Coup d'œil profond sur l'actu qui buzze et le buzz de l'actu
(INVALIDITÉ de la destitution de Mgr Strickland par François...
comme de celle des 82 évêques français par Pie VII
lors du Concordat napoléonien...!
― Défense des évêques Réclamants)
 
 
           
           
À Messeigneurs
Louis-Charles & Jean-Baptiste
du Plessis d'Argentré,
Évêques glorieusement Réclamants,
dont le bien-fond familial breton est
ma commune... Argentré-du-Plessis.
 
Blason du Plessis dArgentré2               
 
        Il est très-important pour le catholique actuel d'activer et tisonner sans cesse sa Foi, de la mettre sans relâche en œuvre avec vigueur et énergie, pour qu'elle triomphe victorieusement tous les jours sur les faits de l'actualité qui viennent, eux aussi sans cesse, surtout ceux ecclésiaux, l'agresser dans son âme aux fins évidentes de l'y faire mourir. La Foi en Jésus-Christ mort et ressuscité, la Foi dans son Épouse-Église très-sainte, doit toujours rester victorieuse en nous. C'est un exercice spirituel, ou plutôt un combat à mort incessant dans l'arène, que le catho de nos jours doit mener sans jamais se lasser mais tout au contraire en saisissant le taureau par les cornes pour toujours vaincre. Cela a pour effet non seulement de nous faire garder la Foi véritable jusqu'à la fin, assurance de notre salut éternel, mais de l'aguerrir et la rendre de plus en plus forte, corsetée de fer contre le mysterium iniquitatis qui, autrement, la ferait tôt ou tard mourir dans l'âme si ce bon combat n'était mené. C'est un combat à mort et sans merci, qui ne vainc pas sera vaincu, que Jésus a mené avant nous contre les pharisiens et les anciens du peuple juif, quand bien même, quant à Lui, évidemment, Il n'avait pas besoin de mener ce combat spirituel pour garder la grâce divine de son Père, étant le Saint des saints et Dieu Lui-même.
           
        C'est à ce prix que nous pouvons connaître dès ici-bas et maintenant, à l'instar des martyrs, la joie intérieure suréminente et pleine de gloire divine que Jésus-Christ n'a jamais manqué de posséder lors même qu'il Lui fallait vivre et mourir sa terrible et affreuse Passion, selon qu'Il le révéla à ses Apôtres le soir du Jeudi-Saint : "Je vous ai dit ces choses, afin que Ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite. (...) Mais maintenant Je viens à Vous [ô Père saint, par la Passion qui va commencer pour Moi], et Je dis ces choses dans le monde, afin qu'ils [mes Apôtres] aient Ma joie complète en eux-mêmes" (Jn XV, 11 & XVII, 13). Jésus, en effet, prononçait ces Paroles de joie quelque très-court moment seulement avant de souffrir la mâlemort mystique, une agonie morale épouvantable dans la grotte de Gethsémani, jusqu'à en suer Son sang : "Mon âme est triste jusqu'à la mort" (Matth XXVI, 38). Cela nous enseigne que dans cette "crise de l'Église" atroce que nous vivons, qui réplique en décalcomanie la Passion du Christ puisqu'elle est "PASSION DE L'ÉGLISE", nous pouvons, nous aussi, si nous faisons sans cesse, en combattants infatigables, triompher la Foi dans nos âmes sur toute contradiction prétendument mortelle mais en réalité inconsistante et passagère, connaître cette joie et cette paix glorieuses et divines qui dépassent tout sentiment, dont l'âme du Christ était inhabitée jusque dans sa Passion...
           
        C'est dans cet esprit de triomphe surnaturel invincible du Bien sur le mal, alors même que, ecclésialement, de nos jours, nous sommes tous, au for externe, "foulés aux pieds par la Bête" (Dan VII, 25), que je vous livre maintenant, chers amis catholiques fidèles à votre Foi, le fruit de mon combat spirituel de ces derniers mois, interpellé voire pris au collet par certains faits qui buzzent dans l'actu à qui mieux mieux pour prétendument contredire la Foi et la renverser sans merci.
 
Jacob Angel Delacroix 
Lutte de Jacob avec l'Ange (Delacroix)
 
        Le principal fait ecclésial en montre spectaculaire qui interpelle vigoureusement ma Foi, est en soi tout positif quant à lui. C'est la magnifique figure d'un saint évêque de l'Église moderne actuelle, Mgr Joseph Strickland (à laquelle figure de saint pontife du Seigneur, on peut joindre aussi celle du cardinal chinois, Joseph Zen, vieux par l'âge mais si jeune d'âme, pareillement issu de l'Église moderne). Tout le monde connaît son histoire, et il est bien inutile que je rappelle ici que le plus clair de ce qui a motivé sa destitution épiscopale par le pape François, est qu'il est non seulement catholique ("curé mais catholique", comme disait l'abbé Sulmont !), mais qu'il l'est... saintement et héroïquement, jusqu'à pouvoir mériter la palme du martyre.
           
        Or, pour notre Foi, il y a là une toute première très-grande leçon à retenir de ce fait ecclésial bougrement aberrant, je n'ai cependant vu personne y réfléchir : c'est tout simplement qu'un fidèle catholique formé dans le giron de l'Église moderne pendant toute sa vie, de l'enfance à l'épiscopat, puisse... devenir fervent voire saint, estimer la Tradition, tant celle doctrinale que liturgique, enfin mener vraiment dans sa vie le saint combat spirituel, le bonum certamen paulinien ! Ce qui signifie que l'Église Universelle actuelle dont François est le pape crucificateur est donc bien encore assistée par le Saint-Esprit puisqu'elle peut donner et donne effectivement la grâce de la sainteté à ses membres qui la désirent ardemment et sincèrement. Comment, en effet, autrement, si l'on voyait "la crise de l'Église" avec la télé en noir et blanc des années 60, les bons d'un côté (tradi) les méchants de l'autre côté (moderne), pourrait-il bien surgir de cette Église contemporaine pourtant bel et bien abominablement "faite péché pour notre salut" (II Cor V, 21), des géants de sainteté à la Foi pure, vraie, forte et innocente, comme Mgr Strickland, n'hésitant pas à aller avec force d'âme jusqu'au sacrifice personnel, vivant authentiquement de Jésus-Christ crucifié ?, ainsi qu'on le constate presque interloqué par les messages si édifiants, d'une Foi vive, humble, simple et ardente, presque incroyable, adressés aux fidèles par cet évêque américain se mouvant dans le giron de l'Église moderne depuis qu'il est prêtre, sans jamais rejoindre quelque mouvance tradi que ce soit...??
           
        C'est une très-belle et excellentissime première leçon que Mgr Strickland, sûrement sans s'en rendre compte, nous donne là, elle nous aide à mieux comprendre "LA PASSION DE L'ÉGLISE" en évitant et expurgeant soigneusement de notre âme tout pharisaïsme intégriste. Je viens d'écrire une nouvelle fois que l'Église, vivant dans sa période moderne sa Passion propre et personnelle, est "faite péché pour notre salut". Cela veut dire qu'elle est faite péché simplement matériel et sans coulpe aucune, en toute innocence. C'est bien pourquoi justement ses membres, d'une manière générale, en ce compris ceux qui sont les plus élevés dans l'échelle hiérarchique, n'ont pas la moindre conscience et advertance de ce "être fait péché" ecclésial et peuvent donc y trouver la grâce de la sainteté véritable, ce que j'ai montré dans plusieurs de mes précédents articles (très-notamment, par exemple, à propos du pape Benoît XVI, dans l'article écrit après sa mort, cf. https://eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/Que%20le%20pape%20Beno%C3%AEt%20XVI,%20MALGR%C3%89%20%20TOUT,%20repose%20en%20paix%20dans%20le%20Christ?Itemid=1), un péché simplement matériel que par ailleurs l'Église moderne vit non seulement depuis Vatican II mais bien avant, beaucoup avant, depuis le Concordat napoléonien comme nous allons le voir tout-de-suite, là aussi de manière éclatante.
           
        Quoiqu'étant faite péché, l'Église moderne qui est aussi Universelle n'en garde pas moins, en effet, la Note de sainteté (car elle est faite péché pour notre salut, donc dans une mission immaculée de co-Rédemption que la Providence de Dieu lui impartit, vivant ainsi l'économie spécifique de la Passion), Note de sainteté qu'elle peut donc, comme en tous temps ecclésiaux ordinaires, transmettre de par le Saint-Esprit à ses membres aspirant sincèrement à la perfection chrétienne. Il ne faudrait pas s'imaginer en effet que cette Note de sainteté inhérente à l'Épouse du Christ est désormais le seul apanage des morceaux d'Église tradis, elle réside autant, et à égalité, dans le grand morceau de l'Église moderne, bien entendu à la discrétion et saint vouloir d'en user de la part des membres respectifs de cesdits morceaux d'Église, qu'ils soient tradis ou modernes. Quant à l'Église moderne, Mgr Joseph Strickland en est donc, à la vérité, une preuve merveilleuse et éclatante, un témoin des plus édifiants et aussi, des plus surprenants. On voit certes d'autres évêques et cardinaux post-vaticandeux se lever dans l'Église actuelle pour défendre la vraie Foi, et il est important de bien remarquer qu'ils le font tous non pas à partir d'une conversion au traditionalisme mais tout simplement à partir de la grâce du Saint-Esprit qu'ils ont puisée dans leur morceau d'Église moderne, car elle y reste encore et toujours, mais il faut reconnaître qu'ils n'ont pas cette héroïcité pure et forte de témoin de la Foi, étymologiquement martyr, qu'on voit, édifié, dans Mgr Joseph Strickland...
           
        ... Prions pour que le Bon Dieu soutienne dans sa grande épreuve actuelle ce saint prélat (dont il est bon de noter qu'il fut sacré évêque par le pape Benoît XVI), par laquelle il lui est désormais donné la meilleure et plus grande récompense, celle du Juste persécuté, à savoir d'être ecclésialement crucifié. Comme Jésus-Christ le fut il y a 2 000 ans par l'église synagogale-mosaïque, au mont Golgotha qui se situait en-dehors des murailles de Jérusalem, signe formel de Son excommunication religieuse.
 
        Jésus, en effet, ayons bien garde de l'oublier, fut le premier excommunié par l'Église...................
 
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Mgr Joseph Strickland, évêque de Tyler (USA)
 
        Concernant Mgr Strickland, j'ai lu des choses bien surprenantes ces derniers jours, mais qui vont nous permettre de dégager une autre leçon extrêmement grave et importante, et de pénétrer beaucoup plus avant dans la profondeur et la vérité des choses de "LA PASSION DE L'ÉGLISE".
           
        Certains clercs et prélats qui ont réagi à l'annonce de la destitution de Mgr Strickland par François, non seulement ont dénié toute raison canonique valable à cette destitution, et c'est juste l'évidence catholique des choses de dire que ce très-édifiant évêque n'a commis aucune vraie faute la justifiant, mais ont été jusqu'à connoter d'anormale la destitution elle-même. Car en fait il n'y a pas eu de procès canonique où l'accusé puisse présenter juridiquement sa défense, et pas plus n'y a-t-il eu un jugement ecclésiastique formel, il n'y a eu qu'une décision motu proprio du pape sans procès ni possibilité de faire appel, suite à une visite apostolique complètement hypocrite de son diocèse, scandaleusement tendancieuse et pro-bergoglienne. Celui qui a le mieux exprimé la question est Mgr Rob Mutsaerts, évêque auxiliaire de Bois-le-Duc aux Pays-Bas (... autre exemplaire d'évêque de l'Église moderne, soit dit en passant, qui, lui aussi, a néanmoins trouvé dans son sacerdoce issu de cette dite Église la grâce du Saint-Esprit de s'appuyer sur la Tradition et de la défendre avec vigueur...). Mais laissons cet évêque néerlandais nous dire son profond scandale quant à la procédure, ou bien plutôt absence de procédure, de destitution de Mgr Strickland : "Il est extrêmement inhabituel d'être privé d'une procédure canonique. Ce sont des méthodes que l'on pourrait s'attendre à voir en Corée du Nord ou à Rome à l'époque de Néron". Plus loin, il souligne à juste titre : "Aucune accusation spécifique n'a été portée [contre Mgr Strickland, qui] n'a même pas eu l'occasion d'être entendu". Mgr Mutsaerts s'est particulièrement indigné de l'absence de recours canonique ouvert à son frère évêque : "Ce n'est pas la première fois, note-t-il, que le pape François impose personnellement une telle sanction, en tant qu'autorité suprême de l'Église. Privant ainsi son destinataire de toute forme d'«appel à la défense». (...) Le pape étant la plus haute autorité, aucun appel ou défense n'est possible. Une procédure canonique s'imposerait pourtant" (Cf. https://www.lifesitenews.com/fr/blogs/le-pape-francis-a-eu-tort-de-destituer-leveque-strickland-sans-appel/). 
           
        Cette réflexion de Mgr Mutsaerts va certes dans le bon sens, il a au moins le grand mérite de lever le lièvre (il est au reste bien le seul à le faire), mais c'est cependant mal formuler et poser le problème. La vraie grande question qui se pose en l'occurrence est en effet, premièrement et en avant de toute autre, celle-ci : Le pape a-t-il le droit et le pouvoir, théologiquement et canoniquement, de destituer un évêque légitimement intronisé dans son diocèse sans aucun procès canonique, uniquement par voie de motu proprio appuyé sur la plénitude universelle de son pouvoir pontifical...?
           
        Or, je vais en faire la démonstration théologique tout-à-l'heure, la réponse à la question est formellement NON. Le pape n'en a, de droit divin, ni le droit ni le pouvoir. Une prétendue procédure de destitution par le pape d'un évêque légitimement intronisé dans son diocèse, sans aucun procès canonique en bonne et due forme près la cour de Rome, est, dans le principe de droit divin de la chose, formellement INVALIDE ; quelque soit par ailleurs le motif, non-fondé ou même fondé, de cette destitution. Dire donc qu'une telle procédure est seulement "inhabituelle", comme le fait Mgr Mutsaerts, c'est maladroitement et surtout inexactement affirmer implicitement qu'elle serait valide, quoiqu'étant cependant à ranger dans la catégorie "exception confirmant la règle générale en la matière", ce qui est faux. La vérité est toute autre : il est rigoureusement impossible de qualifier une telle procédure, ou plus exactement dit une telle absence de procédure, de rare, inhabituel, mais qui pourrait cependant arriver, par conséquent être valide, sans commettre ipso-facto un attentat mortel contre la Constitution divine de l'Église telle que le Christ l'a confectionnée quant à l'Ordre épiscopal, je vais bien l'expliquer tout-à-l'heure.
           
        Parvenu ici dans mon discours, je donnerai ce grave avertissement. Il est vraiment grand'temps que les catholiques actuels, qu'ils soient d'ailleurs modernes ou tradis, sortent de l'engourdissement cataleptique, de l'aveuglement spirituel où ils croupissent quasi tous, peu ou prou, depuis de si longues décennies, depuis de si nombreux et calamiteux lustres, et même très-miteux, bien avant Vatican II. Qu'ils veuillent bien enfin tirer le bandeau d'aveuglement qu'ils ont sur les yeux, afin de ne pas ressembler à l'insensé "qui regarde dans un miroir son visage naturel, et qui, après s'être regardé, s'en va, et oublie aussitôt quel il était" (Jac I, 23-24).
           
        Ne se souviennent-ils donc pas que ce problème de destitutions épiscopales iniques et invalides par un pape est terriblement déjà arrivé dans l'Église lors du Concordat napoléonien il y a plus de deux siècles à présent ?, que ce fut le tout premier acte pontifical très-peccamineux qui ouvrit ainsi la porte à "la puissance des ténèbres" (Lc XXII, 53) pour subvertir et investir l'Église, d'abord celle de France puis ensuite celles du monde entier ?, générant et accouchant dans la suite des temps, de Charybde en Scylla, "la crise de l'Église" dans sa phase terminale, c'est-à-dire son épisode vaticandeux final ? Veulent-ils donc toujours continuer à ressembler jusqu'à leur mort à la tête de linotte sans cervelle de l'épître de saint Jacques qui, à peine ayant vu, oublie ce qu'elle a vu, oublie ce que l'Histoire ecclésiastique a pourtant formellement enregistré ? Le premier épisode de "la crise de l'Église" que nous vivons actuellement, en effet, et dont le dernier volet spectaculaire et scandaleux est l'inique destitution de Mgr Strickland, n'est pas du tout le Concile Vatican II, se situant chronologiquement dans la moitié du siècle précédent (1961-1965), c'est le Concordat napoléonien, se situant chronologiquement dès le sortir de la Révolution française (1801) qui, nous allons le voir avec le pape du Concordat, à savoir Pie VII Chiaramonti, fit bien pire que ce que fait actuellement notre pape François post-vaticandeux, quant aux mœurs pontificales pour destituer injustement des évêques.
           
        ... Qu'est-ce bien, en effet, la destitution non-canonique de quelques évêques épars, par-ci par-là, de temps à autre, par coups d'autoritarisme félons, comme s'en rend certes bougrement coupable le pape François, comparée à l'incroyable destitution non-canonique, en forme d'oukase et sans aucun respect de la personne épiscopale, de TOUT l'épiscopat français en corps de nation par le pape Pie VII, quatre-vingt deux évêques en bloc, sans leur demander le moins du monde leur avis, tout au contraire leur interdisant sévèrement de le donner, pour permettre la signature hérétique et inique du Concordat, sinon... rien ?
           
        L'actualité ecclésiale qui buzze rend donc apparemment urgentissime la mise à plat chirurgicale de cette cataclysmique page historique, et on va voir qu'elle éclaire prodigieusement "LA PASSION DE L'ÉGLISE" en nous faisant comprendre que celle-ci commence dès le Concordat napoléonien, Vatican II n'en étant qu'une lointaine et subséquente suite, qu'on pourrait même évaluer comme étant moins hérétiquement grave, ou, à tout le moins, n'étant pas la cause génésiaque première du mal hérétique que ce très-funeste concile universel a eu le malheur immense de manifester ad extra dans l'Église au niveau de la Foi, ce mal hérétique étant en effet déjà vécu occultement ad intra au niveau des Mœurs depuis le Concordat napoléonien, plus d'un siècle et demi auparavant...
 
440px Gérard Signature du Concordat entre la France et le Saint Siège le 15 juillet 1801
Dans ce tableau si représentatif, remarquons bien
 comme l'État (Napoléon) est ASSIS, regard impérieux,
quand l'Église (Cal Consalvi) est DEBOUT, regard baissé...
 
        Pour commencer, je ne saurai évidemment pas reproduire ici, dans ce nouvel article, les raisons théologiques qui font que le Concordat napoléonien est intrinsèquement mauvais et pervers. J'ai établi soigneusement ces raisons dans une trilogie d'articles rédigée il y a plus de trois ans à présent, en mai 2020, intitulée Les Mœurs ecclésiales concordataires avec les États modernes athées, sont la cause première de "la crise de l'Église" ; la subversion de la Foi à Vatican II n'en est que le fruit pourri (cf. https://eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/les-moeurs-ecclesiales-concordataires-avec-les-etats-modernes-athees-partie-1?Itemid=1), et bien sûr aussi dans mon livre J'accuse le Concordat !, datant quant à lui de 2009 (cf. https://eglise-la-crise.fr/images/stories/users/43/JaccuseLeConcordat.pdf).
           
        Je n'en ferai ici que résumer les attendus de fond, renvoyant le lecteur qui veut l'exposé complet et le grand détail de la question, aux articles et livre susdits : le Concordat napoléonien est en effet intrinsèquement mauvais et pervers, pour la fondamentale raison qu'il a attenté hérétiquement au criterium catholique de validité des sociétés politiques enseigné par saint Paul en son célèbres chapitre XIII de l'épître aux Romains, que voici (je résume synthétiquement l'enseignement paulinien) : Une société politique est valide et l'exercice de son pouvoir est légitime, si, et seulement si, elle est constitutionnellement ordonnée à la poursuite du Bien commun véritable, normé à la fois sur les lois naturelles et celles surnaturelles ; si une société politique n'est pas ordonnée constitutionnellement à la poursuite dudit Bien commun, par-là même, elle n'est pas valide et n'a aucune existence aux Yeux de Dieu, et bien sûr n'en doit avoir aucune pour les hommes.      
           
        Saint Paul, en effet, dans ce chapitre politique de Rom XIII, ne parle que des pouvoirs politiques qui sont constitutionnellement ordonnés à la poursuite du Bien commun, à l'exclusion formelle de tout autre. La démonstration en est facile à faire.      
           
        Nous en avons la preuve formelle dans le v. 3 dudit chapitre XIII, qui, Lapalisse l'aurait dit, suit immédiatement les deux premiers versets, que voici : "Que toute personne soit soumise aux autorités supérieures : car il n'y a pas d'autorité qui ne vienne de Dieu, et celles qui existent ont été instituées par Dieu. C'est pourquoi celui qui résiste à l'autorité résiste à l'ordre établi par Dieu ; et ceux qui résistent attirent la condamnation sur eux-mêmes". Et saint Paul, de continuer immédiatement au v. 3, en disant, sans hiatus : "CAR les princes ne sont pas à craindre pour les œuvres bonnes mais pour les mauvaises. Veux-tu donc ne pas craindre la puissance ? FAIS LE BIEN, ET ELLE TE LOUERA".      
           
        La pensée de saint Paul est claire : il nous dit là qu'à chaque et toutes les fois que je fais le bien dans l'ordre public, la puissance m'en louera, m'en récompensera. Mais, théologiquement, il est rigoureusement impossible qu'une puissance qui n'est pas constitutionnellement ordonnée à la poursuite du Bien commun, puisse, à tout coup, à chaque et toutes les fois, me louer pour le bien public que je fais : il ne reste en effet pas assez de grâce dans l'homme taré du péché originel, qu'il soit seul ou réuni avec ses semblables également tarés comme lui, pour pouvoir, à chaque et toutes les fois que le bien public est acté, opéré, louer celui qui le fait. Un pouvoir politique qui n'est pas ordonné constitutionnellement à la poursuite du Bien commun, pourra certes louer quelques biens publics, mais pas tous et à chaque fois, comme l'enseigne saint Paul. Or, depuis le passage du Christ sur la terre, Lui qui a tout racheté dans sa Rédemption y compris la sphère sociopolitique, seul un pouvoir politique chrétien-sacral constitutionnellement ordonné à la poursuite du Bien commun, c'est-à-dire basant son pouvoir politique explicitement sur le Christ, a ce pouvoir de louer tout bien public opéré par l'homme, quel qu'il soit.      
           
        Il est donc clair que saint Paul n'entend parler, dans son fameux ch. XIII aux Romains, que des pouvoirs politiques qui sont constitutionnellement ordonnés à la poursuite du Bien commun, qui, eux et eux seuls, sont capables de louer celui qui fait le bien dans l'ordre public, à chaque et toutes les fois qu'il l'opère. Lorsque saint Paul dit : "Il n'y a pas d'autorité qui ne vienne de Dieu", omnis potestas a Deo, cela ne doit être entendu que de la façon suivante : "Il n'y a pas d'autorité ordonnée constitutionnellement à la poursuite du Bien commun qui ne vienne de Dieu". Un point catholique, c'est tout. Les autres "autorités" n'existent tout simplement pas, pour saint Paul, et c'est pourquoi il n'a aucun mot pour elles (le cas de l'Empire romain, qui était le pouvoir politique aux temps de saint Paul, ne contrevient nullement à cette grande loi que je rappelle : sans faute de sa part, le pouvoir romain ne connaît pas Jésus-Christ, certes, cependant, comme toutes les structures politiques de l'Antiquité, sa constitution est ordonnée inchoativement à la poursuite du Bien commun, et c'est pourquoi saint Paul le range dans les autorités politiques "qui viennent de Dieu", auxquelles, donc, le devoir de soumission des chrétiens est dû ; mais il serait hors-sujet et trop long d'en donner toute l'explication ici, je l'ai donnée dans la seconde partie de mon article L'obéissance et le respect dûs aux Autorités politiques légitimes sont-ils dûs à la République française actuelle et aux dépositaires de son "pouvoir"...?, auquel je renvoie mon lecteur, article qu'il pourra trouver ici : http://www.eglise-la-crise.fr/index.php/component/joomblog/post/l-obeissance-et-le-respect-dus-aux-autorites-politiques-legitimes-sont-ils-dus-a-la-republique-francaise-actuelle-et-aux-depositaires-de-son-pouvoir?Itemid=483).      
           
        C'est bien pourquoi d'ailleurs l'Apôtre des Nations continue très-logiquement son propos, dans le v. 4, par ces mots : "CAR elle [la puissance politique] est le ministre de Dieu pour le bien", qui a même sens et complète très-bien le "CAR les princes ne sont pas à craindre pour les œuvres bonnes mais pour les mauvaises" du v. 3. Comprenons bien là encore ce que nous dit saint Paul. Il ne dit pas, comme l'entendent très-pernicieusement et très-faussement les scolastiques : la puissance est le ministre de Dieu seulement quand elle poursuit accidentellement le Bien commun quand bien même elle n'y est pas ordonnée constitutionnellement, l'Apôtre des Nations nous dit tout au contraire qu'elle est le ministre de Dieu dans son être et son essence même qui la constitue politiquement et la fait tenir dans l'existence. D'où il s'ensuit précisément qu'à chaque et toutes les fois que le bien est opéré dans le for public, elle le loue, car l'agir suit l'être, agere sequitur esse : puisque l'être du pouvoir politique est ordonné au Bien commun, alors, lorsque ce bien est opéré, il le loue tout naturellement et systématiquement. Et c'est également pourquoi du reste, toujours aussi logiquement, saint Paul continue ainsi ce v. 4 : "Que si tu fais le mal, crains ; car ce n'est pas sans motif qu'elle [la puissance politique] porte le glaive, puisqu'elle est le ministre de Dieu dans sa colère contre celui qui fait le mal". Notons soigneusement comme saint Paul fait exactement le même raisonnement pour celui qui fait le mal au for public que pour celui qui y fait le bien : celui qui fait le mal au for public doit s'attendre, à chaque et toutes les fois qu'il le commet, à être châtié par "la puissance", comme il dit pour parler des pouvoirs politiques. Or, si à chaque et toutes les fois que je fais le mal au for public, je dois m'attendre à être châtié par la puissance, c'est donc bien que ladite puissance est constitutionnellement ordonnée au Bien commun, et non accidentellement.      
           
