", comme on vient de le voir : le qualificatif "universel" regarde non pas seulement, quant au Magistère ordinaire & universel, tous les évêques uniquement dans leur dispersion, mais tous les évêques, dans quelque mode ils se trouvent être, soit dispersés soit rassemblés. Il faudrait donc arrêter d'employer cette formule d'"évêques dispersés", qui a trop fait parler d'elle, qui se situe théologiquement dans le plus qu'imparfait pour conceptualiser le Magistère ordinaire & universel. Vacant lui-même dit fort bien dans son article que donc les lefébvristes aiment énormément, au point tout-de-même excessif d'en faire le fondement essentiel voire unique de leur thèse ("étude classique qui fait autorité sur la question", nous dit l'abbé Gleize ― L'autorité du concile Vatican II, p. 4), que l'avancée des temps sous l'inspiration du Saint-Esprit permet de supprimer les formulations imparfaites du départ dans l'histoire d'un dogme, qui pourraient contenir ou orienter vers un sens favens hæresim. Puis donc de leur très-grande affection pour l'article de Vacant, je conseille aux lefébvristes de bien écouter sa leçon, justement, tirée de son article, que voici :
           
        "Nous avons vu les divergences qui tendent à se produire, soit entre les formules nombreuses dans lesquelles on essaye de faire entrer les doctrines qui ne sont pas encore entièrement élucidées ni, à plus forte raison, définies, soit entre les multiples expositions des doctrines les mieux éclaircies ; mais ce que nous n’avons pas remarqué c’est qu’il y a, en même temps, entre elles comme une lutte pour la vie, par l’effet de laquelle les formules défectueuses et les expositions imparfaites disparaissent, pour laisser peu à peu le terrain aux formules exactes et aux expositions heureuses.
           
        "Il est facile d’étudier, dans les écrits des premiers siècles, la manière dont certaines formules sur la Trinité qui favorisaient l’erreur et pouvaient lui ouvrir l’entrée de l’Église ont insensiblement fait place à des expressions plus irréprochables. C’était la réflexion, c’étaient les conclusions hérétiques que Sabellius, Paul de Samosate ou leurs partisans tiraient d’une formule, qui en montraient l’ambiguïté, l’inexactitude et le danger. Cette formule était abandonnée, puis condamnée. D’autres formules déjà anciennes ou des formules relativement nouvelles qui paraissaient plus heureuses (comme le terme consubstantiel) remplaçaient partout les expressions défectueuses. Les jugements de l’autorité ecclésiastique portaient, en même temps, des coups redoublés à ces expressions et aux erreurs qu’elles favorisaient, jusqu’au moment où une définition fixait pour jamais le langage qui avait été l’objet de tant de controverses et de travaux. Quelquefois c’était le langage qui se précisait, d’autres fois c’était la doctrine elle-même qui se développait sous l’action du magistère ordinaire.
           
        "Il n’est pas difficile de voir que cette lutte pour la vie se produit non seulement entre les formules courtes et précises qui composent nos symboles de foi et nos catéchismes, mais encore entre les ouvrages de longue haleine. Les traités où l’Église ne trouve pas sa doctrine exposée avec exactitude, clarté et netteté disparaissent ou ne sont pas employés ; au contraire, les écrits remarquables restent, se répandent dans toutes les mains, et les pasteurs y reconnaissent l’expression fidèle des enseignements du christianisme" (p. 11).
           
        On ne saurait mieux dire, Vacant est vraiment, je suis le premier à le dire, magistral. Et voilà qui concerne en plein notre sujet : il est grand'temps d'abandonner cette définition antonomastique très-imparfaite du Magistère ordinaire & universel, "évêques dispersés", pour en venir à ce qui définit substantiellement le Magistère ordinaire & universel, à savoir, je le rappelle encore un coup, les lefébvristes ont vraiment beaucoup besoin de l'entendre, d'être les évêques una cum le pape actuel d'une génération ecclésiale donnée, délivrant universellement, en amont comme en aval, un enseignement doctrinal simple et inchoatif ayant vocation de mener à l'explicitation dogmatique définitive.
           
        Vacant lui-même, d'ailleurs, dans son article très-inspirée, quoique, chronologiquement tout proche de Vatican 1er et suivant au plus près Pie IX qui en reste à la formulation définitionnelle imparfaite des "évêques dispersés" pour conceptualiser le Magistère ordinaire & universel, fait cependant déjà très-souvent, il faut que les lefébvristes le remarquent avec grande attention, spontanément et intuitivement abstraction du caractère de dispersion épiscopale universelle quand il donne des définitions du Magistère ordinaire & universel, montrant par-là qu'il est bien loin de considérer cette accidentelle dispersion épiscopale comme étant l'élément fondamental et substantiel qui définit le Magistère ordinaire & universel, ainsi que veulent le lui faire dire erronément les lefébvristes.
           
        Il commence en effet tout son article par une sorte de définition synthétique de ce qu'est le Magistère ordinaire & universel, la voici : "Ce magistère ordinaire n’est autre chose, en effet, que celui dont l’Église tout entière nous offre continuellement le spectacle, quand nous la voyons parler sans cesse par la bouche du pape et de tous les évêques catholiques, se mettre par tout l’univers à la disposition et à la portée de tous les hommes, des infidèles et des chrétiens, des ignorants et des doctes, leur apprendre à régler d’après la révélation divine non seulement leur foi, mais encore leurs sentiments, leur culte et toute leur conduite. Ce mode d’enseignement, qui s’exerce aujourd’hui partout et sur toutes choses, il est facile de montrer qu’il s’est toujours exercé de la même manière et qu’on a toujours reconnu son infaillible autorité" (p. 3).
           
        Pas trace de "dispersion épiscopale", ici, est-il besoin de le dire et de le faire remarquer aux lefébvristes, dans cette tête d'article qui a visiblement vocation d'un résumé synthétique de la doctrine que l'auteur va magistralement exposer dans tout son article. Il y a même un mot dans ce que Vacant emploie, qui renverse complètement et à la racine la conceptualisation du Magistère ordinaire & universel par la seule dispersion épiscopale universelle, c'est le mot partout : "Ce mode d'enseignement [ordinaire & universel], qui s'exerce aujourd'hui PARTOUT et sur toutes choses". Voilà qui est dire qu'il peut aussi s'exercer dans... les conciles généraux, autrement dit dans le rassemblement épiscopal una cum le pape. Partout en effet n'exclut aucun lieu, en ce compris bien évidemment même l'aula conciliaire où se réunissent les évêques rassemblés (le jésuite Perrone aura un propos de sens identique au "partout" de Vacant, lorsque, dans sa Théologie dogmatique, il traite du Magistère ordinaire & universel infaillible : "Il s'opère EN TOUT LIEU, en tout temps").
           
        Mais il s'en faut que ce passage introductif de son article soit le seul où Vacant n'évoque nullement le caractère de dispersion épiscopale en définissant le Magistère ordinaire & universel, on en répertorie beaucoup d'autres dans son article, en voici quelques-uns, qu'apparemment les lefébvristes n'ont pas su lire avec intelligence dans leur sens obvie, alors... qu'ils le fassent maintenant :
           
        ― "En outre, puisque l’infaillibilité dans l’enseignement n’appartient qu’au corps épiscopal et au Pape, c’est au corps épiscopal et au Pape que le magistère ordinaire et universel de l’Église doit sa souveraine et infaillible autorité" (p. 5). Point question ici, de dispersion épiscopale.
           
        ― "C’est ce qui explique le principe, que nous établissions tout-à-l’heure, que c’est au collège épiscopal qu’appartient, en propre et de droit divin, l’exercice du magistère ordinaire de l’Église" (p. 6). Ibidem.
           
        ― "Les signes auxquels on reconnaît une doctrine enseignée infailliblement par le magistère ordinaire et universel doivent donc montrer que cette doctrine est proposée à la croyance de l’Église par la souveraine autorité du Pontife Romain ou du corps épiscopal" (p. 16). Itou.
           
        ― "En 1863, Pie IX rappela à certains théologiens allemands que l’on doit donner sa foi et son adhésion, non seulement aux vérités imposées comme de foi par des jugements solennels de l’Église, mais encore à tous les points qu’elle déclare certains et obligatoires par son magistère ordinaire et universel" (p. 20). Ici, c'est frappant, alors que c'est dans la lettre Tuas Libenter à laquelle fait visiblement allusion Vacant dans ce passage que Pie IX décrit le Magistère ordinaire & universel sous son mode accidentel d'exercice habituel des "évêques dispersés" (= "Quand même il ne s’agirait que de la soumission due à la foi divine, on ne pourrait pas la restreindre aux seuls points définis par des décrets exprès des Conciles œcuméniques, ou des Pontifes romains et de ce Siège Apostolique ; il faudrait encore l’étendre à tout ce qui est transmis, comme divinement révélé, par le corps enseignant ordinaire de toute l’Église dispersée dans l’univers", dit Pie IX), Vacant n'y fait aucune allusion...
           
        ― "V. AUTORITÉ DOCTRINALE DE LA MAJORITÉ DES ÉVÊQUES DISPERSÉS. ― Il est temps que notre attention se porte sur l’élément principal du magistère ordinaire, sur celui qui en fait une règle infaillible et obligatoire de notre foi et de nos sentiments, je veux dire sur L’AUTORITÉ qui y préside. Cette autorité est celle du Pape et du collège épiscopal uni au Pape. C’est à ce chef, c’est à ce corps que toutes les promesses d’infaillibilité sont faites et que tous les pouvoirs sur l’Église sont donnés. Tout est dans la dépendance et sous la surveillance de cette autorité souveraine ; tous les éléments dont nous avons parlé n’entrent dans le magistère ordinaire et universel que par son action ; ils en sont les organes ou plutôt les instruments et en reçoivent toute leur vertu, comme la branche reçoit sa vie et sa nourriture du tronc de l’arbre, aussi longtemps qu’elle y reste attachée" (p. 25).
           
        Ce passage est très-révélateur. Vacant, dans son titre, en reste à parler des évêques dispersés, manière habituelle et commune, et surtout tactique et stratégique dans le contexte historique de Vatican 1er je vais mieux le dire tout-à-l'heure, de parler des sujets du Magistère ordinaire & universel. Or bien, dans l'explication qu'il donne immédiatement sous ce titre, son lecteur peut bien se rendre compte que Vacant ne parle plus du tout de "dispersion épiscopale" : ce qui signifie très-clairement que pour Vacant, les sujets formels du Magistère ordinaire & universel sont les évêques dans n'importe quel mode ils soient, soit dispersés soit rassemblés. S'il évoque sans y attacher d'importance la qualité de dispersé dans son titre, c'est, il faut le répéter, uniquement parce que c'est le mode habituel, commun et ordinaire, c'est le cas de le dire, où se trouvent quasi tout le temps les évêques pour poser un acte du Magistère ordinaire & universel. Et normalement, il n'y a pas d'autre manière pour eux de le poser. Mais cela reste toujours un accident, ça n'est jamais une substance, l'élément substantiel confectionnant essentiellement le Magistère ordinaire & universel. Et c'est tout ce qu'est autorisé à en déduire le catholique : que Vacant parle du mode de la dispersion épiscopale universelle parce que c'est juste ce mode dans lequel se situe quasi tout le temps les évêques sujets du Magistère ordinaire & universel, mode de mise en œuvre qui de toutes façons, métaphysiquement, ne peut être et n'est donc qu'un accident. Le catholique n'est pas du tout autorisé à en déduire, comme le font à tort les lefébvristes, que le mode de dispersion est un élément substantiel constitutif sine qua non des sujets épiscopaux du Magistère ordinaire & universel, à défaut duquel le Magistère ordinaire & universel ne pourrait être mis en œuvre.
           
        ― "Nous avons aussi considéré ce magistère dans les membres de l’Église enseignante. Nous avons dit que le corps épiscopal qui a reçu l’infaillibilité doctrinale, est formé du pape et des évêques qui possèdent une juridiction dans l’Église catholique ; que la majorité de ces évêques sera toujours dans la vérité et qu’elle suivra continuellement le Souverain Pontife dans l’enseignement authentique de la doctrine de Jésus-Christ, sans jamais prendre le pas sur lui" (p. conclusive 36). Aucune trace, là encore dans ce passage, de "dispersion épiscopale universelle"...
           
        ― "CONCLUSIONS. Nous avons vu que le magistère ordinaire est un mode d’enseignement infaillible, distinct des jugements solennels et employé par l’Église enseignante, dans sa vie de chaque jour, avec la même autorité qu’elle revendique pour ses jugements solennels. Examinant ensuite ce magistère plus à fond, nous avons reconnu qu’il s’exerce partout et toujours, à l’aide de nombreux ministres auxquels le pouvoir d’enseigner, donné au Pape et au corps épiscopal par Jésus-Christ, est délégué ou laissé dans des mesures diverses" (p. conclusive 36). Itou derechef...
           
        Il est aisé de remarquer que dans la conclusion où Vacant résume synthétiquement toute la doctrine exposée dans son article sur le Magistère ordinaire & universel, il n'a pas un seul mot pour évoquer le caractère de dispersion pour définir les sujets formels du Magistère ordinaire & universel, sauf une fois, de pure forme, dans ses toutes dernières lignes. C'est bien dire que dans son esprit, le caractère "épiscopal dispersé" n'a nullement la note de nécessité sine qua non pour l'exercice du Magistère ordinaire & universel qu'ont voulu lui donner les lefébvristes, dans une inintelligence complète de vouloir qu'un accident puisse conceptualiser un lieu théologique, comme l'est le Magistère ordinaire & universel...
           
        Mgr Zinelli, rapporteur de la Députation de la Foi au concile de Vatican 1er, Députation de la Foi qui, rappelons-nous, était un organe ad hoc agissant sous l'Autorité infaillible du pape et ayant pour très-haute mission d'exprimer dans l'aula conciliaire la Foi de toute l'Église à tous les évêques assemblés, et la manifestant infailliblement car en fait ils étaient la voix du pape Pie IX, Mgr Zinelli disais-je, avait déjà débouté radicalement le distinguo absurde du lefébvriste qui professe que les sujets du Magistère ordinaire & universel sont seulement les évêques dispersés : "L'accord des évêques dispersés a la même valeur que lorsqu'ils sont réunis : l'assistance a en effet été promise à l'union formelle des évêques, et non pas seulement à leur union matérielle" (Mgr Zinelli, Mansi 51, 676 A). Remarquons bien que pour Mgr Zinelli, ce qui n'est pas du tout sujet à discussion, ce qui est sûr, c'est l'Autorité magistérielle des évêques rassemblés, réunis, et non l'inverse ! Or, soutient-il, c'est parce que les évêques rassemblés sont ipso-facto revêtus de l'Autorité magistérielle, que donc les évêques dispersés le sont eux aussi ! Par ailleurs, il professe très-clairement que l'Assistance divine est l'apanage de l'union formelle des évêques, et cette union épiscopale formelle est bien sûr autant réalisée dans le mode de rassemblement que dans le mode de dispersion. Autrement dit, et comme le vrai théologien doit le professer, Mgr Zinelli n'a que faire de l'insensé accident qui nous occupe pour fonder substantiellement l'Assistance divine promise aux évêques d'une génération ecclésiale donnée, qu'il s'agisse pour eux d'acter le Magistère extraordinaire dogmatique ou celui ordinaire & universel...
           
        Pour finir ce chapitre, on ne peut de toutes façons pas manquer de se poser la question : pourquoi donc les évêques dispersés ont-il été choisis par le pape de Vatican 1er pour décrire les sujets du Magistère ordinaire & universel, ce qui, on vient de le voir, était une manière très-imparfaite de formuler le dogme du Magistère ordinaire & universel ? Je crois qu'ici, le contexte historique explique beaucoup de choses, et Dom Paul Nau en parle d'ailleurs très-clairement dans ses articles très-riches, plus encore que les Heures du duc de Berry. La très-grande affaire du concile de Vatican 1er était, pour la première fois dans toute l'histoire de l'Église, de dégager le sujet-suppôt pontifical tout seul à la face de toute l'Église et du monde entier pour manifester l'infaillibilité ecclésiale. Ce fut une très-grande lutte pour la vie, pour reprendre la très-heureuse expression de Vacant dans son article, et la bataille fut fort rude et rugueuse contre des anti-infaillibilistes extrêmement acharnés, tels Mgr Dupanloup ou le P. Gratry, Dom Guéranger réduisant à rien les arguments de ce dernier. Les anti-infaillibilistes voulaient assurément bien que le pape soit sujet de l'infaillibilité mais pas sans les évêques, à la manière très-conciliariste et/ou gallicane qui voulait que le pape soit infaillible seulement avec le consentement de l'Église, c'est-à-dire des évêques de l'orbe catholique toute entière. Il ne faudrait pas s'imaginer en effet que dégager le pape tout seul pour manifester l'infaillibilité ecclésiale fut, dans la vie de l'Église militante, une étape qui passa comme lettre à la poste, alla sans dire, tout le monde étant d'ores et déjà d'accord sur cette évidence. C'est plutôt le contraire qui est vrai, ce fut un grand combat.
           
        En fait, l'histoire de l'Église nous montre que le pape dut sans cesse lutter au cours des siècles, mais surtout après le grand-schisme d'Occident (1378-1417), contre l'étau des forces "démocratiques" voulant étouffer et subvertir épiscopalement le Tu es Petrus de la Constitution divine de l'Église. Aux temps de Jeanne d'Arc (1412-1431) par exemple, l'évêque Cauchon son persécuteur faisait partie de cette très-active camarilla franc-maçonne avant la lettre, composée de grands universitaires et d'évêques influents, qui, déjà, voulait démocratiser l'Église (lorsque la divine Pucelle inspirée du Saint-Esprit fit appel au pape de sa cause, elle atteignit ingénument, sans le savoir, l'évêque félon au cœur même de sa gnose subversive épiscopalienne). Souvenons-nous du concil(iabul)e de Bâle-Florence (1431-1441) voire même de Constance (1414-1418) à ses débuts, lesquels n'avaient rien moins en projet que de soumettre en principe le pape à tout concile général. Il suffit en effet de lire les discours conciliaristes complètement hérétiques sur cela du français Gerson (1363-1429). Ce n'est qu'à fort grand'peine si l'Église romaine réussit, notamment grâce à l'action intelligente, pondérée, inspirée et persévérante, du pape Eugène IV (1431-1447) et de sa Curie, à sauvegarder sa constitution voulue par le Christ, à savoir que l'Autorité du pape prévaut sur tout concile général.
           
        Or, depuis ces concil(iabul)es du XVe siècle, très-agressifs dans leur dernier avatar, celui de Bâle, étouffés d'extrême justesse, cette révolte contre l'Autorité pontificale ne cessa jamais : les hérésiarques parus dans l'Église depuis lors, qu'ils soient luthériens, calvinistes, hussites, et bien entendu les églises anglicanes épiscopaliennes, puis les jansénistes et enfin les modernistes, ont tous voulu battre en brèche l'autorité du Souverain Pontife, en voulant la plier démocratiquement aux voix épiscopales de l'Église, qu'on fasse résider ces voix dans des assemblées "parlementaires" d'Église, conçues comme de véritables "États généraux permanents de l'Église" tacitement reconductibles, ou bien dans des conciles nationaux, comme avec les jansénistes français. C'est cette sourde mais continuelle et formidable révolte jamais vraiment éteinte (et qu'on voit ressurgir de nos jours dans sa phase démocratique terminale incluant "le peuple de Dieu" avec la synodalité... mais cette fois-ci, le pape François se met avec les subversifs pour renverser le Tu es Petrus...!), qui a fini, tant il est vrai que les hérésies sont opportunes, opportet hæreses, par susciter la proclamation libératrice victorieuse de Pie IX en 1870, concernant l'infaillibilité du pape seul, dans son Magistère extraordinaire. Le pape le dit clairement dans Pastor Aeternus : "Mais comme en ce temps, qui exige au plus haut point l'efficacité salutaire de la charge apostolique, il ne manque pas d'hommes qui en contestent l'autorité, Nous avons jugé absolument nécessaire d'affirmer solennellement la prérogative que le Fils unique de Dieu a daigné joindre à la fonction pastorale suprême".
           
        Or, cette lutte occulte quasi pérenne au sein même de l'Église contre l'Autorité pontificale seule, apporte, semble-t-il, un éclairage sur notre problématique. Lorsque Pie IX, en 1863, sept ans avant les assises du concile Vatican 1er, en vient à définir le Magistère ordinaire & universel dans Tuas Libenter, ayant sûrement déjà en tête de proclamer l'infaillibilité du pape seul, il croit bon de mettre très-fort l'accent sur les seuls évêques de l'orbe catholique, en se faisant on pourrait dire "oublier" lui-même, pape, de façon à ce que tout le monde comprenne bien que de dégager l'infaillibilité du pape seul ne va pas être synonyme de vouloir abolir l'infaillibilité des évêques. Car notons bien que dans Tuas Libenter, il cite seulement les évêques comme étant sujets du Magistère ordinaire & universel (= la formule "le corps enseignant ordinaire de toute l’Église dispersée dans l’univers" fait en effet allusion aux seuls évêques), alors qu'en fait, les évêques tout seuls ne jouissent du charisme de l'infaillibilité que cum Petro et sub Petro, avec le pape et pas sans lui ; de plus, il prend les évêques dans la situation habituelle, commune et ordinaire, par laquelle ils peuvent normalement acter le Magistère ordinaire & universel, à savoir dans leur état de dispersion universelle (sans vouloir aucunement, comme le croient les lefébvristes, en faire une substance, mais simplement en prenant acte de l'état accidentel habituel où ils posent des actes du Magistère ordinaire & universel).
           
        Au reste, et pour conclure sur ce point, il est bon de savoir que ce distinguo entre "Église dispersée" et "Église rassemblée" n’est pas en odeur de sainteté et a poussé sur du terreau et des terres hérétiques : "Ajoutez à cela le sentiment de toute l’antiquité, qui nous apprend que les anciens Pères, comme les conciles, même œcuméniques, ignorèrent complètement la distinction que l’on a faite dans ces derniers temps entre les évêques pris distributivement [= dispersés et épars chacun dans leur diocèse, veut dire Perrone] et collectivement, distinction qui pourtant est l’unique fondement de la doctrine gallicane" (Théologie dogmatique, Perrone, t. VI, p. 16). Le distinguo retenu par les lefébvristes proviendrait en fait du gallicanisme hétérodoxe, et sans doute même plus loin, Perrone, dans un passage dont je n'ai malheureusement pas noté la référence, mille pardons, évoquant saint Augustin qui reprochait aux hérétiques pélagiens de son temps de s'appuyer eux aussi sur ce faux distinguo pour prétendument s'autoriser à professer leur hérésie...!
           
