La Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie :
Une demande désormais obsolète, dépassée ?
À laquelle la paresse spirituelle des chrétiens continue à croire,
papes modernes y compris ?
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La Consécration de la Russie demandée par Notre-Dame de Fatima, est-elle spirituellement caduque de nos jours, n'a-t-elle plus cours, n'ayant plus aucune valeur près le Ciel, ou bien, au contraire, est-elle toujours d'actualité, et le Ciel la veut-il toujours pour apporter "un certain temps de paix au monde" avant la grande tribulation du règne de l'Antéchrist-personne...?
Cette question, fondamentale, primordiale en avant de toute autre, n'est cependant jamais posée par les chroniqueurs actuels écrivant sur la Consécration, dont on voit la plupart s'agiter fébrilement, passionnellement, dans l'épiphénomène second des choses de l'actualité plus ou moins mondaine, en oubliant le fondement spirituel qui encadre cesdites choses. Et pourtant, la question que j'ai posée en titre est bien la toute première question à laquelle il faut répondre, quand on parle de cette célébrissime Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, c'est par-là qu'il faut commencer.
Je consacrerai donc cet article au commencement des choses de la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, ce que, hélas, personne ne fait, du moins à ma connaissance.
Cette question posée sur la caducité ou bien non de la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, de toutes façons, n'est vraiment pas simple, elle est même assez redoutable. En approfondissant le message de Fatima sur ladite Consécration, on ne peut s'empêcher en effet de discerner comme une "contradiction" dans les demandes mêmes de Notre-Dame de Fatima, puis, au fil du temps, un "brouillard" de plus en plus épais sur cette "contradiction", que Sœur Lucie, la principale voyante, est fort loin de lever, bien au contraire. Évidemment, je suis très-conscient que la Reine des prophètes, de par Dieu, sait les choses de la grande Prophétie mieux que quiconque à commencer par moi-même, ces choses qui doivent nous amener, en traversant le feu de la grande Tribulation, au Millenium. Encore faut-il bien expliquer ce qu'elle a prophétisé à Fatima, pour ne pas faire de son message prophétique une contre-vérité, une pieusarderie obscurantiste mensongère et méprisable, très-préjudiciable à la vraie spiritualité qui doit gouverner les âmes chrétiennes vivant le temps de la fin des fins, temps qui est nôtre.
La Consécration de la Russie est-elle périmée ou est-elle toujours d'actu ? Le discours prophétique de base, la matrice originelle de la prophétie concernant la Consécration, qui fonde toute la prophétie sur le sujet, est évidemment ce que dit la très-sainte Vierge le 13 juillet 1917. Ce que Sœur Lucie en dira par après, en 1929, 1940, 1952, etc., ne peut que secondairement reprendre ou développer ce qui y est dit, sans jamais le contredire. Or, il n'est pas besoin de beaucoup lire ce que j'appellerai la proto-prophétie du 13 juillet 1917 pour comprendre que la Vierge de Fatima demande la Consécration de la Russie UNIQUEMENT POUR ÉVITER AU MONDE LE CHÂTIMENT DE LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE. Cela saute aux yeux, dans le discours de 1917. Avant de lire texto cette prophétie originelle du 13 juillet 1917, il est bon de préciser qu'on ne saurait dire que les petits voyants se sont trompés. Lorsque, après l'Apparition, ils ont fait allusion à la Russie, à mots couverts à leur entourage (car la Vierge leur avait demandé le secret sur ce qu'elle leur avait dit), les trois petits pastoureaux étaient si incultes qu'ils ne savaient pas encore que la Russie était un pays, une nation, ils croyaient que la Vierge se plaignait d'une "grosse méchante dame", et on leur apprit alors qu'il s'agissait d'une nation, comme le Portugal... Il n'y a donc pas erreur sur le mot "Russie", l'objet de la Consécration porte bien sur cette nation parmi les autres nations, ses consœurs.