        Il est donc absolument clair et tout ce qu'il y a de plus indiscutable que dans Rom XIII, saint Paul n'entend parler que des pouvoirs politiques qui sont ordonnés constitutionnellement à la poursuite du Bien commun, À L'EXCLUSION FORMELLE DE TOUS LES AUTRES. Or, depuis la Révélation, c'est-à-dire depuis le passage du Christ sur la terre, le Bien commun a un Nom : celui du Christ, celui de Jésus. Tout pouvoir politique donc, depuis lors, pour être ordonné constitutionnellement à la poursuite du Bien commun sur la terre, doit être explicitement basé sur le Christ, ou, à tout le moins, sur le Dieu Un et Trine, le vrai Dieu catholique. Sous peine, tout simplement, de... ne pas exister métaphysiquement. La doctrine que j'expose ici à la suite de saint Paul, et qui veut qu'un pouvoir politique qui n'est pas constitutionnellement ordonné au Dieu vrai et à son Christ, et donc au Bien commun, n'a aucune existence métaphysique, n'est pas nouvelle, elle est au contraire celle de la Foi catholique, bien connu de tous les papes... avant les papes modernes. Voyez par exemple le pape saint Pie V reprenant vertement le faible roy de France Charles IX d'avoir nommé dans une lettre "empereur" le Pacha turc, en ces termes : "... Votre Majesté désigne le tyran le plus inhumain, qui est en même temps l’ennemi le plus acharné de la Religion chrétienne, sous le nom d’Empereur des Turcs, COMME SI CELUI QUI NE CONNAÎT PAS LE VRAI DIEU POUVAIT JAMAIS ÊTRE EMPEREUR ! Très cher fils en Jésus-Christ, donner le nom d’empereur à un tyran et à un infidèle, ce n’est pas autre chose que d’appeler le mal, bien, et le bien, mal" (Saint Pie V, un pape pour notre temps, Tilloy, p. 248). Pour saint Pie V, comme pour tout vrai catholique, le Politique dérive du Religieux, tout pouvoir politique post-christique qui ne s'appuie pas sur le Dieu vrai et sur son Christ-Messie, explicitement et constitutionnellement, n'existe... tout simplement pas.      
           
        Ce criterium de validité des sociétés politiques, basé sur l'ordonnance constitutionnelle obligatoire desdits sociétés politiques à la poursuite du Bien commun, regarde au premier chef, c'est bien le cas de le dire, les Mœurs couvertes par l'infaillibilité de l'Église. Prenons donc bien conscience qu'on ne saurait le rejeter sans pécher hérétiquement contre les Mœurs AUSSI GRAVEMENT QUE SI L'ON TOUCHAIT À UN DOGME DÉFINI DANS LA FOI.
           
        Or, les sociétés politiques post-révolutionnaires constitutionnellement basées sur les "droits de l'homme", lesquels rejettent formellement le vrai Dieu et son Christ à la source du pouvoir politique, ne satisfont pas à ce criterium paulinien fondamental d'être constitutionnellement ordonnées au Bien commun (on s'en rend compte de nos jours par les lois sur l'avortement, le mariage gay, etc., mais dès l'État français de Napoléon, le Code civil, base juridique de cet État, introduisait et légalisait le divorce, sans parler de son fondement juridique destructeur de la famille ; il était en effet rédigé, dira un célèbre auteur dont le nom malheureusement m'échappe, "pour un homme qui n'a ni père ni mère, ni enfants", pour l'individu des "droits de l'homme" autrement dit, au détriment de la famille, un individu idéologique formaté par les prétendues Lumières, inexistentiel, qui n'est pas l'homme vivant, c'est-à-dire l'homme-famille, que Dieu crée), et à cause de cela même, elles ne sont pas valides, elle sont radicalement invalides, in radice.
           
        C'est pourquoi le pape Pie VII n'avait théologiquement pas le moindre droit de recevoir dans un concordat comme partenaire co-contractant l'État français de Napoléon qui était un de ces pouvoirs post-révolutionnaires invalides, car le seul fait d'accepter un partenaire concordataire est lui réputer ipso-facto et formellement la validité, à cause de la structure synallagmatique de tout concordat, acte diplomatique solennel qui présuppose juridiquement la validité de tout co-contractant audit acte. Mais dire d'un pouvoir politique constitutionnellement athée et donc invalide, qu'il est valide, c'est une hérésie gravissime comme étant un attentat formel et à son plus haut niveau contre les Mœurs, dont l'Église est garante infailliblement, au même titre que pour la Foi.
           
        Or, ce qui aggrave considérablement la faute commise, c'est que Pie VII, en acceptant l'État français non-valide dans le Concordat napoléonien, lui réputant ainsi hérétiquement la validité, n'a pas seulement commis une faute passagère, dans le de facto, seulement pour l'État français de Napoléon, c'est au contraire dans le principe même de droit divin de la chose qu'il a prétendu changer radicalement le criterium de validité des Sociétés politiques enseigné par saint Paul, appuyé sur une fausse philosophie scolastique idolâtrant l'en-soi, l'être politique par laquelle on a, depuis le Concordat qui a servi de matrice archétypale à ce nouvel enseignement hérétique pour tous les temps qui lui ont succédé, donné une interprétation hérétique de Rom XIII, en voulant que le "tout pouvoir vient de Dieu" paulinien, omnis potestas a Deo, soit à entendre d'une manière absolutiste, qu'il s'appliquât désormais aux pouvoirs constitutionnellement mauvais comme à ceux qui sont constitutionnellement bons, sans plus tenir aucun compte du théologiquement nécessaire et obligatoire ordonnancement constitutionnel au Bien commun du pouvoir politique, ce qui est hérétique. C'était là pécher, et soumettre l'Église audit péché, en commettant un attentat formel contre les Mœurs, auxquelles sont inhérentes toutes choses regardant le domaine politique constitutionnel, et singulièrement quand il était ni plus ni moins question de renverser le criterium paulinien catholique de validité des puissances, comme dit l'Apôtre des nations en parlant des pouvoirs politiques. C'était là, pour la première fois depuis les assises de l'Église, depuis dix-huit siècles, faire rentrer l'Épouse du Christ dans l'économie de la Passion qui consiste essentiellement à être "faite péché pour le salut" (II Cor V, 21), le Concordat s'avérant être le portillon du jardin de Gethsémani...
           
        Cependant, dans cette question du Concordat, ce n'est pas cette problématique de fond que j'étudierai ici, l'ayant déjà fait et bien fait dans les grandes profondeurs me semble-t-il, notamment dans mes écrits sus-visés, mais celle en relation directe avec la destitution invalide de Mgr Strickland par le pape François... qu'on retrouve exactement à l'identique, pour copie conforme, et cela ne saurait surprendre, dans la destitution invalide et en bloc, d'un seul coup d'un seul, des quatre-vingt deux (!) évêques français d'Ancien-Régime par le pape Pie VII, pour permettre la signature du Concordat. On ne saurait se montrer étonné, en effet, que le moyen employé par François Bergoglio ou par Pie VII Chiaramonti pour mettre en œuvre leur agenda respectif au service du diable, à deux siècles de distance, soit lui-même hérétique, car en effet, si j'ai un mauvais but, je ne peux qu'employer de mauvais moyens pour y arriver.
           
        C'est ce qu'on va voir maintenant...
 
Claude Louis Desrais signature concordat Bonaparte encre lavis 1024x669
Signature du Concordat, très-faussement représentée
en stéréotype idéal et parfait entre l'État et l'Église...
(Remarquons avec soin comme l'allégorie du fond,
censée représenter la Religion et donc Dieu derrière,
est tournée vers Napoléon et non vers le pape,
comme s'il était le premier Dispensateur de la Religion
... par-dessus le pape)
 
        Commençons par dire que le pape Pie VII ne se rangea pas tout-de-suite à la tyrannique et implacable exigence de Napoléon sur ce chapitre, car c'est Napoléon en effet qui exigea, comme condition sine qua non du Concordat, la destitution de tous les évêques français en place à la fin de la Révolution. Cet hypocrite fils de Satan mit haut et fort en avant la raison du royalisme de ces évêques, mais en réalité, la véritable et profonde raison de son exigence était que des évêques catholiques intégraux l'auraient empêché radicalement de mettre en œuvre la reconstruction totale de la France qu'il voulait faire sur la seule base exclusive des "droits de l'homme", tant politiquement que religieusement. Napoléon en effet voulait rien moins que construire un véritable novus ordo sæculorum, en France pour commencer, exactement comme de nos jours les tenants de la IVème révolution dite industrielle veulent, derrière le mondialiste initiatique Klaus Schwab accouplé à la papauté moderne corrompue, introduire le monde dans une nouvelle économie de salut tant politique que religieuse. Comme il avait fait dire à son frère Jérôme Bonaparte, "La Révolution, c'est autre chose que du fumier retourné", il ne s'agissait pas de faire quelques amendements à une vieille constitution, il s'agissait de TOUT reformater le cosmos sociopolitique dans un tohu-bohu pseudo-génésiaque car franc-maçonnique... Or, dans les deux cas, la Religion catholique est un obstacle absolu qui empêche ce grand'œuvre initiatique, opera magnum, et il faut bien sûr commencer les choses par le supprimer, cet obstacle. Il faut donc bien comprendre que derrière son hypocrite volonté de supprimer non seulement tout le corps épiscopal français mais encore toute la structure géographique spirituelle des anciens diocèses qui remontaient à la naissance de la France chrétienne et qui fleuraient bon la sainteté antique, Napoléon n'avait rien moins en projet que de vouloir effacer complètement et radicalement toute trace de la vraie Religion en France...
           
        Et c'est pourquoi, pour y aboutir, sachant fort bien qu'il ne pouvait pas se passer de la force religieuse mais qu'il ne pouvait au contraire qu'en avoir nécessairement besoin pour bâtir son ordre nouveau, ayant vitalement besoin de la force de cohésion sociale que le Spirituel génère et lui seul, il lui fallait absolument des évêques dévoués corps et âmes à l'État, faisant obligatoirement allégeance à son pouvoir... constitutionnellement athée ("L’abbé Bernier [négociateur de l'État français] fait valoir que le Gouvernement «ne veut en France d’autre clergé que celui sur les dispositions duquel il pourra parfaitement compter» ― Lettre de l’abbé Bernier à Mgr Spina du 17 brumaire an IX -8 novembre 1800- Cf. Un coup de force dans l’église : le bref Tam multa du 15 août 1801, Arnaud Decroix, in https://books.openedition.org/putc/12694?lang=fr). Et c'est la raison profonde pour laquelle ce précurseur de l'Antéchrist-personne voulait refaire toute la structure épiscopale en France, personnes et diocèses et même jusqu'aux simples cures, le redécoupage de toutes les paroisses de France et de Navarre étant en effet au programme, en commençant bien évidemment par la destruction radicale de l'ancien Clergé. Par certaines déclarations, on peut bien voir que le fond de la pensée de Napoléon était la haine de la Religion catholique et que s’il avait pu, il l’aurait rayée de la face de la terre. Voyez par exemple, sa petite phrase au philosophe-médecin Cabanis : "Je veux rétablir la religion [catholique en France] comme vous la vaccine, l’inoculer POUR LA DÉTRUIRE". Il écrivit aussi à son frère Joseph Bonaparte, après la mort de Pie VI, faisant écho aux pires sans-culottes révolutionnaires : "Mettez tout en œuvre, pour qu’un autre Pape ne soit pas élu !" (Jeanne d’Arc et la Monarchie, abbé Marie-Léon Vial, p. 496). Le drame, c'est qu'on va voir le pape Pie VII, complètement aveuglé par sa propre corruption démocratique personnelle, lui donner entièrement main et même bras pour cela, honteusement, jusqu'au pire du pire...
           
        De plus, on a peine à s'imaginer, en nos jours éloignés de l'épopée napoléonienne, l'inouïe emprise morale que, certainement pour la punition des peuples et... des papes, la Providence de Dieu avait donné à Napoléon Bonaparte sur tous les esprits, même sur ceux qui le haïssaient, c'était ni plus ni moins cette "puissance active d'égarement" dont parle saint Paul lorsqu'il traite de l'Antéchrist-personne, venant "avec toutes les séductions de l'iniquité pour ceux qui périssent, parce qu'ils n'ont pas reçu l'amour de la vérité pour être sauvés. C'est pourquoi Dieu leur enverra une puissance d'égarement, pour qu'ils croient au mensonge" (II Thess II, 10).
           
        Une dizaine d'années après sa mort (1821), Henri Heine, séjournant à Paris dans les années 1830, aura ce commentaire sur la puissance maléfique de Napoléon sur les esprits, donnant cette photo littéraire de l'époque : "Napoléon est pour les français une parole magique qui les électrise et les éblouit... Le portrait de l'homme est suspendu dans chaque chaumière... Je l'ai trouvé couronné d'immortelles, comme nos images du Sauveur pendant la Semaine-Sainte [!!!]" (La postérité spirituelle de Joachim de Flore, Henri de Lubac, t. II, p. 255). Mais voici un souvenir personnel. Au cours d’un pèlerinage, j’ai eu l’occasion de toucher l’orgue Aubertin de l’église saint Louis à Vichy, église qui a été rebâtie par Napoléon III (1808-1873) et que Pétain fréquenta entre 1940 et 1943. Or, quelle ne fut pas ma surprise d’apprendre par l’organiste qui tenait à me présenter son originale église, que le généreux bienfaiteur, voulant que les vitraux du fond représentassent les saints de la famille impériale, y adjoignit, à côté des saints Eugène, Jean, Hortense, Louis, Eugénie, Joseph et Charles, un vitrail représentant le fameux saint… Napoleone (qui n’existe pas, au Martyrologe !), avec, tenez-vous bien… LA TÊTE DE NAPOLÉON 1ER !!! Bien entendu, le vitrail, dont je reproduis la carte postale ci-dessous (car apparemment le clergé est fier de ce qui fait sa honte), fut béni-oui-oui par la clergie post-concordataire XIXème siècle…!!!
 
NapoléonVitrailEgliseVichy
 "Ils mettent leur gloire
dans ce qui est leur honte"
(Phil III, 19)
       
        Nous sommes là dans l'idolâtrie du personnage post-mortem. Que dire, de son pouvoir magique sur les esprits faibles et pas assez catholiques, c'est-à-dire sur les 99 % de la tourbe humaine, de son vivant !! Le premier à être séduit, c'était... le pape Pie VII, il était complètement sous l'emprise totale et honteuse de son faux charme d'"homme fort" basé sur l'orgueil et l'idolâtrie très-révolutionnaire de l'homme (... alors que le seul "homme fort" qui a jamais existé et qui existera jamais, c'est Jésus-Christ...). Ce qui le prédisposa à cette emprise maléfique fut certainement les opinions politiques non pas même seulement républicaines mais démocrates qu'il avait, comme il osa le montrer scandaleusement dans son incroyable sermon de la Noël 1797 à ses ouailles d'Imola (que j'ai reproduit et analysé dans la 1ère partie de ma trilogie d'articles sus-mentionnée), lequel, Napoléon, l'ayant lu, qualifia de "sermon jacobin".
           
        Mais pour en finir sur le mauvais sujet de l'époque, je dirai que Napoléon Bonaparte ne fut qu'une sale bête malfaisante très-pénétrée de l'orgueil luciférien des "droits de l'homme" au service de l'Antéchrist et de Satan. Peut-être, au reste, en quelques très-rares éclairs de lucidité sur ce qu'il était vraiment devant le Seigneur, il s'en rendit compte lui-même, témoin cette phrase qu'il prononça un jour lorsqu'il fit halte sur la tombe de Jean-Jacques Rousseau, en Suisse : "Il eut mieux valu pour les hommes que ni lui ni moi ne fussions nés". Terrible aveu, qui n'est pas sans faire penser à la parole indignée du Christ lorsqu'Il prédit la trahison de Judas : "Malheur à l'homme par qui le Fils de l'homme sera trahi ! Il aurait mieux valu pour cet homme de n'être jamais né" (Matth XXVI, 24)...
 
        Le Fils de l'Homme n'était-Il pas abominablement trahi dans son Épouse l'Église par le Concordat, dont Napoléon, bien plus que Pie VII, est la principale cheville ouvrière d'iniquité...?
 
og napoleon waterloo
Napoléon, après la défaite de Waterloo : comprit-il enfin
qu'il avait un Maître, un Dieu, comme tout le monde...?
       
        Toujours est-il que lorsque Napoléon fit part directement à la cour romaine de son exigence inconditionnelle de destituer tous les évêques de France en 1800, le pape Pie VII, dans un premier temps, tâcha de trouver des expédients pour l'éviter. Il avait tout-de-même trop conscience de l'anormalité incroyable de destituer tout un corps épiscopal national d'un seul coup d'un seul... quand bien même il finit par céder sur toute la ligne à la volonté inflexible de Napoléon qui l'obligea à marcher sur sa conscience pontificale, laquelle lui montrait pourtant la radicale inconstitutionalité d'une telle procédure par rapport à la Constitution divine de l'Église quant à l'Ordre épiscopal, ainsi que je vais le montrer plus loin.
           
        Ce rusé antichrist, devinant fort bien que s'il avait commencer d'exposer son projet de destitution aux évêques légitimes de France, ceux-ci, évidemment, l'auraient rejeté d'emblée, les court-circuita d'entrée de jeu, dès les prémisses de la négociation, en s'adressant directement, par-dessus leurs têtes, au pape, à Pie VII. Une fois averti des intentions de Napoléon, Pie VII, "par une lettre en date du 13 septembre 1800, informe les évêques de France de la tenue de négociations avec le Gouvernement français. Cependant, là encore, les évêques sont tenus éloignés de l’avancée des négociations que se réserve le Saint-Père, qui ne consulte qu’un petit nombre de cardinaux et de théologiens à qui est imposé le secret" (Decroix, ibid.). Ainsi donc, scandalisé, on voit le pape, foulant aux pieds les droits les plus élémentaires et sacrés des évêques français, ne manifester honteusement aucune autre volonté que celle de suivre Napoléon comme un petit toutou dans la sacrilège mise sur la touche des évêques concernant la grande affaire de leur destitution et du saccage complet de leurs diocèses...
           
        Les négociations du Concordat, qui durèrent plus d'un an, commencent en effet "immédiatement par la question si difficile et si grave de la démission des anciens évêques. Le gouvernement consulaire exige, en effet, l’acceptation de cette mesure comme préalable à toute discussion. Mgr Spina [négociateur du pape] s’efforce de combattre cette position, sachant combien la conscience de Pie VII s’oppose à la démarche impérative qui lui est demandée. Il propose, ainsi, la voie de l’exhortation et de l’obéissance [faite aux évêques légitimes d'avoir à démissionner] au lieu de celle du commandement. Cependant, il ne peut rien obtenir. Le Premier consul reste inflexible et maintient ses exigences qu’il prétend imposer au Saint-Siège comme clauses fondamentales du futur concordat. Ainsi, bien que Rome porte, en partie, devant l’histoire la responsabilité du coup de force que nous étudions, elle n’a, cependant, rien négligé au début pour résister à la demande brutale de Bonaparte" (Decroix, ibid.).
           
        On voit très-bien ici que le grand point, le point le plus important du Concordat voulu par Napoléon, était bel et bien la destruction de tout le corps épiscopal national de la France réelle doublé de l'anéantissement géographique des anciens diocèses, basés sur l'Ordre très-chrétien remontant aux assises mêmes de la fille aînée de l'Église, c'est "l’article essentiel, la clef de voûte du Concordat" (Initiation à l’histoire ecclésiastique, Dom Poulet, t. II, p. 36, cité par Decroix, ibid.). Napoléon va même jusqu'à faire du chantage pour l'obtenir, car il menaçait d'envahir les États Pontificaux dont il avait déjà occupé les Légations, et même Rome : "Vous réclamez les Légations ? Vous voulez être débarrassé des troupes ? Tout dépendra de la réponse que vous ferez à mes demandes, particulièrement au sujet des évêques" (Le Premier consul à Mgr Spina, in L’Église de France sous le Consulat et l’Empire 1800-1814, abbé Constant, p. 113, cité par Decroix, ibid.).
           
        Mais Pie VII, personnellement perverti par son démocratisme, ne comprend pas qu'en cédant à cet homicide spirituel inouï, il va ainsi introduire le sanglier dans la Vigne du Seigneur et que celui-ci, une fois dedans, va la ravager, y faisant son office diabolique. Le rouge de la honte au front mais encore la sainte-colère Boanergès dans l'âme, on le voit se soumettre à la volonté antichristique de Napoléon, et, faute gravissime de sa part pontificale, le suivre dans le mépris sacrilège de l'autorité des évêques légitimes de France pour décider, excusez du peu, de leur... destitution. Ainsi donc, le pape obéissant à Napoléon décida du sort des évêques sans les consulter aucunement, sans aucune forme de procès, par un autoritarisme outrant son pouvoir pontifical et attentant sacrilègement à l'autorité épiscopale et à la Constitution divine de l'Église, ce qui, je vais l'expliquer tout-à-l'heure, invalidait formellement la procédure de leur destitution sur le plan théologique (... et c'est exactement la même chose qui arrive avec Mgr Strickland, de nos jours...).
           
        Puis, le cardinal Ercole Consalvi, Secrétaire d'État de Pie VII, homme énergique qui prendra auprès de Napoléon la suite des négociations après l'effacement de Mgr Spina, finit la convention, après de mémorables entretiens entre Napoléon et lui dont il nous a laissé le souvenir haut en couleurs dans ses Mémoires (dans lesquels, entre autres, on voit l'odieux sans-culotte refuser de déclarer catholique la France dans l'acte concordataire), et le Concordat, achevé de rédiger le 15 juillet 1801, fut avalisé promptement par le pape Pie VII le 15 août suivant. L'article principal du Concordat en était donc le § 3, dans lequel le pape, d'une manière incroyable, inconcevable sur le plan catholique, détruisait non seulement tout l'épiscopat légitime de France mais encore la structure même des diocèses et des cures dont la plupart existaient depuis l'ère mérovingienne, voire même avant, dans l'ère gallo-romaine, c'est-à-dire, on l'a compris, dès la naissance chrétienne de la France (ce que le § 2 formulait lapidairement ainsi : "Il sera fait par le Saint-Siège, de concert avec le Gouvernement, une nouvelle circonscription des diocèses français") ! Ce que le pape, je vais l'exposer plus loin, n'avait rigoureusement pas plus le droit de faire quant à la géographie spirituelle de la France que quant à l'institution épiscopale légitime...
           
        Mais voici cet article 3 du Concordat, suivi du 4 qui lui est attaché : "Sa Sainteté déclare aux titulaires des évêchés français qu'elle attend d'eux avec une ferme confiance, pour le bien de la paix et de l'unité, toute espèce de sacrifices, même celui de leurs sièges. D'après cette exhortation, s'ils se refusaient à ce sacrifice, commandé par le bien de l'Église (refus, néanmoins, auquel sa Sainteté ne s'attend pas), il sera pourvu par de nouveaux titulaires au gouvernement des évêchés de la circonscription nouvelle, de la manière suivante : Article 4. Le premier Consul de la République nommera, dans les trois mois qui suivront la publication de la bulle de sa Sainteté, aux archevêchés et évêchés de la circonscription nouvelle. Sa Sainteté conférera l'institution canonique suivant les formes établies par rapport à la France avec le changement de gouvernement".
           
        Il est clair ici que le pape destitue l'évêque légitime français, ou menace de le faire sans appel s'il refusait, par motu proprio ou mouvement propre qu'il prétend abusivement pouvoir tirer de son pouvoir pontifical suprême. C'est exactement ce qu'il va oser leur dire dans le bref Tam multa, lettre adressée le jour même de la promulgation du Concordat, le 15 août 1801, à tous les évêques légitimes de France, pour exiger d'eux brutalement et sans ménagements aucuns autrement que de pure forme, leur démission obligatoire (cf. https://www.vatican.va/content/pius-vii/it/documents/breve-tam-multa-15-agosto-1801.html, en italien). Mais laissons Arnaud Decroix résumer le bref, il le fait très-bien, quoiqu'en suivant la doxa pro-concordataire : "Le bref Tam multa commence par un éloge des évêques qui ont souffert pour l’Église. Mais le Pape termine en leur demandant le sacrifice de leurs sièges, dans l’intérêt de l’unité de l’Église et du rétablissement de la religion catholique en France. En effet, ces motifs justifient la démission des évêques légitimes de leurs sièges. Ils doivent, alors, en faire librement la remise entre les mains du Pape. Ainsi, le bref est rédigé en termes impératifs : les victimes, priées de se «démettre spontanément», sont tenues d’envoyer dans les dix jours une réponse définitive, «absolue et non dilatoire», faute de quoi le Saint-Père passera outre. Par ailleurs, il se dispense de communiquer le traité qui motive cette rigueur. Par conséquent, soit que les évêques donnent leur démission passé ce délai de dix jours, soit qu’ils ne la donnent pas, ils seront réputés en avoir donné une négative. Dans ce cas, Sa Sainteté peut, alors, procéder, sans autre avertissement, à ce qui est nécessaire pour rétablir la religion, conformément à l’article 3 du concordat. De plus, ce court délai de dix jours vise également à empêcher d’éventuelles concertations entre les évêques auxquels la démission est demandée" (Decroix, ibid.).
           
        Consignons dès ici le résultat de la demande du pape aux évêques français : "Au total [sur les 135 évêques institués lorsque la Révolution commence en 1789, il n'y en avait plus que 98 toujours en vie en 1801], 37 refusent la démission contre 48 qui l’acceptent et 13 qui le font avec réserves et protestations, ce qui constitue selon Camille Latreille une «majorité morale pour la résistance»" (L’opposition religieuse au Concordat de 1792 à 1803, Camille Latreille, pp. 214-215)" (Anticoncordataires ou Petite Église ? Les oppositions religieuses à la loi du 18 germinal an X, Jean-Pierre Chantin, p. 99).
 
Pie VII
 Barnabé Chiaramonti, futur Pie VII
 
        Or, cette lettre Tam multa contient deux gravissimes mensonges de la part de Pie VII, qui en invalident complètement les exigences, in radice.
           
        Le premier mensonge, c'est le motif de fond qui soi-disant légitimerait sur le plan spirituel l'acte concordataire, à savoir "l’intérêt de l’unité de l’Église et du rétablissement de la religion catholique en France". Or, la vérité, c'est que le Concordat, c'est tout, sauf ça. Le Concordat ne rétablit en effet nullement la vraie Religion catholique en France, doctrinalement intégrale, pure et libre comme devant, ce qui donc, en conséquence, ne peut pas servir "l'intérêt de l'unité de l'Église". Il n'y rétablit en effet qu'un ersatz frelaté, hérétique et corrompu, de religion catholique, institutionnellement ligotée à une puissance politique constitutionnellement athée, avec en plus l'obligation de professer la validité de ladite puissance... invalide, sous peine de destitution et même d'excommunication, ce qui attente au criterium paulinien de validité des sociétés politiques comme on l'a vu plus haut. Loin de servir "l'intérêt de l'unité de l'Église", le Concordat ne fit donc en droit et en fait qu'établir une église schismatique en France, au regard de toutes les autres églises du monde entier qui, elles, vivaient toujours dans la vraie liberté des enfants de Dieu, dans les Mœurs politiques constitutionnelles toujours catholiques, comme respectant le criterium paulinien de validité des sociétés politiques. Ce qui donc, à partir du Concordat, n'était plus du tout le cas de la seule Église de France parmi toutes les autres églises dans le monde entier, elle ne vivait plus, dès lors, qu'inféodée à l'Antichrist politique, sous la botte de son précurseur Napoléon qui, gloussant de plaisir d'être arrivé à ses fins une fois l'acte signé, par la faute gravissime du pape, parlait sans cesse de "MES curés et mes gendarmes", appelant SES évêques, mes préfets en violet...
           