        On fera remarquer que le jésuite P. Giovanni Perrone (1794-1876), dont je tire ce passage significatif, est fort estimé par Vacant, qui, basant quelque partie de son article sur lui, l'appelle "le théologien le plus autorisé du temps"... Et c'est vrai que j'ai tiré grand'profit, quant à moi, de lire les six tomes de sa remarquable et très-catholique Théologie dogmatique. Je vais d'ailleurs le citer encore tout-à-l'heure, car il va singulièrement nous aider à faire fondre "comme cire fond devant le feu" (exorcisme de Léon XIII), l'hérésie lefébvriste...
           
        Conclusion : le lefébvriste a tout faux partout lorsqu'il veut voir dans la dispersion épiscopale universelle le fondement même du Magistère ordinaire & universel et de sa mise en œuvre.
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
           
        2/ "En outre, l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel n'est jamais doté de l'infaillibilité, seul l'ensemble des actes de ce Magistère posés au fil du temps sur un même point de doctrine, est infaillible".
 
        Notre porte-plume théologique de la Fsspx le dit très-formellement : "Le magistère ordinaire et universel est non un acte mais un ensemble d’actes par lesquels le pape et les évêques (Église enseignante) enseignent infailliblement les fidèles (Église enseignée)" (Pour une juste réévaluation de Vatican II : la Tradition et le Magistère clairement définis, p. 3). Évidemment, en arrière-pensée transparente de son raisonnement, le lefébvriste a bien entendu l'intention de récuser le fait que, par exemple, Dignitatis Humanæ Personæ, le décret magistériel isolé sur la Liberté religieuse dans Vatican II, puisse jamais être doté de l'infaillibilité, même si on prouvait qu'il est formellement intégré au Magistère ordinaire & universel, qu'il en est authentiquement une expression formelle...
           
        Or, là encore, le lefébvriste n'a pas su réfléchir, il se trompe grossièrement pour une raison tellement simple qu'il n'y a même pas... pensé, s'imaginant beaucoup trop, on en a la bougre d'impression à le lire dans le Courrier de Rome, que la vérité ultime des choses se trouve toujours dans sa complexification de préférence scolastique et philosophique la plus subtile et compliquée possible... voire même, c'est encore mieux, dans l'inconnaissabilité mystérieuse.
           
        Or bien, qu'il veuille donc porter toute son attention à ce qui suit : si un acte du Magistère ordinaire & universel d'une génération ecclésiale donnée pris isolément par rapport à tous les autres actes de même nature et sur le même sujet doctrinal n'est pas doté de l'infaillibilité (et donc le postulat lefébvriste signifie qu'aucun acte du Magistère ordinaire & universel pris isolément ne sera jamais doté de l'infaillibilité), comment donc l'addition de tous cesdits actes faillibles pourra-t-elle bien donner une somme infaillible, puisqu'aucun de ses éléments, pris isolément, ne sera infaillible...? A-t-on jamais vu un total infaillible n'être composé que de parties faillibles...?! Et même, il faut aller plus loin. Prenons l'exemple d'un total composé de trente éléments additionnés. Si un seul et unique élément parmi eux n'est pas infaillible, alors les vingt-neuf autres auront beau être formellement infaillibles, le total n'en sera pas moins certainement faillible. Ce qui signifie très-clairement que puisque la Foi nous enseigne de fide l'infaillibilité du mode magistériel ordinaire & universel, elle enseigne donc formellement implicitement, comme une conclusion théologique certaine, également l'infaillibilité de chacune et toutes des parties fragmentées et isolées qui composent au fil des siècles chrétiens, pour une doctrine donnée, le Magistère ordinaire & universel. Et cette conclusion théologique tirée très-immédiatement du dogme est autant à croire de Foi, de fide que le dogme lui-même.
           
        Comment ne pas voir ici le rapprochement entre cette thèse qui soutient la faillibilité de l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel et celle des gallicans hétérodoxes qui, derrière Bossuet, voulaient bien admettre que tous les papes pris en corps d'institution étaient infaillibles, mais récusaient que chaque pape venant sur le Siège de Pierre puisse l'être, lequel, disaient-ils, pouvait pour sa part particulière de pape, errer. Mais, de la même manière que pour le Magistère ordinaire & universel, comment donc tous les papes pourraient-ils bien être infaillibles en corps d'institution, si chaque pape actuel peut se tromper...?!
           
        La vérité, c'est qu'on peut effectivement trouver dans chaque acte isolé du Magistère ordinaire & universel beaucoup d'imperfections, des formules imparfaites, comme Vacant le soulignait tout-à-l'heure très-justement, qui pourraient même virtuellement faire des ouvertures vers des sens favens hæresim, mais il est rigoureusement exclu d'y trouver une contradictoire formelle contre la vérité de la doctrine en objet dudit acte isolé. Et c'est justement précisément en cela que l'infaillibilité joue pour l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel : le garantir très-fidèlement a minima d'attenter par une contradictoire formelle à la vérité de la doctrine enseignée. Alors que l'acte du Magistère extraordinaire est de dire TOUTE la vérité, synthétiquement résumée, sur une doctrine donnée, l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel est de n'en établir qu'un fragment inchoatif, sous une enveloppe souvent imparfaite qui, petit à petit, le Saint-Esprit inspirant les théologiens, les Pères de l'Église actuelle, etc., voire même le simple "peuple de Dieu" comme on s'est habitué en nos temps modernes à appeler les simples fidèles, va aboutir à une formulation de plus en plus parfaite, le temps et le Saint-Esprit décantant les scories d'imperfection. L'acte isolé du Magistère ordinaire & universel n'est pas infaillible pour dire parfaitement, dans tous les termes employés, TOUTE la vérité d'une doctrine donnée, mais il est garanti par le charisme de l'infaillibilité de ne RIEN dire de formellement contradictoire contre cette dite vérité d'une doctrine donnée. C'est uniquement en cela, le garantir de RIEN dire contre la vérité doctrinale en objet, que joue l'infaillibilité dont sont dotés tous et chacun des actes isolés du Magistère ordinaire & universel. Par contre, l'infaillibilité joue pour l'acte du Magistère extraordinaire pour empêcher qu'une moindre imperfection puisse exister dans la formulation définitive, et non seulement pour cela, mais pour faire de la formule définitive, la perfection absolue d'une doctrine donnée appuyée explicitement sur la Révélation, une "sententia finalis terminativa" (Dom Paul Nau).
           
        Cette doctrine que je rappelle n'est pas spécialement nouvelle. Les Pères de Vatican 1er ont parfaitement bien exposé ces distinctions capitales entre les deux objets différents des deux modes, que je ne fais que rappeler ici, et Dom Paul Nau, dans ses remarquables articles, les résumait de cette manière claire : "Pour parler formellement [à propos du Magistère ordinaire & universel], ce n'est pas infaillibilité, mais fidélité qu'il faudrait dire. Fidélité d'un enseignement à la Révélation qu'il a la mission de faire connaître, fidélité d'une transmission au dépôt reçu et qu'elle a la charge de communiquer [pas seulement dans l'ensemble mais dans l'acte isolé] : ut fideliter exponerent. MAIS FIDÉLITÉ GARANTIE PAR LE CHARISME, TOUT COMME L'INFAILLIBILITÉ DU JUGEMENT SOLENNEL [EXTRAORDINAIRE]. Une doctrine universellement enseignée comme révélée, alors même que n'est intervenue aucune définition, exprime nécessairement, grâce au bénéfice de cette assistance, la révélation confiée par le Christ aux Apôtres, elle est assurée de lui être fidèle ; elle est par suite la règle qui s'impose à la Foi. C'est ce qu'a défini la Constitution Dei Filius" (Nau, 1962, p. 397).
           
        Car de plus, si l'on soutenait que tous les actes isolés du Magistère ordinaire & universel, pris chacun séparément, pourraient être faillibles, alors comment bien l'enseignement du Magistère ordinaire & universel pourrait-il être infaillible tous les jours, chacun d'eux, singulis diebus, comme l'exprime fort bien Mgr d'Avanzo aux Pères de Vatican 1er, au nom de la Députation de la Foi qui était le porte-voix infaillible de Pie XI, puisque tous et chacun des jours ne sont composés que des enseignements isolés du Magistère ordinaire & universel...? Impossible, évidemment. Voici comment Mgr d'Avanzo s'exprime : "Il y a dans l'Église un double mode d'infaillibilité : le premier s'exerce par le magistère ORDINAIRE [... le PREMIER !, donc le plus important !]. C'est pourquoi, de même que le Saint-Esprit, l'Esprit de vérité demeure tous les jours dans l'Église, l'Église aussi enseigne tous les jours les vérités de la Foi, avec l'assistance du Saint-Esprit [elle n'enseigne pas tous les jours et chacun d'eux seulement la matière de la Foi, comme vont le dire hérétiquement les lefébvristes, mais la vérité de la Foi ; nous allons voir cela tout-à-l'heure]. Elle enseigne toutes les vérités soit déjà définies, soit explicitement contenues dans le dépôt de la Révélation mais non définies encore, soit enfin celles qui font l'objet d'une foi implicite. Ces vérités, l'Église les enseigne quotidiennement, tant principalement par le Pape que par chacun des Évêques en communion avec lui [... peu importe qu'ils soient dispersés dans l'orbe catholique ou tous réunis en un seul lieu, le fallacieux et hérétique distinguo lefébvriste n'est évidemment pas pris en compte par les théologiens sérieux, et notons-le avec soin, dès Vatican 1er...]. Tous, et le Pape et les Évêques, dans cet enseignement ORDINAIRE, sont infaillibles de l'infaillibilité même de l'Église. [Et c’est de cet argument théologique majeur de l'infaillibilité du Magistère ordinaire & universel, ici fort clairement et magistralement rappelé, qui, notons-le bien surtout, était admis de tous les Pères de Vatican 1er, même par ceux anti-infaillibilistes, que Mgr d'Avanzo tirait l'infaillibilité du pape seul, comme l'effet immédiat d'une cause :] Ils diffèrent seulement en ceci : les Évêques ne sont pas infaillibles par eux-mêmes, mais ont besoin de la communion avec le pape, qui les confirme, mais le Pape, lui, n'a pas besoin de rien d'autre que de l'assistance du Saint-Esprit qui lui a été promise. Ainsi, il enseigne et n'est pas enseigné [= Magistère ordinaire], il confirme et n'est pas confirmé [= Magistère extraordinaire]". Et donc, si tout acte isolé du Magistère ordinaire & universel pouvait être faillible, il serait tout-à-fait impossible que ledit Magistère enseignât les vérité de la Foi tous les jours, comme la Foi me fait obligation de le croire.
           
        Il est très-important de noter que cet exposé de Mgr d’Avanzo est doté de l’infaillibilité, car il n’exprimait pas à Vatican 1er ce point de Foi en tant que simple évêque ou théologien privé, mais au nom et pour le compte de l’Église Universelle, mandaté très-spécialement à cet effet par le pape Pie IX dans une commission ad hoc du concile. C'est officiellement au nom de toute l'Église qu'il exprime ici la Foi de toute l'Église. Dom Paul Nau souligne par ailleurs que "cette argumentation n'est pas celle du seul Mgr d'Avanzo. Reprise à près d'un mois de distance, et presque dans les mêmes termes, par un autre rapporteur (Mgr Gasser, le 11 juillet ; Mgr d'Avanzo avait parlé le 20 juin), elle exprime sûrement la pensée de la Députation. Elle reflète aussi sans aucun doute la manière de voir de l'ensemble du Concile, PUISQUE LE VOTE DE L'ASSEMBLÉE FUT EMPORTÉ PAR CES DISCOURS" (Nau, 1962, p. 393).
           
        En fait, s'il fallait donner un qualificatif théologiquement adéquat pour l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel, ce n'est pas le qualificatif dialectique non-définitif, hors-sujet et extrêmement dangereux, qu'on devrait retenir (car il tend à faire croire que le Magistère ordinaire & universel ne se définit que par rapport et en dépendance du Magistère extraordinaire, alors que la vérité se situe à l'opposé), mais le qualificatif inchoatif. Ce mot veut dire : "(1380 ; lat. inchoativus, de inchoare «commencer»). Ling. Se dit des formes verbales exprimant une action commençante, une progression" (Petit Robert). On ne saurait donc trouver qualificatif plus adéquat : le but de l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel n'est pas de débiter une doctrine dogmatiquement achevée, sententia finalis terminativa, mais de délivrer un commencement de cette dite sentence aux formes parfaitement achevées, une part inchoative plus ou moins approchée de la définition parfaite et qui, de toutes façons et dans tous les cas, va tendre obligatoirement à cet achèvement dogmatique ultime, objet du seul Magistère extraordinaire, et c'est dans cette tension obligatoire vers la définition que joue l'infaillibilité pour lui, simple acte isolé du Magistère ordinaire & universel. Car ce commencement de définition de la doctrine est théologiquement ordonné à la définition, et donc, il ne saurait lui aussi qu'être couvert par l'infaillibilité dans le sens qu'il ne saurait contenir la moindre erreur en ce qu'il dit inchoativement de la doctrine qu'il expose. Laissons Dom Paul Nau conclure : "On le voit, ces manières différentes pour le jugement solennel et le magistère ordinaire de bénéficier du «charisme de vérité et de foi jamais déficiente» (Denz., n. 1837) ne viennent pas de la condition, réunie ou dispersée, des sujets qui les exercent (et qui n'est après tout qu'une modalité accidentelle), mais de la nature même spécifiquement différente de ces deux modes de proposition doctrinale" (Nau, 1962, p. 375).
           
        Pour se jeter tout-de-suite la tête dans les travaux pratiques de "la crise de l'Église" : si la Liberté religieuse de Vatican II est un acte isolé du Magistère ordinaire & universel (comme c'est le cas, car, comme on vient d'en établir avec soin la doctrine catholique sur le sujet : 1/ tous les Pères d'une génération ecclésiale donnée l'ont acté una cum le pape actuel, 2/ son objet est un enseignement doctrinal sur un dogme déjà défini, à savoir le dogme Hors de l'Église, point de salut ― L'examen théologique de l'objet doctrinal formel de la Liberté religieuse ne saurait jamais prendre en compte, en effet, l'hérésie, donc l'anti-doctrine de la Liberté religieuse, mais uniquement le dogme de Foi dont elle est la contradictoire formelle ; ce qui signifie bien sûr que le vrai objet doctrinal du décret vaticandeux de la Liberté religieuse est le dogme Hors de l'Église, point de salut), alors, cet acte isolé du Magistère ordinaire & universel ne saurait contenir la moindre contradictoire formelle de la doctrine dont elle traite, à savoir Hors de l'Église, point de salut. Mais on ne le sait que trop, et de ce côté-là les lefébvristes l'ont parfaitement compris contre les vents et marées du monde entier, avec sûrement beaucoup de mérite devant Dieu, on ne peut que les en louer, c'est précisément ce qui est arrivé dans le décret doctrinal de la Liberté religieuse : Dignitatis Humanæ Personæ est un enseignement formellement contradictoire au dogme Hors de l'Église, point de salut quant au for public, c'est toute la doctrine exposée non seulement dans le § 2 définitionnel dudit décret, mais elle est émanée dans tout le texte magistériel, peu ou prou. C'était théologiquement impossible. Mais ce qui était théologiquement rigoureusement impossible de toute impossibilité, est cependant arrivé (pour ne pas couper le fil logique de mon exposé, je ne compte pas dire et expliquer ici comment on peut résoudre ce gravissime problème dans et par la Foi, je le ferai plus loin).
           
        Terminons avec Dom Paul Nau : "Dans la constitution Dei Filius, tout d'abord, l'affirmation qu'«il faut croire les vérités présentées comme révélées par le magistère ordinaire et universel» (Denz., n. 1792), nous est garante que cette fidélité NE PEUT FAIRE DÉFAUT, tout au moins à l'enseignement unanime de la hiérarchie. (…) «L'accord de la prédication unanime de tout le magistère de l'Église unie à son chef EST UNE RÈGLE DE FOI» (Mansi, 1216 D)" (Nau, 1962, p. 390).
           
        En conclusion sur ce chapitre : l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel peut certes contenir des scories de formulation, à laisser s'évacuer et décanter au fond de l'éprouvette par le temps, Parole ordinaire du Saint-Esprit, comme le disait plus haut Vacant, il peut également dire la vérité d'une doctrine d'une manière inchoative parfois imparfaite et très-fragmentée, il n'en reste pas moins qu'il est garanti par le charisme de l'infaillibilité de ne jamais, au grand jamais, contenir formellement une hérésie contre la doctrine en objet, là résidant, quant à lui acte isolé du Magistère ordinaire & universel, l'objet de l'infaillibilité.
           
        ... Ce qui, justement, répétons-le, pose le très-gros problème du décret vaticandeux Dignitatis Humanæ Personæ, professant la très-hétérodoxe et même carrément apostate Liberté religieuse dans le cadre formel d'un de ces enseignements isolés du Magistère ordinaire & universel...
           
        Mais il ne faut pas faire comme les lefébvristes : tricher avec la doctrine de multiples façons pour prétendre supprimer le problème, en commençant par dire qu'un concile général ne peut pas acter théologiquement un acte du Magistère ordinaire & universel, puis continuer en disant que l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel n'est pas couvert par l'infaillibilité, pour arriver à dire in fine qu'il n'y a donc PAS de problème avec Vatican II, que la Constitution divine de l'Église n'est PAS mortellement atteinte en plein cœur par ses décrets hérétiques...
           
        Ce ne sont pas là des raisonnements de théologiens catholiques sérieux, c'est du jean-foutisme de jean-foutres qui montrent, hélas, un grand mépris de la vérité.
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
           
        3/ "Enfin, comme les doctrines exprimées à Vatican II sont au moins favens haeresim si pas hérétiques, en tous cas en non-adéquation certaine avec la Foi et la Tradition doctrinale, elles ne peuvent donc jamais avoir été l'expression d'un vrai Magistère ecclésial, car c'est le criterium doctrinal, et lui seul, qui décide si le Magistère est acté ou bien non. En conclusion, nous nous trouvons donc à Vatican II avec un NON-MAGISTÈRE ; une génération ecclésiale universelle donnée de "membres enseignants" avec le pape légitime actuel a eu beau se réunir comme elle ne s'était jamais réunie aussi nombreuse auparavant depuis les assises de l'Église, à beaucoup près, elle n'a cependant pas manifesté le Magistère de l'Église catholique".
           
        Ainsi, menant au bout du toub, au fond du donf, son raisonnement hérétique qui consiste à nier l'emploi très-certain du Magistère ordinaire & universel dans Vatican II, le lefébvriste, au lieu de trouver la délivrance du problème vaticandeux au moyen de ses outils hérétiques, ne fait qu'aboutir, comme on ne pouvait du reste que s'y attendre, l'hérésie ne pouvant enfanter que l'hérésie, à... une très-grosse hérésie christologique qui s'était manifestée au Vème siècle chrétien de notre ère, à savoir l'eutychianisme, du nom de son auteur le moine Eutychès, ou monophysisme, appelée ainsi plus théologiquement et définitionnellement.
           
        Qu'est-ce que le monophysisme ? Cette hérésie anathématisée par le concile de Chalcédoine (451) consiste à ne vouloir professer qu'une seule nature dans le Christ, celle divine. La nature humaine n'existe plus, elle est phagocytée par celle divine. Ainsi, la Personne du Christ n'est plus composée que de sa nature divine. C'est évidemment une énorme déviance : car s'il en était ainsi, et pour n'en tirer que cette application parfaitement incompatible avec le dogme catholique, puisque le Christ mourant sur la croix n'est qu'un Dieu et non un homme, alors, la Rédemption de l'homme n'a pas pu s'opérer, le Christ ne pouvant racheter le péché de l'homme que parce qu'Il est Lui-même un homme. Le moine Eutychès (378-454), qui heureusement se convertit sur son lit de mort in extremis (il se pinça la chair du bras, et, le montrant à tous, dit à ceux qui l'entouraient : "Je ressusciterai dans cette chair"), ne put cependant empêcher que son hérésie se propagea et communiqua extrêmement, principalement et surtout dans les parties orientales du monde chrétien d'alors, et, pour ne citer ici qu'un exemple du pouvoir d'enracinement de cette hérésie, les Coptes d'Égypte actuels professent encore cette foi monophysite hérétique. Le concile de Chalcédoine rétablit donc avec une vigueur toute apostolique la pureté de la Foi catholique, quant à la Personne du Christ, dans ses décrets dont on retiendra la lapidaire formule les résumant : "Jésus-Christ est vrai Dieu, vrai homme, cependant une seule Personne".
           
        Il est bon de noter avec soin que le monophysisme ne donne pas au chrétien qui le professe une Foi assez pure et assez forte pour résister, par la grâce du Christ à la fois Fils de Dieu et Fils de l'homme (on ne compte pas dans l'Évangile, les si nombreux passages où Jésus-Christ s'appelle Lui-même le Fils de l'homme), aux persécutions des ennemis antichrétiens jusqu'au sang, jusqu'au martyre. L'historien Rohrbacher a, dans sa célèbre Histoire universelle, etc., des pages très-significatives pour le bien montrer, et va jusqu'à dire que si les chrétientés orientales du VIIème siècle, quasi toutes infestées et infectées peu ou prou de la foi eutychienne doctrinalement impure, n'ont pas su ni pu résister à l'Islam et ont été facilement vaincues et envahies par lui, c'est parce qu'elles étaient monophysites ; et que si la chrétienté occidentale, aux temps de Charles Martel (688-741), a pu vaincre avec gloire le musulman à la bataille de Poitiers (732), c'est grâce à la pureté doctrinale de sa Foi catholique.
           
        Quoiqu'il en soit de ce dernier point, approfondissons à présent la doctrine eutychienne, qu'hélas les lefébvristes vont adopter comme fondement de leur théologie de "la crise de l'Église", sans doute même sans s'en rendre le moindre compte, on l'espère très-fort pour eux. Le moine Eutychès, lorsqu'on lui demandait de résumer synthétiquement sa doctrine, privilégiait l'exemple suivant. La nature humaine, disait-il, est comme une simple goutte d'eau ; la nature divine est, quant à elle, comme l'océan de la mer. Plongez la goutte d'eau dans l'océan, elle n'existe plus en tant que goutte d'eau, elle s'est assimilée purement et simplement à l'océan lui-même. Ainsi donc, se croyait-il autorisé à conclure, il en est de même pour le Christ : avant l'union hypostatique, il y avait un Dieu, il y avait un homme, mais après l'union hypostatique, il n'existe plus qu'un Dieu.
           