Lisons bien, justement, le discours prophétique, mot pour mot, de Notre-Dame de Fatima, ce 13 juillet 1917 : "... Vous avez vu l'enfer où vont les âmes des pauvres pécheurs. Pour les sauver, Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. Si l'on fait ce que je vais vous dire, beaucoup d'âmes se sauveront et l'on aura la paix. La guerre va finir, mais si l'on ne cesse d'offenser Dieu, sous le règne de Pie XI en commencera une autre, pire encore. Quand vous verrez une nuit illuminée par une lumière inconnue, sachez que c'est le grand signe que Dieu vous donne qu'Il va punir le monde de ses crimes, par le moyen de la guerre, de la famine et des persécutions contre l'Église et le Saint-Père. Pour empêcher cela, je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé et la communion réparatrice des premiers samedis du mois. Si l'on écoute mes demandes, la Russie se convertira et l'on aura la paix ; sinon, elle répandra ses erreurs à travers le monde, provoquant des guerres et des persécutions contre l'Église. Les bons seront martyrisés, le Saint-Père aura beaucoup à souffrir, plusieurs nations seront anéanties. À la fin mon Cœur Immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie qui se convertira, et il sera donné au monde un certain temps de paix. Au Portugal, se conservera toujours le dogme de la foi, etc. Cela, ne le dites à personne, sauf à François".
Voilà, c'est la prophétie textuelle de la très-sainte Vierge Marie à Fatima, quant à la Consécration de la Russie. Il s'agit donc pour nous de bien comprendre ce que dit la Reine des prophètes.
Première chose à prendre en considération : le contexte historique. Cette prophétie est faite en 1917, en pleine fin de première guerre mondiale, et elle n'est même pas terminée que Notre-Dame de Fatima en prophétise déjà une autre à venir sous le prochain pontificat, qui sera "pire encore", avec un cortège de maux liés à cette nouvelle guerre à venir. Or, la très-sainte Vierge cible avec une très-grande précision cette nouvelle guerre à venir, en disant qu'elle aura lieu "sous le règne de Pie XI" : il s'agit donc, sans aucune équivoque possible, de la deuxième guerre mondiale 1939-1945. C'est clair, et aucun doute sur cela n'est admissible ni recevable.
Sortons juste un moment de la Prophétie et rentrons dans l'Histoire, avant de continuer. Cette deuxième guerre mondiale fomentée par les nazis antichrists redoutables, fut en effet accompagnée d'épisodes de famines et de persécutions antireligieuse contre l'Église, surtout en Allemagne, mais l'Histoire et ses faits indiscutables obligent à faire le constat que le Saint-Père de la deuxième guerre mondiale, en l'occurrence Pie XI puis surtout Pie XII, tous les deux furieusement et même hystériquement concordataires avec des États constitutionnellement athées voire antichrists (n'oublions pas qu'un concordat surnaturellement contre-nature fut signé entre Hitler et le cardinal Pacelli mandaté par Pie XI, en 1933, ce qui était ni plus ni moins abominablement réputer à la face du monde entier la validité de l'État nazi, cf. la seconde partie de mon article https://www.eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/face-a-l-eglise-romaine-concordatairement-prostituee-au-iiieme-reich-d-adolf-hitler-un-heros-discret?Itemid=154), que le Saint-Père de la deuxième guerre mondiale disais-je, ne fut pas vraiment persécuté par les méchants.
Il n'aurait d'ailleurs pu l'être vraiment, puisque lui-même, Vicaire du Christ dévoyé sur le plan politique constitutionnel, est, au niveau tout ce qu'il y a de plus mondial, partie prenante du mal et des méchants rien que par sa pratique concordataire avec des États constitutionnellement athées et antichrists, pratique par laquelle il transforme abominablement le "Siège de Rome" (Secret de La Salette) en la grande Prostituée de Babylone que saint Jean nous décrit dans l'Apocalypse, quand bien même il ne s'en rend pas compte et n'en a nullement conscience. Certes, Pie XII craignit à un moment donné, en 1942, d'être enlevé par les nazis, au point de préparer canoniquement sa succession avec les cardinaux, mais ce seul fait n'est pas suffisant pour rendre compte de la prophétie de Notre-Dame de Fatima, qui prédit "des persécutions contre l'Église et le Saint-Père", un Saint-Père qui est décrit, dans ce cadre prophétique de la deuxième guerre mondiale, comme ayant "beaucoup à souffrir" (ce qui pose déjà une première interrogation, Pie XII n'ayant été ni persécuté ni ayant eu beaucoup à souffrir, que ce soit de la part de l'Allemagne nazie ou de la Russie soviétique ; c'est juste un simple constat historique qu'on est obligé de faire, par honnêteté d'examen).