        La conséquence, c'est que si la Foi restait encore intacte doctrinalement, les Mœurs de cette prétendue "religion catholique" rétablie en France par le Concordat étaient corrompues jusqu'à la mœlle et de force par l'indifférentisme religieux au for public imposé à tout fidèle catholique par l'État constitutionnellement athée et approuvé par le pape rien qu'en promulguant le Concordat, lequel indifférentisme, par la dynamique du mal, après un siècle et demi de transvasement des Mœurs dans la Foi, toujours insensible et occulte, finira par amener Vatican II avec sa proclamation apostate de la Liberté religieuse. Car si je ne vis pas par mes Mœurs comme je pense par ma Foi, je serai inéluctablement obligé, tôt ou tard, de penser par ma Foi comme je vis au niveau de mes Mœurs. La raison en est que les Mœurs et la Foi sont aussi viscéralement liées entre elles que le corps et l'âme dans l'être humain, elles ont une interaction directe et immédiate l'une sur l'autre, se forçant mutuellement à l'unité absolue de direction métaphysique. Ce n'était donc pas la Religion catholique véritable qui était rétablie en France par le Concordat, intégralement pure quant aux Mœurs et quant à la Foi, elle n'était pure seulement, et encore pas pour très-longtemps, que quant à la Foi et affreusement impure quant aux Mœurs sur le plan Politique constitutionnel, on avait en fait affaire à une prétendue "religion catholique" ayant en outre maudite vocation de corrompre tôt ou tard la Foi par ses très-mauvaises Mœurs, ce qui arriva à Vatican II.
           
        Et non seulement on rétablissait la Religion catholique en France en corrompant radicalement ses Mœurs, mais de plus, seconde raison théologique mais non des moindres que le Concordat ne travaillait nullement pour "le bien supérieur de l'Église" comme osait le dire le pape Pie VII, on attribuait le fait de ce rétablissement à l'homme et non pas à Dieu. Alors que Dieu, et Lui seul, a le pouvoir, qui est tout surnaturel, de faire vivre ses enfants dans la liberté de la Religion. On orientait donc ainsi les âmes à la fois sur l'effacement, l'apostasie de Dieu, et sur l'idolâtrie de l'homme déifié, en prétendant attribuer faussement à ce dernier le pouvoir de donner la liberté de Religion. La doctrine concordataire napoléonienne professe en effet que c'est l'homme qui donne la liberté des enfants de Dieu en matière de Religion, non seulement d'ailleurs aux catholiques, mais à tous les tenants des autres religions en France (l'État français, en effet, ne contracta pas un Concordat seulement avec la Religion catholique, il en contracta d'autres, dans la foulée, avec les protestants, avec les juifs, et même avec... les franc-maçons !).
           
        En voici une illustration, parmi tant d’autres. Le pieux biographe de saint Vincent Ferrier au XIXe siècle, le R.P. Fages, relate une anecdote du temps de la Révolution, une sordide effigie sans-culotte qui, au fronton d’une des portes de Vannes, avait été mise en lieu et place de la belle statue du saint, qui avait été détrônée… mais voyez plutôt comment il termine l’épisode : "Ce mannequin disparut en 1802, dès que le concordat eût accordé aux catholiques la Liberté religieuse" (saint Vincent Ferrier, Fages, p. 187) ! Voyez comme dans l’esprit de l’auteur, pourtant fort catholique, ce n’est déjà plus Dieu qui accorde la Liberté religieuse, mais un traité humain, mais l'homme… la glissade infernale est commencée. Il faut d'ailleurs bien remarquer que c'est le pape lui-même, c'est le démocrate Pie VII, qui, dans le Préambule du Concordat, gauchit la bonne doctrine en la matière, en formulant que la liberté de Religion en France dépend désormais de la bonne volonté des... Consuls de la République : "Sa Sainteté reconnaît également que cette même religion [catholique, apostolique et romaine] a retiré et attend encore en ce moment le plus grand bien, et le plus grand éclat de l'établissement du culte catholique en France et la protection particulière qu'en font les Consuls de la République" (notons comme la formule, soit dit en passant, est étrangement tarabiscotée et absconse...).
           
        Donc, nous sommes en train de voir que le prétendu "bien supérieur de l'Église", au nom duquel le pape prétend légitimer le Concordat devant Dieu et les hommes... et légitimer la destitution des évêques légitimes de France, est un pur mensonge, un diabolique trompe-l'œil en carton-pâte, une très-funeste illusion d'optique, une super-supercherie. La vérité, si l'on va au fond des choses, c'est qu'il s'agit en fait d'un "mal supérieur de l'Église", comme étant le premier épisode de la mise de l'Église sous "la puissance des ténèbres" antichristiques, par lequel l'homme, épousant la doctrine révolutionnaire, prétend être l'étalon normatif du droit de la Religion, et non plus Dieu. Il est trop vrai que le Concordat, première pierre fondatrice de construction sur laquelle s'ajouteront beaucoup d'autres dans la suite des temps post-concordataires, est métaphysiquement ordonné à l'avènement du règne de l'Antéchrist-personne à la toute-fin des temps, adveniat regnum antechristus tuum, c'est-à-dire au "mal supérieur de l'Église"...
           
        La conclusion est simple. Le pape Pie VII ne pouvait donc absolument pas prétendre être moralement fondé à déployer ce qu'il croyait être la plénitude de son pouvoir pontifical au nom de ce qui est objectivement "le mal supérieur de l'Église", mais qu'il voulait appeler très-mensongèrement "le bien supérieur de l'Église" : cette dite plénitude de pouvoir, en effet, aurait-elle pu être théologiquement déployée pour destituer tous les évêques légitimes de France par simple motu proprio pontifical (et nous allons voir que non, là encore le pape se trompait complètement), ne le pouvait théologiquement être, de toutes façons et en tout état de cause, que sur une bonne motivation, une bonne raison de l'employer. Le pape en effet, n'est autorisé à employer son pouvoir magistériel pontifical que pour le Bien-Fin de l'Église...
 
consalvi 1840
Le cardinal Ercole Consalvi qui finit
au bras-de-fer le Concordat avec Napoléon...
       
        Or, justement, deuxième mensonge gravissime dans le bref comminatoire et brutal Tam multa, très-napoléonien, non seulement le pape Pie VII n'était nullement habilité à déployer la plénitude de sa puissance pontificale pour un mauvais objet, mais en outre, le déploiement de la plénitude de sa puissance pontificale ne pouvait théologiquement pas aller jusqu'à destituer des évêques par simple motu proprio. Même si la motivation pour le faire eût été spirituellement bonne. C'est ce que n'ont pas voulu comprendre les thuriféraires mondains du Concordat, qui, fort honteusement, voudront tous s'éblouir, se shooter jusqu'à l'extase, de la prétendue extraordinaire puissance pontificale déployée en l'occurrence par le pape Pie VII dans le § 3 du Concordat...
           
        ... Dieu sait assez en effet, ad nauseam, leurs dithyrambes hérétiques, impudents et indécents !
           
        Avant de poursuivre, il n'est d'ailleurs pas inutile, pour se dérider un peu dans un sujet d'étude tellement triste et funeste, d'en citer quelques-uns, rapportés par Arnaud Decroix. Voici, pour commencer, une tirade signée de l'abbé Émery, un des pires collabos qui se puissent jamais non pas rêver mais cauchemarder, aux temps atroces de la Révolution (sa biographie fait penser à Laval, le ministre de Pétain durant la seconde guerre mondiale...) : "Les papes qui ont porté le plus loin leur autorité n’ont point fait dans la suite des siècles des coups d’autorité aussi grands, aussi importants que ceux qui ont été faits en ce moment par le pape Pie VII" (Decroix, ibid.).
           
        Grand-clerc de cette époque qui alla sans cesse dans le sens d’une compromission aveugle avec les nouvelles "autorités constituées", comme osait dire le pape Pie VI dans son bref Pastoralis Sollicitudo du 5 juillet 1796 en parlant du gouvernement du Directoire, le plus franc-maçon des gouvernements révolutionnaires, l'abbé Émery s’abouchait sans vergogne aucune avec lesdites nouvelles "autorités constituées", quelles qu'elles soient, même les pires coupeurs de têtes, et quoiqu'il en soit. Il ira dans ce sens jusqu’à la limite insupportable de la servilité, de la veulerie, de la malhonnêteté intellectuelle insoutenable, voire de l'abandon de la Foi. Un seul exemple. Le serment que le Directoire fit prêter l’an V de la République incluait une déclaration explicite "de haine à la royauté". Émery, sans jamais vouloir quitter sa position de reconnaître les nouvelles "autorités constituées" adoptée par lui dès le début de la Révolution, se disculpa toujours de donner un quelconque mot d’ordre sur ce qu’il fallait faire dans ce cas précis, signer ou non (signer était faire profession de haine envers une catégorie de prochain, en l’occurrence les roys, ce qui est formellement incompatible avec la profession de Foi chrétienne ; ne pas signer, c’était se mettre en infraction avec les nouvelles "autorités constituées")... Émery était là bel et bien coincé dans ses petites sinuosités intellectuelles et ses subtils distinguos, il se contenta donc de ne... rien dire, de ne donner… aucun mot d’ordre. Et voilà à quel genre d’impasse insurmontable on voit tôt ou tard se vouer infailliblement, dans leurs impures caresses aux "nouvelles autorités constituées", les contempteurs de l’Ordre très-chrétien que Pie VII, dans le Concordat, osa sacrilègement appeler "l'ancien gouvernement" (§ 16) !
           
        L'influence de l'abbé Émery fut cependant très-grande pendant toute la période révolutionnaire au sein du clergé français voire même romain : au pire moment de la tourmente révolutionnaire, celui que P. de la Gorce appela "l’éminence grise de l’Église gallicane" (Histoire religieuse de la Révolution, t. IV, p. 161), par de rusées et fort subtiles complicités avec les nouvelles "autorités constituées", résidait toujours à Paris, même en pleine Terreur, sans être inquiété ! Et de là, avec bénédiction de Rome, il fut celui qu’on consultait sur les affaires de France, le maître à penser de l’Église gallicane jusqu’à Napoléon, lequel fit de ce prêtre, contradictoirement saint dans son privé, "l’un de ses conseillers favoris" (Monsieur Émery, l’Église d’Ancien-Régime et la Révolution, Leflon, p. 557).
           
        Mais je redis sa tirade, j'en éprouve beaucoup de plaisir : "Les papes qui ont porté le plus loin leur autorité n’ont point fait dans la suite des siècles des coups d’autorité aussi grands, aussi importants que ceux qui ont été faits en ce moment par le pape Pie VII". À la peser sur la balance de la vérité, nous n'allons pas tarder à voir ce que cela vaut, convertis en assignats...
           
        Arnaud Decroix cite d'autres mondains qui lancent l'encensoir très-haut en l'air dans le ciel en faveur du Concordat. Mgr Frayssinous, la coqueluche ecclésiastique mondaine sous la Restauration, le qualifia de "plus grand acte de puissance pontificale qui se fût produit depuis dix-huit siècles" (Histoire religieuse de la France, Goyau & Hanotaux, p. 290, cité par Decroix, ibid.)...!! Portalis, le ministre des Cultes de Napoléon (notez bien le pluriel) et franc-maçon très-distingué, le considérait quant à lui comme un véritable "prodige politique et moral" (Decroix, ibid.). L'historien Rohrbacher n'est pas en reste, lui aussi, de son côté, lorsqu’il commente ainsi la suppression en corps d’institution de tous les évêques français lors du Concordat : "Il s’agissait d’une opération unique dans l’histoire ; il s’agissait, par un même acte, d’anéantir tout un monde et d’en créer un autre" (Histoire universelle de l'Église catholique, t. XXVII, p. 578). C'est effectivement très-exactement ça : comme je l'ai écrit que dessus, il s'agissait pour Napoléon d'anéantir tout un monde vivant sur le droit divin pour le remplacer par un monde maçonnique d'iniquité fondé sur le droit du diable. C'était effectivement un peu autre chose que "du fumier retourné" dans le champ du monde...
           
        Mais il me semble que Hippolyte Taine, cartésien et positiviste, mérite haut la main le 1er accessit avec les félicitations du jury pour son dithyrambe exalté et illuminé dont les pieds ne touchent visiblement plus du tout la terre du réel, lorsqu'il reconnaît au pape, dans son acte de destruction de toute une Église nationale et la reconstruction d'une autre sur ses ruines, "un pouvoir extraordinaire qui n’est limité par aucune coutume, ni par aucun canon, une autorité plénière et absolue, un droit au-dessus de tous les droits, en vertu duquel, dans des cas qu’il détermine lui-même, il pourvoit d’une façon discrétionnaire aux intérêts catholiques, dont il devient ainsi l’arbitre suprême, l’interprète unique et le juge en dernier ressort" (Les origines de la France contemporaine, t. II, p. 637-638, cité par Decroix, ibid.)...!!! Il n'a vraiment manqué à cet alumbrados bourgeois XIXème siècle d'un nouveau genre que de faire un tout petit peu de théologie élémentaire : ce qu'il décrit là ne fait guère, en effet, que montrer un pouvoir absolutiste du pape, et donc complètement hétérodoxe...!! Mais un siècle plus tard, un auteur interroge encore : "Qui aurait jamais pu imaginer un pareil coup d’autorité ?" (Hippolyte Prélot, in Études, t. LXXXVIII, 1901, p. 306, cité par Decroix, ibid.).
             
        À un seul mot et "détail" près, je suis tout-à-fait d'accord avec ce dernier auteur : qui aurait jamais pu imaginer un pareil ABUS d'autorité...?
           
        Car nous sommes là bel et bien en présence d'un pur abus d'autorité de la part du pape, comme nous l'allons voir à présent...
 
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        Ainsi donc qu'on vient de le constater, les thuriféraires du Concordat, suivis d'une multitude complètement innombrable de nabots de la pensée jusqu'en nos sinistres jours, se sont extasiés jusqu'au délire indécent sur le prodigieux pouvoir employé par le pape dans l'acte de destitution de tous les évêques légitimes de France. Alors que la vraie signification de cet acte inique s'il en fût jamais en Église, était que Rome avait été "l'instrument docile d’apaisement de Napoléon et comme l’exécuteur d’un meurtre des apôtres" (La primauté du Pape, son histoire, des origines à nos jours, Klaus Schatz, p. 214, cité par Decroix, ibid.), d'autres auteurs bien inspirés ayant qualifié le bref Tam multa d'"apostolicide" (Nouvelle Histoire de l’Église, Rogier, Bertier de Sauvigny & Hajjar, t. IV, p. 279 & Histoire religieuse de la France contemporaine, Dansette, p. 141, cités par Decroix, ibid.).
           
        Dès lors, convenait-il vraiment, était-il décent, de s'enthousiasmer sans retenue de l'assassinat spirituel de tout un corps épiscopal national, de quatre-vingt deux évêques valeureux et méritants ayant souffert généreusement les affres de la Révolution sans faiblir, mais destitués à la guillotine pontificale, sans aucun droit d'appel...? Même le cardinal Consalvi, qui pourtant mena à terme le Concordat dans un duel éreintant et personnel avec Napoléon, s'en rendit compte : "Qu’on lise tant que l’on voudra l’histoire ecclésiastique. On ne trouvera pas un exemple semblable. Un massacre de cent évêques ne se peut faire" (Histoire religieuse de la France contemporaine, Dansette, p. 133, cité par Decroix, ibid.). Il n'est pas le seul, s'occupant aux premières lignes de l'affaire du Concordat, à s'en rendre compte : "La majorité des membres de la Congrégation [ad hoc, constituée par Pie VII pour s'occuper de la grande affaire], à la suite de Mgr Di Pietro, déclare que le Pape ne doit pas commettre un pareil abus d’autorité. Selon Mgr Spina : «Vous ne trouverez pas de pareils exemples dans l’histoire ecclésiastique. Quoique l’objet de cette destitution et substitution des nouveaux évêques fût le précieux rétablissement de la religion catholique en France [ce qui était archi-faux, nous l'avons vu, il s'agissait du rétablissement d'une religion catholique prostituée à la Bête républicaine constitutionnellement athée, avec obligation hérétique de professer sa validité et d'attenter ainsi très-hérétiquement aux Mœurs de l'Église], il serait bien étrange de voir arborer de nouveau dans ses provinces l’étendard de notre sainte religion sur les ruines de quatre-vingts colonnes de la foi renversées et anéanties par le même bras de Pierre qui doit les soutenir et les protéger» (Lettre de Mgr Spina à l’abbé Bernier du 11 novembre 1800, cité par Theiner, in Histoire des deux Concordats de la République française et de la République cisalpine, p. 96)" (Decroix, ibid.).
           
        Mais tous les intervenants et acteurs du Concordat au plus haut niveau, tant du côté ecclésiastique que gouvernemental, désirant rester à s'éblouir les yeux avec le miroir aux alouettes concordataire, tous, cul et chemise, se poussant du coude à qui mieux mieux les uns les autres à pécher à cet effet très-passionnellement voulu de tous, ne voulurent conclure qu'une chose, c'est que le pape avait le droit d'employer son pouvoir pontifical pour cet acte inouï de destituer d'un seul coup d'un seul tout un corps national épiscopal, évitant soigneusement d'avoir à se demander si, en fait, il le faisait en outrepassant hérétiquement son pouvoir pontifical, tel que le Christ l'a donné à Pierre, ou bien non.
           
        C'était pourtant bien la toute première question théologique de fond dont il fallait impérativement s'occuper dans l'affaire, et dont je vais m'occuper maintenant, Deo adjuvante.
           
        Je vais d'abord commencer par mettre en exergue la grande règle catholique en la matière, qui domine toute la problématique :
           
        Le modèle constitutionnel de l'Église ordonné par le Christ est fondamentalement et exemplairement tempéré : autant de vouloir abolir l'Autorité pontificale par l'ensemble des évêques de l'orbe catholique (doctrine conciliariste et/ou gallicane, donnant un pouvoir absolutiste aux évêques), est formellement prohibé pour cause d'hérésie, autant de vouloir abolir l'Autorité épiscopale d'une manière absolutiste par le pouvoir universel pontifical, l'est.
           
        La raison théologique en est que, autant l'institution de la Papauté que l'institution de l'Épiscopat, est sujet de droit divin. Laissons un théologien pourtant vraiment pas recommandable par son modernisme ultra, Karl Rahner, fort bien synthétiser la doctrine sur cela : "L’essence juridique de l’Église est constituée à la fois par la Primauté pontificale et par l’Épiscopat, qui, tous deux, procèdent de manière également immédiate de l’Institution par le Christ" (in Quelques réflexions sur les principes constitutionnels de l’Église, cité par Decroix, ibid.). Ce qui signifie qu'il est impossible que l'une des deux Institutions puissent avoir droit de vie ou de mort sur l'autre, car l'une comme l'autre est de droit divin. C'est pourtant ce que l'on veut supposer en donnant un pouvoir discrétionnaire au pape de destituer par motu proprio l'évêque... Par ailleurs, saisissons bien que si l'une des deux donnait la mort à l'autre, elle se donnerait la mort à elle-même ipso-facto, par et dans le même acte, et les deux droits divins fondateurs de l'Église étant morts signeraient par le fait même la mort instantanée de l'Église.
           
        Il devient d'une grande nécessité, parvenu ici, de bien exposer la doctrine, en la décortiquant avec soin de long et de large, pour avoir une vue exacte sur cette question très-importante. L'Institution de droit divin de l'évêque comprend son pouvoir d'Ordre sacramentel (Christ-Prêtre), et son pouvoir de juridiction (Christ-Roy). Dans l'affaire qui nous occupe, il n'est évidemment question que du pouvoir de juridiction épiscopal. Cependant, il faut déjà bien comprendre que dès lors que ce pouvoir de juridiction est donné par le pape à l'évêque lors de l'institution canonique sur une église particulière ou diocèse, il se lie aussitôt ipso-facto au pouvoir d'Ordre et participe intrinsèquement immédiatement du droit divin. Il y a en effet un distinguo très-important à faire entre la juridiction épiscopale en amont, donnée par le pape à l'évêque lors de son investiture, et celle en aval, dont jouit l'évêque une fois qu'il est canoniquement institué...
           
        Mais commençons par régler une question préliminaire, qui a agité les siècles ecclésiastiques sans être résolue vraiment que dans ces derniers temps, sous le pontificat du pape Pie XII : la juridiction donnée à l'évêque sur une portion du troupeau du Christ est-elle donnée médiatement ou immédiatement par le pape ? C'est-à-dire, ressort-elle au premier chef du Christ ou du pape ?
           
        L'abbé Fsspx Gleize a fort bien exposé la question dans son article L'opinion commune des théologiens sur l'épiscopat (cf. https://laportelatine.org/formation/crise-eglise/sacres-1988/lopinion-commune-des-theologiens-sur-lepiscopat#footnote_4_193460), lisons-le : "Dans l’état de l’explicitation de la doctrine, relative à l’épiscopat, telle qu’elle avait été proposée par le Magistère avant Pie XII, les théologiens restaient partagés pour résoudre la question de l’origine de la juridiction chez l’évêque. Certains d’entre eux ont pu estimer que les évêques reçoivent leur pouvoir de juridiction immédiatement du Christ, l’investiture du Pape n’intervenant que comme une condition nécessaire mais non suffisante. On rencontre cette explication chez les espagnols François de Vitoria, op (1492–1546), Alphonse de Castro, ofm (1495–1558), Gabriel Vasquez, sj (1549–1604) et chez le lazariste français Pierre Collet (1693–1770). Pour ces théologiens, le pouvoir de juridiction est donné immédiatement par le Christ, et moyennant la mission canonique du pape qui joue le rôle d’une simple condition. Il est bien connu que cette explication théologique a été élaborée à l’occasion de la 23e session du concile de Trente. Cette explication ne dit pas encore que le Christ donne l’investiture [juridictionnelle] dans et par le sacre, et distinction est donc faite entre le pouvoir d’ordre et le pouvoir de juridiction non seulement selon leur essence de pouvoir mais même selon leur origine.
           
        "Par la suite, d’autres théologiens sont même allés jusqu’à soutenir que ce pouvoir de juridiction était formellement communiqué à l’évêque par la consécration épiscopale, de concert avec le pouvoir d’ordre. Cette explication se présente sous sa forme la plus achevée chez Jean-Vincent Bolgeni (1733-1811), dans son ouvrage L'Episcopato ossia la potestà di governare la Chiesa, de 1789. Ces explications sont restées relativement isolées.
           
        "Avant le concile de Trente et après, la plupart des théologiens suivent l’opinion classique, déjà soutenue par saint Thomas, selon laquelle l’évêque reçoit son pouvoir de juridiction directement du Pape lors de l’investiture ou de l’institution canonique : Jean de Torquemada, op (1388-1458), saint Robert Bellarmin, sj (1542-1621) et Benoît XIV (1675-1758) en sont les témoins principaux. L’explication de Bolgeni, en particulier, a été critiquée et réfutée par la grande majorité des théologiens" (ibid.).
           
        Il aurait semblé, pourtant, que la thèse soutenue par Bolgeni avait grande valeur, s'appuyant sur des raisons théologiques très-fortes. En effet, on dit souvent sans trop réfléchir à ce qu'on dit que les évêques sont les "successeurs des Apôtres". Mais les Apôtres, qui donc sont les tout premiers évêques, ont reçu leur juridiction directement par le Christ Lui-même, et de plus, leur juridiction était de soi universelle, sans être circonscrite de quelque manière par Pierre ! Puisque donc les évêques sont les "successeurs des Apôtres", il semblait des plus orthodoxes de pouvoir soutenir qu'ils reçoivent leur juridiction directement du Christ, et l'on pourrait même ajouter de plus que leur juridiction, à tous et chacun des évêques postérieurs aux Apôtres jusqu'à ceux de maintenant, serait, de soi, virtuellement universelle ! L'abbé Gleize, dans les grandes lignes, ne peut qu'en convenir : "Certes, cette opinion nouvelle [de Bolgeni] ne va pas directement contre la Foi, dans la mesure où elle reste conciliable avec le dogme du Primat du Souverain Pontife et avec la distinction formelle entre le pouvoir d’ordre et le pouvoir de juridiction" (ibid.).
           
        Mais la thèse Bolgeni doit être abandonnée, après décision de Pie XII : "Cependant, les enseignements subséquents du Magistère de Pie XII ont fini par dirimer la question. En vertu de l’autorité de ce Magistère ordinaire tel qu’il s’est exprimé notamment dans les trois Encycliques Mystici corporis, Ad sinarum gentem et Ad apostolorum principis, les fidèles catholiques doivent désormais regarder comme une doctrine catholique commune et certaine l’explication traditionnelle selon laquelle l’évêque reçoit sa juridiction immédiatement du Pape, de par l’investiture canonique, et indépendamment de la consécration épiscopale. Pie XII déclare en effet dans la troisième de ces Encycliques, qui fait référence aux deux autres, que : «la juridiction ne parvient aux évêques que par l’intermédiaire du Pontife romain, comme Nous vous en avertissions dans Notre encyclique Mystici Corporis : “Si les évêques jouissent du pouvoir ordinaire de juridiction, ce pouvoir leur est immédiatement communiqué par le Souverain Pontife [immediate sibi ab eodem Pontifice impertita]”. Nous avons rappelé cet enseignement dans la lettre encyclique, à vous destinée, Ad Sinarum gentem : “Le pouvoir de juridiction, qui est conféré directement au Souverain Pontife par le droit divin, les évêques le reçoivent du même droit [divin] mais seulement à travers le Successeur de saint Pierre”. L’opinion inverse doit être logiquement abandonnée comme étant — implicitement — sinon téméraire et fausse, à tout le moins improbable"(ibid.).
           
        Soit dit en passant, ne soyons pas surpris de ces hésitations quant à formuler le dogme dans une "sententia finalis terminativa" (Dom Paul Nau) au cours de l'histoire ecclésiastique, rien là que de très-normal, le Dépôt de la Foi, le Donné révélé, depositum fidei, n'est pas en effet un catalogue de règles mais avant tout la Vie du Christ en son Église, que l'avancement des siècles, sous l'inspiration du Saint-Esprit, désenveloppe harmonieusement à l'intelligence des fidèles sous forme doctrinale (sans que ne s'y trouve jamais aucune vraie contradiction, comme le veulent les modernistes), quand bien même tout le fond doctrinal se trouve bien sûr déjà dans l'Église dès sa naissance au pied de la croix du Salut. On pouvait déjà aussi noter, quant à la doctrine de la Légitimité pontificale, une pareille hésitation doctrinale à laquelle Pie XII, là encore, mettra un terme, autour de la question : Le pape est-il vrai pape dès le moment de son élection conclavique approuvé par lui ou seulement au moment de son intronisation-couronnement, ayant lieu rituellement dans l'octave de ladite élection conclavique ? Dans l'Ancien-Régime et plus généralement depuis la Renaissance, les papes opinaient pour l'intronisation-couronnement, mais les papes modernes, surtout Pie XII, décidèrent qu'un pape est vrai pape dès son élection conclavique approuvée par lui, et non pas seulement à son couronnement ou intronisation.
           