        Nous comprenons bien maintenant où se situe l'hérésie eutychienne : ne vouloir conceptualiser le Mystère du Christ que sous une seule nature, celle divine.
           
        Or, cette compréhension nous permet de voir en toute clarté que le lefébvriste fait un exposé théologique eutychien et monophysite, donc parfaitement hérétique, de "la crise de l'Église".
           
        Car en effet, le Mystère théandrique du Christ, c'est-à-dire d'être à la fois Dieu et homme dans une seule Personne, est communiqué et répandu à l'Église, Épouse du Christ. C'est pourquoi, Bossuet a pu remarquablement bien dire : "L'Église est Jésus-Christ continué". L'Épouse du Christ, l'Église, est donc à la fois constituée par une nature divine et une nature humaine, qui, normalement, ne doivent toutes deux délivrer en jumelé que le même message, la même Révélation. Qu'est-ce que la nature divine dans l'Église, qui manifeste le Fils de Dieu ? C'est tout simplement la Révélation, sa doctrine infaillible, ses saintes-Écritures, sa Tradition, la Foi autrement dit, qui se transmet sans faille ni hiatus de générations ecclésiales en générations ecclésiales, et que, dans L'Église du Verbe incarné, le cardinal Journet appelle l'apostolicitas doctrinæ. Qu'est-ce que la nature humaine dans l'Église, qui manifeste le Fils de l'homme ? C'est sa hiérarchie divinement instituée par le Christ, essentiellement le pape et les évêques, "membres enseignants", que dans le même ouvrage, Journet appelle l'apostolicitas hierarchiæ et qui se transmet elle aussi sans faille ni hiatus de générations ecclésiales en générations ecclésiales, en jumelé et identiquement à l'apostolicitas doctrinæ.
           
        Or donc, puisque l'Église est elle aussi faite vrai Dieu et vrai homme dans une seule Personne (l'Église est en effet une personne morale, Canon 100 § 1), l'examen théologique de "la crise de l'Église" doit se faire impérativement, sous peine d'invalidité, par ses deux natures dérivées de celles du Christ, à savoir, pour faire court et simple, par la doctrine, mais encore et à égalité, par la hiérarchie de droit divin. Et indépendamment l'une de l'autre, l'une et l'autre n'ayant rien à se devoir réciproquement sur le plan métaphysique, étant certes viscéralement liées ensemble mais en non-dépendance l'une de l'autre, car les deux natures du Christ sont, chacune, intégrales.
           
        Pour faire par exemple l'examen théologique de Dignitatis Humanae Personae, le décret vaticandeux sur la Liberté religieuse, je dois donc l'étudier sous deux rapports, doctrinal et hiérarchique, et non pas qu'un seulement, celui doctrinal, et tout rapporter à lui seul, comme j'y vois se cantonner systématiquement le lefébvriste, voulant professer à faux et hérétiquement que l'examen doctrinal négatif de Dignitatis suffit à lui tout seul à poser la conclusion formelle et définitive qu'il n'est pas un acte du Magistère.
           
        On voit très-bien, dans ce passage, l'abbé Gleize tomber les deux pieds dans cette déviance hérétique monophysite, lorsqu'il croit réfuter l'abbé Lucien du haut de sa théologie lefébvriste... hérétique : "L’abbé Lucien nous dit que Vatican II a fait acte de magistère,... parce qu’un concile œcuménique est le sujet qui a la capacité requise pour exercer l’acte de magistère. Normalement, oui : si on a affaire à un concile œcuménique légitimement convoqué, on doit présumer, habituellement, dans des circonstances normales, que le concile va passer comme tel à l’acte, et que les enseignements qui vont être publiés par ce concile seront les enseignements d’un véritable magistère. Cependant, cette présomption est légitime pour autant que nous n’avons pas la preuve explicite et manifeste du contraire. Or, cette preuve intervient justement lorsque les enseignements du concile en question sont en contradiction manifeste avec l’enseignement du magistère ecclésiastique antérieur : c’est le fameux critère négatif qui doit nous conduire à nier qu’il y ait eu, dans le cas précis de Vatican II, l’exercice d’un véritable magistère, l’exercice d’un concile qui serait passé comme tel à l’acte" (L'autorité du concile Vatican II, p. 7).
           
        Citons-le encore, dans le même article, p. 7 également : "En cas de discontinuité au niveau de l’objet de la prédication [qui ne vérifierait pas l'adéquation qu'il doit avoir avec la Tradition doctrinale], on a le devoir de conclure que l’acte de cette prédication n’est pas l’acte du magistère de l’Église ; les hommes qui exercent cette prédication (c’est-à-dire le sujet de cet acte) restent ce qu’ils sont jusqu’à preuve indubitable du contraire : ce sont des hommes d’Église, évêques ou papes légitimes, qui possèdent la fonction et l’autorité du magistère ecclésiastique. Mais en l’occurrence ils ne peuvent pas s’appuyer sur une telle autorité pour imposer leur prédication comme celle du magistère de l’Église, car celle-ci n’est pas la prédication constante et immuable des vérités révélées par le Christ. Puisque les enseignements du concile Vatican II sont en rupture avec la Tradition bimillénaire de l’Église, au moins sur les trois points substantiels que nous avons indiqués plus haut, ces enseignements ne peuvent pas être les enseignements d’un magistère ecclésiastique proprement dit".
           
        Ce que le porte-plume théologique de la Fsspx ne comprend pas, c'est que puisque les "hommes d'Église" comme il dit sont légitimes, alors, il est théologiquement impossible de dire, sans supposer que l'Assistance divine leur ait fait défaut (ce qui est impossible, eu égard à la Constitution divine de l'Église), qu'ils aient pu poser des actes d'enseignements universels en discontinuité avec la Tradition. Quand bien même le fait vaticandeux le vérifie de facto, il est impossible de le supposer de jure, eu égard à la Constitution divine de l'Église. L'Assistance divine garantit en effet le pape légitime et les évêques unis à lui de ne jamais vouloir et acter que des enseignements doctrinaux en conformité parfaite avec le Bien-Fin de l'Église. Il n'y a donc pas à poser une déduction à partir du fait, comme l'abbé Gleize s'y emploie, que ces actes en discontinuité avec la Tradition ne sont pas des actes du Magistère, il y a juste et seulement à faire le constat d'une CONTRADICTION rentrée dans l'Église, entre d'une part la doctrine, et d'autre part le Magistère ecclésial des "hommes d'Église" légitimes.
           
        Mais le porte-plume théologique de la Fsspx ne le comprend pas, parce qu'il en reste monophysitement au seul criterium doctrinal pour poser une conclusion théologique définitive. Il soutient par exemple que Jean XXIII aurait eu une intention pastorale déviante lorsqu'il a convoqué le concile moderne (on va voir tout-de-suite que c'est faux, dans le commentaire que je vais faire de l'article de Don Pagliarani L'effritement de l'autorité du concile), ce qui "exclut que les enseignements du concile Vatican II soient des enseignements doctrinaux et proprement magistériels, ou donne du moins des raisons sérieuses d’en douter" (L'autorité du concile Vatican II, p. 6). Mais, théologiquement, il n'a rigoureusement pas le moindre droit d'en douter justement, et encore moins nier que Vatican II soit magistériel, sans être hérétique, parce que Jean XXIII est pape légitime. Étant légitime, théologiquement il ne peut donc convoquer un concile que sur une base orthodoxe ordonnée au Bien-Fin de l'Église, et donc formellement magistérielle. L'abbé Gleize n'a donc pas compris qu'il doit juger des choses de Vatican II au moyen non seulement du premier examen doctrinal ayant trait à la nature divine de l'Épouse du Christ, comme on le voit s'y cantonner monophysitement, mais encore et en même temps, et à égalité, au moyen du second examen hiérarchique qui a trait, quant à lui, à la nature humaine de l'Église.
           
        Dans un autre article, le porte-plume théologique de la Fsspx titre : "D - Une conséquence : le Magistère ecclésiastique est un magistère traditionnel" (Du Magistère vivant et de la Tradition - Pour une "réception thomiste" de Vatican II ?, p. 2). Non, M. l'abbé Gleize, vous vous trompez. Le Magistère ecclésiastique est un magistère légitime et traditionnel, pas SEULEMENT traditionnel. Si vous en restez au seul concept traditionnel pour définir le Magistère ecclésiastique, votre définition est monophysite et fausse, plus exactement dit elle est à moitié vraie autant qu'à moitié fausse, elle doit rigoureusement inclure la légitimité à parité et en même temps. En effet, un Magistère ecclésiastique qui serait seulement un magistère traditionnel sans être légitime en même temps, n'existerait pas, ne pourrait pas exister.
           
        Don Davide Pagliarani n'est pas en reste du discours hérétique de l'abbé Jean-Michel Gleize. Voici ce qu'il nous dit, après avoir résumé l'impasse dialectique de "la crise de l'Église", à savoir 1/ si nous acceptons la thèse de l'herméneutique de la rupture (école de Bologne), alors, l'église conciliaire et post est une nouvelle Église, ce qui est impossible ; 2/ si nous acceptons la thèse de l'herméneutique de la continuité ratzingérienne, alors l'Église conciliaire et post est la même église que devant, mais cette fois-ci, nous sommes en présence d'une nouvelle doctrine, en contradiction formelle avec la Tradition, ce qui est non moins impossible. "Pour sortir de cette impasse, la solution est seulement (c’est le cas de le dire) lefébvrienne : ce magistère conciliaire qui a réussi à s’imposer comme unique pierre angulaire de tout le complexe théologique, liturgique et pastoral de l’après-Concile, n’a pas eu recours aux garanties surnaturelles qui rendent le magistère de l’Église réellement tel" (L'effritement de l'autorité du concile, p. 4). Rien de plus hérétiquement faux que cette conclusion, à partir du moment où l'on sait que les papes du concile, Jean XXIII et Paul VI, sont papes légitimes, verus papa.
           
        Il n'est que trop clair à lire les écrits des lefébvristes, que leur démarche est donc parfaitement monophysite, hérétique, puisqu'ils se croient autorisés à donner une conclusion théologique définitive seulement par l'examen de la doctrine, inhérente à la nature divine de l'Église, excluant ou "oubliant" complètement que ce premier examen doctrinal n'est que la moitié de la démarche théologique à faire, et qu'ils ne sauraient rendre de conclusion théologique définitive quant au problème Vatican II que, sine qua non, si ce premier examen est complété par l'examen au niveau de la hiérarchie de droit divin, inhérente à la nature humaine de l'Église du Christ. En fait, le lefébvriste phagocyte monophysitement par-là même la hiérarchie de droit divin par la doctrine, c'est-à-dire la nature humaine de l'Église par sa nature divine, exactement de même et semblable manière hérétique que le moine Eutychès faisait en supprimant la nature humaine dans le Christ par sa Divinité, voulant que la goutte d'eau (la nature humaine) soit absorbée jusqu'à ne plus exister en tant que goutte d'eau lorsqu'elle était plongée dans l'océan de la mer (la nature divine). Dignitatis Humanæ Personæ ne satisfait pas à l'examen doctrinal ? Donc, dit le lefébvriste, il n'est pas un acte du Magistère. Il a juste fait hérétiquement l'impasse sur l'autre examen qui lui reste à faire, pour que sa conclusion théologique soit valide, véritable et vérifiée, à savoir l'examen par la hiérarchie de droit divin.
           
       La vérité, sur le plan théologique, c'est donc que sa conclusion reste complètement en suspens tant que l'autre examen n'est pas dûment fait, et qu'il soit fait en totale indépendance de l'examen doctrinal, tant il est vrai et théologiquement vrai que la nature humaine dans le Christ ne dépend métaphysiquement en rien de la nature divine, elle est intégrale en soi, subsistant dans son intégrité parfaite et parfaitement indépendante. Et lorsque ce second examen par la hiérarchie de droit divin inhérente à la nature humaine de l'Église sera fait, alors, et alors seulement, cela permettra au théologien catholique de poser la VRAIE conclusion théologique de "la crise de l'Église" en prenant en compte le résultat des deux examens théologiques, et pas que d'un seul, quelqu'il soit (notons en passant que les "ralliés" font le raisonnement exactement inverse que celui des lefébvristes, et tout aussi monophysite que le leur : ils font l'examen théologique de Dignitatis par la hiérarchie, et comme celle-ci s'avère non seulement légitime mais qu'elle pose des actes inhérents au Magistère ordinaire & universel à Vatican II, alors, le "rallié" conclue tout aussi monophysitement que le lefébvriste, mais à l'envers de lui, que la doctrine contenue dans Dignitatis ne peut être... hérétique : ce qui est tout aussi faux et hérétiquement faux que la conclusion lefébvriste posant que Vatican II enregistre un... non-Magistère). Pour l'instant, le lefébvriste ne connaît pas du tout cette conclusion théologique véritable de "la crise de l'Église", et d'ailleurs il montre malheureusement qu'il n'a pas l'air de vouloir la connaître, car on le voit s'être hérétiquement réfugié, claquemuré, cadenassé et verrouillé la tête et l'âme dans une lecture monophysite en supprimant l'examen hiérarchique.
           
        Mon lecteur l'a sûrement déjà compris, nous en sommes rendus au waypoint où il nous revient donc maintenant de faire ce que le lefébvriste n'a pas fait et ne veut pas faire, ou peut-être ne pense pas à faire, mais que le catholique sait qu'il doit faire, à savoir ce second examen de Dignitatis par la nature humaine de droit divin de l'Église, c'est-à-dire par sa hiérarchie légitime posant des actes, afin qu'une vraie conclusion théologique puisse être donnée à partir des deux examens à faire, catholiquement cette fois-ci, conclusion que seul l'examen des deux natures, divine et humaine, doctrinale et hiérarchique, est en mesure de donner.
           
        L'examen doctrinal de Dignitatis a donc montré que ce décret est recalé pour cause d'hérésie : c'est un non-Magistère. Nous allons constater que l'examen hiérarchique de Dignitatis va montrer, certes complètement anormalement et en contradiction complète avec le premier examen doctrinal, une conclusion exactement opposée, à savoir que cedit décret vaticandeux est l'expression la plus certaine du Magistère ordinaire & universel doté de l'infaillibilité ecclésiale. Je rappelle ici que l'examen hiérarchique que nous devons faire ne doit prendre aucun criterium appartenant à l'examen doctrinal : il ne s'agit pas, dans ce second examen, d'examiner la doctrine, mais seulement, et surtout en indépendance totale avec ce que nous dit le premier examen doctrinal, d'examiner si les sujets qui actent Dignitatis sont premièrement légitimes et aptes à poser un vrai acte du Magistère ordinaire & universel, et secondement, s'ils le font effectivement, s'ils posent vraiment cedit acte.
           
        Si les lefébvristes avaient bien lu à fond Vacant, ils auraient vu qu'il résume très-bien dans un passage de son article les conditions de ce second examen hiérarchique à faire quant à la nature humaine de l'Église, pour tout acte magistériel, ainsi qu'il suit : "TOUTE doctrine enseignée comme obligatoire par la majorité, et surtout par l’unanimité des évêques catholiques, est donc obligatoire pour toute l’Église dans la mesure où ils l’affirment ; car on peut être assuré qu’ils la proposent à la croyance des fidèles, en union avec le Souverain Pontife, et que, par conséquent, cette doctrine est enseignée infailliblement par le corps épiscopal tout entier, c’est-à-dire par le Pape et les évêques unis au Pape" (pp. 29-30). Vacant nous dit bien : TOUTE doctrine enseignée par les évêques unis au pape, est DE SOI obligatoire, à croire de fide par le simple fidèle, c'est-à-dire, saisissons-le bien, sans que le fidèle ait à examiner de quelque manière que ce soit le contenu doctrinal, mais seulement le contenant.
           
        Mais ne brûlons pas les étapes. Commençons l'examen hiérarchique de Dignitatis, par le commencement, c'est-à-dire par prendre acte de la légitimité des pape et évêques qui l'ont promulgué ensemble, à savoir Paul VI et les 2 500 évêques rassemblés autour de lui. Là, leur légitimité est de l'ordre de l'évidence. Les lefébvristes reconnaissent d'ailleurs sans difficulté, au moins en théorie (je vais dire tout-à-l'heure pourquoi je dis cela), la légitimité de Paul VI et des 2 500 évêques signataires du décret sur la Liberté religieuse, inutile donc d'en faire une trop longue démonstration. Il suffira de dire que Paul VI est certainement pape légitime lorsqu'il signe Dignitatis, puisque le 7 décembre 1965, date de la signature du très-peccamineux décret de la Liberté religieuse, il est désigné et reconnu par toute l'Église, acceptus et probatus, pour être le Vicaire du Christ actuel et que la pacifica universalis ecclesiæ adhæsio est la règle prochaine de la légitimité pontificale. Paul VI donc, certainement légitime, reconnaissant lui-même la légitimité de tous les évêques réunis avec lui à cette date, la question n'a pas besoin d'être creusée plus loin : ils sont tous, pape actuel et évêques unis à lui le 7 décembre 1965, les sujets légitimes d'une génération ecclésiale donnée de "membres enseignants" pouvant dûment poser un acte isolé du Magistère ordinaire & universel.
           
        Secondement, en tant que sujets formellement habilités à le faire, ils ont posé réellement avec Dignitatis un acte d'enseignement doctrinal simple émanant de l'Église Universelle enseignante et adressé à l'Église Universelle enseignée, sur la contradictoire formelle d'un dogme, Hors de l'Église, point de salut. Et, contrairement aux dénégations sophistiques et rebelles des lefébvristes, cela suffit formellement, comme vient de nous l'expliquer Vacant, pour faire de Dignitatis un acte isolé du Magistère ordinaire & universel. TOUTE doctrine enseignée par l'universalité ecclésiale enseignante est en effet DE SOI, par la nature humaine de l'Église dérivée du Christ, dotée de l'infaillibilité. Il n'est pas ici question de contenu mais de contenant.
           
        Pas question ici, dans ce second examen hiérarchique de Dignitatis, de prendre en compte le moins du monde que loin d'avoir condamné la Liberté religieuse, contradictoire formelle d'un dogme, comme ils auraient normalement dû le faire dans cet enseignement doctrinal simple qu'ils ont fait, ils l'ont au contraire exalté aux nues infernales, car, on l'a compris, ce n'est pas le sujet de ce second examen hiérarchique selon la nature humaine de l'Église de s'en occuper, lequel consiste juste à prendre acte que les "membres enseignants" légitimes d'une génération ecclésiale donnée ont débité à l'universalité des fidèles enseignés un formel enseignement doctrinal. Comme explique fort bien Vacant, je le cite de nouveau, il n'est sûrement pas inutile que les lefébvristes le relisent encore une fois : "TOUTE doctrine enseignée comme obligatoire par la majorité, et surtout par l’unanimité des évêques catholiques, est donc obligatoire pour toute l’Église dans la mesure où ils l’affirment ; car on peut être assuré qu’ils la proposent à la croyance des fidèles, en union avec le Souverain Pontife, et que, par conséquent, cette doctrine est enseignée infailliblement par le corps épiscopal tout entier, c’est-à-dire par le Pape et les évêques unis au Pape".
             
        Et, quant à Dignitatis, par l'examen hiérarchique ayant trait à la nature humaine de l'Église qu'on en fait, nous nous trouvons donc bel et bien, ou plutôt fort mal, avec un acte de cette nature décrite par Vacant, un véritable acte isolé du Magistère ordinaire & universel.
           
        Pour faire validement et authentiquement un acte isolé du Magistère ordinaire & universel, c'est en effet extrêmement simple, ce n'est pas compliqué : il faut et il suffit seulement que les "membres enseignants" que sont les évêques una cum le pape actuel d'une génération ecclésiale donnée, enseignent à l'universalité des fidèles, à l'Église Universelle enseignée, une doctrine de Foi ou de Mœurs. Un point, c'est catholiquement tout. Il n'y a pas besoin d'autres choses.
 
        Tout le reste vient du démon.
 
        Les lefébvristes ont voulu sophistiquer cette doctrine définitionnelle très-simple quant au Magistère ordinaire & universel, pour qu'elle ne puisse pas être dite employée à Vatican II. On peut comprendre qu'ils l'ont fait en réaction trop dialectique et trop passionnelle contre les modernistes, réfléchissant à tort que si Dignitatis est vraiment un acte isolé du Magistère ordinaire & universel doté de l'infaillibilité, alors, cela va les obliger à acquiescer à la doctrine hérétique y professée. Mais ce n'est pas du tout ce raisonnement qu'ils devaient faire, passionnel et dialectique, c'est un tout autre raisonnement, que je vais dire en finale de mon propos, lorsque je donnerai la vraie solution théologique de "la crise de l'Église", de par Dieu et son Saint-Esprit, vraie solution que pour l'instant le lefébvriste ne connaît pas.
 
        Il est trop facile de voir qu'ils sont dans une mauvaise voie, car leur sophistication de la doctrine du Magistère ordinaire & universel infaillible n'a fait que les faire verser dans l'hétérodoxie la plus profonde, comme nous l'allons voir à présent.
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
       
        Première sophistication hérétique que les lefébvristes emploient. ― Pour qu'un acte magistériel infaillible soit dûment acté, ils ont par exemple mis en avant la nécessité que les Pères de l'Église disent avoir l'intention de faire un acte infaillible, tant s'il est du mode extraordinaire que s'il est du mode ordinaire & universel, pour que ledit acte le soit vraiment. Où ont-ils été pêché cela, je me le demande. Les Pères de Vatican 1er n'ont parlé de cette nécessité de dire explicitement l'intention de faire un acte infaillible que d'une manière accidentelle et non-substantielle, à savoir lorsque le pape veut faire une définition dogmatique extraordinaire, et c'est tout. Et si les Pères de Vatican 1er veulent que le pape dise son intention de faire une définition, c'est uniquement pour que les fidèles aient bien conscience d'être en présence du Magistère extraordinaire dogmatique, pour qu'ils ne la confondent point, cette définition, avec un simple enseignement doctrinal du Magistère ordinaire & universel. Et c'est tout.
           