Mais donc, après cette parenthèse, reprenons la question prophétique pure. Une première analyse de la proto-prophétie de 1917 concernant la Consécration de la Russie, montre qu'elle est demandée par Notre-Dame de Fatima DANS LE SEUL BUT D'ÉVITER LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE, avec son cortège de maux et sa persécution anti-ecclésiale. C'est le premier point important à bien comprendre. Ce qui conforte cette conclusion, c'est que la très-sainte Vierge, comme elle l'a annoncé aux voyants dans son discours proto-prophétique ("je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé, etc."), vient effectivement la demander en 1929, donc bien avant la deuxième guerre mondiale, c'est-à-dire que, historiquement, on est toujours dans le cadre où la Consécration de la Russie doit être faite pour éviter au monde la deuxième guerre mondiale. Le délai de dix ans donné par le Ciel au pape Pie XI pour la faire, était amplement suffisant. Et ce qui achève de conforter ce contexte exclusif de la deuxième guerre mondiale comme cadre formel de la Consécration de la Russie, c'est l'aurore boréale, qui a lieu en 1938, juste un an avant le déclenchement de ladite deuxième guerre mondiale ; elle est bien "le grand signe que Dieu vous donne qu'Il va punir le monde de ses crimes, par le moyen de la guerre, de la famine et des persécutions contre l'Église et le Saint-Père". Et la Vierge de Fatima dit bien que c'est "pour empêcher cela" qu'elle demande la Consécration de la Russie...
1917, 1929, 1938 : les trois dates confirment on ne peut mieux que la Consécration de la Russie est proto-prophétiquement demandée uniquement "pour empêcher cela", comme dit Notre-Dame de Fatima le 13 juillet 1917 en désignant sans équivoque, par cette formule, la deuxième guerre mondiale.
Il y a cependant, dans cette analyse de la question, une anormalité de taille : pourquoi, si la Consécration en question devait servir uniquement à éviter au monde la deuxième guerre mondiale, est-elle demandée d'une nation... qui n'est pas la mauvaise cause nationale de ladite deuxième guerre mondiale...?? En effet, la Russie, ou plutôt, à l'époque de l'ouverture de la deuxième guerre mondiale, l'URSS, n'est pas, de près ou de loin, cause de la deuxième guerre mondiale, la Nation qui en est à la fois coupable et responsable au premier chef, on ne l'apprendra à personne, c'est l'Allemagne, et l'Allemagne... seule ! Et Dieu sait assez si ce nouvel ordre mondial nazi à partir de la nation allemande a cherché furieusement, par tous les moyens en son pouvoir, pendant de terribles années, à "répandre ses erreurs à travers le monde", à coups de crosses de fusil, de camps de concentration, de chars d'assaut, de sous-marins, de bombardements aériens de grandes villes, et dans des fleuves de sang...! Donc, pardon très-sainte Vierge Marie, vous ne pouvez pas en vouloir à votre enfant de vous parler à cœur ouvert, la logique la plus élémentaire, s'il ne s'agissait que d'éviter au monde la deuxième guerre mondiale, aurait voulu que vous demandassiez la Consécration de... l'Allemagne à votre Cœur immaculé !
Il n'en est rien, la Reine des prophètes demande, de par Dieu, la Consécration de la Russie dès 1917... pour empêcher le châtiment de la deuxième guerre mondiale. Et elle le confirme on ne peut mieux lorsque le 13 juin 1929, dans la révélation mystique de Tuy, elle annonce à Sœur Lucie que c'est l'heure de la faire : "Le moment est venu où Dieu demande au Saint-Père de faire, en union avec tous les évêques du monde, la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé, promettant de la sauver par ce moyen". Ce n'est pas l'Allemagne qui, en 1929, est désignée par la très-sainte Vierge, mais la Russie soviétique... qui, politiquement et militairement péniblement debout à cette époque, n'est pas du tout le danger immédiat devant déclencher la guerre "encore pire", "sous le règne de Pie XI", dont elle a dit que la Consécration devait "l'empêcher" ! Comment expliquer cela, qui semble être d'un illogisme absolu si l'on s'en tient à la proto-prophétie du 13 juillet 1917, à savoir que la Consécration de la Russie est demandée uniquement pour éviter au monde la deuxième guerre mondiale et son cortège de maux...? Et puis, on est obligé de remarquer en outre que dans le message de 1929, la Consécration de la Russie n'est plus demandée pour éviter la deuxième guerre mondiale, mais uniquement pour sauver la Russie, ce qui signifie que le Ciel aurait donc, si l'on s'en tient à ce que dit Sœur Lucie, changé en 1929 l'objet de la Consécration de la Russie révélé en 1917.