        Mais revenons à notre sujet. Ce bon exposé de la question nous permet déjà d'avoir les idées très-claires sur l'origine de la juridiction chez l'évêque, la juridiction en amont : elle est toute entière dans la main du pape. C'est le pape qui donne formellement la juridiction à l'évêque, et il la donne de manière discrétionnaire, à qui il veut et comme il veut, c'est-à-dire en délimitant selon sa seule volonté pontificale la portion du troupeau des fidèles du Christ donnée à gérer par l'évêque.
           
        Mais il nous faut maintenant impérativement poser la doctrine catholique quant à la juridiction épiscopale en aval, c'est-à-dire définir son statut théologique après que l'évêque en ait été légitimement institué par le pape. Car c'est là que se situe notre problème, le nœud gordien à dénouer. Or, il s'en faut qu'une fois canoniquement donné par le pape à l'évêque, le pape ait le même pouvoir discrétionnaire sur le pouvoir de juridiction épiscopal en aval que celui dont il disposait pour ledit pouvoir en amont, de par la Constitution divine même de l'Église fondée par le Christ quant à l'Ordre épiscopal ! Le pape, en effet, une fois canoniquement donné à l'évêque le pouvoir de juridiction, n'a pas plus de pouvoir sur lui que l'évêque le possédant légitimement, ils ont tous les deux à parité, de droit divin, le même pouvoir sur lui, pape et évêque, évêque et pape. C'est ce point extrêmement important que n'ont pas compris, ou plutôt n'ont pas voulu comprendre, les concordataires (à commencer par Pie VII), qui ont tous passionnellement foulé aux pieds la doctrine sur cela, aux fins mauvaises d'autoriser le pape à faire le Concordat dont le premier point préliminaire était, nous l'avons vu, la destitution du corps épiscopal français.
           
        Expliquons-la bien, cette doctrine, si importante pour notre sujet, de la juridiction épiscopale en aval. Avant de donner à l'évêque le pouvoir de juridiction, celui-ci, en effet, est à l'entière discrétion du pape ; mais après l'avoir donné, et immédiatement après et non médiatement, le pouvoir de juridiction donné à l'évêque n'est plus du tout à la discrétion du pape, parce que, rien qu'en le donnant, le pape a mis immédiatement en œuvre un lien sponsal sacré créé par le Saint-Esprit entre l'évêque institué et son église particulière qui devient son épouse, également entre l'Ordre et la juridiction de l'évêque sur l'objet de l'église particulière épousée, par lequel lien sponsal sacré, qui a plusieurs objets, le droit divin épiscopal joue automatiquement, se met automatiquement en œuvre. L'Église percevait si bien et si fortement le lien sponsal sacré entre l'évêque institué et son église-épouse particulière, qu'elle interdisait très-sévèrement les translations d'un siège épiscopal à un autre, ce qui eut lieu au moins jusqu'au IXème. Tellement l'évêque, une fois canoniquement institué, est considéré comme l'époux de son église particulière, et alors joue pour lui instantanément la grande règle de l'indissolubilité du mariage. C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, l'élection au Siège de Pierre était toujours doublée du sacre épiscopal de l'élu, car, avant le IXème siècle, celui qui devait être le nouveau Vicaire du Christ n'était jamais évêque.
           
        Le pouvoir juridictionnel de l'évêque légitimement institué par le pape est à partir de là théandriquement immédiatement lié à son pouvoir d'Ordre, dans l'unité du droit divin épiscopal mis en œuvre. "Avec ceci, il reste vrai que les deux pouvoirs sont un, d’une unité d’ordre, car l’un dépend de l’autre dans son exercice et c’est pourquoi ils sont le plus souvent sinon ordinairement exercés par un seul et même sujet. Dans le passage déjà cité, Charles Journet a soin de le préciser. «Le pouvoir d’ordre et le pouvoir de juridiction sont deux pouvoirs réellement distincts. Ils ne sont pas cependant, disons-le ici déjà succinctement, indépendants l’un de l’autre»" (Gleize, ibid.).
           
        Ce qui signifie qu'une fois intronisé canoniquement par le pape dans son église particulière, alors, les deux droits divins qui fondent l'Église Universelle, celui du pape et celui de l'évêque, sont tous deux à équiparité en présence dans l'évêque institué, à parfaite égalité, l'un en regard de l'autre dans la Charité de Dieu, et qu'on ne saurait plus du tout supposer sans attenter mortellement à la Constitution divine de l'Église que l'un, tout seul, aurait droit de supprimer l'autre sans son formel accord, sans devoir en conclure ipso-facto que l'Église est, par-là même, radicalement détruite. Ce qui signifie évidemment que le pape Pie VII n'avait absolument pas le droit de destituer les évêques légitimes de toute la France de son seul propre mouvement, motu proprio, sans que lesdits évêques concernés, à parité de pouvoir avec lui, ne donnassent leur exprès et formel accord à cette destitution, sous peine d'invalidité radicale et ipso-facto de ladite destitution. Et, on l'a déjà compris, le même raisonnement est à faire pour la "destitution" par le pape François de Mgr Strickland...
           
        C'est précisément cette doctrine très-catholique des épousailles de droit divin de l'évêque avec son église particulière, de soi indissolubles une fois l'évêque canoniquement institué par le pape, doctrine qui existe dès les assises de l'Église, que vont rappeler d'une manière très-édifiante les évêques français Réclamants dans leurs Réclamations canoniques et très-respectueuses adressées à notre très-saint Père Pie VII, par la Providence divine, Souverain Pontife, contre différens Actes relatifs à l'Église Gallicane, 1804 (cf. https://books.google.fr/books?id=hp7ugYcbWSEC&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false).
           
        Doctrine très-catholique disais-je, dont il faut remarquer avec grand'soin que si elle avait été respectée par Pie VII, qui se serait retranché derrière elle dans un triomphant Non possumus (Nous ne pouvons pas destituer validement les évêques de France par notre seul pouvoir pontifical, il Nous faut obligatoirement leur libre accord), comme il aurait été catholiquement tellement souhaitable qu'il le fît et comme nous verrons tout-à-l'heure son prédécesseur, Pie VI, le faire en 1790, elle aurait instantanément dressé un rempart infranchissable et inexpugnable qui aurait d'un seul coup d'un seul terrassé Napoléon et son projet maçonnique de détruire la vraie Église de France dans ses évêques, projet auquel s'est hélas accouplé misérablement, traîtreusement, hérétiquement et ignominieusement Pie VII ; doctrine très-catholique qui, en sauvant l'Église de France aurait en même temps empêché radicalement la subversion a-posteriori de l'Église Universelle, mais que les habituels mondains de service, minus habens avec ou sans soutane, petits insectes méprisables, affecteront de connoter péjorativement de gallicane pour mieux l'évacuer, alors qu'elle n'était que romaine et très-catholique...
 
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        Voyons, justement, le remarquable exposé qu'en font les victimes épiscopales du Concordat, ces glorieux évêques de Louis XVI dont l'assiette diocésaine remontait aux assises mêmes de la France très-chrétienne. Voici la première phrase qu'ils prononcent dans leur discours de gémissements plaintifs, comme de doux agneaux innocents qu'on mène à l'abattoir, sans pour autant qu'ils aient, pas plus que le Christ Lui-même, aucun mauvais sentiment contre celui qui les y mène :
           
        "Nous supplions instamment et nous conjurons VOTRE SAINTETÉ, avec un profond sentiment de respect et d'amour, comme il convient à des enfans [sic ; j'avertis dès maintenant que je respecterai l'orthographe vieux-françois du texte], de daigner, dans sa justice, nous écouter favorablement ; nous allons plaider la Cause la plus importante, peut-être, et la plus intéressante qu'il soit possible d'imaginer. (...) Ce témoignage de notre dévouement ne peut paroître suspect à V. S., puisqu'il lui est rendu par des Évêques blanchis dans l'exil et sous le poids d'une longue tribulation, pour avoir toujours enseigné, soutenu, défendu, avec un courage invincible, la primauté d'honneur et de jurisdiction dans l'Église universelle, qui appartient de droit divin au Pontife Romain. Ni les calomnies, ni les invectives ne répandront jamais le moindre nuage sur cette foi dont nous faisons profession, sur cette amour filial pour le Siège apostolique et pour VOTRE SAINTETÉ, que tant de voyages, de dangers, d'exils, de travaux et de souffrances ont annoncés depuis douze ans, et annoncent encore à l'univers" (pp. 11-13).
           
        Voilà comment les victimes innocentes s'exprimaient dans la grande sincérité de leur Foi pure, avec un ton d'humilité touchant qu'il n'est pas besoin de souligner.
 
CharlesLouisDuPlessisDArgentré Jean BaptisteDuPlessisDArgentré Alexandre Angélique de Talleyrand Périgord
De gauche à droite :
Louis-Charles du Plessis d'Argentré (Limoges), Jean-Baptiste du Plessis d'Argentré (Séez), 
Alexandre-Angélique de Talleyrand-Périgord, oncle du "diable boîteux" (Reims),
 
Évêques Réclamants
 
        Puis, les évêques Réclamants, après avoir dit à grande raison que l'affaire de la destitution de leurs sièges épiscopaux par la seule main du pape est une affaire qui ne regarde pas seulement leurs personnes épiscopales, mais qu'elle regarde le statut même de l'Épiscopat catholique dans l'Église, car "il s'agissait du sort de chacun de nos Diocèses en particulier, de toute l'Église gallicane, et même de tout l'Épiscopat catholique" (p. 19), commencent par montrer que le pape n'a eu aucun respect envers leur fonction épiscopale de droit divin, très-notamment en fixant un délai comminatoire, brutal et irrespectueux, napoléonien pour tout dire, de dix jours seulement, si petit pour une si grande affaire, donné pour faire l'envoi de leur démission au pape. Surtout pour ceux qui, parmi eux, n'avaient même pas reçu le bref Tam multa où ce délai leur était intimé, car il y en eût dont ce fut le cas, mais qui furent traités comme s'ils l'avaient reçu, subissant comme les autres le couperet de leur destitution formelle et définitive décrétée dans le bref du 29 novembre 1801.
 
        C'était ignominieusement montrer là que Pie VII n'avait aucun souci des évêques français légitimes, le seul souci qu'il montrait était, encore et toujours, de satisfaire à tout prix la volonté de Napoléon de construire une nouvelle église en France, donc de faire à toute vitesse la démission des évêques français pour satisfaire ce précurseur de l'Antéchrist, sans aucuns égards pour eux, et non seulement quant à leurs personnes privées mais infiniment plus gravement quant à leur fonction épiscopale de droit divin, dont le pape, honteusement indigne de la Chaire de Pierre, montrait qu'il n'avait que foutre...
           
        Le pape, en effet, osait refuser dans le bref Tam multa toute concertation avec les évêques français pour leur démission, leur interdisant en dictateur toute réponse "dilatoire" à sa demande de démission pure et simple. Il est à peine besoin de faire remarquer que c'était là faire usage d'un despotisme absolutiste complètement réprouvé, que la fonction pontificale suprême de Pierre ne permet absolument pas sur la fonction épiscopale, et dont, soit dit en passant, on voit de nos jours le pape François faire un bougre d'usage immodéré... très-notamment dans l'affaire de Mgr Strickland. Il était évident que Pie VII voulait faire l'acte de démission des évêques français tout seul, en tant que pape, et en cela précisément, il outrepassait hérétiquement le pouvoir de la fonction pontificale, comme nous l'avons vu plus haut en définissant le pouvoir juridictionnel des évêques en aval, dont je rappelle ici l'élément essentiel : dès lors que l'évêque est institué canoniquement, les deux droits divins de l'Église, celui du pape et celui de l'évêque, sont théologiquement en équiparité, et donc, la démission d'un évêque ne peut canoniquement se faire qu'avec l'accord de l'évêque (sauf s'il y a faute grave de l'évêque, et que celui-ci ne veut pas donner sa démission : dans ce cas, certes, seul un procès canonique en cours de Rome peut prononcer sa destitution valide ; mais là, avec les évêques Réclamants, nous sommes exactement dans le cas contraire : c'est le pape qui est en faute, et les évêques ont le bon droit pour eux ; en ce cas, si l'évêque, injustement poussé, acculé à démission, ne la donne pas, la destitution par le pape seul ne peut avoir et n'a effectivement aucune valeur canonique).
           
        Mais qu'à cela ne tienne : Pie VII, sans cesse obsédé par Napoléon comme je ne le serai pas d'une prostituée sur le bord du trottoir (dès que le Concordat fut signé, Pie VII entra dans une "agitation, une inquiétude, et le désir d'une jeune épousée qui n'ose se réjouir le jour de son mariage"Histoire religieuse de la France contemporaine de la Révolution à la troisième République, Dansette, p. 175), ne tint absolument aucun compte de ses évêques français, qu'il trucida sans vergogne dans le décret du 29 novembre 1801, sans aucune Charité, avec une brutalité toute... napoléonienne, et, ce qui est à peine croyable, absolument sans aucun égard pour le droit divin épiscopal inhérent à la Constitution divine de l'Église dont il était le suprême Pasteur et Gardien. Laissons les victimes porter leur juste plainte à la barre : "Maintenant V. S. a passé outre ; ce qu'elle ne nous avoit d'abord annoncé qu'à mots couverts [dans le bref Tam multa du 15 août 1801], elle l'exécute aujourd'hui publiquement [dans le bref Qui Christi Domini vices du 29 novembre 1801] ; et elle prononce, à la face de toute I'Église, un décret en vertu duquel ceux d'entre nous dont les libres démissions ne lui sont pas parvenues au 29 Novembre 1801 subiroient un sort parfaitement semblable à celui des Évêques punis par une sentence de déposition. (...) Nos Églises seroient regardées comme vacantes, quoique de notre vivant, et malgré notre refus de nous démettre ; nous-mêmes interdits à perpétuité de tout exercice de la Jurisdiction ecclésiastique, et les actes que nous en pourrions faire à l'avenir, déclarés nuls et invalides" (p. 20).
           
        Nous venons pourtant de voir que le droit ecclésial fondé sur le droit divin, et du pape, et de l'évêque, exigeait que dans l'affaire d'une démission épiscopale sans qu'il y ait aucune faute grave de l'évêque, il y eut obligatoirement concertation et accord entre le pape et l'évêque pour ladite démission. Sans quoi, tout est frappé d'invalidité formelle. Le pape Pie VII était donc, dans sa procédure, ou plutôt son absence de procédure (dont on voit un exemple de nos jours dans la "destitution" forcée de Mgr Strickland), doublement en faute, et en faute gravissime : premièrement, il n'avait pas à prononcer une sentence de déposition de l'évêque, qui en l'occurrence était rien moins, excusez du peu, que tout un corps épiscopal national de 82 évêques, laquelle, théologiquement, ne valait rien sans l'accord formel des évêques de France, mais de plus, le droit lui faisait obligation d'en débattre préalablement avec l'évêque. Ce qui signifie bien évidemment qu'il n'avait rigoureusement pas le moindre droit d'exiger des évêques français qu'ils ne fassent aucune demande d'explication quant à cette demande de démission, mais juste de la donner sans aucun commentaire, comme il osa scandaleusement le formuler quasi manu militari dans Tam multa, en leur interdisant avec une brutalité inqualifiable quoique enrobée dans du papier de soie, toute réponse "dilatoire" à sa demande de démission !
           
        Dilatoire veut dire, en effet : "Qui tend à différer l'instruction ou le jugement d'une affaire, d'un procès" (Cnrtl). Or précisément, la justice théologique de l'affaire EXIGEAIT TOUT AU CONTRAIRE qu'il y eût ajournement de la demande de démission des évêques français tant qu'elle ne fut pas instruite par lesdits évêques français à parité et de concert avec le pape ! Le pape, aux antipodes du bon droit et de la justice, exigeant de traiter la question tout seul en excluant formellement l'avis des évêques dont il ne voulait aucune "réponse dilatoire", voulait là une procédure complètement hérétique, eu égard au droit divin épiscopal. Et c'est là qu'on est bien obligé de remarquer, atterré, que le démocrate pape Pie VII rentrait étonnamment bien dans les vues antichristiques de Napoléon, comme pied dans chausse exactement de même pointure ; indigné, on le voit ne pas du tout reculer devant l'attentat mortel contre la Constitution divine de l'Église fondée par le Christ quant au droit divin épiscopal, pour œuvrer de son pontifical côté et satisfaire à la mise en œuvre du plan antichristique de Napoléon... Je ferai remarquer ici qu'on détecte déjà dans Pie VII, dès le Concordat de 1801 donc, toute l'attitude radicalement pro-antichristique qu'on est affligé et plus encore encoléré de sainte-colère de constater dans François...
 
Louis Joseph de Montmorency Laval 1 arthur richard dillon quartier saint cyprien toulouse Louis Hilaire de Conzié
De gauche à droite : Cardinal-évêque Louis-Joseph de Montmorency-Laval (Metz), 
Arthur-Richard Dillon (Narbonne), Louis-François-Marc-Hilaire de Conzié (Arras),
 
Évêques Réclamants
       
        Mais après s'être justement plaint saintement, avec douceur et sans passion, de leur hérétique mise à l'écart par le pape dans l'affaire de leur démission, les évêques français vont maintenant faire appel au droit, ce qui va convaincre la procédure de Pie VII d'hérésie dans l'affaire de leur démission sans leur accord exprès (dans ce qui va suivre, je vais mettre en gras voire en rouge ce qui, dans leur texte, fait allusion au droit divin épiscopal foulé aux pieds scandaleusement par le pape Pie VII, comme vil sanglier saccageant la Vigne du Seigneur) :
           
        "D'ailleurs, comment faire un crime à des Évêques de ces réponses dilatoires, dont l'objet n'était pas de chercher des prétextes pour reculer leurs démissions, mais d'exposer clairement les motifs [en italiques dans le texte] qui leur imposoient l'obligation de les différer ; de ces réponses, dans lesquelles ces mêmes Évêques, avec tous les égards et toutes les marques d'une soumission filiale, ainsi qu'il convenait, ont représenté à V. S. ce qu'ils craignoient pour leurs Diocèses respectifs, pour leur Église nationale de France, pour tout l'Ordre épiscopal, pour l'Église catholique toute entière, pour le Saint-Siège lui-même, si l'on consommoit les projets dont l'exécution paroissoit déjà entreprise ; de ces réponses, dans lesquelles ils ont supplié, conjuré V. S., avec de si vives instances, de leur communiquer, avec bonté, les motifs qu'elle avoit de se rassurer et de se livrer à la confiance pour l'avenir, s'il pouvoit y en avoir quelques-uns dans des conjonctures aussi extraordinaires ?
           
        "Votre Prédécesseur, Benoit XIV, de glorieuse mémoire, a enseigné que des Évêques qui se conduisent de la sorte [en faisant leurs représentations au pape], non-seulement sont exempts de tout reproche, mais qu'ils ne font que s'acquitter d'un devoir indispensable. «Un Évêque, disoit ce Pontife (dans son Traité du Synode diocésain), qui a lieu de craindre qu'une loi du Siège apostolique ne soit préjudiciable à son Diocèse, a non-seulement le droit de faire ses représentations au Pontife Romain, mais il y est même étroitement obligé» (Benoît XIV, Traité du Synode diocésain, Liv. 9, ch. VIII, n° 3).
           
        "Pie VI, pareillement de glorieuse mémoire, votre Prédécesseur immédiat, n'a pas moins expressément justifié d'avance les Évêques françois qui, dans l'affaire importante dont il est question et qui concerne leur Église, exposent, avec respect, leurs sentimens à V. S., lui qui, dans ses Lettres données à Rome à Saint-Pierre, le 10 Mars 1791, les prioit, les supplioit si ardemment de lui faire parvenir leurs avis. «Le Roi nous demande entr'autres choses, écrivoit Pie VI, d'exhorter les Métropolitains et les Évêques à consentir à la division et à la suppression des Églises métropolitaines et épiscopales..... cette demande du Roi prouve clairement qu'il reconnoît lui-même la nécessité de consulter les Évêques dans une pareille circonstance, et qu'en conséquence il est juste que nous ne décidions rien avant de les avoir entendus. Ainsi nous vous demandons un exposé fidèle de vos avis, de vos sentimens, de vos résolutions, signés de tous, ou du plus grand nombre. Nos idées s'appuyeront sur ce monument comme sur une base solide ; il sera le guide et la règle de nos délibérations ; il nous aidera à prononcer un jugement convenable, également avantageux pour vous et pour tout le Royaume de France..... Nous vous conjurons de nous faire connoître comment nous pourrions parvenir à concilier les esprits. La grande distance des lieux ne nous permet pas de juger quels sont les moyens les plus convenables. Mais vous, placés au centre des événemens, vous trouverez, peut-être, quelqu'expédient qui ne blesse point le Dogme catholique, ni la Discipline universelle de l'Église. Nous vous prions de nous le communiquer, afin que nous puissions l'examiner avec soin et le soumettre à une mûre délibération» (pp. 22-25).
           
        "Pie VI, Prédécesseur de V. S., avoit jugé, dans une affaire absolument semblable [à celle du Concordat], que le Chef visible de l'Église devoit la traiter d'une manière bien différente. Il n'ignoroit pas à quel triste état se trouvoit réduite la Religion en France, lorsqu'on lui demandoit [en 1791] d'approuver la nouvelle circonscription des Diocèses de France, décrétée par l'Assemblée nationale (alors investie du pouvoir) comme le Gouvernement actuel a signifié à V. S. qu'il vouloit pareillement une nouvelle division des Diocèses. Voici néanmoins de quelle manière s'expliqua Pie VI sur la proposition qui lui étoit faite. «On nous demande, dit-on, d'approuver cette division des Diocèses décrétée par l'Assemblée nationale. Mais ne faut-il pas que nous examinions mûrement si nous devons le faire ?..... car il ne s'agit pas ici de quelques changemens dans un ou deux Diocèses, mais du bouleversement universel de tous les Diocèses d'un grand Empire. Il s'agit de déplacer une multitude d'Églises illustres, de réduire des Archevêques au simple titre d'Évêques, nouveauté expressément condamnée par Innocent III, qui fit à ce sujet les reproches les plus vifs au Patriarche d'Antioche..... Ajoutez à cela qu'avant de consentir à une telle opération, il nous faudroit consulter les Évêques dont il s'agit d'abolir les droits ; prononcer sur leur sort sans les avoir entendus, ce seroit violer à leur égard, les lois de la justice.... » (Lettres apostoliques du 19 Mars 1791)" (pp. 50-51).
                 
        "Il est bon d'observer que dans cette nouvelle circonscription des Diocèses voulue par le Gouvernement actuel de France, se rencontrent précisément les mêmes inconvéniens dont vient de parler Pie VI, et qu'il a jugés aussi graves que difficiles à lever. (...) Mais surtout, ce qu'il ne faut pas oublier et ce qui est ici le point le plus important, c'est que Pie VI a déclaré hautement et à la face de toute l'Église, dont il étoit le Chef à la place de Pierre, qu'avant d'approuver la nouvelle division des Diocèses, il étoit absolument nécessaire d'interroger les Évêques des droits desquels il s'agissoit, de peur qu'on ne l'accusât d'avoir violé, à leur égard, les lois de la justice" (pp. 51-52).
 
JosephFrançoisDeMalide LouisAndréDeGrimaldi Jean Louis dUsson de Bonnac
De gauche à droite : Joseph-François de Malide (Montpellier),
Louis-André de Grimaldi (Noyon), Jean-Louis d'Usson de Bonnac (Agen),
 
Évêques Réclamants
       
        Les Évêques Réclamants faisaient là allusion à l'attitude du pape Pie VI lorsque l'Assemblée Constituante, en 1790-91, complotait déjà de détruire l'Église de France, non seulement par la Constitution civile du Clergé, mais déjà, donc, en voulant la destruction géographique des diocèses existants en bouleversant et saccageant toute la structure diocésaine érigée au fil de longs siècles sous l'inspiration et l'Action divine du Saint-Esprit en France. C'est cependant une chose qu'ils ne purent réaliser parce que le pape Pie VI s'y opposa, comme le font fort bien remarquer nos évêques Réclamants, mais que Napoléon, reprenant le projet antichristique des "grands-ancêtres", réalisa... par la main scandaleusement lâche et traîtresse du pape Pie VII. Notons bien, en effet, que tout seul, Napoléon n'y serait pas plus arrivé que les révolutionnaires de 1790 ! Le comble, c'est qu'il y arriva... "grâce" au pape !! "Alors que le refus massif avait, en 1791, aux yeux du pouvoir, rendu de fait les évêques démissionnaires, Bonaparte a l’habileté en 1801 de charger le pape lui-même de la basse besogne de demander sa démission à l’épiscopat réfractaire, et même, comble d’ironie, aux évêques constitutionnels" (Histoire des catholiques de France, du XVe siècle à nos jours, Lebrun, p. 276, cité par Decroix, ibid.). Or, il n'est pas besoin de souligner beaucoup, dans ce qu'on vient de lire, que le pape Pie VI, en l'an 1791 qui voit le même cas de figure qu'en 1801 avec le Concordat, respectant la Constitution divine de l'Église en la matière et le droit divin épiscopal quant à la structure géographique des diocèses, met entièrement dans les mains des évêques français concernés la décision à prendre en l'occurrence. On est exactement, et très-catholiquement, aux antipodes du comportement hérétique de Pie VII... à dix ans d'écart seulement.
           
        L'attitude du pape Pie VI a d'autant plus de poids qu'elle est soutenue par tout le Collège cardinalice, comme le soulignent à juste titre nos évêques Réclamants : "Il ne faut pas oublier d'observer que Pie VI témoigne en avoir agi ainsi d'après l'avis des Cardinaux assemblés ; car voici comment s'en explique ce vénérable Pontife, dans ses Lettres monitoriales, données à Saint-Pierre, le 13 Avril de la même année 1791 : «S'étant assemblés deux fois pour en conférer, l'avis unanime des Cardinaux de la Sainte Église romaine, appelés à notre conseil, d'après un examen sérieux et approfondi, a été qu'il falloit demander aux Évêques de France leur sentiment sur ce sujet»" (pp. 25-26).
             
        Devant la volonté des sans-culottes de détruire les diocèses de France, ce qui touche au droit divin des évêques français canoniquement institués dans lesdits diocèses, on a donc deux attitudes pontificales :
           
        — En 1791, le pape Pie VI et ses cardinaux, refusant ce qui est presque un sacrilège, ont l'habileté des fils de la Lumière de se retrancher derrière l'autorité des évêques de France pour soutenir leur propre cardinalice et pontifical refus de toucher à la structure des diocèses ;
           
        — En 1801, le pape Pie VII et ses cardinaux, acquiesçant à ce quasi sacrilège, ont l'habileté des fils des ténèbres de court-circuiter les évêques de France pour autoriser Napoléon dans le Concordat, par un abus hérétique d'autorité pontificale, à détruire les diocèses, attentant ainsi hérétiquement non seulement au droit divin épiscopal mais encore, comme vont le souligner plus loin les évêques Réclamants, à la Constitution divine de l'Église.
           