        Et cette dite nécessité n'est là encore qu'un accident. Elle n'est nullement constitutive de l'acte du Magistère extraordinaire, comme veulent se l'imaginer faussement les lefébvristes, à savoir que si la définition était faite sans l'explicitation de l'intention de la faire par le pape, alors, elle serait invalide. Or donc, c'est uniquement pour l'acte définitionnel extraordinaire que l'intention d'en faire un doit être dite par le pape, mais il est capital de comprendre que ce n'est qu'un simple ajout surérogatoire accidentel et non-constitutif de l'acte dogmatique infaillible, lequel l'est tout-à-fait même si cette intention n'était pas dite lors de la proclamation dogmatique. Par contre, il n'y a rigoureusement aucune nécessité, quelle qu'elle soit, même simplement accidentelle, d'expliciter l'intention de faire un acte du Magistère ordinaire & universel lorsqu'il s'agit pour les Pères actuels de faire un enseignement doctrinal simple et inchoatif. Celui-ci n'a nullement besoin que les Pères qui le posent disent avoir l'intention d'en poser un pour qu'il le soit vraiment, ce qui d'ailleurs confine à la folie, à l'absurde. Le simple fait de poser un acte d'enseignement doctrinal de la part de l'universalité de l'Église enseignante en direction de l'universalité ecclésiale enseignée, suffit en effet théologiquement à dire que... l'acte spécifique du Magistère ordinaire & universel est ipso-facto acté, puisque les conditions pour qu'il le soit sont dûment toutes remplies, à savoir d'être un enseignement doctrinal acté par les Pères enseignants universellement un avec le pape actuel, en direction de l'universalité des membres enseignés !
           
        Nous nous trouvons là en fait exactement dans ce qu'explique fort bien le P. Perrone dans sa Théologie dogmatique : "Pour éclaircir cela [= la place de l'humain dans un acte de droit divin] par un exemple familier, il arrive par l'institution divine que le pain est changé par la consécration au corps de Jésus-Christ ; il dépend cependant de la volonté du prêtre de prononcer les paroles de la consécration sur un pain plutôt que sur un autre. Mais s'il a une fois consacré un pain, il n'est au pouvoir de personne [pas même la personne du prêtre consécrateur] d'enlever la consécration à ce pain, et c'est avec vérité qu'on dirait que c'est de droit divin, ou par l'institution du Christ, que ce pain est devenu le corps de Jésus-Christ, bien que ce soit par un fait purement humain, c'est-à-dire par la volonté d'un prêtre, qu'il s'est fait que ce pain a été changé par la consécration au corps du Christ". Et Perrone, à l'appui de son propos, de judicieusement citer le cardinal Gerdil, qui professe ainsi dans son Commentarium a Justino Febronio in suam retractationem editum animadversiones, édit. cit. de ses œuvres, tome XIII, posit. 9, p. 241 : "Il y a beaucoup de choses qui, pour être et exister, requièrent préalablement un fait humain ; mais dès qu'elles ont été produites par un fait humain, elles reçoivent IMMÉDIATEMENT la consécration du droit divin". Et de conclure : "Il ne faut donc pas confondre le fait avec le droit, lequel se produit par l'institution divine DÈS QUE LE FAIT A ÉTÉ POSÉ ; il s'interpose effectivement un fait, et un fait humain ; mais ce fait une fois posé, et l'institution du Christ précédant, le droit divin se dégage et se développe".
           
        Faisons remarquer ici que Perrone, citant l'exemple de la transsubstantiation n'entend exclusivement parler à son sujet que du fait et du droit le concernant, et nullement de la théologie de l'acte sacramentel qui inclut l'intention du prêtre (théologie de l'acte sacramentel qui n'a rien à voir avec la théologie de l'acte infaillible). C'est seulement quant au fait et au droit de l'acte sacramentel qu'il en parle, excluant la question de l'intention. Son exemple emporte donc formellement la démonstration, laquelle consiste à dire ceci : une fois que l'acte humano-ecclésial théologiquement sous-tendu par le droit divin est posé, alors l'acte devient ipso-facto un acte divin irréformable, il n'appartient plus à l'humain qui l'a posé, celui-ci n'étant en cela qu'un simple suppôt passif du Saint-Esprit, exactement comme l'écrivain sacré rédacteur de la sainte-Écriture. Et c'est exactement ce qui se passe pour un acte isolé du Magistère ordinaire & universel : une fois que les Pères actuels l'ont posé, c'est-à-dire qu'ils ont fait un enseignement doctrinal en tant qu'Église Universelle enseignante en direction de l'Église Universelle enseigné, il est automatiquement un acte divin dans la Main du Saint-Esprit, de soi bien entendu irréformable, les humains qui l'ont posé n'ayant plus aucun pouvoir sur lui. Et il en est bel et bien ainsi quant à Dignitatis...
           
        Ainsi donc, c'est par trop bien assis sur les fondements théologiques, un acte doté de droit de l'infaillibilité comme l'est tout acte isolé du Magistère ordinaire & universel, c'est-à-dire "fondé sur l'institution divine" comme disent ces auteurs que je cite, est tel de soi, une fois qu'il est dûment posé par le fait humain pour qu'il le soit... Dès lors, il ne dépend plus en quelque manière que ce soit de l'humain ni de son intention, il appartient immédiatement et formellement à Dieu. Quand bien même l'intention humaine y serait devenue a-posteriori explicitement contraire, ce qui d'ailleurs supposerait de l'absurdité et même de la folie chez ceux qui poseraient ainsi un tel acte infaillible qu'ils voudraient annuler à peine posé, par exemple, suivez mon regard, en le déclarant simplement "pastoral" avec le sens très-ciblé de vouloir le connoter de non-infaillible… L'acte doté de l'infaillibilité, comme l'est tout acte isolé du Magistère ordinaire & universel donc, par exemple Dignitatis Humanae Personæ, est un acte DIVIN qui n'appartient plus à ceux qui l'ont posé, une fois dûment posé par eux, parce qu'ils n'y étaient que les organes, les suppôts passifs de Dieu, quelle que soit l'intention qu'ils en ont, non seulement postérieurement audit acte posé mais encore antérieurement également.
           
        Et, in casu, dans notre cas affreux et terrible de Dignitatis, examiné théologiquement par la nature humaine de l'Église, nous nous trouvons bel et bien, ou plutôt fort mal, avec un acte ecclésialement dûment posé et doté de l'infaillibilité le 7 décembre 1965, dès lors absolument irréformable, car appartenant immédiatement au Saint-Esprit. Il nous reste à expliquer une telle situation dans la Foi, c'est évident bien sûr, mais je l'ai déjà dit que dessus, je ne veux pas couper le fil de mon "discours de la méthode", je le dirai seulement en finale, plus loin, pour l'instant j'ai encore bien de l'hérésie lefébvriste à pourfendre de taille et d'estoc, d'outre en outre, usque ad mortem...
           
        Pour le dire en finale de ce chapitre, Don Pagliarani a voulu, dans tout son article L'effritement de l'autorité du concile, nier que les papes du concile moderne, Jean XXIII et Paul VI, aient eu l'intention de faire un enseignement doctrinal conforme à la Foi et à la Tradition dans Vatican II, notamment en tirant par les cheveux des phrases piochées dans l'autobiographie du cardinal Giacomo Biffi, qui fut très-proche de Paul VI dans ses dernières années, ils n'eurent, croit-il pouvoir postuler, que l'intention de dialoguer avec l'homme moderne, et donc, suivez son regard, sa conclusion va être de dire que n'ayant pas eu cette intention de Foi, l'Assistance divine leur fit subséquemment défaut radical, ce qui signifie donc in fine, cqfd, que Vatican II est un non-Magistère. Don Pagliarani oublie juste une chose excessivement importante sur le plan théologique : il est théologiquement radicalement impossible de toute impossibilité de supposer que des papes légitimes aient validement réuni un concile universel en union morale avec tous les évêques de l'orbe catholique sans avoir eu l'intention d'y faire au moins, a minima, un enseignement doctrinal simple inhérent au Magistère ordinaire & universel de soi couvert par l'infaillibilité, c'est-à-dire un enseignement enté sur la Foi.
           
        On peut remarquer pour commencer que l'article de Don Pagliarani est d'une manière bien significative très-déficient quant à bien différencier les deux modes, extraordinaire et ordinaire, du Magistère doté de l'infaillibilité, il n'a pas un mot pour bien différencier les deux dans tout son article (mais il ne s'en faut point trop étonner, puisque, pour le lefébvriste, le Magistère ordinaire & universel ne saurait être acté dans un concile universel !). Or, il ne suffit pas de dire comme il le fait que les papes conciliaires n'ont pas eu l'intention de faire des définitions dogmatiques, pour conclure que lesdits papes n'aient jamais eu l'intention de faire de vrais enseignements doctrinaux, toute sa thèse, péniblement embarbouillée de scolastique et de raisons philosophiques inutiles et même hors-sujet, veut affirmer qu'ils n'aient pas eu cette dernière intention. Mais comme je viens de le dire, théologiquement, cette affirmation est hérétique : impossible de postuler que les papes légitimes d'une génération ecclésiale donnée aient pu validement réunir un concile universel sans avoir l'intention d'y faire un enseignement doctrinal enté sur la Foi qui, bien entendu, étant inhérent au Magistère ordinaire & universel, sera ipso-facto, par le fait même, automatiquement couvert par l'infaillibilité dont ledit mode est doté.
           
        Secondement, cet a-priori théologique de jure que je viens de formuler est vérifié par l'a-posteriori factuel, à savoir qu'effectivement, les papes Jean XXIII et Paul VI ont bel et bien voulu faire un enseignement doctrinal conforme à la Foi et à la Tradition dans Vatican II, car ils ne pouvaient, en effet, de jure, que vouloir en faire un. Ils ne l'ont pas fait certes on ne le sait que trop mais ils ont voulu le faire. Leur seule erreur fut de vouloir compatibiliser cedit enseignement avec la pensée de l'homme moderne, ce qui était impossible certes, autant que de vouloir faire un rond carré. L'abbé Pagliarani se trompe donc et trompe son lecteur lorsqu'il dit qu'à Vatican II, le pape n'a voulu que dialoguer avec l'homme moderne, au sens très-ciblé par lui de vouloir dire, suivez son regard, qu'il n'a pas fait audit homme moderne un vrai enseignement doctrinal enté sur la Foi, de soi couvert par l'infaillibilité magistérielle, premier jalon qu'il emploie pour aboutir à sa conclusion lefébvriste réprouvée que Vatican II est un non-Magistère. Cependant, que l'actuel Supérieur général de la Fsspx veuille bien prendre conscience que ses prolégomènes sont faux : le pape a voulu certes établir un pont avec l'homme moderne, dialoguer avec lui, mais à partir de la Foi, mais en l'enseignant sur la Foi. C'était du moins son intention théologique formelle dans Vatican II, l'intention qui couvre tout le concile moderne...
           
        Il n'est pas bien difficile, dans le discours d'ouverture du Concile de Jean XXIII ou au contraire dans le discours final de Paul VI, alpha et oméga de Vatican II pour bien comprendre quelle fut leur intention d'ouvrir ce concile universel, de voir cette identique intention pontificale très-orthodoxe qu'ont les deux papes de Vatican II de vouloir enseigner la Foi à l'homme moderne. L'abbé Pagliarani, au lieu de faire des découpages pro domo pour sa thèse lefébvriste hérétique de passages cités hors-contexte, aurait tout-de-même dû s'en rendre compte. Commençons par citer cette magnifique phrase de Paul VI, dans son Discours de clôture du concile, le 7 décembre 1965 : "Pouvons-Nous dire que nous avons rendu gloire à Dieu, que nous avons cherché à le connaître et à l'aimer, que nous avons progressé dans l’effort pour le contempler, dans la préoccupation de le louer et dans l'art de proclamer ce qu'il est aux hommes qui nous regardent comme pasteurs et maîtres dans les voies de Dieu ? Nous croyons franchement que oui, notamment parce que c'est de cette intention première et profonde que jaillit l'idée de réunir un Concile. Ils résonnent encore dans cette basilique les mots prononcés lors du discours d'ouverture par Notre vénéré prédécesseur Jean XXIII, que Nous pouvons bien appeler l'auteur de ce grand rassemblement". Il y a bel et bien là l'intention du pape de "proclamer ce que Dieu est aux hommes modernes" dans le concile, donc l'intention de leur y débiter la bonne doctrine de la Foi et du salut, intention, Paul VI le dit explicitement, qui est génitrice et motivation théologique première de tout le concile. Dont acte, n'est-il pas M. l'abbé Pagliarani.
           
        Mais puisque Paul VI évoque Jean XXIII, lisons donc maintenant ensemble ce que Jean XXIII dit quant à son intention pontificale d'ouvrir le concile, et lisons-le dans la citation qu'en fait le pape Benoît XVI dans son discours aux cardinaux de son premier Noël pontifical, en 2005, ce qui aura l'avantage de bien montrer la pérennité sans faille de la pensée des papes modernes sur cette intention authentique d'enseigner la Foi à l'homme moderne, de 1962 à 2005 en passant par 1965 : "Je ne citerai ici, dit Benoît XVI, que les célèbres paroles de Jean XXIII, dans lesquelles cette herméneutique [de la continuité] est exprimée sans équivoque, lorsqu'il dit que le Concile «veut transmettre la doctrine de façon pure et intègre, sans atténuation ni déformation», et il poursuit : «Notre devoir ne consiste pas seulement à conserver ce trésor précieux [du Dépôt révélé de la Foi], comme si nous nous préoccupions uniquement de l'antiquité, mais de nous consacrer avec une ferme volonté et sans peur à cette tâche, que notre époque exige... Il est nécessaire que cette doctrine certaine et immuable, qui doit être fidèlement respectée, soit approfondie et présentée d'une façon qui corresponde aux exigences de notre temps. En effet, il faut faire une distinction entre le dépôt de la foi, c'est-à-dire les vérités contenues dans notre vénérée doctrine, et la façon dont celles-ci sont énoncées, en leur conservant toutefois le même sens et la même portée» (S. Oec. Conc. Vat. II Constitutiones Decreta Declarationes, 1974, pp. 863-865)" (Discours à la Curie romaine à l'occasion de la présentation des vœux de Noël, 22 décembre 2005).
           
        Ainsi donc, la thèse lefébvriste exposée par l'abbé Pagliarani dans son article L'effritement de l'autorité du concile, est radicalement fausse, dans ses prolégomènes mêmes in radice qui veulent affirmer que les papes du concile moderne n'ont pas eu l'intention d'enseigner la Foi dans Vatican II à l'homme moderne. Ils ont bel et bien eu cette intention, quand bien même, hélas ce n'est que trop vrai, elle fut affreusement dévoyée par leur volonté de la compatibiliser à toutes mauvaises forces avec la pensée moderne.
           
        Et bien entendu, la conclusion que l'on doit en tirer, qui est la seule vraie, contrairement à celle très-fausse que veut tirer l'abbé Pagliarani de ses faux prolégomènes, est toute opposée à la sienne : les papes du concile ayant eu l'intention d'y faire un vrai enseignement de Foi à l'homme moderne, quand bien même répétons-le ils se sont bougrement trompés en voulant le compatibiliser avec la pensée moderne qui lui est antinomique, cedit enseignement donc, dans le cadre d'un concile œcuménique validement convoqué et assemblé, ressort automatiquement et ipso-facto du Magistère ordinaire & universel d'enseignement, de soi couvert par l'infaillibilité ecclésiale.
           
        Impossible de sortir de là sans attenter au cœur même de la Constitution divine de l'Église et de la Foi, et tomber dans l'hérésie.
 
 cerveau feminin
 Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
           
        Deuxième sophistication hérétique des lefébvristes. ― En voici une autre, par exemple, d'hérésie. Les lefébvristes, cherchant donc fébrilement et malignement à échapper à cette conclusion théologique certes terrible et affreuse à laquelle aboutit formellement l'examen hiérarchique de droit divin de Dignitatis selon la nature humaine de l'Église, à savoir que Dignitatis est formellement un acte isolé du Magistère ordinaire & universel doté de l'infaillibilité, formellement dans la Main du Saint-Esprit, invoquent le caractère d'obligation qui soi-disant doit accompagner tout acte ecclésial infaillible : s'il y a obligation faite explicitement aux fidèles de croire la doctrine enseignée, indiquée dans l'acte, alors l'acte est infaillible, à son défaut, il ne l'est pas, croient-ils pouvoir soutenir.
           
        Le lefébvriste ne va sûrement pas trouver mieux pour prétendument asseoir son objection, que d'appeler à la barre le texte de Vacant que je viens de rappeler. J'y consens volontiers, le voici donc à nouveau : "TOUTE doctrine enseignée comme obligatoire par la majorité, et surtout par l’unanimité des évêques catholiques, est donc obligatoire pour toute l’Église dans la mesure où ils l’affirment ; car on peut être assuré qu’ils la proposent à la croyance des fidèles, en union avec le Souverain Pontife, et que, par conséquent, cette doctrine est enseignée infailliblement par le corps épiscopal tout entier, c’est-à-dire par le Pape et les évêques unis au Pape".
           
        Ce que j'ai mis en gras, je suis bien certain que le lefébvriste va vouloir en faire ses choux... gras ! Vacant, croira-t-il pouvoir soutenir, invoque bien là une nécessité constitutive d'obligation pour l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel, sans laquelle ledit acte ne pourra pas l'être.
           
        Malheureusement pour le lefébvriste, cette citation ne fait que faire ressortir une imperfection de formulation chez Vacant, que je n'ai pas voulu relever tout-à-l'heure quand je l'ai cité une première fois, si l'on en tire, comme le lefébvriste veut le faire, que l'obligation est constitutive du Magistère ordinaire & universel.
           
        En effet. Comme avec l'intention, l'obligation est un simple signe topique accidentel qui accompagne ipso-facto tout acte isolé du Magistère ordinaire & universel, elle n'est nullement constitutive du Magistère ordinaire & universel : dès lors que l'Église Universelle enseignante acte un enseignement doctrinal en direction de l'Église Universelle enseignée, il y a automatiquement obligation pour le fidèle d'y adhérer, sans qu'il y ait jamais besoin d'aucune formule surérogatoire extrinsèque à rajouter pour signifier cette obligation, laquelle serait juste superfétatoire, c'est-à-dire inutile, infiniment malséante et même fort offensante envers Dieu. La raison théologique profonde en est très-simple. "Dieu est Amour" (I Jn IV, 16). Or, il suffit que l'Amour parle pour... obliger. Ce qui veut dire que le caractère d'obligation est implicite et non explicite, il découle de la nature intrinsèque de l'Autorité divine infaillible informant tout acte magistériel doté de l'infaillibilité, qu'il soit du mode extraordinaire dogmatique ou ordinaire & universel, et non d'une formule juridique extrinsèque surérogatoire. Vouloir que l'obligation de croire soit extrinsèque alors qu'elle est intrinsèque, c'est faire de l'Église une caserne de sapeurs-pompiers ou de saint-cyriens fonctionnant le-petit-doigt-sur-la-couture-du-pantalon, à la pharisienne et à la scribe, et c'est presque blasphématoire, car est-il besoin de rappeler que l'Église du Christ, c'est bien autre chose que cela !
           
        C'est dès les Actes que cette doctrine que je rappelle est connue, saint Pierre l'affirmera magistralement au premier concile général de l'histoire de l'Église, l'an 51, en ces termes non-équivoques, d'une grande clarté : "Dieu m'a choisi parmi vous afin que par ma bouche, les Gentils entendent la Parole de l'Évangile, ET QU'ILS CROIENT" (Act XV, 7). Que le lefébvriste veuille bien noter avec soin : les Gentils ont l'obligation de croire immédiatement et dès lors qu'ils entendent la Parole de Dieu sortir de la bouche de Pierre. C'est automatique (= d'où l'emploi de la conjonction "ET" -qu'ils croient-). Le premier pape en effet ne dit pas et sous-entend encore moins : " … et qu'ils croient, seulement si je leur en fais explicite obligation". La formule des Actes est en vérité lapidaire dans sa simplicité lumineuse.
           
        L'abbé Lucien, en 1984, avait fort bien déboulonné cette soi-disant nécessité d'une formule explicite d'obligation dans un acte d'enseignement magistériel pour que celui-ci soit couvert par l'infaillibilité, lisons-le attentivement : "Le concile [Vatican 1er] donc affirme d'abord l'existence d'une obligation de poser des actes de foi : fide divina et catholica ea omnia credenda sunt : «[est] à croire», «il faut croire», «on doit croire»... et le fondement de cette obligation est indiqué : on doit croire «ce qui est contenu dans la parole de Dieu». C'EST LE CARACTÈRE RÉVÉLÉ (PAR DIEU) QUI EST LA SOURCE DE L'OBLIGATION DE POSER UN ACTE DE FOI. On retrouve donc très-exactement, au début de ce paragraphe Porro fide divina, l'enseignement donné par le concile au commencement du chapitre III qui le contient : «Puisque l'homme dépend totalement de Dieu comme son Créateur et Seigneur et que la raison créée est complètement soumise à la Vérité incréée, nous sommes tenus, lorsque Dieu se révèle, de lui présenter par la foi la soumission plénière de notre intelligence et de notre volonté» (D. 1789). Telle est la substance des choses, la «métaphysique» de l'obligation liée à la Révélation et à la Foi. La source, le motif formel, la cause propre et adéquate de cette obligation, c'est la Vérité incréée qui se révèle, c'est la Véracité divine, ou encore, comme le dit la suite du texte que nous venons de citer (D. 1789), «l'autorité de Dieu lui-même se révélant, qui ne peut ni se tromper ni nous tromper». Comme on le voit, toute la question de «l'obligation» est réglée, substantiellement, avant et en-dehors de l'intervention de l'Église. Quel est donc ici son rôle ? L'intervention infaillible de l'Église, a pour fonction de déterminer avec précision l'objet matériel de la foi : c'est-à-dire de faire savoir avec certitude quelles sont en détail les vérités révélées. Le rôle propre de l'Église n'est donc nullement d'obliger à croire ; il est de certifier infailliblement que telle proposition appartient au donné révélé. En bref, le magistère comme tel n'oblige pas à croire, mais PROPOSE ce qui est à croire comme divinement révélé.
           