... Avouons que le brouillard est épais, sur le sens spirituel réel de la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie...
La suite, dont le fil d'Ariane est tenu et déroulé non pas seulement par Sœur Lucie mais par l'Histoire indéniable, très-notamment celle des pontificats modernes (ce criterium de l'Histoire que le dominicain Melchior Canus, une des lumières du concile de Trente, voyait comme un lieu théologique pour accéder à la Vérité de Dieu), cette suite disais-je, va obscurcir plus encore la problématique.
Nous venons de voir que le 13 juin 1929, Notre-Dame de Fatima, remplissant sa promesse et son annonce du 13 juillet 1917, vient demander "officiellement" la Consécration de la Russie au pape, celui-ci étant Pie XI, nommé par la très-sainte Vierge dans son discours proto-prophétique de 1917. Pie XI n'en fit rien. Et le plus probable, malgré les supputations tirées par les cheveux et les affirmations volontaristes et purement gratuites du fr. Michel de la Sainte-Trinité dans son t. II de Toute la vérité sur Fatima, c'est qu'il n'en eût aucune vraie connaissance. Sœur Lucie, dans sa lettre au pape Pie XII du 24 octobre 1940 originelle (celle du 2 décembre n'en est qu'un raccourci revu à la baisse et corrigé par Mgr Da Silva), veut pouvoir s'imaginer que la révélation de Tuy de 1929 demandant au pape de faire la Consécration fut bien certainement portée à la connaissance du pape Pie XI. Mais en vérité, rien ne le prouve, rien n'est moins sûr. "Quelque temps après [la révélation de Tuy] j'ai rendu compte de cela à mon confesseur, qui a pris les moyens de la faire parvenir à la connaissance de Sa Sainteté Pie XI", écrit Sœur Lucie, voulant se persuader, sans preuve, que ces moyens, qu'elles ne connaît d'ailleurs pas, ont abouti. La vérité, ce me semble, c'est que Pie XI n'eut sans doute pas plus connaissance de la demande du Ciel quant à la Consécration de la Russie, que le roy Louis XIV ne fut informé de la révélation de 1689 à sainte Marguerite-Marie d'avoir à faire la Consécration de la France au Sacré-Cœur de Jésus. Ou du moins, si le roy et le pape en ont eu par leurs proches quelque lointaine, éthérée et fugitive connaissance, ce fut sans leur montrer l'importance surnaturellement capitale d'avoir à faire les deux Consécrations, en 1689 et en 1930, pour le salut et la paix du monde.
Pour ce qui est de Fatima, on sait que Mgr Da Silva se décida enfin à écrire directement à Pie XI en 1937, sur le très-tard et quasi in extremis, pour lui signaler la Consécration de la Russie et toutes les autres demandes formulées par le Ciel à Fatima. Sans nul doute, ce qui le décida fut la terrible guerre civile espagnole de 1936, où les erreurs communistes faillirent triompher politiquement dans une nation d'Europe de l'Ouest (mais cela n'arriva pas grâce à Franco, ce qui montre bien que le péril communiste n'est pas tout-puissant puisqu'il ne réussira jamais à s'implanter en Europe occidentale quand bien même la Consécration de la Russie n'était pas faite). Le Portugal se trouva alors fort dangereusement frôlé par l'affreux péril, et il n'est pas douteux que l'évêque de Fatima prit alors peur. Mais, quand on lit sa lettre, on s'aperçoit qu'il remplit presque passivement un devoir, qui lui fut sans doute pénible, il ne se fait pas l'apôtre brûlant des demandes de Notre-Dame de Fatima, et Pie XI, s'il la lut (le Saint-Siège accusa bel et bien réception de sa lettre le 8 avril 1937, mais cela ne prouve pas que Pie XI en prit connaissance), ne put pas être remué par l'importance spirituelle capitale desdites demandes...