        C'est donc peu dire qu'ils étaient plus que fondés à conclure ainsi : "Il est indubitable que le Gouvernement civil n'a aucun droit de prescrire des règles sur cette matière [soit toucher à la structure des diocèses, soit démissionner leurs évêques] ; et que de l'autre, c'est une chose avouée de tout le monde, qu'il n'existe aucune loi ecclésiastique qui enjoigne aux Évêques d'abdiquer l'Épiscopat, promptement et sans en connoître les raisons, dès que cette démission leur est demandée par un Souverain Pontife (...). Enfin, comme ces Prélats ne sont accusés d'aucun crime, qu'on n'a formé contr'eux aucune plainte, qu'on n'a entamé aucune procédure, les règles les plus sacrées et les plus inviolables de tous les droits s'opposent invinciblement à ce qu'on prononce contre eux un jugement de condamnation" (pp. 26 & 27).
           
        "Qui pourroit encore douter du grand préjudice que portent à la Religion le mépris des Saints Canons, et les innovations introduites dans la Discipline générale de l'Église, quand il est manifeste que c'est pour avoir abandonné le chemin frayé par nos Pères, que les choses en sont venues au point (sans doute contre l'intention de VOTRE SAINTETÉ) que si l'on ne remédie promptement au mal, et si on n'en arrête les progrès, c'en est fait de la Religion ? Car, comment peut-elle subsister, lorsqu'on foule aux pieds les droits sacrés de l'Épiscopat ("Cette cause [de la destitution des sièges épiscopaux par le pape seul] regarde l’épiscopat de toute la catholicité" ― Lettre de Mgr de Coucy du 4 novembre 1801, cité par Decroix, ibid.) ; qu'on ébranle la Constitution de l'Église ; qu'on ne lui laisse plus qu'une existence précaire, incertaine, qu'on la met sous la dépendance de tous les Gouvernemens civils, même dans les choses qui sont le plus incontestablement du ressort de la Puissance spirituelle ?" (pp. 43-44).
           
        "Mais, ce qui n'est pas moins déplorable, c'est la manière dont on s'y est pris pour exécuter ces innovations. Car, pour en venir à cette suppression et extinction de tant d'Églises, opération jusqu'alors sans exemple, on n'a observé aucunes formes canoniques. Tout s'est fait sans entendre ni les Peuples, ni les Chapitres, ni même les Évêques, des droits desquels il s'agissoit, et auxquels cependant on a refusé la liberté d'exposer leurs raisons. (...) Quoique les Archevêques et les Évêques qui occupoient leurs Églises, voyant les dangers extrêmes dont la Religion catholique étoit menacée, eussent refusé leurs démissions ; quoiqu'ils demandassent à être entendus dans des affaires aussi importantes et qui les touchoient de si près, ils ont cependant été repoussés ; ils n'ont été ni interrogés, ni écoutés" (pp. 48-49).
 
PierreJosephDeLastic 560px Mgr Jean François de La Marche Pierre Augustin Godart de Belbeuf 
 De gauche à droite : Pierre-Joseph de Lastic (Rieux, émérite),
Jean-François de La Marche (Léon), Pierre-Augustin de Belbeuf (Avranches),
 
Évêques Réclamants
       
        Puis, de poursuivre en mettant le doigt là où ça fait vraiment mal : "Lorsque ce vénérable Pontife [Pie VI] proclamoit d'une manière si solemnelle, que cette dette du Chef de l'Église envers les Évêques étoit d'une étroite et rigoureuse justice, il étoit bien éloigné de penser (comme on l'a souvent répété depuis) que le pouvoir de faire des opérations dont, pour de puissantes raisons, il se croyoit obligé de s'abstenir, appartenoit à la primauté de son Siège non pas, à la vérité, dans les circonstances ordinaires, mais dans les temps orageux. Car, nous le demandons, en quelles conjonctures se trouvoit-il placé lui-même, lorsqu'il parloit ainsi ?, étoit-ce dans des circonstances ordinaires, ou plutôt n'étoit-ce pas au milieu de la plus furieuse tempête [en 1790, veulent dire les évêques Réclamants, la situation politique et religieuse était aussi bousculée et terrible qu'en 1800] ? Et cependant il a prouvé par sa conduite combien il étoit persuadé que les lois de la justice ne pouvoient pas se prêter aux variations et à l'inconstance des événemens humains, et que les difficultés des temps, quelques terribles qu'elles fussent, n'autorisoient jamais le Pontife Romain à enfreindre ces lois à l'égard de qui que ce fût puisque la primauté du Saint-Siège apostolique a été établie par Celui-là même qui est l'unique et divine source de tout droit et de toute justice [contrairement à Pie VII qui osa invoquer dans Tam multa "la nécessité urgente des temps", formule très-moderniste soit dit en passant, pour s'autoriser à renverser les lois de la Constitution divine de l'Église quant au droit divin épiscopal...].
           
        "Il falloit d'autant plus se donner de garde de violer ces lois de la justice à l'égard des Évêques, que leurs droits sacrés n'ont pu être blessés dans cette affaire, comme ils l'ont été réellement, sans que la Constitution de l'Église ne fût en même-temps ébranlée.
           
        "Et, en effet, conclure une affaire d'une telle conséquence sans l'intervention des Évêques qui s'y trouvoient spécialement intéressés ; juger seul des circonstances infiniment graves et périlleuses dans lesquelles, pour prévenir ou pour détourner le mal, il étoit plus nécessaire que jamais de s'aider des lumières et des conseils de plusieurs, comme l'ont fait tant de fois les Souverains Pontifes, en sollicitant du haut de leur Chaire les secours de leurs frères les Évêques [ainsi que Pie VI lui-même l'avait fait, comme on l'a vu, en 1791] ; décider, dans des temps si critiques, du sort, de l'état, de tous les biens, de tous les droits de tant d'Églises, non-seulement sans interroger les Évêques des intérêts desquels il s'agit, mais sans vouloir même les écouter lorsqu'ils demandent la liberté de dire leurs raisons, comme ils ont droit de le faire ; n'est-ce pas agir comme si Dieu n'avoit établi qu'une seule puissance pour le Gouvernement de l'Église, celle du Pontife Romain ? Or, telle n'est point la Constitution que Jésus-Christ a donnée à son Église.
           
        "Que les Évêques soient appelés de Dieu à prendre part au Gouvernement de l'Église, c'est ce qu'enseignent de concert les Livres saints et la Tradition universelle. Car ce n'est pas seulement à Pierre et à ses successeurs, mais à tous les Apôtres et à leurs successeurs que Jésus-Christ a dit : «Allez donc, enseignez toutes les Nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit..... Et voilà que je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la consommation des siècles» (Matth XXVIII, 19-20).
           
        "On ne doit donc pas être surpris de ce que saint Augustin écrivoit au Pape saint Boniface 1er : «La surveillance pastorale nous est commune à nous tous qui sommes Évêques, quoique vous teniez un rang plus éminent dans le gouvernement de l'Église» (Saint Augustin, Liv. I, Contre deux lettres des Pélagiens, ch. I, n° 2). Nous lisons aussi dans saint Cyprien : «Il n'y a qu'un seul Épiscopat ; chaque Évêque en a reçu et en exerce solidairement une portion» (Saint Cyprien, De l'unité de l'Église). Le Pape saint Jean 1er écrivoit à des Évêques : «Le soin de l'Église a été confié à vous et à nous : travaillons donc pour tous» (Saint Jean 1er, Pape, lettre à Zacharie, Archevêque).
           
        "Mais comment les Évêques auroient-ils été établis par le Saint-Esprit pour gouverner I'Église de Dieu ?, comment la Sainte Église leur auroit-elle été confiée, ainsi que le dit le Pape saint Jean 1er ?, comment la surveillance pastorale leur seroit-elle commune à tous, ainsi que l'écrit Saint-Augustin ?, comment enfin pourroit-on dire, avec saint Cyprien, que chaque Évêque est chargé solidairement d'une portion de cet Épiscopat unique que Jésus-Christ a institué, si, sans avoir le moindre égard pour eux, sans les interroger, sans vouloir même les écouter, lorsqu'ils demandent à être entendus, on peut validement décider du sort, de tous les biens, de tous les droits d'un grand nombre d'Églises qui leur ont été confiées canoniquement ; en supprimer, annuller et éteindre à perpétuité le titre, le nom et l'état tout entier ? S'il en étoit ainsi, ne faudroit-il pas (ce qu'à Dieu ne plaise) changer le langage des Livres-Saints et de toute la Tradition, et dire dorénavant que le Pape seul a été établi par le Saint-Esprit pour gouverner l'Église ; que c'est à lui seul qu'elle a été confiée ; qu'à lui seul appartient la surveillance pastorale, à l'exclusion de tous les Évêques ; que lui seul enfin possède tout l'Épiscopat ; en sorte qu'il ne peut être solidairement partagé ni exercé par chacun des Évêques ?
           
        "Car (ce qu'on n'a jamais vu dans l'Église jusqu'à ce jour) il a été décrété, dans ces Lettres [Tam multa, du 15 août 1801 & Qui Christi Domini vices, du 29 novembre 1801], que de légitimes Évêques seroient chassés de leurs Sièges canoniquement érigés et canoniquement subsistans ; et cela, sans aucune procédure, sans aucune forme de jugement, du propre mouvement [motu proprio] du Chef de l'Église, et comme en vertu de sa Providence pontificale [il faut hélas remarquer que non seulement Pie VII procédait dans l'hérésie, mais en outre, il le faisait avec un orgueil peu croyable, ce qui est perceptible dans la bulle de saccage révolutionnaire des diocèses de France du 29 novembre 1801, intitulé Qui Christi Domini vices, qui signifie : Celui qui est le vicaire du Christ...].
           
        "Quel Évêque catholique pourra à l'avenir se croire en sûreté sur son Siège ? [Mgr Strickland en sait quelque choses...], comment les Fidèles pourront-ils se reposer sur la sollicitude paternelle de leurs Évêques canoniquement institués, s'il est permis, même sous le prétexte d'une nouvelle circonscription de Diocèses, de chasser de légitimes Évêques de leurs Sièges canoniquement érigés et canoniquement subsistans, sans procédure, sans aucune forme de jugement, du propre mouvement du Pape, et en vertu de sa Providence pontificale ; ce qui supposeroit que l'Épiscopat n'a aucune stabilité, et qu'il peut être révoqué au gré du Pontife Romain ? Mais assurément, Jésus-Christ n'a pas établi son Église, sous cette condition qu'elle seroit composée d'Évêques révocables à la volonté d'un seul homme, pas même de celui qu'il leur a donné pour Chef et pour Supérieur.
           
        "Dans toutes les Églises catholiques et de temps immémorial, on a cru et enseigné unanimement, que la dignité Épiscopale étoit stable et inamovible ; en sorte que les Évêques canoniquement institués ne peuvent être privés de leurs Sièges selon le bon plaisir de qui que ce fût, et sans une sentence juridiquement prononcée, après les instructions et procédures requises.
           
        "Mais Saint Grégoire le Grand s'exprime là dessus d'une manière encore plus précise : «Si nous ne conservons pas à chaque Évêque la Jurisdiction qui lui appartient, que faisons-nous autre chose, que mettre le trouble et le désordre dans l'Église, tandis que c'est à nous à y maintenir la paix» (Saint-Grégoire le Grand, Liv. XI, lettre 37, à Romain, défenseur de Sicile ; alias, liv. IX, Lett. 324) ? Ce saint Pontife nous fait assez entendre par ces paroles, combien il étoit éloigné de s'attribuer le pouvoir d'interdire à de légitimes Archevêques ou Évêques, l'exercice de toute Jurisdiction ecclésiastique dans leurs Diocèses respectifs, sans examen, sans procédure, sans aucune forme de jugement, de son propre mouvement et en vertu de sa Providence Pontificale ; et de déclarer, nonobstant le défaut de démission de leur part, leurs Églises et Diocèses entièrement libres, afin d'en disposer et ordonner selon une forme nouvelle.
           
        "[Voici] ce que disoit Pie VI, il y a quelques années, aux Évêques de France, touchant la manière dont peut être rompu le lien spirituel qui unit les Évêques à leurs Églises : «C'est à vous maintenant que nous adressons la parole, VÉNÉRABLES FRÈRES qui tous, à l'exception d'un très-petit nombre ; avez si bien connu vos devoirs envers votre troupeau, qui, foulant aux pieds tous les intérêts humains, avez fait une profession publique de la saine doctrine, et qui avez jugé que vos soins et vos travaux devoient être proportionnés à la grandeur du péril..... Le spectacle de votre conduite est pour nous une consolation bien douce, et nous vous exhortons instamment à persister dans vos généreuses résolutions. Retracez-vous sans cesse le souvenir de l'alliance spirituelle qui vous unit à vos Églises, et qui ne peut être rompue que par votre mort, ou par notre Autorité apostolique, en suivant les formes que nous prescrivent les Canons. Restez-y donc inviolablement attachés (Lettres Monitoriales du 13 Avril 1791)».
           
        "Or, il n'y a que deux formes canoniques selon lesquelles l'Autorité apostolique puisse rompre le lien de ce mariage spirituel des Évêques avec leurs Églises : la première, quand le Souverain Pontife, conformément à la discipline actuelle de l'Église, accepte la libre démission d'un Évêque faite entre ses mains ; «car l'abdication de l'Épiscopat...... est nulle et invalide aux yeux de l'Église, tant qu'elle n'a pas été ratifiée par le consentement et l'autorité du Pontife Romain» (Lettre de Son Éminence, Monseigneur le Cardinal de Zélada, écrite par ordre de Pie VI, aux Grands-Vicaires du Diocèse d'Autun, le 2 Avril 1791). La seconde, quand on prononce contre un Évêque une sentence juridique de déposition, après avoir exactement observé toutes les formalités requises pour la validité d'un jugement, selon les règles, usages et coutumes de chaque Église.
           
        "Mais c'est une chose inouïe dans toute l'antiquité, QUE LE PROPRE MOUVEMENT DU PAPE [MOTU PROPRIO] SOIT UNE FORME CANONIQUE, en vertu de laquelle puisse être validement dissous le mariage spirituel qui unit les Évêques à leurs Églises, sans qu'il soit besoin d'examen, de discussion, ni de jugement.
           
        "Au contraire, Pie VI ayant, à l'exemple des anciens Pères, comparé à l'union conjugale, le lien spirituel qui attache les Évêques à leurs Églises («Il est hors de doute que l'Église de l'Évêque est son Épouse» — Saint Calixte 1er, Pape, Lettre 2, aux Évêques des Gaules ; «Puisqu'un lien spirituel est plus fort qu'un lien corporel, on ne doit pas douter que le Dieu tout-puissant n'ait réservé à son jugement seul de dissoudre le mariage spirituel qui existe entre l'Évêque et son Église» — Innocent III, chap. Inter corporalia 2, de translation Episcopi), nous a clairement enseigné par là que ces Évêques, liés à leurs Épouses par l'institution divine, n'en peuvent être arbitrairement séparés par qui que ce soit, et qu'il ne peut y avoir d'autre manière de rompre une si sainte alliance, que celle qui a été établie et consacrée par les loix de l'Église, ou par une Tradition constante et perpétuelle. Or, selon les lois de l'Église, et d'après une Tradition non-interrompue, un Siège épiscopal, occupé canoniquement, ne peut devenir vacant que par la mort du légitime titulaire, ou par sa démission volontaire et acceptée [par le pape], ou enfin par une sentence de déposition prononcée juridiquement, après que la cause a été instruite, et en observant religieusement toutes les formalités prescrites pour la validité de pareils jugemens.
           
        "Le lien spirituel qui unit les Évêques canoniquement institués avec leurs Églises, subsiste donc dans son entier et dans toute sa force, tant qu'ils vivent, ou qu'ils n'ont pas donné librement leurs démissions, ou qu'ils n'ont pas été dépossédés par une sentence juridique, rendue selon les formes requises par les saints Canons.
           
        "Mais tant que ce lien spirituel subsiste dans son entier, les Églises, qui ont leurs Époux, ne peuvent, en aucune manière, être réputées libres, ni l'être effectivement. D'où il suit, qu'en donnant à ces Églises, ou à quelques portions d'entr'elles, de nouveaux Évêques, même sous prétexte d'une nouvelle circonscription de Diocèses, on introduit dans l'Église du Dieu vivant, un état de choses entièrement contraire à sa Constitution, et qui l'expose aux plus grands périls" (pp. 52-78).
           
        L'inconstitutionalité de la procédure, ou plutôt absence de procédure, employé par le pape Pie VII pour destituer les évêques de France, est donc patente et formelle (il en est de même pour la manière dont a été destitué Mgr Strickland, bien évidemment, qui n'est presque qu'une pâle suite, on en conviendra, de l'attentat inouï qui fut commis par le pape Pie VII lors du Concordat envers quatre-vingt deux évêques légitimes...) ; l'attentat mortel contre la Constitution divine de l'Église ne l'est pas moins.
           
        Nos évêques Réclamants le disent fort bien. Continuons à les lire, genou en terre et yeux baissés, comme devant la bonne et sainte Justice de Dieu :
           
        "Sans doute les Évêques qui, se conformant aux avis de Pie VI, rapportés ci-dessus, ont cru devoir s'attacher de plus en plus à leurs Églises, loin de les abandonner, peuvent, du moins, se rendre ce témoignage, que pénétrés de tendresse pour leurs Épouses, ainsi que de vénération pour V. S., ils ont fait provisoirement tout ce qui pouvoit dépendre d'eux, pour prévenir les maux considérables qu'ils prévoyoient, sans peine, devoir résulter de ces étranges innovations ; mais il n'a pas dépendu d'eux d'empêcher qu'elles n'altérassent la Constitution de l'Église. Car, comme d'un côté, il n'est rien de si contraire à cette divine Constitution que le défaut d'unité, et que de l'autre l'unité de l'Église consiste, en grande partie, dans l'unité des Pasteurs, il est impossible que la Constitution de l'Église ne soit point altérée, lorsqu'on donne de nouveaux Évêques à des Diocèses dont les Titulaires, canoniquement institués, sont encore vivans, et continuent de demeurer attachés à leurs Épouses, c'est-à-dire, leurs Églises, puisqu'alors le nœud sacré qui les unit à elles, n'a point été rompu.
           
        "«L'Apôtre dit : “Une femme est liée par la loi, tant que son mari est vivant ; mais lorsqu'il est mort, elle est affranchie de la loi du mariage”. De même l'Épouse de l'Évêque, c'est-à-dire, son Église, lui demeure liée, tant qu'il est vivant. S'il vient à mourir, elle est libre, et peut se choisir un autre époux, pourvu que ce soit dans le Seigneur, c'est-à-dire, en observant les saintes Règles : mais si une Église, du vivant de son Évêque, c'est-à-dire, de son Époux, s'attache à un autre, elle devient adultère» (Saint Calixte 1er, Pape, Lett. 2, aux Évêques des Gaules)" (pp. 78-80).
 
        Les évêques Réclamants sont par trop bien fondés à décrire à présent ce qui va s'ensuivre de l'attentat sacrilège et inouï commis dans le Concordat par Pie VII. Et ici, ces bons évêques, toujours légitimes, mais persécutés, calomniés, humiliés et foulés aux pieds avec une brutalité toute napoléonienne par un pape misérablement et ignominieusement séduit et obsédé de démocratisme et de napoléonisme, vont visiblement user du charisme prophétique divin attaché à leur rang d'Apôtres, ils vont revêtir tout soudain la livrée glorieuse des grands Prophètes de Yahweh Sabaoth, le Dieu des Armées célestes. À genoux dans notre âme, considérons en effet et méditons avec soin à quel point de véracité quasi divine nous voyons tout le XIXème siècle et plus encore le XXème et à l'excès notre début de XXIème, réaliser dans l'Église leurs malédictions divines et sinistres prédictions faites en... 1801 : "Alors l'Église subira toutes les variations que la mobilité des intérêts et des passions du monde introduira dans le Gouvernement temporel («Nous ne croyons pas que la mobilité des intérêts du monde doive rendre l'Église de Dieu sujette à l'instabilité» — Saint Innocent 1er, Lett. 24, à Alexandre, Évêque d'Antioche, chap. 2, n° 2, tom. I, col. 852, édit. de D. Coustant). L'état entier de la Religion deviendra flottant et incertain ; les Souverains Pontifes, jamais tranquilles sur le premier Siège, sans cesse fatigués par d'importunes et vives instances, forcés par l'urgente nécessité des temps, se verront obligés de céder, et paroîtront, en quelque sorte, avoir abandonné les rênes du gouvernement de l'Église. Bientôt les hommes les regarderont moins comme les Vicaires de Jésus-Christ, régnant dans les Cieux, que comme les Ministres de toute Puissance temporelle, quelle qu'elle soit, à qui il plaira de vouloir disposer à son gré des objets mêmes les plus divins et les plus spirituels ; et les maux que souffrira l'Église seront d'autant plus difficiles à guérir, que son Chef visible lui-même deviendra le complice des coups qui lui auront été portés [... n'est-ce pas que cela décrit fort bien François, pour ne parler que de lui parmi les papes modernes post-concordataires...?].
           
        "Ces lugubres pressentimens, cette vue anticipée de tant de calamités, produit sur notre âme une si vive impression de crainte et d'horreur, que nous ne pouvons nous empêcher d'adresser à V. S. la même prière qu'adressoit autrefois au Pape Paschal II, saint Bruno, Évêque de Segni et Abbé du Mont-Cassin. «Ayez pitié de l'Église de Dieu, de l'Épouse de Jésus-Christ, et faites en sorte, par votre prudence, qu'elle recouvre sa liberté (et nous, nous ajoutons : sa Constitution) qu'elle semble avoir perdue» (Baronius, Annales ecclésiastiques, an. IV, n° 24)" (p. 85).
 
 PhilippeFrançoisDAlbignac FH de VS Eveque de Gap Cardinal de la Fare
De gauche à droite :
Philippe-François d'Albignac (Angoulême), François-Henri de la Broüe de Vareilles (Gap),
Anne-Louis-Henri de La Fare, qui deviendra cardinal sous la Restauration (Nancy),
 
Évêques Réclamants
           
        ... "All’urgente necessità dei tempi", osera invoquer Pie VII pour s'autoriser à ses attentats sacrilèges contre la Constitution divine de l'Église, dans Tam multa ("Nous sommes contraints par la nécessité urgente des temps -qui exerce en cela aussi sa force sur Nous- à vous rappeler l’impérieuse nécessité que vous donniez une réponse écrite à cette lettre dans le délai d’au moins dix jours"), osant très-hérétiquement, par cette formule très-moderniste, soumettre la Constitution divine de l'Église donnée aux hommes par le Sacrifice divin de Jésus-Christ pour leur Rédemption et salut éternel, à la volonté mauvaise des hommes, en l'occurrence aux "droits de l'homme" athées, sous les auspices desquels Napoléon voulait construire son novus ordo sæculorum, ce que remarquent bien nos évêques Réclamants, qui poursuivent ainsi : "Depuis dix-huit siècles que la Religion catholique, bâtie sur la pierre ferme, est demeurée inébranlable au milieu de tant d'orages dont elle a été battue, il est souvent arrivé que l'urgente nécessité des temps exerçât son empire, et sur les Papes, et sur les Évêques. Cependant jamais aucun Souverain Pontife n'a, de son propre mouvement, et sous prétexte d'apaiser la tempête, bouleversé à la fois tous les Diocèses d'une immense étendue de pays, et anéanti une multitude d'Églises illustres : aucun n'a entrepris de dépouiller de son Siège, sans forme de jugement, un seul Évêque canoniquement institué, et non convaincu de quelque crime" (p. 89).
           
        Et de rappeler à excellente et très-bonne enseigne le cas du pape Pascal II (1050-1118) qui, cédant sur la question des Investitures, ce qui était hérétique, sous la menace d'un sac de Rome et du massacre des romains par l'empereur césariste Henri V d'Allemagne, se rétracta très-peu de temps après, généreusement et avec grande humilité, devant un concile rassemblé à ce sujet dans la basilique romaine Saint Jean de Latran. Mais voici comment nos évêques Réclamants résument la question... suivez leur regard en direction de Pie VII : "Le Pape Paschal II se vit pareillement dans des conjonctures difficiles, et il céda aussi à l'urgente nécessité des temps : mais il reconnut sa faute, et il avoua publiquement le jugement qu'il portoit lui-même du Décret sur les Investitures, qui lui avoit été arraché par la force impérieuse des circonstances" (p. 88). Et de conclure très-catholiquement : "Ajoutons à cela que, comme selon saint Augustin, «il ne peut jamais y avoir de vraie nécessité de rompre l'unité de l'Église» (Saint Augustin, contre Parménien, Liv. II, chap. 2), de même il ne peut y en avoir non plus d'ébranler sa Constitution, par la raison évidente et décisive qu'en donne le Pape saint Félix II ; c'est qu'«il est certain qu'au jour du jugement, Dieu nous redemandera son Église dans toute son intégrité, telle que nous l'avons reçue de nos Pères» (Saint Félix II, Lettre à Acace de C. P. dans Baronius, an. 485, n° 29).
           
        "Non, il n'est jamais permis, quelques violentes que soient les tempêtes qui s'élèvent contre la maison de Dieu, jamais il n'est permis, même sous prétexte de rétablir le calme, d'altérer le moins du monde la Constitution de l'Église et quand il arriveroit qu'on en fût réduit à une telle extrémité, qu'il ne parût plus y avoir aucun autre moyen d'apaiser les flots irrités, que de consentir à une telle altération, il faut bien se donner de garde d'exercer, même dans la vue de procurer le salut de l'Église, un pouvoir que Jésus-Christ n'a conféré à personne : car si on en agissoit ainsi [comme l'a fait sans remords le pape Pie VII...], outre que tout ce qu'on feroit seroit nul et invalide, on sembleroit accuser la Providence du Rédempteur, de n'avoir pas suffisamment pourvu aux besoins de son Épouse. Il faut alors reconnoître, avec humilité, que tout le pouvoir des hommes est insuffisant, qu'il ne leur appartient pas de faire cesser l'orage ; et recourir à Jésus-Christ, «l'Apôtre et le Pontife» (Hebr III, 1) de la Religion que nous professons" (pp. 90-91 & 93).
 