        "C'est ainsi que les choses sont présentées par le texte de Vatican 1er. L'exercice du magistère infaillible, comme tel, ne comporte pas d'affirmer une obligation, mais de faire connaître le caractère révélé d'une proposition : «quae (...) tamquam divinitus revelata credenda proponuntur» ; ce que (l'Église) «propose à croire comme divinement révélé» ou «propose à notre foi comme des vérités révélées par Dieu». En vertu de ce texte de base de Vatican 1er, l'acte propre du magistère infaillible comporte seulement d'affirmer le caractère révélé d'une proposition ; ET ALORS, IPSO-FACTO, L’OBLIGATION LIE LE CROYANT : ON DOIT CROIRE. Non pas parce que l'Église créerait une obligation, mais parce que le fidèle connaît, par suite de l'affirmation infaillible de l'Église que telle proposition est révélée et qu'ainsi il se trouve lié par l'obligation générale de croire ce qui est révélé s'appliquant à ce cas particulier. Il est vrai que l'autorité de l'Église exerce souvent son pouvoir de juridiction conjointement au pouvoir magistériel, en frappant de peines ecclésiastiques ("anathèmes" ou autres) ceux qui refusent extérieurement son enseignement. Mais l'acte du pouvoir de juridiction est formellement et réellement distinct de celui du pouvoir magistériel. Cela est manifeste d'après le texte de Vatican 1er que nous venons d'analyser, et qui ne mentionne pas l'intervention du pouvoir de juridiction.
           
        "Et cela a été clairement exposé par le Père Kleutgen, dans les justifications théologiques jointes au schéma réformé sur l'Église (cf. pp. 15-16) : «Dans ces décrets, il est nécessaire de distinguer l'interdiction (ou le commandement) de la définition (ou du jugement sur la doctrine). D'abord, en effet, l'Église définit que telles opinions sont mauvaises ; ensuite, elle les interdit comme telles, et elle établit des peines contre les contumaces. Or, on doit la soumission de l'esprit à l'Église qui définit, même si elle n'ajoute aucun précepte. Puisqu'en effet Dieu nous a donné l'Église comme mère et maîtresse pour tout ce qui concerne la religion et la piété, nous sommes tenus de l'écouter quand elle enseigne. C'est pourquoi, si la pensée et la doctrine de toute l'Église apparaît, nous sommes tenus d'y adhérer, même s'il n'y a pas de définition : combien plus donc si cette pensée et cette doctrine nous apparaissent par une définition publique ?» (M. 53, 330 B).
           
        "Cet exposé doctrinal de l'un des théologiens de la Députation de la Foi à Vatican 1er est en pleine concordance avec le texte de Dei Filius que nous avons expliqué. L'interdiction ou le commandement (et donc l'explicitation de l'obligation) ne sont nullement constitutifs de l'acte infaillible : ni pour le magistère ordinaire (en-dehors d'une définition au sens strict), ni pour le magistère extraordinaire ("définition"). Dans tous les cas, l'acte du magistère garanti par l'infaillibilité est le «jugement sur la doctrine» (conformité ou désaccord avec la Révélation). Et alors les fidèles doivent adhérer, dans le même acte, et à la doctrine enseignée, et au jugement de l'Église, toujours à cause de l'autorité de Dieu qui révèle : qui révèle, et telle doctrine en particulier, et qu'il assiste infailliblement l'Église dans son enseignement. Bien entendu, si l'interdiction, ou le commandement, ou les peines canoniques ne sont pas constitutifs de l'acte infaillible, ils peuvent en être le signe. Tel est le cas bien connu des «canons avec anathème» des conciles œcuméniques, spécialement de Trente et de Vatican 1er. Dans le canon, seule la peine d'excommunication contre ceux qui disent telle doctrine est explicitée. Mais tous les catholiques reconnaissent que c'est le signe certain du jugement infailliblement porté par l'Église sur la doctrine elle-même" (L'infaillibilité du magistère ordinaire et universel de l'Église, pp. 133-135, Annexe II — Infaillibilité et obligation).           
           
        Dom Paul Nau rappellera, sur ce même sujet de l'obligation intrinsèque à tout acte magistériel doté de l'infaillibilité, les propos de Mgr Martin à Vatican 1er : "On peut s'en remettre sur ce point à la conclusion de Mgr Martin, quand, exprimant la pensée de la Députation, il explique que ce dont il faut affirmer le caractère obligatoire pour la Foi, c'est «ce que Dieu a révélé et que l'Église, de quelque manière que ce soit (quomodocumque [c'est-à-dire : autant par son mode magistériel dogmatique définitionnel que par son mode ordinaire & universel]), nous propose à croire. Le motif de la Foi, en effet, à savoir l'autorité de Dieu qui parle, ainsi que l'obligation pour l'homme de le croire, s'étend à tout ce que le magistère de l'Église, de quelque manière que ce soit (quomodocumque), nous fait constater avec certitude avoir été révélé par Dieu» (Mgr Martin, 6 avril 1870, Mansi, LI, 314 A)" (Nau, 1962, p. 349 & note 3 de la même page).
           
        Et donc, pour conclure sur notre problème spécifique, s'il est possible d'admettre qu'il n'y a dans la rédaction conciliaire de Dignitatis aucune formule d'obligation stricte, cela, de toutes façons, n'a aucune espèce d'incidence sur la qualification d'infaillibilité du document, qui n'en a nullement besoin pour l'être authentiquement, comme il l’est effectivement bien, étant formellement une manifestation du Magistère ordinaire & universel (rappelons en effet les termes conclusifs de Dignitatis : "Tous et chacun des articles édictés dans cette déclaration ont plu aux pères du sacro-saint Concile. Et Nous, par le pouvoir apostolique que Nous avons reçu du Christ, un avec les Vénérables Pères, Nous l'approuvons dans l'Esprit-Saint, Nous le décrétons et le statuons, et Nous ordonnons de promulguer pour la Gloire de Dieu ce qui a été ainsi statué synodalement. À Rome, près Saint-Pierre, 7 décembre 1965, Paul, Évêque de l'Église catholique" ; et la notation générale que donne Paul VI à tous les Actes du Concile dans son Bref de clôture In Spiritu Sancto est de semblable facture).
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
        
        Troisième sophistication hérétique employée par le lefébvriste. ― Le lefébvriste dresse encore malignement quelques herses, qui lui sont inspirées par l'esprit malin, pour s'empêcher d'embrasser dans la Foi la simplicité conceptuelle de l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel, que je crois bon de répéter encore une fois ici à son intention, à savoir : l'enseignement doctrinal simple et inchoatif par l'Église Universelle enseignante à l'Église Universelle enseignée.
           
        Par exemple, il évoque la définition de l'infaillibilité pontificale du ch. IV de Pastor Aeternus en s'inventant une interprétation restrictive des plus fausses. Y lisant "la suprême autorité apostolique de docteur et pasteur de tous les chrétiens", il commente en disant que si le pape utilise cette dite suprême autorité apostolique, etc., alors, c'est infaillible, mais pas autrement... et bien sûr, pour lui, ce n'est pas du tout très-souvent qu'il l'emploie.
           
        Or, il appert de cette objection que le lefébvriste n'a tout simplement pas compris ce qu'il a lu. Car cette formule "suprême autorité apostolique, etc." n'est qu'un superlatif qui veut signifier que le pape parle en tant que pape, c'est-à-dire comme docteur universel de tous les chrétiens, et… c'est tout. Or, à chaque et toutes les fois que le pape parle ès-qualités, c'est-à-dire lorsqu'il s'adresse à l'universalité du monde catholique sur la question de la Foi ou des Mœurs, il est ipso-facto dans sa fonction de docteur universel, c'est-à-dire encore… "docteur et pasteur de tous les chrétiens"… et donc encore, bien sûr, à tout coup revêtu de "la suprême autorité apostolique"… et donc enfin, son prêche doctrinal s'insère et s'inscrit par le fait même (ipso-facto) dans le cadre de l'infaillibilité.
           
        Il n'y a en effet strictement aucun cas où le pape parlerait Foi ou Mœurs aux fidèles du monde entier sans le faire au nom de sa suprême autorité apostolique, sauf le cas du docteur privé (mais dans ce cas, il faudrait que le pape le dise très-explicitement et très-expressément au préalable de son prêche, et ce serait d'ailleurs un grand désordre, la Chaire de Saint Pierre n'étant pas commise au pape pour être le haut-parleur de ses opinions théologiques personnelles, petites ou grandes). Ainsi donc, lorsque le pape prêche la doctrine ès-qualités, c'est à dire en tant que docteur et pasteur de tous les chrétiens, c'est toujours au nom de sa suprême autorité apostolique et donc toujours sous le couvert de l'infaillibilité. Le lefébvriste s'imagine qu'il faut que le pape dise absolument quand il parle en tant que docteur universel, pour qu'on en soit bien sûr, et que l'infaillibilité soit employée. Mais la vérité est exactement le contraire : lorsqu'il parle à l'universalité du monde catholique, c'est automatiquement en tant que docteur universel des chrétiens qu'il le fait, et donc, il n'a nullement besoin de le dire, c'est une évidence implicite ; par contre, s'il voulait parler au monde chrétien en tant que docteur privé, alors c'est là qu'il faudrait absolument et nécessairement qu'il le dise, car autrement, puisque quand il s'adresse à l'universalité catholique, on doit croire de Foi, de fide, qu'il le fait en tant que docteur universel, on ne pourrait pas savoir qu'il a l'intention de s'exprimer sur un point de doctrine seulement en tant que docteur privé...
           
        En vérité, le lefébvriste s'est bâti là toute une contre-théologie ecclésiologique où l'Église n'est que de constitution humaine et non divine, puisque, lorsque le pape parle doctrine à l'universalité des fidèles, il professe qu'il peut très-bien le faire en tant qu'homme ou docteur privé (puisque, selon lui, il pourrait être faillible dans cedit prêche). Or, la vérité est aux antipodes : lorsque le pape parle doctrine à l'universalité des fidèles, c'est TOUJOURS en tant que christ (doté de l'infaillibilité ipso-facto). C'est ainsi que le Christ a constitué son Église : pas pour qu'elle vive la Foi, par l'organe de sa tête le pape, en pointillé et très-exceptionnellement, mais TOUS LES JOURS, tout le temps, singulis diebus comme disait Mgr d'Avanzo, rapporteur de la Députation de la Foi à Vatican 1er, que j'ai cité plus haut, c'est-à-dire chaque jour que Dieu fait, dans une longue ligne droite infranchissable par les forces du mal, et qui nous conduit au Ciel si nous la suivons. Que le lefébvriste réfléchisse enfin que s'il était vrai que le pape n'était pas tout le temps infaillible dans son prêche doctrinal universel aux fidèles, alors, l'Église ne serait qu'une construction humaine parmi tant d'autres, puisqu'imparfaite, et non divine, parfaite. Je parle là, on l'a sûrement compris, en me basant sur la théologie fondamentale de la Constitution divine de l'Église, et non pas, malheureusement, en prenant en compte la situation que nos yeux affligés voient dans l'Église aujourd'hui...
           
        Conclusion de ce chapitre : Dignitatis Humanæ Personæ, le décret vaticandeux sur la Liberté religieuse, qui sur le plan théologique a valeur d'exemplaire pour toute "la crise de l'Église", est formellement un acte du Magistère ordinaire & universel, doté de l'infaillibilité, si l'on retient, comme on doit le faire, la conclusion de l'examen hiérarchique de cet acte ayant trait à la nature humaine de l'Église qui est Jésus-Christ continué (la conclusion de l'examen doctrinal de cet acte, ayant trait à la nature divine de l'Église, dit le contraire, certes, à savoir que Dignitatis ne saurait être un acte du Magistère ordinaire & universel, et cette conclusion-là aussi, bien évidemment, il faut la retenir ; nous allons voir en finale ce qu'il faut tirer de ces deux examens théandriquement radicalement contradictoires, pour poser la solution théologique véritable de "la crise de l'Église", c'est-à-dire d'une manière catholique, en tenant compte du Mystère théandrique des DEUX examens, et non en formulant une conclusion monophysite, comme le font les lefébvristes, en ne tenant nul compte dudit Mystère théandrique dont vit l'Épouse du Christ).
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
 
        4/ "Vatican II n'est en fait, théologiquement, qu'un Magistère authentique de soi non-infaillible ; du reste, ce n'est même pas le cas, car s'il l'était, il obligerait encore le fidèle d'assentir aux doctrines hérétiques qu'on y trouve".
           
        Il y a une chose presque drôle, dans l'exposé du lefébvriste. Il commence par nous dire, et là il sait qu'il enfonce une porte ouverte car tout le monde en effet est d'accord sur ce point, que l'infaillibilité du mode extraordinaire dogmatique n'a pas été employée à Vatican II ; puis, continuant son examen, il croit pouvoir ajouter, mais nous venons juste de voir ensemble qu'il raisonne hérétiquement en cela, que l'infaillibilité du mode ordinaire & universel n'a pas non plus été employée au concile moderne. Il se retrouve donc alors avec... une énorme anormalité : un pape actuel et 2 500 évêque cum Petro et sub Petro dans une aula conciliaire tout ce qu'il y a de plus existante, qui ont posé des actes doctrinaux et même dogmatiques (Dei Verbum et Lumen Gentium sont en effet officiellement connotés comme étant dogmatiques), plus nombreux que les plus nombreux conciles généraux du passé depuis les assises du christianisme, Trente ou Vatican 1er par exemple ne réunissant à tout le mieux que 500 évêques ! Mais en fait, selon les lefébvristes, ces 2 500 évêques plus le pape, ... "plus le Saint-Esprit" dira le cardinal Marty l'archevêque de Paris de l'épique époque, auraient été là pour ne... RIEN dire !! Car quand bien même les Actes de Vatican II sont d'une prolixité touffue remarquable jamais vue, le lefébvriste nous dit que les Pères de Vatican II n'auraient jamais voulu enseigner doctrinalement en Apôtres les fidèles du monde entier puisque donc aucun de leurs enseignements ne seraient dotés de l'infaillibilité qui est propre au statut théologique du "membre enseignant", ni par le mode extraordinaire ni par celui ordinaire ! Ce qui veut donc vraiment dire qu'ils n'ont RIEN dit, puisque le seul dict qu'on doit retenir du "membre enseignant" porte obligatoirement sur la Foi ou les Mœurs couvert de soi par l'infaillibilité ecclésiale. Et, on en conviendra, c'est là une énorme anormalité...
           
        N'a-t-on pas vu un moine du couvent d'Avrillé, épousant alors la thèse lefébvriste, oser dire sans rire que La Liberté religieuse est un acte... conciliaire (Congrès théologique de Si, si, no, no, P. Pierre-Marie, 1996) ; et Mgr Gherardini ne trouvait rien de mieux pour connoter les Actes de Vatican II que cette tautologie qui s'écrit et s'épèle surtout... totologie de Toto de Lahurie. Voilà qui en effet rappelle bougrement le bourgeois gentilhomme de Molière, qui s'exclamait de faire de la prose rien qu'en parlant ! Le problème, c'est que si le bourgeois mis en scène par Molière pouvait être sot sans pécher, il n'en est plus du tout de même des lefébvristes qui nous disent que la Liberté religieuse est un acte... conciliaire, car ils le disent pour nier hérétiquement que ladite Liberté religieuse est un acte isolé du Magistère ordinaire & universel doté de l'infaillibilité, ce qu'il est vraiment et authentiquement.
           
        Alors, effectivement, il ne reste donc plus qu'un tiroir où le lefébvriste peut caser les Actes de Vatican II, celui dit authentique, de soi non-infaillible (je veux le suivre, ici, dans son faux raisonnement).
           
        Un article de l'Ami du Clergé cadre bien ce Magistère authentique non-infaillible quant au pape, dont il est fort important cependant de dire qu'on ne l'a vraiment mis sur le chandelier de l'Église que dans la période moderne (il n'en est absolument pas question dans Vatican 1er) : "En-dehors de là [du domaine du Magistère ordinaire et extraordinaire strictement infaillible], il y a présomption en faveur de son inerrance [au pape], à cause de l'Assistance divine qui lui est promise, et pratiquement on doit un assentiment religieux ferme et sans réserve aux décisions pontificales personnelles ou émanant des Congrégations romaines. Bien qu'elles soient réformables, elles excluent absolument tout défaut de prudence et tout mal moral ; elles sont l'autorité éclairant les doutes de la conscience pratique. Les circonstances changeant, ces décisions peuvent être modifiées ou même abolies, et il n'y a pas lieu de se scandaliser de ces changements ni d'opposer les décrets d'un pape aux décrets d'un autre ; mais cette mutabilité n'enlève rien au devoir strict que les fidèles ont de s'y soumettre" (Tables générales 1909-1923, p. 381, 2e col.).
           
        Ce magistère authentique recueille en fait tous les actes des papes et des Évêques qui ont trait à la gestion pastorale du Peuple de Dieu sans faire partie de l'enseignement ayant trait au noyau de la Foi ou des Mœurs proprement dit, sauf de manière plus ou moins éloignée. Mais cependant, là encore, donc, l'assentiment du simple fidèle à ce genre d'actes est absolument requis. On pourrait de prime abord s'en étonner puisque ce Magistère authentique n'est pas couvert par l'infaillibilité. Et pourtant, rien de plus juste, car l'Église est SAINTE. L'infaillibilité accordée à l'Église n'est en effet elle-même qu'une conséquence parmi d'autres, la plus importante certes, de l'Assistance permanente du Christ et de l'Esprit-Saint à l'Église : lors même, donc, que l'Église n'est pas dans le cadre du Magistère ordinaire ou extraordinaire infaillible, elle est quand même assistée par le Christ de telle manière que le fidèle est sûr que toutes ses directives ne peuvent que le mener dans la voie du salut, quand bien même il y aurait erreur dans l'ordre temporel ou accidentel.
           
        Le lefébvriste nous dit donc que tous les Actes de Vatican II ressortent de ce Magistère authentique, c'était d'ailleurs à peu près le message du monsignore romain, Mgr Gherardini.
           
        Cependant, même dans ce cas où il constate le non-emploi du mode magistériel extraordinaire dogmatique à Vatican II, où il y récuse aussi (hérétiquement) celui du mode ordinaire & universel, le lefébvriste n'en est pas moins obligé de prendre acte de l'impossibilité théologique que même les seuls actes du magistère authentique puissent être hérétiques ou favens hæresim, comme il appert de moult Actes du concile moderne. Je laisse le soin à l'abbé Gleize de nous le dire, il le fait très-bien : "L’acte de magistère non-infaillible et simplement authentique oblige lui aussi, au for interne : il est contraignant. Certes, il ne réclame pas un acte de foi, mais il réclame quand même un acte d’obéissance (le fameux «assentiment religieux interne») sous peine de faute grave. Le pape Pie IX va même jusqu’à dire qu’on ne peut refuser d’adhérer aux enseignements du magistère simplement authentique «sans aucun détriment aucun pour la profession de la foi catholique»" (Du magistère vivant et de la tradition - Pour une "réception thomiste" de Vatican II ?, p. 3). "La critique des enseignements du Concile est donc possible si et seulement si il s’avère que nous n’avons pas affaire avec Vatican II à l’exercice d’un véritable magistère (infaillible ou pas)" (ibid., p. 4).
           
        La seule (et abominable) porte de sortie que trouve alors le lefébvriste pour fuir cette obligation d'adhérer aux hérésies de Vatican II quand bien même ses décrets ne seraient que du ressort d'un département magistériel authentique non-infaillible, est donc de déclarer Vatican II un non-Magistère. Qu'il me pardonne de lui dire qu'il retombe là dans sa vomissure, une fois de plus : "Mais il leur est arrivé ce que dit un proverbe très vrai : Le chien est retourné à ce qu'il avait vomi ; et la truie, après avoir été lavée, s'est vautrée dans la boue" (II Pet II, 22). Le porte-plume théologique de la Fsspx n'hésite pas à écrire de manière complètement monophysite, en effet, dans un aveuglement total : "L’acte de magistère se définit par son objet, et, comme nous l’avons expliqué plus haut, cet objet est la Révélation transmise par les apôtres c’est-à-dire le dépôt de la foi à garder saintement et à expliquer fidèlement. Et c’est pourquoi le magistère ecclésiastique est un magistère traditionnel et constant. Si, comme l’a fait Vatican II, on propose des vérités qui sont en opposition manifeste avec les vérités déjà enseignées comme révélées par l’Église, cette proposition ne peut pas être l’exercice d’un magistère digne de ce nom" (ibid., p. 4). Ce qui veut bien sûr dire que l'abbé Gleize ne juge Vatican II que par le seul criterium doctrinal, de manière parfaitement monophysite.
           
        Et de continuer par ces propos qui achèvent le caractère hérétique formel de son monophysisme impénitent : "Parce qu’ils ne sont pas l’expression d’un véritable acte de magistère, les enseignements du Concile Vatican II peuvent être jugés à la lumière du magistère de toujours, à la lumière de la Tradition immuable de l’Église. C’est d’ailleurs ainsi que Mgr Lefebvre concevait la critique du Concile. «Pour moi, pour nous, je pense, dire qu’on voit, qu’on juge les documents du Concile à la lumière de la Tradition, ça veut dire évidemment qu’on rejette ceux qui sont contraires à la Tradition, qu’on interprète selon la Tradition ceux qui sont ambigus et qu’on accepte ceux qui sont conformes à la Tradition" (ibid., p. 5). Ainsi donc, la surnature montrant plus encore que la nature qu'elle a horreur du vide, le monophysite lefébvriste, Mgr Lefebvre en tête, après avoir supprimé la réalité du Magistère, c'est-à-dire, excusez du peu, le pape et la hiérarchie légitime divinement instituée, ne peut que se prendre lui-même pour... le pape et la hiérarchie légitime divinement instituée. Si en effet, en Église, on supprime le pape, c'est parce qu'on l'est soi-même. On ne peut que constater par son propos même que Mgr Lefebvre, sans vergogne, sans aucune retour sur son comportement hérétique, réagissant trop passionnellement et dialectiquement à la persécution moderniste, n'éprouva aucun scrupule, pour garder "mains propres et tête haute" dans "la crise de l'Église", à remplir la fonction du... pape dans un concile, à savoir : juger les documents du concile, rejeter ceux qui ne lui plaisent pas parce qu'il les déclare non-conformes à la Tradition (alors que, sur le plan théologique, seul le pape actuel du présent a mandat divin de dire ce qui est conforme à la Tradition ou bien non), donner l'interprétation des enseignements qu'on juge soi-même ambigus par rapport à la Tradition, donner son placet à ceux qu'on juge être conformes à la Tradition...
           