En fait, c'est dans la transmission du message salvateur, que se situe la culpabilité collective de la non-connaissance par le roy et par le pape du Plan de salut du Ciel ; car tout le monde est plus ou moins coupable, dans cette affaire. Et c'est bien pourquoi d'ailleurs, ce que ne s'explique pas le fr. Michel, Notre-Seigneur, en 1931, emploie le pluriel lorsqu'Il révèle à Sœur Lucie, en repos à Rianjo, proche de Pontevedra, son mécontentement que la Consécration n'est pas encore faite : "Fais savoir à MES ministreS, étant donné qu'ILS suivent l'exemple du roy de France en retardant l'exécution de ma demande, qu'ILS le suivront dans le malheur". Le vrai, c'est que personne, dans les responsables ecclésiastiques qui forment une longue chaîne de Sœur Lucie à Pie XI, n'est vraiment converti et ne veut se convertir, à commencer par Mgr Da Silva, l'évêque de Sœur Lucie, qui n'arrêtera pas de traîner très-lourdement les pieds pour transmettre les messages successifs qu'elle lui adressait à destination du pape...
Le plus clair de la question, en tous cas, c'est qu'en 1939, dix ans après la révélation de Tuy, Pie XI n'avait pas fait la Consécration demandée, et qu'il ne comptait absolument pas la faire, l'esprit complètement obsédé, possédé serait plus juste, de concordatisme avec les pires gouvernements athées ou antichrists, ce qu'il mit en pratique avec l'URSS, d'une manière éhontée et des plus scandaleuses, par l'Ostpolitik. Il meurt le 10 février 1939, et certain historien, dont le nom ne me revient plus, a écrit qu'il fut la première victime de la deuxième guerre mondiale.
Sœur Lucie, confortée et encouragée par son confesseur le P. Apariçio, va alors, sur ordre de ses directeurs spirituels comme on va le voir plus loin, écrire directement au nouveau pape, Pie XII, le 2 décembre 1940, quelqu'un an et demi après l'élévation de ce dernier au Souverain Pontificat. Avant de lire le curieux passage de sa lettre, qui pose fichtrement question, il est important de noter que cette demande se situe d'ores et déjà tout-à-fait hors-cadre de la proto-prophétie mariale du 13 juillet 1917, puisqu'en décembre 1940, on est en... pleine deuxième guerre mondiale, et que Notre-Dame de Fatima avait bel et bien originellement assigné comme but essentiel de ladite Consécration de la Russie, de... l'"empêcher".
Dans sa lettre au pape Pie XII, on voit Sœur Lucie faire un petit historique de cette demande de Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, puis, elle finit sa requête par ces mots, qui ne lassent pas de beaucoup surprendre : "En diverses communications intimes, Notre-Seigneur n’a pas cessé d’insister sur cette demande, promettant dernièrement que si Votre Sainteté daignait faire la consécration du Monde au Cœur immaculé de Marie, avec mention spéciale de la Russie, et ordonner que, en union avec Votre Sainteté et en même temps, la fassent aussi tous les Évêques du monde, d’abréger les jours de tribulation par lesquels Il a déterminé de punir les nations par la guerre, la famine et diverses persécutions contre la sainte Église et Votre Sainteté".
La demande de Consécration présentée au pape en 1940 n'a donc plus pour objet d'éviter la guerre, puisqu'elle n'a pu être évitée, mais seulement de raccourcir le temps des châtiments. Beaucoup plus étonnant encore, Sœur Lucie parle à Pie XII d'une Consécration "du Monde au Cœur Immaculé de Marie, avec mention spéciale de la Russie"...! Or, lorsque, quelque quarante ans plus tard, le pape Jean-Paul II fera lui aussi une Consécration de la Russie, Sœur Lucie, interrogée sur sa validité par "Mgr Hnilica (= «Ma sœur, hier dans son acte d’offrande, le pape a-t-il vraiment consacré la Russie au Cœur Immaculé de Marie ?»), répondit, en date du 14 mai 1982, le lendemain même de l’acte d’offrande fait par Jean-Paul II lors de son premier pèlerinage à Fatima : «Non, (…) la Russie n’apparaissait pas nettement comme étant l’objet de la consécration». Et elle précisa que Dieu voulait «la consécration de la Russie et uniquement de la Russie, sans aucune adjonction»" (La consécration d'hier : un odieux sacrilège, 26 mars 2022, abbé François Pivert, au lien suivant : https://abbe-pivert.com/la-consecration-dhier-un-odieux-sacrilege/).