 
FrançoisMarieDeVintimille Jean Charles de Coucy JeanMarieAsseline 2
De gauche à droite : François-Marie-Fortuné de Vintimille (Carcassonne),
Jean-Charles de Coucy (La Rochelle), Jean-Marie Asseline (Boulogne-sur-Mer),
 
Évêques Réclamants 
       
        Puis encore, d'aborder la question fameuse des Articles organiques, qui montrent quant et quant que l'Église concordatisée est abominablement jugulée, ligotée, esclavagisée jusque dans son fondement spirituel sous la puissance de l'État constitutionnellement athée avec lequel, ayant accepté l'obligation faite par le pape de manger avec le diable sans longue cuillère, elle s'est prostituée... sous l'impulsion très-ardente du pape Pie VII. Il ne sert à rien, en effet, de se récrier hautement et hypocritement, avec de grands accents hystériques et effarouchés de vierges violées, que le pape n'accepta jamais lesdits Articles organiques, qu'il portât sans cesse et à maintes reprises au fil des ans sa réclamation près le Gouvernement français, qui, avec une extrême politesse de fin de non-recevoir et de grands ronds-de-jambe diplomatiques n'en tint jamais aucun compte, pour la raison très-simple que dans le corps du texte concordataire, le pape s'y était lui-même librement soumis en promulguant le § 1, ainsi rédigé : "La religion catholique, apostolique et romaine sera librement exercée en France. Son culte sera public, en se conformant aux règlements de police, que le Gouvernement jugera nécessaire pour la tranquillité publique". Or, les Articles organiques n'étaient rien d'autres que cesdits "règlements de police" mis en forme...! Ce qui montre l'incohérence et l'illogisme insensés où s'était enfermé le pape, dès lors qu'il était rentré dans l'attentat contre la Constitution divine de l'Église par le Concordat. De quel droit en effet pouvait-il bien réclamer contre ces Articles organiques puisqu'il s'y était lui-même librement soumis dans le principe de la question par le § 1 du Concordat qu'il avait promulgué...?! Mais laissons nos évêques Réclamants fort bien exposer la question au regard de la Foi, comme on les voit se montrer fort accoutumés de le faire si bellement, depuis que nous les lisons :
           
        "Il est d'autant plus fâcheux que cette conduite [de ne pas mettre hérétiquement la prétendue "nécessité urgente des temps" au-dessus de la Constitution divine de l'Église] n'ait pas été suivie dans la triste affaire dont il est question, que c'est précisément parce que l'on s'en est écarté, que la Religion catholique, apostolique et romaine, loin d'avoir retiré un avantage réel de ce qui a été fait, en éprouve, au contraire, un grand dommage et un énorme préjudice.
           
        "Car, quoique V. S. ait toujours eu l'intention, comme elle l'a déclaré, «de porter la condescendance jusqu'à faire pour le bien de l'unité tous les sacrifices qui ne sont pas incompatibles avec l'essence de la Religion» (Bulle Ecclesia Christi), il s'en faut de beaucoup néanmoins, qu'elle ait obtenu, au prix de ces sacrifices, la conservation de la Religion en France (ce qui étoit le grand objet de ses vœux), puisqu'au contraire ils n'ont abouti qu'à y rendre plus déplorable l'état de cette Religion sainte, et à la mettre, pour ainsi dire, à deux doigts de sa ruine totale. Comment, en effet, pourroit-on espérer de voir la Religion se maintenir dans notre malheureuse Patrie ; qui ne craindroit plutôt pour elle les plus terribles désastres, en considérant cette suite de Décrets que le Gouvernement françois a publiés le 6 Avril 1802, sous le titre d'Articles organiques de la Convention du 26 Messidor, an IX ; Articles dont V. S. a eu tant de raison de se plaindre, comme elle l'a fait dans le Consistoire secret du 24 Mai de la même année 1802, et au sujet desquels elle a déclaré qu'elle n'en avoit eu aucune connoissance avant leur publication.
           
        "Car, outre que ces Articles renferment plusieurs dispositions qui tendent nécessairement à détruire la Religion, ils assujétissent entièrement à la Puissance séculière le Ministère que Jésus-Christ n'a confié qu'à son Église, et convainquent leurs auteurs, avec la dernière évidence, d'avoir usurpé l'autorité spirituelle. Il n'est que trop visible que les auteurs desdits Articles ont réellement usurpé la puissance de l'Église ; et qu'ils n'ont pas craint de porter des lois sur des objets spirituels, en attirant à eux ce qui y a rapport : c'est ainsi que s'arrogeant un Ministère qui n'est nullement de leur compétence, ils se sont ouvertement déclarés les ennemis de la divine Constitution de la Religion catholique.
           
        "Et plût à Dieu qu'on n'eût pas donné occasion à ces Articles, en souscrivant purement et simplement, sans aucune précaution, à la seconde partie du premier article de la susdite Convention du 15 Juillet 1801, lequel est conçu en ces termes : La Religion catholique, apostolique et romaine sera librement exercée en France..... en se conformant aux règlements de police que le Gouvernement jugera nécessaires pour la tranquillité publique.
           
        "Hélas ! cette Convention, prise dans tout son ensemble, loin de guérir les maux de l'Église, n'a fait que les aigrir (sans doute contre l'intention de V. S.) mais la seconde partie de l'article premier lui a été spécialement funeste, parce qu'elle a fourni à la Puissance séculière l'occasion de s'emparer du Gouvernement spirituel, occasion qu'elle n'a eu garde de laisser échapper. Oui, voilà ce qui lui a applani le chemin pour en venir à tant d'étonnantes dispositions, auxquelles un Catholique ne peut penser sans la plus vive douleur. Et comme, d'une part, V. S. a formellement reconnu dans son Allocution du 24 Mai 1802, que lesdits Articles, tels qu'ils sont, mettent obstacle à l'exécution de ce qui est prescrit par la Constitution de notre Sainte Religion, ainsi qu'à l'exacte et fidèle observance de la Discipline établie par les loix de l'Église ; et que de l'autre ces mêmes Articles, tels qu'ils existent, sont des règlements de Police qui ont force de loi en France, et auxquels on est tenu de se conformer dans l'exercice de la Religion ; il s'en suit évidemment que la Religion catholique, apostolique et romaine, est aujourd'hui exercée en France, sous la condition expresse, que ses Ministres obéiront à des réglemens qui, au jugement de V. S. elle-même, s'opposent à ce que l'on pratique ce qu'exige la divine Constitution de notre Sainte Religion, et à ce que l'on observe fidèlement la salutaire Discipline que l'Église a établie par ses loix" (pp. 94-101).
           
        ... Amen ! Il n'y avait rien à dire face à ces vérités si criantes rappelées par nos évêques Réclamants montrant l'hétérodoxie radicale du Concordat et de son application en France, Pie VII n'avait plus qu'à pleurer de honte son péché, en se frappant la poitrine d'un mea MAXIMA culpa retentissant, tel saint Pierre après avoir renié le Christ lors de sa Passion, tel Pascal II l'avait fait... Hélas !, on ne le sait que trop bien : Pie VII ne le fit point ; et même, bien pire : il n'y pensa jamais. Comme non plus, on ne le vit faire aucune réponse aux Réclamations, etc., rédigées par nos évêques Réclamants, dont on peut bien se rendre compte, depuis qu'on les lit, que les critiques savantes, pieuses, fermes et toutes ciselées dans une extrême droiture de Foi non moins que toutes mesurées dans la plus grande Charité envers le pape étrangement défaillant, sont toutes forgées à l'aune de la plus pure Vérité catholique... Quelle ressemblance, n'est-ce pas, avec l'attitude coupable de François ne faisant, lui non plus, aucune réponse aux Dubia des cardinaux relativement à Amoris Laetitia !!
 
 
Marie Joseph de Galard de Terraube JeanBaptisteDuChilleau Francois de Gain de Montaignac 1782 Tarbes 
De gauche à droite : Marie-Joseph de Galard de Terraube (Puy-en-Velay),
Jean-Baptiste du Chilleau (Châlon-sur-Saône), François de Gain de Montagnac (Tarbes),
 
Évêques Réclamants
       
        Mais voici le pire. Et ce pire du pire nous met incroyablement de plain-pied avec ce que nous vivons et mourons à la fois en Église de nos jours, à savoir que les hérétiques et les scandaleux vont très-concrètement être acceptés et accueillis dans l'Église concordatisée de France, au même titre que les catholiques purs de toute hérésie et de tout scandale... Non, ô lecteur !, tu ne vas pas lire, dans ce qui va suivre, un commentaire autorisé sur ce qui se passe actuellement dans l'Église Universelle aux temps cala(très)miteux du Synode sur la synodalité, tu vas lire ce qui s'est passé il y a 220 ans dans l'Église de France... avec les prêtres jureurs et/ou mariés synodalisés de par la Constitution civile du Clergé, et réintégrés sans aucune repentance dans le clergé officiel, de par le Concordat. Napoléon, en effet, avait exigé du pape, qui lui céda sur ce chapitre comme sur tous les autres, qu'on n'inquiétât pas ces pécheurs ecclésiastiques et qu'on leur réservât le même traitement que les prêtres restés purement catholiques, dans la recomposition prostituée du Clergé concordataire... Toute ressemblance, évidemment, avec la situation des pécheurs de notre temps, par exemple les divorcés remariés et autres déviants sexuels qu'on veut admettre sans repentance dans l'Église et au banquet eucharistique, est bien sûr totalement fortuite, comme on dit dans les films biopics...
           
        Or, de quoi se rendaient coupables les prêtres qui avaient juré la Constitution civile du Clergé ? Ils se rendaient coupables de souscrire à une synodalisation de la vie de l'Église en France... exactement comme on la voit de nos jours vouloir ressurgir et s'imposer, non seulement sous le pontificat de François mais par François lui-même.
           
        La Constitution civile du Clergé en effet, était essentiellement basée sur la doctrine hérétique du richérisme. Qu'est-ce que le richérisme ? C'était tout simplement vouloir que l'Autorité dans l'Église parte de la base pour remonter vers le haut, aux antipodes radicales mêmes de la structure hiérarchique voulue par le Christ pour son Épouse, qui part du haut pour descendre vers le bas, et que la théologie a cristallisé par les termes "membres enseignants" et "membres enseignés". Le richérisme, c'est, sous terminologie différente, théoriser une Église... synodale, prétendant ainsi revenir à une soi-disant pureté de l'Église primitive. Le principe essentiel d'Edmond Richer (1559-1631), était en effet celui-ci : "Chaque communauté a droit immédiatement et essentiellement de se gouverner elle-même, c’est à elle et non à aucun particulier que la puissance et la juridiction a été donnée" (cherchez où est l'erreur, avec la doctrine actuelle du Synode sur la synodalité...!).
           
        "La doctrine entend appliquer le principe de gouvernement des communautés à tous les niveaux de l’organisation ecclésiale. Au niveau supérieur, le richérisme se confond avec la doctrine gallicane qui considère que le Pape est soumis, en termes d’autorité temporelle et dogmatique, au Concile, donc à l’ensemble des évêques représentant le peuple chrétien. Mais la doctrine n’en reste pas à ce premier niveau. Ainsi de la même manière, l’évêque est soumis, au synode diocésain, donc à l’ensemble des curés représentant le peuple chrétien du diocèse. On comprend que le richérisme recueillait les faveurs du bas-clergé. Et enfin au troisième niveau, le curé est soumis à l’assemblée paroissiale, donc à l’ensemble du peuple chrétien de la paroisse. Très influents à l’Assemblée constituante, les partisans du richérisme orientèrent la réorganisation de l’Église gallicane, tant à l’égard de la constitution civile du clergé qu’à l’égard de la constitution ecclésiastique, autour du principe de gouvernement démocratique des communautés paroissiales et diocésaines dont le système de Richer avait fourni l’une des premières théorisations" (https://fr.wikipedia.org/wiki/Edmond_Richer).
           
        En condamnant la Constitution civile du Clergé, c'est surtout la doctrine du richérisme qui la sous-tendait que le pape Pie VI condamna solennellement, mais le Concordat va voir les prêtres qui avaient hérétiquement juré ladite Constitution, c'est-à-dire qui étaient au moins implicitement richéristes, c'est-à-dire... synodaux !, être mis à rang d'égalité avec les prêtres réfractaires, c'est-à-dire catholiques, qui avaient refusé d'y souscrire. Exactement, l'analogie est frappante, comme dans l'Église de nos jours, les plus hauts prélats richéristes-synodaux, notamment ceux d'Allemagne, gardent place et faveur près le pape, et ne sont pas sanctionnés (ce sont les catholiques qui le sont, tel Mgr Strickland).
           
        Mais, pour exposer l'affaire, je laisse parler, ils le font si bien, nos bons Pères dans la Foi, nos évêques français Réclamants.
           
        "Rien, en effet, de plus déplorable, et en même temps de plus certain que ce qui est arrivé depuis peu, lorsqu'il s'est agi de la rétractation à laquelle étoient si justement obligés les Ecclésiastiques assermentés, intrus, invaseurs, [ayant juré la Constitution civile du Clergé], et de la réparation du scandale causé par ces Prêtres, qui ont osé contracter des mariages sacrilèges [c'est principalement sous la Terreur, entre 1793 et 1794, que 70 % des prêtres mariés pendant la Révolution se marient, on ne peut attribuer en soi à la Constitution civile du Clergé d'en être responsable, quand bien même "le mariage des prêtres est un phénomène important qui a touché près de 6 000 individus, soit près du quart du clergé constitutionnel"Les prêtres mariés sous la Révolution française, thèse soutenue à Paris 1 par Xavier Maréchaux, 1995].
           
        "Le Prédécesseur de V. S., Pie VI, d'heureuse mémoire, après avoir condamné la Constitution civile du Clergé, décrétée par l'Assemblée nationale, après avoir prononcé des peines canoniques contre les Ecclésiastiques qui avoient prêté purement et simplement, et n'auroient pas rétracté dans le temps prescrit, le Serment civique, «source empoisonnée de toutes sortes d'erreurs, et la principale cause des maux qui affligent l'Église de France» (Lettres monitoriales du 13 Avril 1791), comme aussi contre ceux qui s'étoient souillés du crime de l'intrusion, ou qui s'en souilleroient à l'avenir, régla la manière dont les uns et les autres pourroient être réconciliés avec l'Église, «en ne consultant que sa Discipline la plus douce et la plus favorable» (Indult du 13 Juin 1792).
           
        "Le Saint-Père se réserva à lui seul et à ses Successeurs, la faculté d'absoudre les Archevêques et les Évêques. Cependant il n'ôta point auxdits Archevêques et Évêques tout espoir de pardon, il ajouta, au contraire, dans les mêmes Lettres : «À Dieu ne plaise que cette réserve que nous faisons à notre Tribunal soit, pour les coupables, un sujet de découragement. Notre désir le plus ardent est qu'elle soit, au contraire, pour eux un plus pressant motif de recourir, avec confiance, à notre commune Mère, et de se jetter dans son sein avec empressement. Si leur pénitence est sincère, s'ils sont disposés à avouer leurs fautes, à les réparer pleinement, et à renoncer aux Églises qu'ils ont usurpées, nous l'avons déjà déclaré avec Saint-Léon, et nous le déclarons de nouveau, nous les recevrons à bras ouverts , et nous les ferons jouir de l'Unité de notre paix et de notre communion (Indult du 13 Juin 1792)».
           
        "Quant aux Ecclésiastiques du second ordre, le même Pontife accorde aux Archevêques, Évêques et Administrateurs des Diocèses du Royaume de France, d'abord la faculté d'absoudre ceux qui auroient prêté le Serment civique, à condition néanmoins que ceux-ci rétracteroient, ou plutôt, après qu'ils auroient rétracté ledit Serment, et réparé, le mieux qu'il leur seroit possible, le scandale qu'ils auroient donné aux fidèles (Indult du 19 Mars 1792).
           
        "Il a ensuite accordé aux légitimes Archevêques, Évêques et Administrateurs des Diocèses, le pouvoir d'absoudre les Intrus, en prescrivant, toutefois, les conditions préalables que ceux-ci auroient à remplir pour obtenir cette grâce : «Afin d'empêcher, dit Pie VI, que ces sortes d'absolutions ne soient accordées indiscrettement, ou qu'elles ne présentent des formes diverses, nous en tenant..... à la plus douce discipline de l'Église, nous défendons qu'aucun Intrus ne soit absous, à moins d'avoir auparavant rétracté, par écrit, le Serment civique, et les erreurs contenues dans la Constitution civile du Clergé de France, et déclaré spécialement que les Ordinations reçues ou conférées par les Intrus, sont toutes sacrilèges ; que l'autorité déléguée par eux est nulle ; que leur intrusion viole toutes les lois de la justice, et que tous les actes qui en ont été la suite, sont frappés d'une nullité radicale ; d'avoir promis, avec serment, obéissance au Saint-Siège apostolique et aux légitimes Évêques ; enfin d'avoir renoncé à la Paroisse, ou à la portion de Paroisse qu'ils ont envahies ; lesquelles rétractations et abdications doivent être publiques, comme le crime l'a été» (Indult du 13 Juin 1792).
           
        "Une heureuse expérience a fait voir que, si cette manière de procéder, tracée par Pie VI, étoit nécessaire, aussi n'a-t-elle pas été inutile et sans fruit. Beaucoup d'Ecclésiastiques qui avoient prêté le Serment, ou qui s'étoient souillés du crime de l'intrusion, se soumirent avec une scrupuleuse exactitude, aux conditions prescrites ; satisfirent pleinement pour le passé ; rentrèrent en grâce avec l'Église, leur mère, et la consolèrent, par la sincérité de leur pénitence, après l'avoir contristée par leurs égaremens. Ainsi, quoiqu'elle eût la douleur d'être privée du Culte public et solemnel [dans les années 1791-1800], on voyoit de temps en temps triompher l'Unité par le renoncement public au schisme, et par la rétractation du fatal Serment qui y avoit donné lieu ; on voyoit de temps en temps triompher la Foi par l'abjuration publique de l'erreur ; on voyoit de temps en temps triompher la Discipline, la sauvegarde de la Foi, par la condamnation solemnelle que faisoient les pécheurs publics des crimes énormes qu'ils avoient commis.
           
        "Mais les choses se sont passées et se passent encore bien différemment, depuis la publication de la Convention conclue le 15 Juillet 1801, entre V. S. et le Gouvernement françois [c'est-à-dire le Concordat lui-même], et des Articles dits organiques de cette même Convention" (pp. 101-107).
           
        Napoléon, en effet, exigeait que le clergé constitutionnel civil, de soi hérétique et schismatique, soit traité de la même manière que le clergé qui n'avait pas péché contre l'Unité de l'Église, qu'on ne leur demandât aucune rétractation de quoi que ce soit. Et il imposa cette mesure au pape comme condition du Concordat, lequel laissa faire, et on ne peut y voir de la part de Napoléon, une fois de plus, qu'il n'avait que foutre de la pureté de la Foi catholique, son seul désir étant de se créer un clergé français inféodé à son pouvoir politique. C'est pourquoi les prêtres jureurs redressèrent la tête en rebelles impénitents lorsque le Légat Caprara, au nom du pape Pie VII, vint à Paris recueillir leurs rétractations. Ils se savaient soutenus par le Gouvernement, et refusèrent hautement toute rétractation. Mais le plus grave, et même l'incroyable, c'est que le Légat s'est prêté et plié scandaleusement à une parodie de rétractation, et, pour satisfaire aux exigences du Gouvernement napoléonien, s'est avili sacrilègement à donner des Lettres d'absolution à ceux qui lui déclaraient en face ne point se rétracter. Voici ce qu'en disent nos édifiants évêques Réclamants :
           
        "Parmi les Ecclésiastiques qui avoient prêté le Serment civique, ainsi qu'il a été dit, et qui, de plus, s'étoient souillés du crime de l'intrusion, en occupant, contre les lois de l'Église, des Sièges épiscopaux, et qui, à raison de ces délits, avoient encouru la peine de suspense, et étoient ensuite tombés dans l'irrégularité, plusieurs ont été promus à des Archevêchés ou Évêchés de la nouvelle circonscription : cependant ils n'ont point condamné leur criminelle conduite ; bien loin de là, quelques-uns d'entr'eux ont publié des écrits, où déposant tout honte, ils se vantent de n'avoir fait aucune rétractation, d'être dans la résolution de n'en jamais faire, et se font gloire d'avoir rejetté, avec mépris, la grâce de l'absolution qui leur à été offerte, parce que, disent-ils, «il n'en avoient pas besoin».
           
        "C'est ce qu'on lit dans la lettre de Dominique Lacombe (appellé Évêque d'Angoulême, selon la nouvelle circonscription), au vénérable Prêtre Binos, ancien Chanoine de St-Bertrand, écrite à Paris le 4 Juin 1802, et imprimée à Bordeaux chez Simart, rue Ste-Catherine. «Il est très-vrai que M. le Légat a voulu de nous une rétractation ; il est très-vrai qu'il ne l'a pas obtenue..... Je déclarai que je ne faisois l'abandon de la Constitution civile du Clergé, que parce qu'une nouvelle loi la rend impraticable ; qu'ayant respecté et aimé ses dispositions, je continuerois de les respecter et de les aimer ; que bien loin de me blâmer d'y avoir obéi, d'y avoir été fidèle, je regardois comme les meilleurs actes de ma vie, comme les plus dignes des récompenses éternelles, tous les actes qu'elle m'a prescrits, et auxquels je me féliciterai toujours de m'être prêté. On vous dira, peut-être, que M. le Légat nous a donné l'absolution, que la preuve en est dans les registres de sa Légation, qu'on y a vu..... plusieurs exemplaires d'un Decretum absolutionis humblement demandé par plusieurs de nous, et à plusieurs de nous charitablement accordé. Comment repousserez-vous ces faits là ? Vous direz avec moi, que M. le Légat, aux mépris des règles usitées dans le Sacrement de Pénitence, au mépris de ces paroles célèbres d'une infinité de Papes : Nisi vere contritis et confessis, a donné une absolution qui n'étoit ni voulue ni demandée ; que lorsque le Decretum en a été remis.... à quelques-uns d'entre nous, ils en ont fait justice en le jettant au feu, en présence de celui de qui ils l'avoient reçu..... Vous direz de plus, que le constitutionnel Lacombe n'a pas été gratifié de ce Decretum : sans doute qu'on a craint qu'il ne fût moins patient que les autres».
           
        "Qui pourroit assez déplorer une pareille obstination, une si invincible opiniâtreté, dans l'erreur ? Qui ne seroit pénétré d'indignation, en voyant que ces Hérétiques, loin d'avoir demandé avec humilité la grâce de la réconciliation dont ils ont tant besoin, l'ont, au contraire, orgueilleusement repoussée, au grand mépris du Saint-Siège apostolique ? N'est-ce pas ici le cas de dire avec saint Bernard : «Beaucoup de gens s'étonnent et se scandalisent de voir de pareils hommes protégés, défendus, favorisés, comblés d'honneurs» (Saint Bernard, Lett. 178, au Pape Innocent II, n. 3) ? Quelle doctrine vont enseigner au Clergé et au Peuple des hommes qui ne rougissent pas de manifester un respect et un attachement si opiniâtres pour cette Constitution civile du Clergé, qui, comme personne ne l'ignore, a été condamnée par un jugement solemnel du Saint-Siège apostolique, aux applaudissemens de toute l'Église gallicane ; et sans la moindre réclamation de la part des autres Églises catholiques ; condamnée, disons-nous, «comme étant un composé de principes hérétiques, par conséquent hérétique elle-même, et contraire au Dogme catholique en plusieurs de ses Décrets ; schismatique et sacrilège, dans d'autres ; destructive des droits de la primauté du S. Siège et de ceux de l'Église ; opposée à la Discipline, tant ancienne que nouvelle, et qui enfin n'a été inventée et publiée que dans le dessein d'abolir entièrement la Religion catholique» (Lettres monitoriales du 13 Avril 1791) ?
           
        "Quelle est grande et quelle est juste l'horreur de toute l'Église, lorsqu'elle voit des hommes frappés de la censure de suspense, qui ont encouru l'irrégularité ; et qui, après avoir repoussé avec mépris le bienfait de l'absolution, s'emparent du Gouvernement d'immenses Diocèses, et ont l'audace d'y exercer les fonctions épiscopales !
           
        "Au reste, nous n'avons pas seulement à gémir des fautes commises par les Ecclésiastiques depuis la conclusion du Concordat et des Articles dits Organiques ci-dessus mentionnés, il est encore émané du Gouvernement civil et de ses Agents, depuis la même époque, des actes plus funestes à la Religion qu'il n'est possible de l'exprimer.
           
        "En effet, quoique Pie VI, Prédécesseur de V. S., s'en tenant, comme nous l'avons déjà observé, à la plus douce discipline de l'Église, ait défendu d'absoudre aucun Ecclésiastique Jureur ou Intrus, à moins, qu'au préalable, il n'eût satisfait à l'obligation indispensable de se rétracter, ainsi que les saints Canons l'ont prescrit dans tous les temps, et n'eût rendu sa rétractation aussi publique que le crime l'avoit été (Indults du 19 Mars et du 13 Juin 1792), la Puissance séculière a néanmoins défendu d'en exiger d'aucune espèce. Car voici ce qu'on lit dans la lettre circulaire du Ministre de la Police générale, aux Préfets, datée de Paris, 18 Prairial, an X, le 7 Juin 1802 : «Vous devez porter une égale attention à ce qu'aucun des partis qui ont divisé l'Église, n'exige aucune espèce de rétractation. Je vous ait fait connoître la volonté du Gouvernement à cet égard. On ne peut, sans la méconnoître, demander aux Prêtres ni Serment, ni Formule, autre que la déclaration qu'ils adhérent au Concordat, et qu'ils sont dans la Communion des Évêques nommés par le Premier Consul. Si l'on se croyoit autorisé, de part et d'autre, à demander des rétractations réciproques, où seroient les fruits de la réconciliation religieuse, dans laquelle doivent s'éteindre toutes les haines et tous les souvenirs du passé ? L'organisation des Cultes est dans l'Église ce que le 18 Brumaire est dans l'État. Ce n'est le triomphe d'aucun parti, mais la réunion de tous dans l'esprit de la République et de l'Église».
           
        "Après cette défense d'exiger aucune espèce de rétractation des Ecclésiastiques, soit Jureurs, soit Intrus, les Archevêques et les Évêques des Diocèses de nouvelle circonscription, ont reçu une instruction, ou pour mieux dire, un ordre du Gouvernement civil, de ne mettre aucune différence entre les Prêtres qui ont obéi à l'Église, et ceux qui lui ont désobéi, et d'appeller ces derniers dans une proportion du tiers au quart à remplir les fonctions de Curés et de Vicaires. Car on trouve ce qui suit dans la lettre circulaire du Conseiller d'État chargé de toutes les affaires concernant les Cultes, écrite le 8 Juin 1802, aux Archevêques de nouvelle circonscription, lettre si répréhensible à tant d'autres égards. «L'intention du Premier Consul est que, pour réaliser un système d'impartialité équitable, vous choisissiez un de vos Grands-Vicaires parmi les Ecclésiastiques du second Ordre qui ont appartenu à ce qu'on appeloit le Clergé constitutionnel, et que les Ecclésiastiques de la même classe soient appellés dans une proportion du tiers au quart à remplir les fonctions de Curés, de Chanoines et de Desservans».
           