        Loin donc de trouver une délivrance en connotant tous les Actes de Vatican II de simplement authentique, et donc non-dotés de l'infaillibilité, le lefébvriste est bien obligé de constater, et son porte-plume a l'honnêteté louable de le reconnaître, que son devoir de catholique reste aussi formel d'être soumis auxdits Actes, sans doute pas de la même manière que s'ils étaient dotés de l'infaillibilité de par le Magistère ordinaire & universel, mais aussi formellement. Reste donc devant les yeux du lefébvriste le mur élevé jusqu'au Ciel de l'Autorité inhérente à l'Institution hiérarchique des "membres enseignants" una cum le pape actuel, contre laquelle on ne saurait s'élever voire se rebeller sans être anathème.
           
        Mais au lieu de comprendre que cette situation ecclésiale plus qu'anormale montre une contradiction entre la nature divine et la nature humaine de l'Épouse du Christ, ce qui donc montre au regard catholique que l'Église est plongée dans l'économie de la Passion du Christ, dont saint Paul nous révèle qu'elle est "si grande contradiction" (He XII, 3), il n'y a pas d'autres déductions catholiques à faire en effet, le lefébvriste se braque en rebelle, dialectiquement et passionnellement, et refuse alors, s'anathématisant ipso-facto lui-même, de reconnaître qu'il y a eu un vrai Magistère à Vatican II. Ce qu'il a l'air d'oublier, c'est que dire et professer, comme il le fait erronément, que Vatican II est un non-Magistère en suivant un raisonnement monophysite hérétique, alors que Vatican II est un vrai Magistère, de par le mode ordinaire & universel, c'est exactement dire et professer la non-existence des "membres enseignants" una cum le pape actuel de toute une génération ecclésiale donnée. Le lefébvriste tire ainsi un trait annihilateur sur toute une génération ecclésiale donnée de "membres enseignants" certainement légitimes. Il y a en effet synonymie et équiparité théologiques parfaites entre les deux propositions, de professer un non-Magistère alors qu'on est en présence d'un vrai Magistère, et de professer l'inexistence théologique du pape actuel et de tous les évêques avec lui qui actent ce soi-disant non-Magistère.
           
        Les dernières et ultimes déductions de la doctrine lefébvriste hétérodoxe nous montrent donc qu'ils professent l'ecclesiovacantisme. Déclarer inexistante l'Église enseignante du présent que la Providence de Dieu nous donne, certes dans un état de crucifixion total, c'est être ecclesiovacantiste.
           
        Le lefébvriste est donc un ecclesiovacantiste, qui, on l'espère de tout cœur, s'ignore.
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
 
        5/ "En conclusion, autant par la forme que par le fond, nous nous trouvons à Vatican II avec un non-Magistère ; une génération ecclésiale universelle donnée de "membres enseignants" avec le pape légitime actuel a eu beau se réunir comme, à beaucoup près, elle ne s'était jamais réunie aussi nombreuse auparavant depuis les assises de l'Église, elle n'a cependant pas manifesté le Magistère infaillible de l'Église catholique".
           
        Proposition théologique qui, je viens de l'écrire, est exactement dire : "Je suis ecclesiovacantiste". La position sédévacantiste bien connue consiste à professer que le pape moderne seulement n'est plus pape, à partir de Jean XXIII ou Paul VI. Puis ensuite, mais ensuite seulement, réfléchissant que le pape est comme le résumé théologique de l'Église, le sédévacantiste ne peut qu'étendre son sédévacantisme à l'Église moderne toute entière, c'est une extension obligée de son sédévacantisme. Mais le lefébvriste quant à lui, est bien plus radical : derrière une profession de bouche seulement, très-affichée, de croire à la légitimité des papes modernes et de l'Église qu'ils représentent, il va en réalité carrément, radicalement et brutalement, mais comme occultement, dès les prolégomènes de son positionnement théologique dans "la crise de l'Église", à inexister en bloc toute l'Église enseignante de la génération ecclésiale de Vatican II et post, c'est-à-dire toute l'Église du présent, englobant dès le départ de son raisonnement théologique, le pape actuel légitime avec tous les évêques unis à lui dans cette inexistence. C'est hélas bien cela que signifie théologiquement sa profession de mauvaise foi de déclarer Vatican II, un non-Magistère.
           
        En fait, découvrant jusqu'à fond ce qu'il est dans son cœur, on voit que le lefébvriste est un... super-sédévacantiste !
           
        J'avais déjà fort noté et remarqué en 2011, il y a donc plus de douze ans maintenant, lors de ma réfutation du Courrier de Rome n° 344 qui prétendait répondre aux objections que lui faisait le P. Cavalcoli, dominicain italien, cette profession de foi ecclésiovacantiste très-marquée des lefébvristes. J'en recopie ici quelques passages significatifs :
           
        ... Le lefébvriste en vient à donner sa solution empoisonnée, à savoir : recourir au Magistère du passé contre le Magistère du présent, pour s'exorciser du Magistère du présent quand il est erroné. Et de s'en justifier par ces propos qui ne font que montrer à tous qu'il s'empale, qu'il s'enferre soigneusement, à son grand dam, dans les profondeurs de Satan de ses raisonnements hérétiques : "Le Père Cavalcoli ne peut pas prétendre que le recours au Magistère strictement actuel est le seul moyen de connaître infailliblement la vraie doctrine". Et pour bien montrer que le Magistère du présent ne saurait rendre compte, avec sûreté, de la Foi, le rédacteur lefébvriste prend ici à tâche de nous embarquer dans une réflexion pseudo-philosophique sur le fait que... LE PRÉSENT N'EXISTE PAS VRAIMENT ! C'est hallucinant de voir jusqu'où peut aller une âme qui ne veut pas rejeter son péché intellectuel. Je cite : "Pris dans un sens très strict, presque «mathématique», ce principe [de recourir au Magistère strictement actuel] aboutirait à une absurdité : en effet, l'enseignement que le Pape a donné il y a deux jours n'est plus «actuel» au sens strict, et encore moins l'enseignement d'un Concile qui a eu lieu il y a cinquante ans. Pour être précis, la vérité est que pour un acte de foi actuel d'un membre de l'Église, la règle prochaine est toujours un enseignement passé (au moins de quelques instants)"...!! On est là en pleine folie hérétique qui veut se rendre à elle-même raison qu'elle s'appelle sagesse.
           
        Éh bien !!!, c'est dit. Allons jusqu'au bout du raisonnement, c'est-à-dire pressons tout le pus de l'abcès lefébvriste. S'il en était ainsi du présent que le dit le lefébvriste, alors, il serait un pur fantôme, un véritable ectoplasme spirite, il n'existerait pas. Quand par exemple je prononce une phrase et que vous êtes à deux pas de moi pour l'écouter, ô lefébvriste, cette phrase sera intellectuellement inaudible par vous puisque un mot en chassant un autre immédiatement la seconde suivante, alors, si je vous dis : "Vous êtes fou", vous ne pourrez pas le comprendre. En effet, quand ma langue, juste après avoir prononcé le mot "vous" sera rendue à prononcer le mot "êtes", vous n'aurez plus conscience du "vous" antécédent qui sera déjà évanoui dans les abîmes inconnaissables du passé, et donc vous ne pourrez plus savoir que c'est vous que je considère comme étant quelque chose, et lorsque, troisième palier, ma langue prononcera le mot "fou", il viendra en suspension solitaire dans un univers incompréhensible : non seulement vous ne pourrez pas comprendre que c'est "vous" que je considère comme étant "fou", mais pire, le mot "êtes" étant déjà lui aussi évanoui, vous ne saurez pas si je veux donner une définition générale de la folie par exemple, ou bien en qualifier une personne ! À ce stade-là, où le présent n'existe plus du tout, il n'y a plus, justement, qu'à sortir les camisoles de force pour en garrotter tous les lefébvristes. Le lefébvriste, là, pour justifier son hérésie, vient de nous faire un exposé de l'... inexistentialisme !! Le problème, c'est qu'au lieu d'être un amusant divertissement, un délassement de l'esprit sans suite, un peu comme Xavier de Maistre avait écrit son Voyage autour de ma chambre, on se rend compte, atterré, que le lefébvriste professe très-sérieusement sa folie inexistentialiste quant à la Foi sur le point capital de l'infaillibilité de l'Église actuelle : "L'Église magistérielle actuelle inexiste, donc je suis", nous dit-il. Le lefébvriste est bel et bien théologiquement dans la folie d'inexister l'Église actuelle. Ses propos hélas ne nous font que par trop bien comprendre où il en est, à savoir de ne pas croire à l'Église du présent, celle que le Christ nous donne hic et nunc...
           
        Après ce dangereux vent de folie, il est bon de rappeler la vraie doctrine, catholique, concernant "le seul moyen de connaître infailliblement la vraie doctrine" comme dit le lefébvriste, ce SEUL moyen qui réside TOUT ENTIER dans le Magistère ecclésial actuel du... PRÉSENT. Qu'est-ce que le Magistère ecclésial du présent ? Le Magistère ecclésial du présent, c'est tout simplement le dernier en date, dont, sous peine d'anathème formel, je dois prendre acte et que je dois intégrer à ma croyance, parce que c'est lui qui la fait vivre. Il y a évidemment plusieurs acceptions au mot "présent", mais, in casu, l'acception la plus obvie, commune, est que ce que je dois considérer comme le Magistère du présent pour moi, c'est celui de "ma" génération ecclésiale, celui qui est le compagnon spirituel, l'ange gardien salvifique de ma courte vie terrestre au regard de la vie multiséculaire de l'Église militante, celui de "mon" pape, ou de son successeur s'il vient à mourir quand moi je vis toujours. Je suis né en 1957 ; si je meurs en 2038, le Magistère du présent sera pour moi compris entre ces deux fourchettes de dates. Ce n'est pas plus compliqué que cela.
           
        Voici donc ce que j'écrivais en 2011, dans le cadre de ma réfutation du Courrier de Rome n° 344.
           
        Mais pour clore ce débat magistralement, faisons de nouveau appel au grand théologien jésuite qu'était le P. Perrone, il va exposer on ne peut mieux cette vérité que le Magistère de l'Église du présent norme celui du passé quant à la Foi, et non l'inverse : "… Il nous reste à démontrer que notre thèse [= l'Immaculée-Conception] est fondée sur le sentiment perpétuel de l'Église. Mais ce sentiment se montre dans la manifestation PRÉSENTE de cette même Église. (...) LA FOI ACTUELLE DE L'ÉGLISE EST UN CRITERIUM TRÈS-CERTAIN POUR PROUVER QUELLE A ÉTÉ LA FOI DE L'ÉGLISE À TOUS LES SIÈCLES ; car l'Église ne peut pas changer sa foi, qu'elle tient de la Révélation divine. Il peut se faire, il est vrai, qu'à certains siècles cette foi ait été moins connue, moins nette pour les simples particuliers, mais elle a toujours été la même en soi, et elle n'a subi aucun changement, car, s'il en avait été ainsi, non seulement la promesse divine de l'infaillibilité perpétuelle péricliterait, mais il en serait même fait pour toujours. [Et d'ajouter, en note :] De là Bossuet, dans son ouv. intit. Défense de la tradition et des saints Pères, pose-t-il légitimement ce principe avec saint Augustin : "Pour juger des sentiments de l'antiquité, le quatrième et dernier principe de ce saint (Augustin) est que le sentiment unanime de toute l'Église PRÉSENTE en est la preuve ; en sorte que, connaissant ce qu'on croit dans le temps présent, on ne peut pas penser qu'on ait pu croire autrement dans les siècles passés" ; ce qu'il développe longuement dans les chapitres qui suivent ; œuv. édit. de Versailles, 1815, tom. V, p. 42" (Perrone, t. II, pp. 423-424 & note 1 de la p. 424).
           
        Je prends maintenant un autre passage tout aussi significatif sur la question d'inexister l'Église du présent, dans ma réfutation du lefébvrisme de 2011 :
           
        ... Le rédacteur du Courrier de Rome invoque maintenant pour sa thèse le fait que le Magistère ordinaire & universel du présent peut parfois contenir un exposé doctrinal plus imparfait que celui qui a été fait, sur le même sujet, dans le passé. Cette affirmation est-elle catholiquement fondée ? Approfondissons cela, qui est un sujet d'étude fort intéressant. Nous verrons tout-à-l'heure que chaque acte du Magistère d'enseignement ordinaire & universel actuel est couvert par l'infaillibilité, non en ce sens qu'il est définitif (justement, ce n'est pas son objet, celui-là, de définition, étant l'objet exclusif du Magistère extraordinaire), mais en ce sens qu'il ne saurait contenir la moindre erreur, hérésie, sur une doctrine donnée. Pour résumer lapidairement la question : un acte isolé du Magistère ordinaire & universel actuel ne dit pas TOUTE la vérité sur une doctrine donnée, mais il est capital de saisir qu'il ne peut RIEN dire contre la vérité de cette dite doctrine donnée. De plus, il est de Foi que l'enseignement isolé actuel est, sous la mouvance du Saint-Esprit, celui qui est le plus en adéquation avec le désir spirituel et le besoin salvifique des fidèles au moment où ils l'entendent de la bouche des "membres enseignants".
           
        Ceci étant bien rappelé, est-il possible d'admettre que l'acte isolé du Magistère ordinaire & universel actuel à un moment donné de la vie de l'Église militante, puisse ne pas être le plus parfait quant à son ordonnancement au désir spirituel des "membres enseignés" qui vivent au moment où cet acte d'enseignement leur est donné ? Il est absolument impossible de l'admettre. Ce serait supposer que le Saint-Esprit n'est pas "au courant" de ce qui convient exactement aux fils de l'Épouse du Christ à un moment particulier de l'Église militante.
           
        Prenons un exemple concret. Supposons un père de famille chrétien et son enfant. À 8 ans, cet enfant est témoin d'un vol dans un supermarché, là, juste devant lui, et son père est présent, et il se rend compte que son enfant l'a vu. Il est évident que, à ce moment, le père va faire un long et approfondi enseignement à son enfant sur la nature du vol, son caractère peccamineux, etc., car l'enfant en a pris conscience et doit être enseigné en profondeur. L'enfant grandit, puis, à 11 ans, au cours d'une simple promenade avec son père, il reparle évasivement de vol, sans y attacher d'importance, et pose quelques questions superficielles à son père ; le père alors, voyant le peu d'intérêt de son enfant, ne fera que des réponses courtes et peu profondes sur le vol. Donc, à 8 ans, le père aura donné à son enfant un enseignement approfondi sur le vol, et trois ans après, il ne lui donnera qu'un enseignement fragmenté et superficiel. Le lefébvriste va en conclure : "Vous voyez bien que l'enseignement du passé peut parfois être plus complet et plus riche que l'enseignement du présent". C'est parfaitement vrai dans l'absolu, on ne lui fait nulle réticence de le concéder, mais cela ne revient pas à dire que l'enfant de 11 ans a besoin, pour le salut de son âme, d'entendre l'enseignement approfondi que son père lui a donné quand il avait 8 ans.
           
        Ce qu'il faut bien saisir, c'est que l'acte isolé du Magistère actuel d'enseignement ÉPOUSE LE DÉSIR SPIRITUEL SOUS MOTION DIVINE DE L'UNIVERSALITÉ DES FIDÈLES AU MOMENT OÙ LES "MEMBRES ENSEIGNANTS" LE POSENT. Il est de Foi, de fide, qu'il est en adéquation parfaite avec lui. Si donc, sous la pure motion du Saint-Esprit, les fidèles ne sont pas dirigés vers l'approfondissement de tel point de doctrine, ledit Magistère actuel ne fera, toujours sous motion du Saint-Esprit, qu'un survol de la doctrine en question. Les Pères de Vatican 1er ont d'ailleurs clairement exprimé la chose pour les définitions de leur concile dont les propositions, disaient-ils, n'avaient en vue que de réfuter les erreurs présentes, et non de faire un exposé exhaustif ex professo. Alors, pour conclure, que penser de l'affirmation de notre auteur lefébvriste : "L'enseignement d'un Magistère antérieur [peut être] plus clair que l'enseignement d'un Magistère actuel" ? Elle est juste et licite, mais sous expresse réserve de bien comprendre que s'il en est ainsi, c'est parce que, sous motion du Saint Esprit, les fidèles du Magistère actuel n'ont pas besoin d'en entendre plus.
           
        Or, il appert de son exposé que le lefébvriste ne sait pas en rester là, qui est orthodoxe. À partir de ceci qui est licite, on le voit se laisser entraîner plus loin, beaucoup plus loin, hérétiquement trop loin, en affirmant ensuite, par un glissement très-vicieux vers l'hérésie, subreptice et plein de malice (inconsciente ? c'est à souhaiter...), que le lefébvriste voudrait insensible par amalgame : "On ne peut pas exclure dans l'absolu que, en temps de crise, les affirmations claires du passé puissent clarifier ou juger les affirmations ambiguës ou erronées d'un enseignement présent". Clarifier : oui ; juger : absolument non. Ambiguës : oui (et encore, en excluant que ladite ambiguïté pourrait recouvrir un sens qui serait favens haeresim) ; erronées : absolument non. Là, désolé d'avoir à le lui dire, on voit le lefébvriste revenir encore à sa vomissure hérétique de considérer que le Magistère du présent, non plus seulement "imparfait" comme il est orthodoxe de le dire mais "erroné" comme il est hétérodoxe d'en faire seulement la supposition, puisse avoir à être "réparé" par le Magistère du passé. On ne saurait supposer, en effet, qu'il y ait une seule fois à missionner le Magistère du passé pour réparer "les affirmations erronées d'un enseignement présent", sans attenter mortellement au droit divin du Magistère infaillible du présent, actuel. La Foi enseigne que le Magistère du passé peut certes complémenter accidentellement le Magistère du présent, mais jamais substantiellement, c'est-à-dire comme s'il manquait doctrinalement quelque chose au Magistère du présent pour être catholique. Le Magistère du passé, contrairement à ce que pense hérétiquement le lefébvriste, n'a nullement pouvoir et mandat divins de "juger" le Magistère du présent (on a vu que c'est exactement tout le contraire qui est vrai puisque l'acte de jugement est un acte vivant, que donc, seul le Magistère du... présent peut poser, mettant sous son jugement même le Magistère du... passé).
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
       
        Maintenant, quelques points annexes, qu'il me semble cependant important d'aborder avant de mettre le point final.
           
        À un endroit de son article, Vacant en reste à une confusion terminologique certaine quand il décrit l'objet différent des deux modes magistériels, extraordinaire dogmatique d'une part et ordinaire & universel d'autre part : "Or, il est une foule d’actes pontificaux qui se rapprochent plus ou moins, les uns des jugements solennels, les autres de l’enseignement quotidien, et, si l’on en dressait une liste complète, il serait impossible de marquer, dans cette liste, le point où le magistère ordinaire commence et celui où cessent les jugements solennels" (p. 31). L'abbé Gleize reprend sans réfléchir les obscurcissements de Vacant dans son article ("Mais il y a deux catégories de dogme : dogme de foi divine et catholique et dogme de foi divine et catholique définie" [comprenne qui pourra un tel brouillard-brouillon définitionnel !] ― Pour une juste réévaluation de Vatican II : la tradition et le magistère clairement définis, p. 4).
           
        Il ressort très-clairement de ce passage comme de quelques autres dans son texte, que Vacant ne sait pas bien définir ce qui différencie essentiellement l'objet du Magistère ordinaire & universel de l'objet du Magistère définitionnel. Il n'en faut pas vouloir à Vacant, il n'écrit, somme toute, que dix-sept ans seulement après le concile de Vatican 1er, en 1887, et la compréhension parfaite de ses énoncés fondamentaux n'est pas encore bien assimilé. Il reviendra à un bénédictin de Solesmes, Dom Paul Nau (1901-1984), déjà moult cité dans mon article, la gloire de l'avoir fait magistralement dans deux articles très-savants et d'une grande richesse, Le magistère pontifical ordinaire, lieu théologique, parues dans la Revue thomiste en 1956 et 1962. Dom Nau qui, soit dit en passant, a représenté son Père-Abbé Dom Prou à Vatican II et qui à Rome œuvrait pour le traditionnel Cætus Internationalis Patrum (il connut donc Mgr Lefebvre), bénéficie d'un recul du temps de plus de quatre-vingts ans après Vatican 1er et donc d'un apport plus grand du Saint-Esprit pour éclairer le dogme de l'infaillibilité magistérielle en Église. Il apporte dans ses deux articles des explications autrement lumineuses, qui permettent justement de bien délimiter les objets respectifs du Magistère ordinaire & universel et du Magistère extraordinaire, beaucoup mieux et clairement que ne le fait Vacant dans son article qui, certes, contient une excellente et magistrale doctrine générale sur le sujet, qui a de très-beaux passages comme celui qui inclut les simples "membres enseignés" que sont les fidèles, les prêtres, etc., dans les acteurs dynamiques et authentiques du Magistère ordinaire & universel (... pas besoin d'attendre la synodalité de François, exprimée de façon hétérodoxe, pour comprendre la place très-importante du "peuple de Dieu" dans l'expression ecclésiale du dogme !), mais dont il faut bien dire, après lecture, qu'il s'exprime de manière parfois obscure, absconse, son rédactionnel compliqué et parfois abstrus n'étant sûrement pas la qualité dominante de son article...
           
        Pour la première fois donc, quelques courtes années avant Vatican II, fut bien dégagé avec Dom Paul Nau le fondement substantiel des deux modes magistériels qui les différencie tous deux. Le moine bénédictin nous explique en des formules décisives et admirables, que le fondement substantiel du Magistère ordinaire & universel est l'enseignement doctrinal simple, non-achevé théologiquement, et qu'on a dangereusement appelé dans nos temps modernes, non-définitif, par opposition dialectique avec l'objet du Magistère extraordinaire qui, lui, a pour objet la définition dogmatique achevé théologiquement, que Dom Nau appelle une sententia finalis terminativa.
           
        Certains libéraux-modernistes voulaient soutenir qu'entre les verbes "définir" (qui regarde le Magistère extraordinaire) et "enseigner" (qui a trait au Magistère ordinaire & universel), il n'y a pas de différence substantielle, et que les deux verbes pourraient bien signifier la même chose. Dom Paul Nau en prit occasion pour bien rappeler, à partir des textes même de Vatican 1er, ce qui différencie substantiellement les deux objets des modes extraordinaire d'une part et ordinaire d'autre part, lisons-le : "Que l'acte du magistère ordinaire se présente comme distinct de la définition, le texte même de la Constitution Dei Filius le montre assez clairement. C'est en effet comme opposés l'un à l'autre qu'il introduit ces deux modes de présentations doctrinale : Sive solemni judicio, sive ordinario et universali magisterio. Mais les Pères ne se sont pas contentés de cette présentation négative. Parmi les nombreuses expressions employées par eux pour désigner les diverses formes que peut revêtir ce magistère [ordinaire], deux termes reviennent surtout dans la bouche des orateurs : Prædicatio et doctrina ; prædicat et docet. M. Caudron [l'objecteur à la pensée moderniste que Dom Paul Nau avait pris à bonne tâche de réfuter dans ses articles] pense qu'en leur sens générique, ils auraient aussi bien convenu aux définitions et aux jugements [réservés au mode extraordinaire de l'infaillibilité]. Quoiqu'il en soit de ce sens générique, ces expressions semblent bien employées ici dans le sens spécifique qu'elles ont toujours eu dans la tradition scolastique. De même que le judicium est l'acte propre du juge, de l'autorité qui prononce une sentence, la doctrina est l'acte spécifique elle aussi, du magisterium. (…) Démarche analytique, l'enseignement a pour but de faire connaître ce qui est contenu dans le principe d'une connaissance, dans la Révélation pour la connaissance de Foi, de «l'ex-poser», de «l'expliquer» pour le faire saisir à l'intelligence du disciple. Depuis les siècles, les prédicateurs apprenaient aux fidèles, comme une vérité contenue dans la Révélation, que Notre-Dame est montée au Ciel. Cette vérité, les théologiens la déduisaient de l'article de Foi à l'Incarnation et à la Maternité divine. Opération de synthèse au contraire, affirmant qu'une doctrine est réellement contenue dans son principe, le jugement achève la connaissance ou la proposition doctrinale par cette affirmation décisive : le 1er novembre 1950, Pie XII, revenant sur la doctrine couramment enseignée de l'Assomption de Notre-Dame, la confrontait avec son principe, la Révélation, pour définir que «c'est un dogme divinement révélé que Marie… a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste»" (…) De la seule affirmation qui constitue le jugement, on dira, à parler formellement, qu'elle est vraie ou fausse. De l'exposé, qui fait connaître le contenu de la Révélation, on s'exprimera plus rigoureusement en le déclarant fidèle : c'est l'expression qu'a retenue la constitution Pastor Aeternus : Ut fideliter exponerent" (Nau, 1962, pp. 364-367).
           
        Voilà pourquoi l'objet d'une définition extraordinaire est un dogme, quand l'objet du simple enseignement magistériel ordinaire & universel, est une doctrine, qu'il ne faut pas appeler dogme, comme le fait l'abbé Gleize, qui mélange là les torchons et les serviettes.
           
        ... Pourquoi ne pas oser une analogie qui, certes, comme toutes les analogies, sera boiteuse par quelque côté, mais qui aura l'avantage de donner une photo pratique de ce qu'est le Magistère en Église : l'analogie de l'Autorité parentale avec l'Infaillibilité ecclésiale.
           
        Cela peut aider à bien comprendre la différence entre l'enseignement simple et la définition dogmatique, c'est-à-dire entre le magistère ordinaire et celui extraordinaire, et surtout nous faire bien saisir que l'infaillibilité couvre autant l'un que l'autre. Lorsque les parents chrétiens ont à révéler la vérité de l'amour conjugal à l'enfant, ils ne lui diront pas "la vérité définitive" tout-de-suite, et de plus ils ne lui diront pas la même chose s'il pose question à sept, douze, ou seize ans ; cependant, à chacune de ces tranches d'âge, les parents conscients de leurs devoirs et fidèles aux bonnes mœurs chrétiennes, diront LA VÉRITÉ autant que l'enfant peut la comprendre, et ce sera là des vérités incomplètes, inchoatives, d'un Magistère ordinaire : ce qu'ils lui diront quand il a sept ans en évoquant par exemple la pollinisation naturelle des fleurs, etc., ne sera en rien un mensonge ni contraire à "la vérité définitive" qu'ils lui révèleront en une seule fois quand il sera en âge de l'entendre. Autrement dit, tout ce qu'ils lui diront à ces différents âges de sa vie, qui seront des vérités "non définitives" de leur magistère parental ordinaire, sera infailliblement ORDONNÉ à la vérité définitive, laquelle lui sera révélée en une seule fois uniquement lorsqu'il sera en âge de la comprendre, vérité définitive que, sur le plan doctrinal, on appelle une sententia finalis terminativa.
           
        Les relations entre les différents modes magistériels entre eux, sont aussi éclairées par cette analogie. En effet, la mère de famille a, on pourrait dire, l'exercice quotidien du "magistère ordinaire & universel" et tient le rôle du corpus des évêques, beaucoup plus que le père qui, quant à lui, a l'us du "magistère extraordinaire", c'est-à-dire prendre les grandes décisions dans le foyer chrétien, et tenant le rôle du pape. Lorsqu'un enfant a à obéir à la mère qui lui donne un ordre simple qui a trait au bon fonctionnement quotidien de la maison, et tous les jours cet ordre simple recommence ("Herménégilde, va acheter un pain d'une livre au boulanger !"), la nature de l'acte d'autorité est relativement inférieure seulement à celle d'un acte d'autorité posé par le père lorsqu'il prend, rarement, une grande décision donnant une nouvelle direction au foyer, infléchissant sa destinée, comme, par exemples, s'expatrier et changer de travail, faire changer d'école aux enfants, etc. Mais relativement seulement. Car notons avec soin que l'obéissance dûe par l'enfant à sa mère d'aller acheter un pain d'une livre est aussi stricte que celle qu'il doit à son père lorsqu'il prend la grande décision, "extraordinaire", de le faire changer d'école. C'est la même chose pour notre affaire : l'obéissance dûe aux actes émanant du Magistère ordinaire & universel en Église est aussi stricte que celle dûe aux actes émanant du Magistère extraordinaire… parce que tous les deux émanent aussi strictement l'un que l'autre de Dieu et sont fondés sur le droit divin, dont l'infaillibilité y attachée est le signe topique. De la même manière que l'autorité de la mère sur les enfants émane autant de Dieu, et à égalité, que celle du père de famille.
           
        Par ailleurs, ne manquons pas de noter avec soin comme le père et la mère n'ont pas l'exercice de leur autorité propre, extraordinaire et ordinaire, en séparé l'un par rapport à l'autre : bien au contraire du moindre clivage ou opposition entre eux, c'est un échange quotidien et permanent, un échange d'amour entre l'extraordinaire et l'ordinaire qui se perçoit plus encore, évidemment, en Église, on pourrait presque parler d'une circumincession de charité entre la mère et le père sur les décisions extraordinaires à prendre ou les simples ordres ordinaires à donner aux enfants. Et, par ailleurs, il n'est pas du tout exclu que le père donnât des ordres du… "magistère ordinaire" dans le foyer, et pas plus que la mère puisse exceptionnellement avoir à donner dûment un ordre du… "magistère extraordinaire", qui est une grande décision quant aux destinées du foyer, "rassemblée" avec son mari pour ce faire. Et vice-versa. Car l'un l'autre peuvent poser ces ordres ou décisions, ordinaires ou extraordinaires, ensemble ou en séparé. L'analogie peut encore être poussée plus loin : la mère comme le père, ou les deux ensemble, peuvent donner de simples conseils à l'enfant qui, sans être des ordres formels, lui indiquent la bonne direction pour sa vie, usant ainsi du… "magistère authentique". "Tu sais, Hermen', à ta place, je ferai ceci, je ferai cela, cela me semble être le bon choix pour toi dans cette situation où tu dois prendre une décision". Et l'enfant, là encore, s'il n'est pas tenu de suivre le conseil sous peine de péché grave, doit néanmoins le suivre s'il veut aller dans la bonne direction de sa vie, et il n'est pas sans péché que de ne pas le suivre. Etc.
           
        Mais j'en arrive maintenant à saint Vincent de Lérins. Le porte-plume théologique de la Fsspx en glose évidemment beaucoup dans son article À propos de saint Vincent de Lérins. Il n'a cependant pas assez retenu plusieurs choses importantes. Saint Vincent, on le sait, dans la crise arienne du Ve siècle, avait posé le premier ce principe, pour savoir ce que le catholique devait croire certainement : "Il faut croire certain ce qui a été toujours cru, par tous, et partout (quod ubique, quod semper, quod ab omnibus creditum est)", et les lefébvristes ont cru pouvoir en tirer toute leur théologie profondément hétérodoxe sur l'autorité du Magistère du passé par rapport à celui du présent, jusqu'à même annihiler ce dernier.
           
        Mais il est bon de rappeler que saint Vincent de Lérins était loin de dissocier hérétiquement le Magistère du présent de celui du passé, comme le fait le lefébvriste. C'est en effet bien à tort que le lefébvriste l'invoque comme un Père de l'Église qui aurait professé d'avoir recours au seul Magistère du passé à l'exclusion formelle de celui du présent, pour connaître de la Foi. D'autres textes qu'on lit de lui le prouvent : "Vincent de Lérins dit excellemment, dans son Livre des Instructions, n. 32 : «L'Église de Jésus-Christ est la gardienne soigneuse et attentive des dogmes qui lui ont été confiés ; elle n'y change jamais rien, elle n'en retranche rien, elle n'y ajoute rien, elle ne retranche pas les choses nécessaires, elle n'ajoute rien de superflu, elle ne perd pas ce qui lui appartient, elle n'usurpe pas ce qui appartient à autrui… Enfin, elle ne s'est jamais efforcée, dans les décrets de ses conciles, que de faire croire plus expressément ce que l'on croyait déjà simplement… Voilà, dis-je, ce qu'elle a TOUJOURS fait ; aussi, lorsqu'elle y a été poussée par les nouveautés des hérétiques, l'Église catholique, dans les décrets de ses conciles, n'a fait seulement que confier à l'Écriture, pour transmettre à la postérité, ce qu'elle avait y reçu par la Tradition seule»" (Perrone, t. 1, p. 310, note 1). Il est clair ici que saint Vincent de Lérins ne dissocie nullement la Tradition doctrinale ou Magistère du passé, de la profession de foi actuelle des Pères de l'Église d'une génération ecclésiale donnée, comme le lefébvriste trop pressé a cru pouvoir le déduire de son célèbre Commonitorium, s'appuyant à tort sur un cas d'école pensé par lui tout-à-fait… ex absurdo.
           
        C'est d'ailleurs parler par euphémisme, car la vérité, c'est que la formule lérinienne n'a jamais été considérée par l'Église comme le criterium premier et capital pour accéder à la Vérité. Perrone, dans sa Théologie dogmatique, a un passage où il réfute le fidèle qui voudrait connaître de la Foi par lui-même au moyen du principe lérinien, par ces termes : "Il ne faut pas oublier du reste que cette règle qu'enseigne Vincent n'est qu'un des criterium pour connaître la vérité catholique, mais qu'elle n'est pas le seul, et bien moins encore le principal moyen, le moyen suprême. Car l'enseignement perpétuel et toujours vivant de l'Église seule est tel [= c'est-à-dire le prêche du pape et des évêques de la génération ecclésiale du présent, veut dire le P. Perrone, en quoi consiste véritablement le Magistère ordinaire & universel] ; tous les autres lui sont soumis et en dépendent [… y compris, donc, le principe lérinien de Tradition…!]" (Perrone, t. VI, pp. 483-484).
           
        Pour finir sur l'aspect technique de mon travail, je dirai que, après beaucoup de lectures au fil de longues années, la plus belle formule que j'ai trouvée pour définir Vatican II sous le rapport de l'autorité magistérielle, est celle signée par un "rallié", l'abbé Christian Gouyaud, qui, sous le titre L'autorité du magistère actuel, a écrit dans La Nef n° 158 (2004) : "On peut donc dire que l'Église, à Vatican II, a usé d'une forme magistérielle extraordinaire (un concile œcuménique) pour un contenu ordinaire (le Concile s'étant abstenu de proposer des définitions dogmatiques infaillibles en bonne et due forme). Cette assemblée, constitutive d'«une communion en acte» des successeurs des apôtres avec le successeur de Pierre, mettait singulièrement en valeur l'aspect universel du magistère ordinaire". La forme de Vatican II fut bel et bien extraordinaire quand son contenu, son fond, fut, certes anormalement et contradictoirement aux usages, l'expression très-certaine du Magistère ordinaire & universel, infaillible de soi dès lors qu'il y eût enseignement simple de la Foi enté sur la Parole de Dieu, par une telle assemblée universelle autorisée (ce qui fut le cas, pour en rester là, de Dignitatis Humanæ Personæ). C'est singulièrement bien vu et tout aussi bien dit, cela rejoint d'ailleurs le propos judicieux de Mgr Ocariz, qui non moins magistralement, nous dit : "Le charisme de vérité et l'autorité magistérielle y furent [à Vatican II] certainement présents, au point que les refuser à l'ensemble de l'épiscopat réuni cum Petro et sub Petro pour apporter un enseignement à l'Église universelle, ce serait nier une partie de l'essence même de l'Église". Là aussi, on ne saurait mieux dire. Mais le Père Héris, o.p., affine encore la question en nous permettant de discerner ce qui est doté de l'infaillibilité magistérielle dans Vatican II et ce qui ne l'est pas : "Pour reconnaître les cas où l'infaillibilité de l'Église est engagée, il suffit de se rappeler que TOUTE doctrine enseignée universellement par les pasteurs chargés de conduire le troupeau du Christ, et donnée manifestement comme appartenant directement ou indirectement à la Révélation, est infaillible" (L'Église du Christ, Le Cerf 1930, pp. 44-45).
           
        C'est très-exactement le cas pour Dignitatis Humanæ Personæ, qui ose appuyer sa doctrine très-hérétique et même apostate sur la Parole de Dieu et la Révélation en trois endroits du très-exécrable et abominable décret ("Le Concile du Vatican déclare, en outre, que le droit à la liberté religieuse a son fondement dans la dignité même de la personne humaine telle que l'a fait connaître la Parole de Dieu et la raison elle-même" ― § 2 ; "Qui plus est, cette doctrine de la liberté [religieuse] a ses racines dans la révélation divine, ce qui, pour les chrétiens, est un titre de plus à lui être saintement fidèles [!!!]" ― § 9 ; "L'Église donc, fidèle à la vérité de l'Évangile, suit la voie qu'ont suivie le Christ et les Apôtres lorsqu'elle reconnaît le principe de la Liberté religieuse comme conforme à la dignité de l'homme et à la Révélation divine, et qu'elle encourage une telle liberté [!!!]. Cette doctrine, reçue du Christ et des Apôtres [!!!], elle l'a au cours des temps gardée et transmise" ― § 12)...
 
cerveau feminin
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
       
        Conclusion générale. ― Nous avons vu où mène l'hérésie monophysite adoptée par le lefébvriste : pour ne vouloir faire l'examen théologique de "la crise de l'Église" que par la doctrine inhérente à la nature divine de l'Épouse du Christ, on l'a vu aboutir, au fond du cul de sac, à une monstrueuse hérésie ecclésiologique : l'ecclesiovacantisme, nier en corps d'institution l'Église du présent, nier la génération ecclésiale de "membres enseignants" una cum le pape actuel vaticandeuse et post, dont pourtant, très-contradictoirement, il professe de bouche reconnaître la légitimité.
           
        ... Mais alors, où se situe la solution théologique véritable de "la crise de l'Église" ? Quelle est donc la Parole du Saint-Esprit pour l'Église de notre temps moderne ?
           
        Pour la saisir, il faut premièrement bien respecter humblement la Constitution divine de l'Église telle que l'a confectionnée Jésus-Christ Notre-Seigneur lorsqu'Il est venu "habiter parmi nous" il y a 2 000 ans, passer en courbant notre "hommerie" (Montaigne) sous les fourches caudines du Saint-Esprit. Je l'ai rappelé en commençant ces lignes, l'Église, c'est Jésus-Christ continué. Et Jésus-Christ est vrai Dieu, vrai homme, cependant une seule Personne. "La crise de l'Église" s'analyse et s'examine donc sous deux rapports, la nature divine et la nature humaine du Christ incarné ecclésialement. Seul le résultat de ce double examen fait en même temps et comparativement peut donc nous faire la révélation au sens fort de ce qu'est vraiment "la crise de l'Église".
           
        Faisons donc maintenant quant à nous, catholiques, l'examen de "la crise de l'Église" sous les deux rapports, divin et humain, où il doit être fait, en respectant le Mystère théandrique qui constitue l'Épouse du Christ, et le Saint-Esprit va tout-de-suite nous donner la solution.
           
        Premièrement, l'examen selon la nature divine de l'Église, doctrinal, nous révèle la présence d'hérésies dans les décrets de Vatican II.
           
        Secondement, l'examen selon la nature humaine de l'Église, hiérarchique, nous révèle la légitimité certaine des acteurs de Vatican II et la certitude qu'ils ont dûment posé des actes inhérents au Magistère ordinaire & universel, doté de l'infaillibilité, dans les décrets mêmes où gît l'hérésie constatée lors du premier examen.
           
        Ce que révèlent donc ces deux attendus dans la Lumière du Saint-Esprit, qu'on pourrait appeler le Dieu de l'Évidence, c'est donc que la CONTRADICTION est rentrée dans l'Église, le principe de non-contradiction a sauté ; l'Église vit depuis Vatican II un écartèlement au cœur de sa Constitution divine, qui ne peut qu'aboutir à sa mort dans son économie de salut actuelle, dite du Temps des nations et de Rome son centre.
           
        Et c'est pourquoi tout le monde, à l'instar des onze Apôtres sur douze fuyant la Passion du Christ, a voulu fuir ce simple constat, qui pourtant est si simple à faire, si absolument vrai et véridique.
           
        Les tradis, toutes mouvances confondues dont bien évidemment celle qui nous occupe présentement, celle lefébvriste, ont trop voulu une solution humainement logique à "la crise de l'Église", par laquelle le principe de non-contradiction reste debout (et eux avec), ils n'ont oublié qu'une chose, c'est à savoir qu'il peut exister une contradiction DANS l'Église sans que cela signifiât que "les portes de l'enfer ont prévalu contre l'Église" irrémédiablement. Leur raisonnement fondamental, et ils ont foncé dessus comme taureau devant chiffon rouge et s'y sont très-passionnellement empalés, est qu'il ne peut y avoir contradiction dans l'Église. C'est par ce raisonnement apparemment logique que le démon des ténèbres, maître en fausses lumières, a attrapé malignement leurs esprits et qu'il leur fait épouser son mensonge total quant à "la crise de l'Église".
           
        Or, il est faux de postuler qu'il ne peut pas y avoir de contradiction dans l'Église sans que celle-ci signifiât automatiquement la victoire absolue et définitive du mal. Il peut y avoir en effet une contradiction dans l'Église sans que cela signifiât que "les portes de l'enfer ont prévalu contre elle", c'est lorsque l'Église est mise par la Providence divine dans l'économie de la Passion du Christ, laquelle est théologiquement une contradiction, synonyme d'écartèlement sur la croix, l'Église restant cependant dans cet état l'Église, identiquement à elle-même, comme le Christ mis en croix était toujours le Christ. Et cela arrive en Église lorsque nous sommes à la fin des temps de tous les temps, car évidemment cette situation de contradiction qui, à terme, verra la mort de l'Église-Épouse dans son économie de salut actuelle dite du temps des nations et de Rome son centre, à l'instar de celle du Christ mourant au terme de sa Passion, ne peut qu'être celle de la crise dernière, juste avant les grands évènements apocalyptiques devant finir par la Parousie glorieuse de Jésus-Christ Notre-Seigneur.
           
        Saint Paul nous révèle fort bien cette contradiction lorsqu'il décrit, par ses mots lapidaires et tellement inspirés, l'économie de la Passion du Christ : "Considérez, en effet, Celui qui a supporté contre Lui-même de la part des pécheurs une telle contradiction, afin que vous ne vous lassiez point, l'âme découragée" (He XII, 3). Crampon traduit le mot par "une si grande contradiction", ce qui est beaucoup plus près du sens exact du texte. J'incline à penser, d'ailleurs, que la traduction française, qu'elle soit celle de la Vulgate ou de Crampon, tend à atténuer le sens du passage, qui signifie premièrement : une contradiction qu'à la vérité aucun être humain ne peut concevoir. Le fond de la pensée du grand Apôtre des nations est bien en effet de dire que la contradiction inhérente à la Passion du Christ dépasse toutes les limites de ce qui peut être humainement conçu (... c'est bien la raison pour laquelle, précisément, quasi personne parmi les catholiques contemporains ne comprend le fond de "la crise de l'Église" qui est "PASSION DE L'ÉGLISE", pas plus les modernes que les tradis du reste, et qui inclut donc cette même apocalyptique contradiction qui dépasse la faible capacité de la nature humaine...). Et effectivement, pour tâcher de bien le saisir, méditons à deux genoux comme Jésus, Dieu Transcendant incarné qui est en même temps le Roy des rois terrestres, fut moralement foulé aux pieds par absolument tous et chacun des pécheurs qui ont existé et qui existeront sur la terre, depuis le commencement du monde jusqu'à la consommation des siècles, d'une manière infinie et radicalement inimaginable. "Considérez celui qui a supporté contre sa personne une SI GRANDE CONTRADICTION de la part des pécheurs" (He XII, 3). C'est pourquoi d'ailleurs les âmes mystiques à qui Dieu fait la grâce de vivre la Passion, en reviennent complètement bouleversées, pour le peu qu'il leur est donné de la vivre...
           
        Or, cette même si grande contradiction inhérente à la Passion rédemptrice du Christ, dont la motivation spirituelle se trouve révélée par Jésus Lui-même le soir du Jeudi-Saint lorsqu'Il dit qu'Il nous a aimés in finem dilexi (ce qui, selon le mot latin, veut dire pas seulement : jusqu'à la fin de l'Amour, mais : jusqu'à l'excès de l'Amour), est revécue in concreto duro de nos jours par l'Église, puisque, justement, le fond de notre contemporaine "crise de l'Église", c'est qu'elle revit, en tant qu'Épouse mystique, la Passion et la mort sur la croix de son divin Époux, Jésus-Christ. La revivant, elle vit donc en même temps cette si grande contradiction qui dépasse l'entendement humain, contradiction sans coulpe ni faute pour l'acteur divin qui la vit et la meurt, le Saint des saints ou son Épouse mystique, l'Église.
           