        "Enfin, quel est celui qui n'a pas frémi d'horreur, lorsqu'il a entendu traiter de véritable scandale la réparation publique d'un sacrilège commis publiquement, et qu'il a vu une réparation si digne d'éloges sévèrement blâmée et rigoureusement interdite à l'avenir ? Le Conseiller d'État chargé de toutes les affaires concernant les Cultes, a écrit ce qui suit au Préfet du Département de la Somme, le 14 Mai 1802 : «Avec votre lettre du 10 du courant, j'ai reçu, Citoyen Préfet, les pièces qui constatent la rétractation publique faite par Claude de la Cour, Prêtre marié, et l'anathème dont il frappe son mariage. Cette démarche est un véritable scandale..... Les Prêtres qui administrent la Paroisse ou l'Église dans laquelle de la Cour a fait sa rétractation solemnelle, auroient dû veiller à ce que pareil scandale n'eut pas lieu ; et vous les avez très-justement rendus responsables, pour l'avenir, de tout évènement pareil».
           
        "Quoi donc ! Est-ce que le scandale ne vient pas ici tout entier de la part de ces malheureux Prêtres, qui ont osé se marier ? Et le simple bon sens ne dit-il pas qu'on ne peut faire un crime à un pécheur de réparer publiquement un scandale qu'il a donné en public ? Pour justifier de si étranges mesures, on allègue le prétexte de rétablir la Paix et l'Unité. Mais, comme le disoit autrefois saint Hilaire de Poitiers : «S'il n'y a effectivement rien de plus précieux et de plus beau que les noms de Paix et d'Unité, personne ne peut ignorer que l'Église et l'Évangile ne connoissent d'autre Paix, ne connoissent d'autre Unité, que la Paix de Jésus-Christ, que l'Unité de Jésus-Christ» (Saint Hilaire, Livre contre les Ariens ou contre Auxence de Milan, n° 4). Et, par la manière dont nous avons dit que se faisoit la réconciliation des pécheurs publics, ce n'est point la Paix de Jésus-Christ, l'Unité de Jésus- Christ qu'on établit ; mais, au mépris de la vérité évangélique, on introduit dans l'Église un simulacre de Paix, un simulacre d'Unité, beaucoup plus dangereux qu'une guerre ouverte et qu'un schisme déclaré.
           
        "Peut-on dire qu'on a la Paix de Jésus-Christ, l'Unité de Jésus-Christ, lorsqu'un Gouvernement temporel usurpe, contre la volonté de Jésus-Christ, une autorité toute spirituelle, s'érige en juge de controverses qui se sont élevées sur la doctrine, ordonne de regarder comme de pures questions oiseuses et qui ne touchent point à la Foi, des erreurs solemnellement condamnées par l'autorité légitime ; lorsqu'il décide que la rétractation de ces erreurs n'est pas nécessaire ; et, qui plus est ; lorsqu'il ne craint pas de défendre ces rétractations qui ont été prescrites par l'autorité ecclésiastique, et va jusqu'à fixer de nouvelles conditions, lesquelles, selon lui, n'ont rien que de licite, et sont suffisantes pour réconcilier avec l'Église ; en sorte que ceux qui avoient commis les crimes le plus énormes, et à qui on avoit interdit très-justement les fonctions redoutables du Saint-Ministère, reprennent aussitôt et sans autre obstacle, l'exercice de ces mêmes fonctions ?
           
        "Peut-on dire qu'on a la Paix de Jésus-Christ, l'Unité de Jésus-Christ, lorsque l'Église, son Épouse, est avilie au point d'être regardée comme une faction qui produit des troubles, et dont il est nécessaire de réprimer les mouvemens séditieux pour avoir la tranquillité ?
           
        "On représente l'Église comme ayant été déchirée par différentes factions ! Le pape Pie VI étoit-il donc le chef d'une faction, lorsque, s'acquittant des devoirs de l'Apostolat, il a déclaré et prononcé du haut de son Siège, que, «de l'aveu et du consentement unanime de toute l'Église gallicane, les Sermens civiques devoient être regardés comme autant de parjures et de sacrilèges, absolument indignes, non-seulement de tout Ecclésiastique, mais de tout bon catholique, et que tous les actes subséquens devoient être réputés schismatiques, entièrement nuls, et qu'ils méritoient d'être soumis aux censures les plus graves. Nous ordonnons, par ces présentes, à tous, sans aucune exception, Cardinaux de la sainte Église romaine, Archevêques, Évêques, Abbés, Vicaires, Chanoines, Curés, Prêtres, et à tous autres Ecclésiastiques séculiers ou réguliers, qui auroient prêté le Serment civique, purement et simplement, tel qu'il a été prescrit par l'Assemblée nationale...... de le rétracter dans l'espace de quarante jours, à compter de la date des présentes. Que ceux qui, dans cet intervalle, n'auroient pas fait la rétractation prescrite, soient suspens de l'exercice de tout Ordre quelconque, et soumis à l'irrégularité, s'ils en exercent les fonctions (Lettres monitoriales du 13 Avril 1791)».
           
        "L'Église a constamment maintenu, sur ce point, la sévérité de sa Discipline, et ne s'est jamais relâchée d'une vigueur aussi salutaire qu'indispensable ; c'est ce qu'atteste, de la manière la plus énergique, le Pape saint Gélase 1er : «Que l'on parcoure les Annales de la Religion chrétienne, disoit ce saint Pontife, dans son Avertissement à Fauste, et que l'on cite un seul fait, un seul exemple qui prouve que, dans l'Église de Dieu, les Pontifes les Apôtres, Jésus-Christ lui-même aient jamais accordé le pardon à d'autres qu'à ceux qui ont témoigné un sincère repentir. On n'a lu nulle part, jamais on n'a ouï-dire, qu'on ait entendu tenir un langage pareil à celui qui sort de la bouche de ces gens-ci : Pardonnez-nous, mais permettez-nous en même temps de persévérer dans nos erreurs».
           
        "Il ne faut donc pas croire (quoiqu'en aient pu dire contre nous tant de calomniateurs et d'hommes mal-intentionnés) qu'en nous plaignant de ce que ceux qui ont attaqué la Foi et rompu l'Unité, n'en ont pas fait une pleine et entière réparation, nous soyons inspirés par la haine que nous leur portons. Bien éloignés d'une disposition si condamnable, en même-temps que nous accomplissons le devoir que nous impose le zèle pour la loi (I Mach II, 54-58), nous n'en conservons pas moins, à leur égard, au fond de nos cœurs, l'amour fraternel (II Petr I, 7) et la charité évangélique.
           
        "Mais aujourd'hui il n'est point abattu ce mur de séparation élevé par l'erreur. Il est ordonné, au contraire, de fermer les yeux sur l'obstination des errans, afin de pouvoir présenter une fausse apparence de Paix. On prescrit de dissimuler l'impénitence de ceux qui sont tombés, afin de pouvoir présenter une fausse apparence d'Unité.
           
        "Cependant il est encore d'autres maux énormes qui résultent de la défense qu'on a faite de rétracter l'erreur, d'abjurer le Schisme et de réparer le scandale qui en a été la suite ; ainsi que de l'ordre qui a été donné, d'admettre aux fonctions saintes les Ecclésiastiques dont la conduite a été criminelle, sans exiger d'eux aucune pénitence, aucune épreuve préalable. Car, outre qu'en agissant ainsi, l'on augmente l'impudence des errants et des prévaricateurs, on jette encore les fidèles dans les plus grandes perplexités, et la Foi des peuples devient presqu'incertaine et chancelante. Aussi se rencontre-t-il des fidèles qui, lorsqu'ils viennent à comparer ce qu'ils ont vu avec ce qu'ils voient maintenant, ne savent plus quel parti prendre, ni à quoi s'en tenir. Plusieurs sont tentés de croire que Pie VI s'est donc trompé, en s'imaginant voir l'erreur là où il n'y en avoit pas, et que la Constitution civile du Clergé ne renferme rien de contraire à la Doctrine catholique, puisqu'on n'exige plus de rétractation de ceux qui y ont adhéré. Beaucoup d'autres croient avoir un juste sujet de se plaindre amèrement, de ce qu'on les a gratuitement et sans cause exposés aux fureurs de la persécution la plus cruelle, en leur défendant de communiquer, dans les choses saintes, avec les Intrus, quel qu'ils fussent, puisque ces mêmes hommes sont maintenant admis à exercer toutes les fonctions du Saint Ministère, sans avoir préalablement condamné leur Intrusion et leur résistance à l'Autorité de l'Église. Les Intrus font tous leurs efforts pour entretenir dans le Peuple ces fausses idées ; car ils se vantent, de tous les côtés (quoique sans aucun fondement), d'avoir remporté, au jugement de VOTRE SAINTETÉ elle-même, une victoire complette de sorte, qu'à les entendre, ce n'est pas V. S. qui leur a fait grâce, mais ce sont eux qui ont triomphé de V. S., en l'amenant au point d'approuver leurs erreurs.
           
        "Nous avouons que depuis la publication du Concordat conclu entre VOTRE SAINTETÉ eť le Gouvernement françois, on a obtenu une espèce de permission, qu'on n'avoit pas auparavant, d'exercer publiquement le Culte catholique. Mais les sacrifices qu'il a fallu faire pour cela prouvent évidemment que le sort de la Religion n'en est pas devenu meilleur.
           
        "Et, en effet, à quel prix a-t-on acheté cette espèce de permission ? Notre esprit n'y pense qu'avec horreur, notre main se refuse à l'écrire ; car, pour ne parler ici que de ce qui fait le sujet de nos présentes Réclamations, cette permission, si on peut l'appeller de la sorte, n'a été accordée qu'au prix d'une violation des lois canoniques et de la Discipline de l'Église, dont les siècles passés ne fournissent pas un seul exemple, et capable d'entraîner, pour la suite, les plus dangereuses conséquences ; au prix des droits sacrés de l'Épiscopat et de la Constitution même de l'Église qui a été ébranlée. Pour avoir ce Culte public, il a été nécessaire de mettre la Religion, cette très-Sainte Religion que Jésus-Christ a établie par l'effusion de son sang, sous le dur esclavage d'un Gouvernement laïque, et de la rendre entièrement dépendante. Enfin, pour procurer ce Culte public, on a donné, contre toutes les lois canoniques, l'institution à des Ministres, qui, après s'être rendu coupables publiquement des crimes les plus énormes, loin d'en avoir réparé le scandale par une pénitence proportionnée, les ont, au contraire, aggravés par leur endurcissement, et n'ont donné que trop de sujet de craindre qu'ils se serviroient du pouvoir spirituel qu'on leur confioit, non pour édifier, mais pour détruire (II Cor X, 8 & XIII, 10)" (pp. 113-149).
           
        Qu'on se rende bien compte, en effet, à quels ignominieux abaissements et sacrilèges le Concordat réduisait l'Église, par le fait suivant : lorsqu'il s'est agi de sacrer évêque tous ceux que Napoléon et Pie VII avaient promus de concert pour remplir les nouveaux sièges concordataires mais qui ne l'étaient pas encore, l'évêque consécrateur qui fut choisi pour le faire à toute vitesse fut... l'ex-évêque d'Autun, de Talleyrand-Périgord, qui avait défroqué puis s'était marié et qui ne savait même plus toutes les rubriques à respecter quand il devait dire une messe, par ailleurs effrayé et tremblant comme une feuille quand il fallait qu'il en dise une, tout juste relevé d'excommunication par le pape... Et voilà comment fut mise debout la toute première génération épiscopale française enfantée impudiquement par le Concordat : comme une putain qui accouche ses enfants de fornication sur le fumier !
 
        Mais je laisse nos dignes évêques Réclamants donner leur conclusion générale :
           
RéclamationsEvêquesDeFrancePageDeTitre redressé
 
        "Tout cela mûrement considéré, voyant la grandeur du péril dont notre Sainte Religion est menacée, et voulant, dans des circonstances aussi critiques, ne rien omettre de ce que nous devons à nos Diocèses, à l'Église Gallicane, au Saint-Siège, à l'Église Catholique toute entière :
 
"NOUS RÉCLAMONS PAR CES PRÉSENTES
           
        "Contre [suit la liste détaillée des sept actes magistériels promulgués par le pape Pie VII relatifs au Concordat]
           
        "Et sans nous départir, en aucune manière, du profond respect que nous ne cesserons jamais de porter à VOTRE SAINTETÉ ;
 
"NOUS FORMONS OPPOSITION AUX SUSDITS ACTES.
 
"Prosternés aux pieds de VOTRE SAINTETÉ,
"nous la conjurons de nous accorder
"sa Bénédiction apostolique.
 
"DE VOTRE SAINTETÉ,
"TRÈS-SAINT PÈRE,
 
"Les très-humbles et très-obéissans 
"serviteurs et Fils"
(pp. 150, 152 & 156)
           
        J'ai cité tout au long ces passages, parce qu'ils sont très-intéressants dans le parallélisme presque transparent avec ce que le processus synodal engagé dans l'Église de nos jours, nous montre : pas besoin d'être grand'clerc pour comprendre que le refus qu'on fait d'une conversion des divorcés remariés, des transgenres, etc., avant de les intégrer dans l'Église, que la démocratisation richériste-synodale inconstitutionnelle de l'Église, avec l'accord du pape François, au moins par défaut, se retrouve étonnamment dans la situation de l'Église de France, lorsqu'elle fut soumise avec l'accord du pape Pie VII, au moins par défaut, au lois du Concordat et à son régime réintégrant sans pénitence ni abjuration convenables les tenants hérétiques richéristes-synodaux de la Constitution civile du Clergé et autres scandaleux...
 
France Ancien Régime Diocèses 1789 
Carte de France des anciens diocèses 
       
        Il y a un autre point très-important, dans l'affaire du Concordat, que je n'ai pas vu traiter, sauf en passant, par les évêques Réclamants dans leurs Réclamations, etc., c'est la question du bouleversement géographique de fond en comble des diocèses de France, par son § 2, dont je rappelle ici les mots exacts, extrêmement lapidaires mais de conséquence inouïe non moins extrême, sacrilège et cataclysmique : "Il sera fait par le Saint-Siège, de concert avec le Gouvernement, une nouvelle circonscription des diocèses français", et que la bulle Qui Christi Domini du 29 novembre 1801 mettra concrètement en œuvre à coups de bulldozer en détruisant complètement toute l'ancienne structure diocésaine. La question, là encore, est, comme pour la destitution pontificale motu proprio des évêques dont nous venons de voir qu'elle est radicalement non-canonique, et donc invalide : Le pape Pie VII avait-il le droit, par simple motu proprio pontifical, de faire tabula rasa de cette structure géographique diocésaine traditionnelle en France, suivant ainsi sans aucun scrupule de conscience la maxime très-révolutionnaire : "Du passé, faisons table rase" ?
           
        Là encore, la réponse est NON, théologiquement NON. Le grand point qui fonde cette réponse négative, est toujours le même : Ces églises particulières étaient, jusque dans leur structure géographique, les épouses des évêques français canoniquement institués, qui, dès lors, étaient leurs époux très-sacrés. Le pape n'avait donc pas le moindre droit de les "toucher" si j'ose le dire ainsi, ces épouses, pour carrément les tuer sur le plan géographique, autrement qu'avec l'accord desdits époux, déroger à cet accord était attenter au droit divin épiscopal comme nous l'avons vu. Or, le pape Pie VII détruisit les épouses sans le moindre accord de leurs époux, ce qui, par-là même, frappait d'INVALIDITÉ radicale cette dite destruction géographique des diocèses très-chrétiens d'Ancien-Régime...
           
        Rappelons ici qu'il s'agissait, pour Napoléon dont Pie VII suivra les volontés les plus sacrilèges sans sourciller le moins du monde, je l'ai déjà dit, de casser, détruire radicalement toute la structure très-chrétienne en France, tant sur le plan purement spirituel que sur celui matériel géographique, pour refaire ex nihilo un simulacre de reconstruction d'Église catholique dont le fondement le plus certain était d'être institutionnellement inféodé au pouvoir politique constitutionnellement athée qu'il représentait, aux fins occultes voulus par Napoléon, et après lui par tous ses successeurs républicains dans le pouvoir politique sur la France, de construire un novus ordo sæculorum qui excluait dans le principe métaphysique la Religion catholique. Car le fond de la question, c'est que Napoléon, digne précurseur de l'Antéchrist, avait nécessairement besoin de la force morale et spirituelle de la Religion pour établir son grand-œuvre maçonnique, il ne pouvait pas s'en passer, mais c'était non pas pour la Religion, mais tout au contraire contre la Religion. Le grand paradoxe en effet, c'est que le méchant, et c'est son supplice, ne peut pas se passer du surcroît du Royaume de Dieu pour supprimer le Royaume de Dieu, son but profond ! Comme le disait si bien saint Eucher de Lyon, un des premiers Pères de l'Église des Gaules au IVème siècle : "Ceux qui n'aiment pas Dieu ne peuvent cependant aimer que ce que Dieu a créé"...
           
        C'est bien pourquoi, d'ailleurs, un siècle après le Concordat, les hommes politiques de la IIIème République, affichant bien en montre, pour que nul n'en ignore, ce désir religiocide qui sous-tend en soubassement essentiel tout pouvoir politique post-révolutionnaire constitutionnellement athée, quelque soit la forme qu'il adopte, voudront la séparation de l'Église et de l'État : pour bien faire saisir à tout homme qui acceptait de réfléchir, ce qui ne fut absolument pas le cas des papes, que s'ils avaient besoin de la virtus de la Religion, ce n'était absolument pas pour la Religion, mais tout au contraire, contre elle, c'était pour la détruire ! Et, mettant soudain bas le masque de leur hypocrisie, ils croyaient, en 1905, le moment venu pour donner le coup fatal à l'Église ! Raison profonde que le pape Pie X, à l'époque, ne comprit pas plus que son prédécesseur Pie VII, tous les papes venant après la Révolution en effet, même les plus saints en leur for privé, ayant bandeau d'aveuglement très-honteux sur les yeux quant à la mise de l'Église sous "la puissance des ténèbres" par le Concordat napoléonien, au niveau des seules Mœurs pour commencer, au niveau politique constitutionnel. Un journaliste pouvait bien résumer la question ainsi, en 1905 : "Le Concordat qui, religieusement, avait clos la Révolution, n'existe plus ; religieusement, la Révolution recommence" (Le Correspondant, 25 décembre 1905).
           
        Mais revenons à notre sujet précis. "Déjà en 1790 [car, nous l'avons vu, dès cette date l'Assemblée Constituante avait dans le collimateur la destruction radicale de la structure géographique des diocèses français, ce qu'elle ne réussit pas à faire grâce à l'opposition de Pie VI... quand Napoléon réussit à le faire "grâce" à la trahison collaborationniste de Pie VII], l’abbé Maury estimait que ni l’Assemblée constituante, ni même le Pape, ne pouvait «bouleverser de son propre mouvement [motu proprio] tous les diocèses du royaume et les étendre ou les circonscrire à son gré» (Conscience religieuse en révolution, Plongeron, p. 201, cité par Decroix, ibid.).
           
        Car rappelons-nous que lesdits évêques destitués en corps de nation par le pape Pie VII, tant sur le plan spirituel que celui géographique, de cette manière scandaleusement superficielle et tellement désinvolte qu'on voit dans le Concordat, étaient les successeurs légitimes de ceux gallo-romains puis mérovingiens, puis carolingiens, puis capétiens, qui fondèrent tous la France non seulement religieuse, mais celle sociale, géographique, et encore bien celle purement politique ! Ce sont les évêques en effet, les tout premiers d'entre eux, les gallo-romains devenus mérovingiens, qui élevèrent politiquement Clovis à la royauté sur une Gaule virtuellement Unie pour commencer, créant ainsi ce que le géant romain n'avait pu faire ! En vérité, en détruisant leurs légitimes successeurs, comment mieux montrer qu’on voulait détruire complètement, radicalement, la France RÉELLE, c’est-à-dire celle sacrale, acheiropoïète (= non-faite de main d'homme) aux fins et profit de la nouvelle fondation d’une AU­TRE France religieuse et politique non-réelle, car faite de main d’homme et non-sacrale, et donc donnée à Satan ! Et c'était le pape qui mettait le plus et le mieux la haute-main à cela !!
 
        La France politique réelle est en effet très-véritablement née par un acte collectif des évêques gallo-romains de la Gaule, de la Neustrie, de la Germanie, toute l'Europe d'alors, derrière saint Rémy de Reims, c’est historique (cf. mon ouvrage L’extraordinaire conversion de Clovis ou le devoir catholique de NE PAS voter, au lien suivant : http://www.eglise-la-crise.fr/images/pdf.L/L'extraordinaireConversionDeClovis.pdf), évêques gallo-romains dont justement les évêques de Louis XVI, que le pape démissionnait tous de force comme des malpropres, étaient les légitimes successeurs ! En fait, le pape Pie VII, perverti de républicanisme et même de démocratisme, ce qui le mettait à la remorque infâme de Napoléon, tirait là sacrilègement un trait annihilateur sur la France réelle, religieuse mais encore politique, d’ailleurs, ... ô douleur et mille hontes !, sans même se rendre compte de ce qu'il faisait, tel un vil barbare, un méprisable vandale qui ne sait pas penser, un sanglier dévastateur qui ravage la Vigne du Seigneur sans du tout savoir ce qu'il fait, mais dont les ennemis du nom chrétien, avec Satan leur maître, savaient bien, eux, ce qu'il faisait ou plutôt ce qu'il défaisait !!!
           
        Quant à la géographie de cette France réelle, acheiropoïète, qui existe de par le Christ qui innerve la structure naturelle, commençons par dire qu'on ne méditera jamais assez cette remarquable réflexion de Fustel de Coulanges : "Il est digne de remarquer que les vieux états gaulois ont conservé jusqu'à une époque très voisine de nous, leur nom, leurs limites et une sorte d'existence morale dans les souvenirs et les affections des hommes. Ni les Romains, ni les Germains, ni la féodalité, ni la monarchie n'ont détruit ces unités vivaces ; on les retrouve encore dans les provinces et les pays de la France actuelle" (Histoire des institutions politiques de l'ancienne France, Fustel de Coulanges, p. 7).
           
        C'est précisément sur ce réel géographique que les diocèses chrétiens vivant dans cette structure naturelle innervé surnaturellement par la grâce divine, vont se construire, jusqu'au Concordat, principalement sous la très-active impulsion des grands, saints et énergiques évêques mérovingiens dont la plupart étaient des dignitaires de l'ancien Empire romain, et qui, en ce temps-là, in illo tempore, géraient les peuples autant dans l'ordre sociopolitique que dans celui purement spirituel, surtout après l'écroulement de l'Empire romain.
           
        "La Gaule est christianisée progressivement à partir du IIème siècle. Les communautés chrétiennes apparaissent d'abord dans les grandes villes, notamment à Lyon (sainte Blandine). Lorsque les communautés chrétiennes sont organisées, notamment après l'édit de tolérance de l'empereur Constantin, elles sont placées sous la direction d'un évêque (episcopus) siégeant au chef-lieu de la cité. Les évêques sont eux-mêmes placés sous la direction d'un métropolitain ou archevêque dont le siège est au chef-lieu de la province, voire du diocèse impérial. Les premiers archidiocèses de Gaule sont Lyon, Bordeaux et Reims (chefs-lieux des provinces d'Auguste).
           
        "Par un glissement sémantique, le terme «diocèse» est utilisé pour désigner le ressort d'un évêque. Mais le mot «cité» reste lié à la fonction épiscopale : une ville ou un quartier de ville est une «cité» s'il s'agit d'un siège épiscopal (par exemple : l'île de la Cité à Paris). Une des conséquence est que très souvent, la ville épiscopale perd son nom gaulois ou romain et prend le nom du peuple éponyme : par exemple, Condevicnum, chef-lieu de la cité des Namnètes (Namnetes), reçoit au IVe siècle le nom de Namnetes (puis de «Nantes»). Le même processus a lieu à Poitiers (Limonum), Angers, Vannes (Durioritum), Avranches, Bayeux, Lisieux, Vieux, Amiens, Arras, etc. Certains sièges épiscopaux conservent cependant leur nom antique : Lyon, Bordeaux (Burdigala), Lillebonne (Juliobona), Narbonne (Narbo), etc.
           
        "Lorsque l'Empire romain s'effondre dans sa partie occidentale en raison des invasions germaniques, du sac de Rome en 410 à la déposition de l'empereur d'Occident en 476, les structures administratives impériales disparaissent aussi (notamment les décurions), la seule structure qui résiste [et qui donc est fondée sur le Réel naturel] est celle de l'Église chrétienne. Les structures ecclésiastiques perdurent ensuite pour une grande part jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, voire au-delà" (https://fr.wikipedia.org/wiki/Territoires_du_royaume_de_France#cite_ref-3). 
           
        Or, le Saint-Esprit ne travaille pas contre le Saint-Esprit. Impossible de supposer qu'ayant patiemment donné sa Grâce pour la lente et toujours homogène élaboration ordonnée des diocèses français pendant de si nombreux siècles depuis l'ère gallo-romaine puis mérovingienne, carolingienne, capétienne, sans qu'il n'y ait jamais de destruction tabula rasa mais toujours un harmonieux et saint développement des structures, le Saint-Esprit puisse avoir soudain la volonté de tout détruire, tout supprimer d'un trait de plume concordataire ce travail divin qu'Il avait fait dans les siècles très-chrétiens, pour refaire à zéro, sans tenir aucun compte de Son travail antécédent fait avec les hommes saints ses serviteurs, un tout nouveau découpage de diocèses, comme le veut très-sacrilègement le § 2 du Concordat. Le Saint-Esprit ne méprise pas le Saint-Esprit, Il travaille toujours en continuité très-respectueuse avec ce qu'Il a précédemment fait avec le concours des saints, ses "serviteurs inutiles" (Lc XVII, 10). Car en effet : "Si un royaume est divisé contre lui-même, ce royaume ne peut subsister" (Mc III, 24).
           
        Et c'est pourquoi il est donc rigoureusement impossible de supposer une reconstruction ex nihilo de la structure géographique diocésaine en France ne tenant pas compte de la structure naturelle antécédente, qui serait soi-disant agréée par le Saint-Esprit via l'aval, le placet, du pape. Cette non-conformité radicale de la nouvelle structure moderne par rapport à l'ancienne n'est par ailleurs que trop bien montré rien que par le chiffre des nouveaux diocèses redécoupés par le Concordat : "Alors que la France d’Ancien Régime comptait 135 diocèses, le concordat n’en prévoit dans un premier temps que 60 : dix métropoles et cinquante évêchés. Ce nombre limité a essentiellement pour cause une raison financière : il s’agit de limiter les traitements épiscopaux et les frais de remise en état des cathédrales" (Decroix, ibid.). Tuediable ! De cent trente-cinq, les diocèses français sont réduits à soixante !! Il est évident, rien que par ce chiffre, que tout est reconstruit idéologiquement et anarchiquement, sous impulsion maudite des Lumières et de son coryphée Lucifer, ange déchu qui vit dans une idée qu'il s'est inventée du Réel, à la fois naturel et surnaturel, idée qu'il veut voir supplanter le vrai Réel, qui est le Dieu vrai et son Christ, tant sur le plan surnaturel que sur le plan naturel qui est généré par celui purement surnaturel...
 