        Ainsi donc, si on veut faire l'effort d'ôter le bandeau d'une logique humaine rationnalisée inspirée par Satan, qui aveugle nos yeux, le VRAI syllogisme, quant à "la crise de l'Église", est le suivant : Les papes de Vatican II et post sont certainement légitimes (majeure) ; les Décrets vaticandeux sont, pour la plupart, dotés de l'infaillibilité du Magistère ordinaire & universel (mineure) ; ils professent peu ou prou l'hérésie voire même l'apostasie radicale comme dans Dignitatis (conclusion).
           
        Là, nous sommes dans la "si grande contradiction", certes !, mais surtout et encore dans la vérité vraie en vérité de la situation de l'Église contemporaine... qui signifie formellement que l'Église vit depuis Vatican II dans l'économie de la Passion.
           
        Je vais bien sûr tout-de-suite expliquer comment ce syllogisme de "LA PASSION DE l'ÉGLISE" peut se compatibiliser avec la Foi sans qu'elle soit trouvée le moins du monde en défaut, mais auparavant remarquons bien que c'est cedit syllogisme que ne veut pas voir le tradi, et singulièrement le lefébvriste (comme d'ailleurs tout catholique de toute mouvance ecclésiale actuelle, quelle qu'elle soit, le lefébvriste n'est certes pas le seul à fuir "LA PASSION DE L'ÉGLISE", je ne lui en veux pas à lui particulièrement) : il devient fou furieux de devoir faire le constat véridique de l'hérésie ou plutôt de l'apostasie dans le Magistère infaillible des papes modernes certainement légitimes, ne comprenant pas que, par-là même, le démon l'empêche de vivre authentiquement et salvifiquement ce que le Saint-Esprit fait vivre à l'Église contemporaine : LA PASSION DU CHRIST.
           
        ... Mais, mais, mais, me dira-t-on immédiatement, comment ne pas conclure ipso-facto du syllogisme de "LA PASSION DE L'ÉGLISE" que vous venez d'énoncer, que "les portes de l'enfer ont prévalu contre elle"...?!?
           
        Tout simplement en comprenant qu'il existe deux sortes de contradictions dont l'Église, théoriquement, peut être victime : l'une, formelle, c'est-à-dire que cette contradiction serait mise en œuvre avec advertance du caractère hérétique formel contenue dans les Décrets peccamineux, par les acteurs agissant in Persona Ecclesiæ qui mettent en œuvre cette contradiction formelle, in casu, les Pères de Vatican II, et cette contradiction formelle, que la Foi nous enseigne être impossible, signifierait évidemment que "les portes de l'enfer auraient prévalu contre l'Église" ; l'autre contradiction, simplement matérielle, c'est-à-dire que les Pères de Vatican II ont certes promulgué in Persona Ecclesiæ leur hérésie et apostasie mais en toute inadvertance du caractère hérétique formel contenue dans les Décrets peccamineux (je le montre bien à propos de Benoît XVI, il me semble, dans la seconde partie de mon article écrit aux lendemains de sa mort, au lien suivant : https://www.eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/Que%20le%20pape%20Beno%C3%AEt%20XVI,%20MALGR%C3%89%20%20TOUT,%20repose%20en%20paix%20dans%20le%20Christ?Itemid=1). Or, si la première sorte de contradiction est bien entendu rigoureusement exclue (cela va sans dire), la seconde, qui signifie la mise de l'Église dans l'économie propre à la Passion, ne l'est pas du tout. Et c'est cela qu'il fallait comprendre...
           
        Ainsi donc, le syllogisme de "LA PASSION DE L'ÉGLISE" théologiquement bien désenveloppé et exposé à fond, et non plus brut de décoffrage comme je l'ai formulé plus haut, devient : Les papes de Vatican II et post sont certainement légitimes (majeure) ; les Décrets vaticandeux sont, pour la plupart, dotés de l'infaillibilité du Magistère ordinaire & universel (mineure) ; ils professent peu ou prou l'hérésie, voire même l'apostasie radicale comme dans Dignitatis, DE MANIÈRE SEULEMENT MATÉRIELLE, EN TOUTE INADVERTANCE, POUR FAIRE RENTRER L'ÉGLISE DANS L'ÉCONOMIE DE LA PASSION DU CHRIST, QUI MANIFESTE LA "SI GRANDE CONTRADICTION" (conclusion).
           
        Car c'est très-précisément de cette seconde manière seulement, c'est-à-dire par inadvertance totale, que les Pères de Vatican II ont promulgué leur hérésie et apostasie au concile moderne : c'est toute une génération ecclésiale donnée de "membres enseignants" una cum le pape actuel qui a été invinciblement aveuglée par une disposition particulière de la Providence divine sur la malice diabolique de leurs Décrets, aux fins surnaturelles supérieures de faire rentrer par elle l'Épouse du Christ, l'Église, dans l'économie de la Passion fondée sur la contradiction ou plutôt la "si grande contradiction" (He XII, 3).
           
        Il faut revenir à la Passion archétypale vécue par le Christ pour bien comprendre ce qui arrive à son Épouse mystique lorsque, elle aussi, a à vivre et mourir sa propre et personnelle Passion à la fin des fins de tous les Temps, c'est-à-dire pour comprendre ce qui nous arrive, à nous catholiques du temps présent, car c'est notre Église qui vit cette Passion terminale de nos jours. Je viens donc de poser, à la suite de saint Paul dans son épître aux Hébreux, que lorsque l'Église est mise par la Providence divine dans l'économie de la Passion, elle vit donc une "si grande contradiction", puis j'ai expliqué le sens à donner à cette contradiction, compatible avec la Foi. Saint Paul, dans une autre épître, celle aux Corinthiens, va nous révéler, dans une fulgurance transcendante dont il est coutumier, ce que signifie la "si grande contradiction". Il nous dit que lorsque l'acteur de la Passion (il parle du Christ bien sûr mais nous sommes fondés à transcrire pour l'Église), est mis dans la "si grande contradiction" simplement matérielle, cela signifie qu'Il est "fait péché pour le salut". C'est ce qu'il révèle aux Corinthiens : "Le Christ a été fait péché pour notre salut" (II Cor V, 21). C'est-à-dire qu'il nous révèle que la "si grande contradiction" est un péché matériel, à savoir sans aucune coulpe. Tout ce que l'on constate d'hérétique et d'apostat dans Vatican II relève donc du simple péché matériel sans coulpe endossé formellement par l'Église (car tous les Actes posés par les Pères du concile moderne le sont in Persona Ecclesiæ, sinon par le Magistère ordinaire & universel au moins par son Magistère authentique, l'abbé Gleize l'a bien vu), mettant ainsi l'Épouse du Christ dans l'économie de la Passion du Christ. Et c'est pourquoi, puisque être mis dans la "si grande contradiction" est en fait être "fait péché matériel" (au niveau du raisonnement, nous passons de la théologie dogmatique à la théologie morale), l'Ancien-Testament révèle que celui qui est ainsi soumis à l'économie de la Passion est donc réprouvé par la Justice de Dieu : "Celui qui est pendu au bois est maudit de Dieu" (Deut XXI, 23), il est de plus livré implacablement à "la puissance des ténèbres" (Lc XXII, 53). Et, inutile de faire un dessin surtout aux temps cala(très)miteux de François, c'est certes bien tout cela que vit et meurt à la fois notre Église contemporaine qui, depuis et par Vatican II, est "faite péché pour notre salut".
           
        Il y a donc deux écueils principaux à éviter soigneusement, devant cette situation de mise de l'Église dans l'économie de la Passion : soit nier qu'il y ait même une simple matière de péché sans coulpe dans les Actes de Vatican II, se tordant l'âme et l'esprit et, pardon, se masturbant la cervelle dans une malhonnêteté intellectuelle absolument insoutenable et insupportable à appeler blanc, le noir des décrets vaticandeux (c'est la fuite du "rallié"), soit au contraire trop voir le péché conciliaire, au point de transformer la simple matière du péché conciliaire en un péché formel, d'où il se déduirait bien sûr que "les portes de l'enfer auraient prévalu contre l'Église" si l'on en restait là, et alors, pour sortir de la contradiction, il n'y aurait plus, mais en péchant hérétiquement contre la règle prochaine de la Légitimité pontificale, qu'à nier la légitimité des Pères de Vatican II à commencer bien sûr par celle de Paul VI (c'est la fuite du sédévacantiste et du guérardien), ou encore, reconnaître de bouche seulement la légitimité des Pères de Vatican II, mais nier que cesdits Pères ont dûment mis en œuvre le Magistère ecclésial doté de l'infaillibilité à Vatican II (c'est la fuite du lefébvriste qui, derrière une très-fausse profession de bouche seulement de la légitimité des Pères de Vatican II, s'avère être bougrement ecclesiovacantiste).
           
        Le Christ a été fait péché pour notre salut ; l'Église contemporaine est faite péché pour notre salut. Notez bien que saint Paul nous plonge là en plein oxymore, c'est-à-dire dans une contradiction antinomique entre des termes mis ensemble (exemple : un jour nocturne), car le péché est en soi exclusivement générateur de damnation... et non de salut ! Mais justement, c'est là que se situe le nœud gordien de la question, un nœud de grande et salutaire mystique à dénouer, et qu'il faut bien comprendre.
           
        Pour que le Christ Rédempteur anéantisse le péché par sa Divinité, il faut nécessairement de toute nécessité théologique qu'il soit Lui-même "fait péché" RÉELLEMENT, et non simplement porter la malédiction du péché comme s'y sont frileusement cantonnés trop d'auteurs scolastiques. Or, la seule manière pour le Christ d'être "fait péché" sans que ne s'y trouve aucune espère de coulpe ou faute séparant de Dieu, tout en restant toujours le Saint des saints, est d'être "fait péché" simplement matériellement, le péché purement matériel excluant, en soi, dans le principe, toute coulpe. Et c'est exactement ce cas de figure qui arrive à notre Église à Vatican II : elle y est, elle aussi, à des fins co-Rédemptrices manifestes et évidentes, "faite péché pour notre salut".
           
        Car, faut-il le dire, saint Paul a raison de poser les choses de la Passion ainsi : l'acteur de la Passion, qu'il soit le Christ ou l'Église, est... "fait péché". Or, puisqu'il l'est pour notre salut, comme il le dit lapidairement si bien (c'était même la seule chose importante qu'il fallait qu'il dise après avoir dit que le Christ, et donc notre Église de fin des temps, est "fait péché", et c'est pourquoi, très-inspiré du Saint-Esprit, il le dit), alors, il ne peut être fait péché que d'une manière simplement matérielle, c'est-à-dire sans aucune coulpe ni advertance de la malice contenue dans le péché.
           
        Et c'est donc ce qui arrive à notre Église, depuis Vatican II (pour faire court et même extrêmement court !, car en fait il faut remonter au Concordat napoléonien si l'on veut avoir devant les yeux toute la genèse de "la crise de l'Église" et son péché originel, l'Église étant d'abord faite péché au niveau des Mœurs par le Concordat, puis, quelqu'un siècle et demi plus tard, les Mœurs corrompues ayant occultement corrompues la Foi, elle sera faite péché au niveau de la Foi elle-même, et ce sera bien sûr Vatican II qui l'enregistrera ; on lira avec grand'intérêt, si l'on aime la vérité intégrale et complète, mes deux derniers articles ; cf., pour le premier d'entre eux, au lien suivant : https://www.eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/coup-d-il-profond-sur-lactu-qui-buzze-et-le-buzz-de-lactu-invalidit-de-la-destitution-de-mgr-strickland-par-fran-ois-comme-de-celle-des-82-v-ques-fran-ais-par-pie-vii-lors-du-concordat-napol-onien-d-fense-des-v-ques-r-clamants-?Itemid=1 ― Une chose est d'ailleurs à remarquer soigneusement, c'est que le péché de "la crise de l'Église" se commet exactement de la même manière que celui originel d'Adam et Ève : d'abord, par les Mœurs, que représente la femme, Ève, puis ensuite, par la Foi, que représente l'homme, Adam) : l'Église, par les Décrets hérétiques voire apostats de Vatican II, éminemment celui de la Liberté religieuse, est faite péché POUR NOTRE SALUT, car les Pères de Vatican II à commencer par Paul VI ont promulgué cesdits Décrets peccamineux en toute inadvertance de la malice y contenue, complètement aveuglés sur cela par une disposition particulière de la Providence divine, Jupiter rend fous ceux qu'il veut perdre, quos vult perdere Jupiter dementat (non d'une perdition éternelle, mais seulement temporelle, c'est ainsi qu'Il a "perdu" son Fils sur la Croix, ce qui Lui a arraché ce terrible cri de désespérance ― et non de désespoir, comme l'avait voulu Luther ―, Eli, Eli, lamma sabachtani !).
           
        ... C'est dur à comprendre ? Certes, cela dépasse complètement l'humain, et si l'on ne dépasse pas ce stade (et rappelons-nous que onze Apôtres sur douze ne le purent point du tout, dépasser ce stade humain, lors de la Passion du Christ ; on ne saurait donc s'étonner que tous les cathos de nos jours ou quasi, fuient eux aussi par le moyen des théories les plus absurdes et folles, les plus hérétiques et impies, "LA PASSION DE L'ÉGLISE"...), on ne peut pas comprendre la Passion, ni celle archétypale du Christ ni non plus celle, actuelle, de son Épouse mystique, l'Église, qui la réplique de nos jours on pourrait dire en décalcomanie. Mais il faut comprendre humblement d'avoir à s'y soumettre, à cette économie de la Passion, si l'on veut goûter le fruit du salut, c'est seulement ainsi, en s'y soumettant, qu'on peut bénéficier des fruits de la Rédemption, et, quant à notre "crise de l'Église", des fruits de la co-Rédemption en cours...
           
        ... Vous ne pouvez pas le comprendre ?, et donc prenez la décision de ne pas vouloir le comprendre ?, pas vouloir croire que le sens profond de "la crise de l'Église" contemporaine est qu'elle vit la Passion du Christ jusqu'à la mort, usque ad mortem ? Je ne saurais en être surpris ni m'en offusquer, car le (petit) disciple que je suis n'est pas au-dessus du Maître. Hélas ! La nature de l'homme est ainsi faite qu'il fuit naturellement la Passion, même quand elle est divinement rédemptrice, ou ecclésialement co-rédemptrice comme de nos jours. Quand le Christ doit vivre Sa Passion et qu'Il la prophétise clairement à ses Apôtres, l'homme, dans les Apôtres, dit qu'il "ne comprend rien à cela". Or, pourtant, le Christ la leur annonce en termes simples, faciles à comprendre, absolument non-équivoques, au surplus Sa Passion était déjà révélée dans les écrits inspirés des prophètes de Yahweh que connaissaient fort bien les Apôtres, auxquels, d'ailleurs, Jésus les renvoie explicitement ("Ensuite, Jésus prit à part les douze, et leur dit : Voici que nous montons à Jérusalem, et tout ce qui a été écrit par les prophètes au sujet du Fils de l'homme s'accomplira. Car Il sera livré aux gentils, et on se moquera de Lui, et on Le flagellera, et on crachera sur Lui ; et après qu'on L'aura flagellé, on Le fera mourir ; et le troisième jour, Il ressuscitera. Mais ils ne comprirent rien à cela ; ce langage leur était caché, et ils ne saisissaient point ce qui était dit" ― Lc XVIII, 31-34 ; Luc, d'ailleurs, affine encore plus la question, en précisant dès les premiers chapitres de son Évangile, preuve soit dit en passant que Jésus avait annoncé sa Passion à ses Apôtres dès le début de sa mission publique, que "... ils ne comprenaient pas cette parole [prédisant sa Passion], et elle était voilée pour eux, de sorte qu'ils n'en avaient pas le sens ; et ils craignaient de L'interroger à ce sujet" ― Lc IX, 45).
           
        Convenons que Jésus, pourtant, la leur disait on ne peut plus clairement, cette parole de sa Passion ! En soi, donc, il n'y avait pas à... ne pas comprendre ! Il y avait juste à entendre le sens obvie, simple et non-équivoque, des mots prononcés par Jésus... Mais les Apôtres ne le purent pas, et je ne saurai me montrer surpris que la plupart de ceux qui lisent mon exposé sur "LA PASSION DE L'ÉGLISE" ne le puissent point non plus. En fait, c'est la chose en elle-même que les Apôtres ne pouvaient admettre, accepter, représentant pour lors tous les hommes dans ce refus de conscientiser la Passion. Et en effet, la Passion est tellement insupportable à l'homme, tellement contre sa nature, qu'il la rejette instinctivement, sans même y réfléchir consciemment : elle est vraiment extra-humaine, j'allais dire... extra-terrestre. Il faut d'ailleurs noter soigneusement que même la très-sainte Humanité du Christ a voulu la rejeter dans un premier mouvement, lequel premier mouvement n'est donc en soi entaché, le Christ étant parfaitement saint, d'aucune espèce de coulpe, aucun péché ("Père, s'il se peut, que ce Calice s'éloigne de Moi..."). Il ne l'a acceptée ("... cependant, non ma Volonté mais la Vôtre" ― Matth XXVI, 39), qu'après être passé par une effrayante suée de sang de tout son Corps, une hématidrose comme s'expriment les spécialistes, c'est-à-dire une sorte d'explosion interne de tout le micro-tissu sanguin sous-cutané, sous le coup d'une émotion extrêmement forte et violente, capable de faire mourir celui qui l'éprouve, un véritable tsunami métabolique, une révolte universelle irrépressible de tout le corps (certains spirituels considèrent d'ailleurs, à très-juste titre, l'Agonie du Christ au jardin des Oliviers comme une première mort : et il est parfaitement vrai que le Christ serait effectivement mort sur-le-champ s'Il n'avait été physiquement soutenu et conforté par l'ange l'assistant alors).
           
        Alors, si le Christ Lui-même ne put faire comprendre et admettre à ses Apôtres par des mots clairs et simples, dénués de toute ambiguïté, la Passion, comment pourrais-je prétendre, moi petit disciple, être mieux compris de mon prochain, lorsque je lui explique que l'Église vit en ce moment la Passion ?, tâchant pourtant le plus que je peux moi aussi, à la suite du divin Maître, d'employer pour ce faire les mots les plus simples, les plus clairs...? Je ne suis donc nullement étonné de la non-compréhension de la plupart de ceux qui me lisent, cependant que je leur dis, comme sainte Bernadette à qui lui jetait à la figure qu'il ne croyait pas aux Apparitions de Lourdes : "Je ne suis pas chargé de vous le faire croire, mais de vous le dire".
           
        ... Mais je vais m'arrêter là, dans l'exposé de "LA PASSION DE L'ÉGLISE", car je me rends compte que si je continue, je vais marcher sur les brisées de mon exposé de fond, mis sur mon site au lien suivant, que j'invite fort mon lecteur catholique à bien lire, surtout s'il est lefébvriste, parce qu'il est le seul à expliquer VRAIMENT la vraie situation de l'Église contemporaine et à en apporter la solution véritable, autant sur le plan théologique que, surtout, pour la conduite et la direction spirituelle de nos âmes dans cette via crucis qui est la nôtre (il serait tout-de-même bien lamentable que les tradis ne comprennent pas ce qu'un évêque moderne persécuté a compris, j'ai bien l'honneur chrétien de citer Mgr Joseph Strickland, invalidement destitué par le pape François : "... Je veux vous dire ceci à tous aujourd'hui : ne quittez jamais, jamais, jamais l'Église ! Elle est l'Épouse du Christ ! Elle est en train de vivre sa Passion, et vous devez vous résoudre à vous tenir résolument à la croix !"Lettre ouverte aux fidèles, 27 novembre 2023) : https://www.eglise-la-crise.fr/index.php/fr/13-la-passion-de-l-eglise/7-la-passion-de-l-eglise-2.
 
        Je vais terminer mon article par une boutade. Je ne crois pas aux lefébvristes rassemblés, mais je crois aux lefébvristes dispersés ! 
 
        C'est-à-dire je ne crois pas à la pensée lefébvriste sur "la crise de l'Église" partagée et admise par tous les évêques et prêtres de leur Institut, au moins par défaut et passivement, mais je crois au bon travail surnaturel qu'ils font, chaque clerc pris individuellement, isolément, près des fidèles et par rapport à l'Église Universelle. En effet, il faut quand même bien prendre acte que c'est grâce à Mgr Lefebvre et à la Fsspx que tout le monde, depuis "l'été chaud 1976", peut voir, s'il veut, que l'Église est rentrée dans sa Passion depuis Vatican II. Sans lui, sans la Fsspx, nous serions tous arrivés au règne de l'Antéchrist-personne, qui finira "la crise de l'Église" de manière apocalyptique, sans nous en rendre compte le moins du monde, ce qui aurait été très-préjudiciable pour le salus animarum... Et justement, il serait bien bon que les lefébvristes en prennent eux-même conscience, que l'Église vit désormais dans l'économie de la Passion du Christ usque ad mortem, parce que pour l'instant ils n'en prennent pas conscience, c'est-à-dire qu'ils aillent jusqu'au bout du bonum certamen certavi, puisque c'est par eux que cette grâce de conscientiser "LA PASSION DE L'ÉGLISE" a été donnée au monde !
 
        Quelle chose lamentable si ceux par qui la grâce a été donnée universellement aux âmes n'en profitaient pas eux-mêmes !!
           
cerveau feminin   
Théologie de "la crise de l'Église"
selon la thèse lefébvriste.....
       
        Ô grand et bon saint Joseph, Patron de l'Église Universelle, priez le Bon Dieu et la très-sainte Vierge Marie pour tous les lefébvristes, évêques, prêtres et fidèles, priez la Mère et l'Enfant pour ceux qui liront avec bon esprit mes présentes lignes dénonçant leur hétérodoxie quant à leur positionnement théologique dans "la crise de l'Église" (et même pour ceux qui les liront avec mauvais esprit), et bien sûr, priez pour moi aussi également, petit avorton de prophète !
 
En la grande fête de Saint Joseph,
Patron de l'Église Universelle,
Ce 19 mars 2024.
Vincent Morlier,
Écrivain catholique.
 
 
Saint Joseph
Saint Joseph
(Guido Reni, 1635)
 
 
19-03-2024 09:48:00
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