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Voici le plus beau calvaire que j'ai vu, 
tiré du trésor de la cathédrale Saint-Lizier (Ariège),
supprimée par le Concordat...
       
        Et puis, soit dit en passant, là encore : comment pourrait-il être pour "le bien supérieur de l'Église", comme osait le dire très-mensongèrement le pape Pie VII du Concordat, que l'État ne subvienne plus financièrement qu'à 60 diocèses, alors que l'ancien Ordre très-chrétien en gérait sans difficulté 135...? Impossible à supposer, bien évidemment, le nombre réduit d'évêques et de prêtres et l'augmentation du territoire diocésain à gérer, multiplié par deux, ne pouvant évidemment plus donner la même qualité de service spirituel aux fidèles. Car c'est en effet ce prétexte financier que le Gouvernement napoléonien osera invoquer sans rougir de honte jusqu'à la crête pour réduire à plus de la moitié le nombre des diocèses... alors qu'il avait par ailleurs volé les biens du Clergé et de l'Église de France, et que donc l'entretien financier des nouvelles églises était un dû formel de l'État à l'Église, mais vol dont, là encore, Pie VII l'absoudra sans eau bénite dans le Concordat sans que le voleur ait à reconnaître le moins du monde son vol (§ 13), pas plus que les richéristes-synodaux ayant souscrit à la Constitution civile du Clergé ne furent obligés de faire rétractation de leur hérésie.
           
        ... Est-il encore besoin de rajouter que par tous les bouts où on prend le Concordat, on voit la patte du diable, toujours, partout, partout, toujours, à tous les endroits, carrefours, chemins de traverse, culs de basse-fosse, impasses et surtout mauvais lieux et autres bouges...         
           
        Mêmes les auteurs profanes, qui analysent le phénomène concordataire de manière seulement universitaire, s'en rendent compte. Voici par exemple ce qu'on peut lire dans Wikipedia, frappé du sceau du bon sens :
           
        "Les dispositions édictées par cette bulle [Qui Christi Domini, du 29 novembre 1801] sont absolument uniques dans l'histoire de l'Église. Jamais un pape ne s'était accordé le droit de supprimer purement et simplement un seul siège épiscopal, ni a fortiori tous les sièges d'une nation ou d'un royaume, ni de déposer un ou plusieurs évêques hormis les cas de schisme, hérésie ou scandale. Les réorganisations territoriales des diocèses qui ont eu lieu dans l'histoire de l'Église se sont traduites par exemple par la création de nouveaux sièges dont le territoire diocésain était démembré d'un ancien diocèse ; ou encore, on a réuni des diocèses à un même siège. Mais jamais on n'a supprimé purement et simplement des sièges et des diocèses, surtout à une telle échelle.
           
        "Par cette bulle, tous les sièges épiscopaux, remontant la plupart à l'Antiquité, étaient supprimés et abolis ; et de nouveaux sièges étaient érigés. Comme les nouveaux sièges ont été fondés la plupart dans les mêmes villes et les mêmes cathédrales que les anciens, cette mesure est passée un peu inaperçue. Néanmoins, elle a causé un grand étonnement parmi de nombreux fidèles. Certains ont continué à reconnaître les anciens évêques canoniquement installés, d'autres ont rejeté les évêques constitutionnels installés par le pape sur des nouveaux sièges. Ainsi, ceux qui ont rejeté ces mesures inouïes ont constitué une sorte de schisme qui dure encore au XXIe siècle. (...) Cette politique de la tabula rasa a pour conséquence que les évêques diocésains français, à partir de 1801, ne sont pas, juridiquement, les successeurs des anciens évêques, quoiqu'ils le demeurent du point de vue symbolique. Par exemple, l'archevêque de Lyon a comme plus lointain prédécesseur non pas les saints Pothin et Irénée, mais le cardinal Fesch [le cardinal-oncle de Napoléon, né en 1763, mort en 1839, premier archevêque concordataire de Lyon en 1802].
           
        "(...) Malgré la suppression de tous les sièges épiscopaux et l'érection de soixante nouveaux sièges, le Pape Pie VII autorisa le port, par les nouveaux évêques, du titre de quelques anciens sièges, mais uniquement à titre de «souvenir», sans qu'on puisse en conclure que ces Églises «n'ont pas été réellement supprimées» : «Nous ordonnons, en vertu de l'autorité apostolique à nous déléguée, et nous donnons respectivement la faculté aux archevêques et aux évêques qui seront canoniquement institués, de joindre chacun au titre de l'église qui lui sera confiée, les autres titres des églises supprimées que nous avons mentionnés dans le tableau ci-dessus ; de manière, cependant, que de cette union et de cette application de titres, uniquement faites pour l'honneur et pour conserver le souvenir de ces églises illustres, on ne puisse en aucun temps en conclure, ou que ces églises subsistent encore, ou qu'elles n'ont pas été réellement supprimées, ou que les évêques à qui nous permettons d'en joindre les titres au titre de celle qu'ils gouverneront, acquièrent par-là aucune autre juridiction que celle qui est expressément conservée à chacun d'eux par la teneur de notre présent décret»" (https://fr.wikipedia.org/wiki/Qui_Christi_Domini#cite_ref-1). Comme on le voit, indigné, le pape Pie VII tenait donc énormément à ce qu'il ne reste RIEN de l'ancienne structure diocésaine très-chrétienne, à épouser la cause révolutionnaire qui veut faire du passé, table rase !!!
           
        Donc, pour conclure cette question très-importante de la structure de droit divin des diocèses de France d'Ancien-Régime : leur restructuration faisant table rase de leur socle très-chrétien sans l'accord de leurs époux légitimes, à savoir les évêques d'Ancien-Régime, était radicalement invalide, tant sur le plan théologique que canonique...
           
        Certes, il est vrai d'autre part, que sur ce sacrilège, le pape légitime a créé ex nihilo d'autres diocèses qui ne peuvent être, quant à eux, que légitimes puisque le pape l'est et qu'il est le maître de la juridiction universelle. Mais comme le souligne fort bien l'auteur de l'article de Wikipedia que nous venons de lire, les titulaires de ces nouveaux diocèses ne peuvent plus dire qu'ils sont les successeurs des évêques très-chrétiens d'avant le Concordat sacrilègement destructeur, ni remonter aux glorieuses assises de leur fondation, "par exemple, l'archevêque de Lyon a comme plus lointain prédécesseur non pas les saints Pothin et Irénée, mais le cardinal Fesch" (ibid.).
           
        Ceci soulève d'ailleurs une question extrêmement grave, celle de la Note d'Apostolicité des Églises concordataires, depuis 1801. Celles-ci l'ont-elles... encore ? Gardons-nous bien de répondre par la négative, car comme aucune église catholique ne saurait l'être sans posséder la Note d'Apostolicité, alors, si les églises concordataires ne la possédaient pas, cela équivaudrait à dire qu'elles ne sont... pas catholiques ! Le vrai, sur le sujet, c'est qu'elles sont en possession de la Note d'Apostolicité, effectivement, mais non plus par l'Apôtre qui fonde les antiques églises de France (par exemple, saint Jean Apôtre, d'où est très-probablement issue l'apostolicité de l'évêque saint Pothin, premier évêque de la ville et du diocèse de Lyon), désormais toutes le sont uniquement par le seul Apôtre Pierre, puisqu'elles reçoivent toutes leur institution canonique par le pape Pie VII. Mais cette nouvelle institution n'était pas que seulement apostoliquement pétrinienne, elle était en même temps, par le même acte concordataire, ayons garde de l'oublier, prostituée obligatoirement à un État constitutionnellement athée, pervertie dans ses Mœurs, entachée hérétiquement de l'attentat contre le criterium paulinien de la validité des puissances politiques...
           
        Non seulement donc, pour conclure ce chapitre, la destitution des évêques français d'Ancien-Régime attaquait en son cœur la Constitution divine de l'Église, comme nous l'avons vu plus haut et comme nos évêques Réclamants le soulignent à si juste titre dans leurs Réclamations, etc., mais encore bien, ne l'attaquait pas moins la destruction puis restructuration radicales des diocèses français par le Concordat. Tous deux en effet étaient actées sans le moindre accord des époux desdites églises et diocèses, à savoir leurs évêques légitimes, ce qui était théologiquement formellement proscrit et rédhibitoire.
 
 
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        C'est donc bien à partir du Concordat que l'Église-Épouse du Christ est "faite péché pour notre salut" (II Cor V, 21), qu'elle vit dès lors dans la "si grande contradiction" (He XII, 3), sous "la puissance des ténèbres" (Lc XXII, 53), autrement dit qu'elle rentre dans l'économie spécifique de la Passion du Christ, pour vivre "LA PASSION DE L'ÉGLISE" et, in fine, à la toute-fin du processus, en mourir de mâlemort sous le règne de l'Antéchrist-personne. On ne s'en rendit absolument pas compte lors du Concordat et après, parce que cette mise de l'Église dans le "être fait péché pour le salut" co-Rédempteur fut vécu occultement de 1801 jusqu'au concile Vatican II, seulement au niveau des Mœurs ecclésiales, la Foi restant contradictoirement encore sauve au for externe public et ecclésial des choses, trompant ainsi toutes les âmes, on ne s'en rendit généralement compte qu'au moment fatidique où la corruption des Mœurs ayant infesté et infecté occultement la Foi pendant plus d'un siècle et demi, la corruption de la Foi perça soudainement et brutalement à Vatican II dans les années 1961-65, comme elle avait spectaculairement et non moins brutalement percé au niveau des seules Mœurs, en 1801. Et toujours, remarquons-le bien, par un pape, Pie VII puis Paul VI... tant il est vrai que le poisson, qui fut pris comme symbole du christianisme dans la primitive Église, pourrit par la tête. Tout le mouvement tradi, par exemple, a fondé sa juste et légitime réaction à l'hétérodoxie de Vatican II sans prendre du tout conscience, à commencer par Mgr Marcel Lefebvre, de ce grand point : le premier épisode de "la crise de l'Église" qui donc est "PASSION DE L'ÉGLISE", est le Concordat napoléonien et nullement Vatican II, qui n'en est que subséquente et lointaine suite et débouché débauché... 
           
        Certains voudront sûrement opposer à la prostitution concordataire de l'Église de France après 1801 par laquelle elle est très-véritablement "faite péché pour notre salut", les nombreux saints qui ont surgi en son sein durant tout le XIXème siècle, et puis encore l'immense élan missionnaire qui remplit surtout la dernière moitié de ce siècle immédiatement post-concordataire, jusqu'au martyr de tant de ses saints membres. L'objection est facile à faire, mais plus encore ficelle, de bien peu de portée. Un mot, un, seulement, sera suffisant pour détruire l’amalgame vicieux qu’on prétend faire en mettant les saints du XIXème siècle dans la charrette concordataire. Ce constat qu’il y eut de nombreux saints au XIXe siècle, ce qui est parfaitement vrai, en vérité, ne prouve absolument rien quant à démontrer que Dieu cautionne le Concordat. De tout temps, en effet, Dieu avait prévu de susciter des saints pour ce XIXème siècle. Mais ce n’est pas parce que les hommes ont prévariqué à la fin du XVIIIème siècle, qu’Il va rapporter son plan, Lui, Dieu, Il l’exécute, Il envoie les saints qu’Il avait prévu d’envoyer pour ce temps ecclésial. Cela ne fait que prouver que l'Église concordataire est toujours inhabitée du Saint-Esprit qui donne toujours sa grâce à qui veut être saint, son Action est toujours là, quand bien même le vers est désormais dans le fruit, quand bien même cette Église est désormais "faite péché pour notre salut", vivant désormais l'économie de "LA PASSION DE L'ÉGLISE".
           
        Il n’y a donc là nulle caution de la part des saints, encore moins de Dieu, apportée au Concordat de l’abomination de la désolation dans le Lieu-Saint. C'est comme si on disait, pour justifier Vatican II et sa dérive doctrinale, que puisqu'il y a encore des saints dans l'Église moderne, ce que donc Mgr Strickland, pour sa très-édifiante part, vérifie, comme je l'ai fait remarquer en commençant ces lignes, donc cela prouverait que Vatican II ne peut être mauvais ! On voit tout-de-suite la fausseté intrinsèque du raisonnement. En vérité, cet argument qu'on croit pouvoir soutenir ne pourrait être fondé et prouver que Dieu approuve et même suscite le Concordat que si, et seulement si, Dieu avait donné un saint au XIXème siècle avec mission publique spéciale et expresse d'enseigner que Dieu approuvait le Concordat, que c'était un moyen de salut voulu par Lui… Mais est-il besoin de préciser que le XIXème siècle n’enregistre AUCUN "saint" de cet acabit-là, pas le plus petit, pas un seul, je mets bien au défi tout concordataire de m’en citer un seul ou une seule...!! La plupart des saints suscités par Dieu pour cette malheureuse époque, n’ont-ils pas, tout au contraire, réparé d'une manière pratique autant qu’ils ont pu les désordres révolutionnaires près des peuples ? Réparer les désordres, c’est bien autre chose que les agréer en cautionnant Napoléon et son Concordat (car il est bien plus de lui que du pape), qui faisaient passer dans la vie des peuples les principes révolutionnaires qui les avaient produits, ces désordres !
           
        Et puis, je rappelle qu'à Pontmain, en 1870, lorsque tout prêtre français était encore sous le régime concordataire de 1801, la très-sainte Vierge se mit aussitôt sur la grande défensive dès que le curé Guérin, le prêtre de Pontmain, pourtant saint en son privé, arriva sur le lieu de l'Apparition, exactement comme si elle avait affaire à un ennemi potentiellement mortel ! La très-sainte Vierge n'était pas dupe. Quand bien même le prêtre de Pontmain était un saint prêtre en son for privé, elle n'en avais pas moins affaire, quant à son for public, à un prêtre... concordataire, donc parfaitement ennemi de son Fils sous ce rapport ! Et c'est ce qu'elle manifesta dans l'appareil de l'Apparition (cf. https://eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/le-saint-abbe-guerin-cure-de-pontmain-aux-temps-des-apparitions-a-t-il-plu-en-tout-a-la-tres-sainte-vierge-et-au-bon-dieu?Itemid=1). Et puis, et puis, trente ans auparavant, lorsqu'elle apparaissait à La Salette, pourquoi fustigea-t-elle d'importance le clergé français en général, en le traitant de "cloaque d'impureté" ? On ne peut pas dire qu'à cette époque il s'agissait de l'impureté charnelle des prêtres, comme hélas la nôtre l'enregistre, Notre-Dame de La Salette ne pouvait donc dénoncer là, dans les prêtres de France, que l'impureté concordataire...
 
 
 Blason du Plessis dArgentré2
 
Blason des Du Plessis d'Argentré
       
        J'ai eu grand'plaisir à découvrir, en listant les trente-huit signataires de ces Réclamations, etc., Messeigneurs DU PLESSIS D'ARGENTRÉ, Louis-Charles (1723-1808), évêque de Limoges, et Jean-Baptiste (1720-1805), évêques de Séez, deux frères ayant trois ans d'écart entre eux et qui se sont beaucoup suivis dans la vie, tant pour leurs études, leurs carrières ecclésiastiques très Ancien-Régime, que lorsqu'il s'est agi pour tous deux d'émigrer ensemble en Allemagne très-peu de temps après que la Révolution éclata. En effet, le bien-fonds familial des du Plessis d'Argentré est devenu précisément la commune que j'habite... ARGENTRÉ-DU-PLESSIS !
           
        Le comportement de Mgr Louis-Charles du Plessis d'Argentré, d'ailleurs, quant à la grande affaire du Concordat, est fort instructif et même édifiant, au moins dans les grandes diagonales. Ainsi qu'on l'a vu, "[il] signe d'abord, avec trente-sept autres évêques français [dont son frère Jean-Baptiste], des remontrances qui sont adressées à Pie VII. Mais, craignant un schisme qui serait fatal à l'Église, il fait passer, le 20 février 1802, aux fidèles de son diocèse, un avertissement, avec des instructions pour les vicaires généraux et pour le clergé : il reconnaît le nouvel évêque qui est entré en fonctions avec l'autorisation du pape, il retire ses pouvoirs aux vicaires généraux que lui-même a institués. Par suite de cette décision, il n'y eut presque point d'ecclésiastiques dissidents dans ce diocèse, et l'ancien évêque fut constamment en relation avec son successeur l'évêque concordataire Jean-Marie-Philippe Dubourg" (https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Charles_du_Plessis_d%27Argentr%C3%A9).
           
        Cette attitude de Mgr Louis-Charles du Plessis d'Argentré est très-intéressante, quoiqu'elle n'aille pas jusqu'au bout de la question, qui est de comprendre que par le Concordat, l'Église Universelle, pour commencer, seulement dans sa portion française, est rentrée dans l'économie de "LA PASSION DE L'ÉGLISE". Elle relève en tous cas d'une grande sagesse, et me fait penser à l'attitude de Mgr Marcel Lefebvre lors du concile Vatican II. Dans sa biographie monumentale sur le fondateur de la Fsspx, Mgr Tissier de Mallerais révèle en effet dans un endroit que Mgr Lefebvre a lutté à de nombreuses reprises, tant qu'il a pu, contre le décret de la Liberté religieuse, pour qu'il ne soit pas promulgué, dénonçant à si juste titre son caractère doctrinalement hérétique ; mais dès qu'il apprit que le pape, Paul VI, l'avait signé et promulgué, il se résigna et s'obligea immédiatement à le signer lui-même, mais seulement en signe d'union avec le pape actuel légitime, Paul VI, faisant toute expresse réserve sur l'orthodoxie dudit décret. Et la raison de l'attitude qu'il donna de sa conduite était très-louable : il s'appuyait sur la raison théologique très-forte qu'on ne saurait s'opposer au pape légitime actuel sur le plan doctrinal. En droit théologique, rien de plus catholique, et même édifiant, c'était tout-à-fait exact.
           
        Et précisément, nous devons avoir la même attitude quant au Concordat. Et c'est donc l'attitude adoptée, on vient de le voir, par Mgr Louis-Charles du Plessis d'Argentré. Premièrement, le Concordat est intrinsèquement mauvais et pervers, car,  il corrompt formellement les Mœurs des fidèles en les obligeant à reconnaître la validité à un pouvoir politique qui ne l'est pas, ce qui est pécher contre le criterium catholique de validité des sociétés politiques enseigné par saint Paul. De là, évidemment, résulte que dorénavant les catholiques sont donc obligés de professer et pratiquer l'hérétique indifférentisme religieux au for public, que professe et pratique ledit pouvoir politique mauvais, nonobstant toutes autres très-mauvaises lois qu'il tire de son mauvais fond constitutionnel. De plus, et, théologiquement, c'est encore plus grave, le Concordat attente hérétiquement à la Constitution divine de l'Église quant à l'Ordre épiscopal, tant sur le plan de la destitution des évêques légitimes que quant à celui de la restructuration des diocèses. Mais deuxièmement, ce qui est aussi sûr, c'est qu'il est promulgué par un pape légitime, Pie VII, et nous devons donc, en tant que catholiques respectant l'intégralité des exigences de la Foi, l'accepter, en tant qu'instrument crucificateur de l'Église-Épouse, comme les clous fixant mains et pieds du Christ sur la croix jusqu'à ce que mort s'ensuive, usque ad mortem...
           
        En fait, face au Concordat, il y a deux écueils dont il faut se garder avec soin, à savoir : soit le sédévacantisme, c'est-à-dire faire schisme avec Pie VII et l'Église Universelle, comme un seul Évêque Réclamant cependant, il est bon de le rappeler et de le souligner, l'a possiblement fait parmi les anticoncordataires (tous les Évêques Réclamants qu'on a vu, même Mgr de Coucy, ont fini par se rallier au pape Pie VII, parfois à l'article de la mort, comme Mgr de Lauzières-Thémines, et aucun n'a fini sa vie dans le schisme sédévacantiste, sauf peut-être, semble-t-il, mais c'est fort loin d'être sûr, Mgr Louis-André de Grimaldi) ; soit tout au contraire blanchir à la chaux pharisienne le péché concordataire (... comme les Ralliés l'ont fait pour la Liberté religieuse de Vatican II...), vouloir voir blanc ce qui est très-objectivement noir, comme tous les cathos l'ont fait à partir du Concordat jusqu'à nos jours, qu'ils soient modernes ou tradis, en voulant connoter comme très-orthodoxe la nouvelle doctrine concordataire moderne qui veut que tout pouvoir politique, quelqu'il soit, est de soi valide, même ceux qui ne sont pas constitutionnellement ordonnés au Bien commun, ce qui est hérétique et contraire à l'enseignement catholique de saint Paul.
           
        La seule vraie et équilibrée solution théologique de "la crise de l'Église" déjà manifestée par le Concordat, bien avant donc Vatican II qui voit la même problématique, consiste et réside dans "LA PASSION DE L'ÉGLISE" : d'abord, premièrement, reconnaître le péché ecclésial soit concordataire soit conciliaire ; ensuite, connoter ce péché ecclésial de simplement matériel et sans coulpe, comme étant le signe topique de la mise de l'Épouse du Christ dans l'économie de la Passion du Christ, celle-ci étant, par cesdits actes concordataire puis conciliaire, "faite péché pour le salut" (II Cor V, 21). Et enfin, vivre et mourir quant à soi, en union avec saint Jean et les saintes femmes au pied de la croix, la Passion, sans reniement laxiste de la Foi, sans non plus de durcissement stérile...
 
Mgr Joseph Strickland Diocese of Tyler
           
        En conclusion générale de mon long article, et pour revenir sur l'actu qui buzze et le buzz de l'actu, je vais citer la belle lettre ouverte aux fidèles que Mgr Joseph Strickland a publié le 27 novembre dernier, laquelle permet de bien faire le point sur sa............... "des-ti-tu-tion" (Tonton, pourquoi tu tousses ?, comme disait Fernand Raynaud) :
           
        "Comme vous l'avez certainement appris, j'ai été démis de mes fonctions d'évêque du diocèse de Tyler. On m'a demandé de rencontrer le nonce apostolique aux États-Unis et, au cours de cette réunion, on m'a lu la liste des raisons pour lesquelles j'étais démis de mes fonctions. Je mettrais ces raisons à votre disposition si cela était possible ; cependant, je n'ai pas reçu de copie de cette liste à ce moment-là, et je n'ai pas encore été en mesure d'en obtenir une malgré mes demandes.
           
        "Dans les raisons qui m'ont été lues, aucune mention n'a été faite de problèmes administratifs ou d'une mauvaise gestion du diocèse pour justifier mon renvoi. Les raisons invoquées semblaient être liées, pour la plupart, au fait que je disais la vérité sur notre foi catholique et que je mettais en garde contre tout ce qui menaçait cette vérité (y compris les questions soulevées lors du Synode sur la synodalité). On a également mentionné le fait que je n'ai pas accompagné mes frères évêques lorsque j'ai défendu l'Église et ses enseignements immuables, et que je n'ai pas mis en œuvre le motu proprio Traditionis custodes. Si je l'avais mise en œuvre, j'aurais dû laisser une partie de mon troupeau sans nourriture et sans soins. En tant que berger et protecteur de mon diocèse, je ne pouvais pas prendre des mesures dont je savais avec certitude qu'elles porteraient préjudice à une partie de mon troupeau et le priveraient des biens spirituels que le Christ a confiés à son Église. Je maintiens mes actions car elles étaient nécessaires pour protéger mon troupeau et défendre le dépôt sacré de la foi.
           
        "C'est le moment où tout ce qui est actuellement couvert doit être découvert et où tout ce qui est actuellement caché doit être clarifié. En fait, c'est à l'époque où l'on cachait des choses concernant le cardinal Theodore Mc-Carrick, aujourd'hui en disgrâce, et le scandale des abus sexuels de l'Église, que je suis apparu pour la première fois dans le collimateur du Vatican. Mon principal crime, hier comme aujourd'hui, semble avoir toujours été de mettre en lumière ce que d'autres voulaient garder caché. Malheureusement, il semble aujourd'hui que c'est la Vérité elle-même, notre Seigneur Jésus-Christ, que beaucoup souhaitent voir cachée.
           
        "Même si je n'ai plus de diocèse, je suis toujours un évêque de l'Église et donc un successeur des apôtres, et je dois continuer à dire la Vérité, même si cela exige ma propre vie. Je veux vous dire ceci à tous aujourd'hui : ne quittez jamais, jamais, jamais l'Église ! Elle est l'Épouse du Christ ! Elle est en train de vivre sa Passion, et vous devez vous résoudre à vous tenir résolument à la croix ! Il est important d'assister à la messe tous les dimanches et aussi souvent que possible, de passer du temps en adoration, de prier le rosaire tous les jours, de se confesser régulièrement et d'appeler toujours les saints à l'aide ! Je vous exhorte à persévérer afin de pouvoir dire à la fin : "J'ai combattu le bon combat jusqu'au bout, j'ai couru la course jusqu'à l'arrivée, j'ai gardé la foi".
           
        "Que Dieu tout-puissant vous bénisse et que notre sainte et bienheureuse Mère intercède pour vous et vous renvoie toujours à son Divin Fils Jésus en ce temps de l'Avent.
           
        "Je reste votre humble père et votre serviteur,
 
            "L'évêque Joseph E. Strickland"
           
           
        ... "Ne quittez jamais, jamais, jamais, l'Église ! Elle est l'Épouse du Christ !" Voilà qui fait penser à l'admirable image empruntée par le cardinal Zen pour faire comprendre le devoir catholique de rester dans l'Église, quand bien même son âme est déchirée de voir son Église chinoise être abominablement crucifiée par un concordat chinois qui n'est rien d'autre qu'un énième scandaleux copier-coller du Concordat napoléonien : "Quand un enfant reçoit une fessée par sa mère, loin de s'en éloigner, il se colle à elle, s'agrippe en pleurant à ses jupes"...
           
        Monseigneur Strickland au Rome Life Forum 2023, a eu également une autre très-belle parole : "Les catholiques qui vivent cette crise doivent se rappeler qu’ils sont nés pour cela". Voilà une parole très-inspirée, qui rejoint celle que le Christ prononça pour Lui-même lorsqu'il eût à vivre et mourir sa Passion : "Maintenant Mon âme est troublée [car le moment où je dois vivre ma Passion est arrivé pour Moi]. Et que dirai-Je ? Père, délivrez-Moi de cette heure. Mais c'est pour cela que Je suis arrivé à cette heure" (Jn XII, 27).
           
        D'une certaine manière ou plutôt d'une manière certaine, on pourrait dire, comme pour le Christ : c'est pour vivre la Passion à la fin des temps, que le chrétien est né il y a 2 000 ans...
           
        N'est-ce pas cela, "la largeur, et la longueur, et la sublimité, et la profondeur du mystère du salut" (Eph III, 18) manifesté de nos jours dans et par "LA PASSION DE L'ÉGLISE"...?
 
En la très-grande fête de
L'IMMACULÉE-CONCEPTION,
Ce 8 décembre 2023,
Vincent Morlier,
Écrivain catholique.
 
 
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"Que soy era Immaculada Councepciou"
 
 
08-12-2023 08:12:00
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