... Alors, Consécration de la Russie seule, ou, comme elle l'écrivit à Pie XII en 1940, du Monde, avec mention spéciale de la Russie...? Une consécration du monde entier, qui du reste avait déjà été faite, mais au Sacré-Cœur de Jésus, par le pape Léon XIII le 11 juin 1899, et que Notre-Seigneur avait demandé dans les années 1935 que le pape la fasse de nouveau mais cette fois-ci au Cœur Immaculé de Marie, par révélations privées à une âme mystique authentique, Alexandrina Maria da Costa, elle aussi portugaise (cf. http://alexandrina.balasar.free.fr/alexandrina_ame_victime.htm) ?
Comme tout le monde le sait, la question de la Consécration de la Russie se complique bougrement et même s'obscurcit étrangement d'une sorte de Plan B de salut. Plan A, primordial : la Consécration de la Russie, seule ; plan B, seulement dans le rétroviseur et comme pour éviter le pire si le Plan A n'est pas actionné : la Consécration du Monde.
On est bien obligé de prendre acte, par ailleurs, que Sœur Lucie prend des libertés illicites dans ses écrits avec les prophéties pourtant formelles de Notre-Dame de Fatima, ce qui surprend beaucoup. Par exemple, on la voit écrire en juin 1930 une longue lettre au P. Gonçalves, où elle dit, en finale : "Le bon Dieu promet de mettre fin à la persécution en Russie, si le Saint-Père daigne faire, et ordonne aux évêques du monde catholique de faire également, un acte solennel et public de réparation et de consécration de la Russie aux très saints Cœurs de Jésus et de Marie, et si Sa Sainteté promet, moyennant la fin de cette persécution, d’approuver et de recommander la pratique de la dévotion réparatrice indiquée ci-dessus [les cinq premiers samedis du mois]".
... Que je sache !!, Notre-Dame de Fatima demandait le 13 juillet 1917 une Consécration de la Russie à son Cœur Immaculé, et le Cœur Immaculé de Marie, ce n'est pas les très-saints Cœurs de Jésus et de Marie !! Pourquoi ce méli-mélo pénible dans la tête de Sœur Lucie, qui connaît pourtant mieux que personne les paroles exactes de Notre-Dame de Fatima...!??
En ce qui la concerne d'ailleurs, on a pire encore. En 1940 on prend Sœur Lucie en flagrant délit de faux mysticisme, sans qu'elle-même ni non plus son entourage clérical ne s'en rende le moindre compte. 1940. On est alors en pleine guerre nazie qui fait rage, feu et sang, sur toute la planète, l'Allemagne, qui "répand ses erreurs à travers le monde", et non pas du tout la Russie, est dans tous les esprits, mais on se rend compte, vraiment étonné, qu'elle est absolument et totalement absente de l'esprit de Sœur Lucie, de son champ de vision spirituel ! Lorsqu'un prêtre allemand, le P. Ludwig Fischer, qui, dévotement, avait tâché de répandre notamment par ses écrits la dévotion à Notre-Dame de Fatima dans son pays tourmenté et possédé, vient rendre visite en 1940 à Sœur Lucie, il ne peut s'empêcher, ... comme on le comprend !, de lui poser ex abrupto la grande question qui lui brûle les lèvres, lui, pauvre malheureux prêtre de son pays diaboliquement nazifié : "Quel sera l'avenir de l'Allemagne ?" Sœur Lucie, entendant la question, est visiblement complètement prise de court, interloquée, on se rend compte que d'elle-même, elle n'a aucune pensée immédiate sur l'Allemagne !, ... en 1940 !!! Alors, pour faire tout-de-même bonne impression et donner une réponse au prêtre allemand, elle va faire oraison devant le Saint-Sacrement pendant plusieurs heures pour obtenir une réponse de Notre-Seigneur, qui, selon elle, finit par lui révéler quel va être l'avenir de l'Allemagne ! Nous sommes là, il est à peine besoin de le faire remarquer, en plein faux mysticisme, où Dieu doit répondre sur commande de l'humain, à ses interrogations. En bonne théologie mystique, cela s'appelle tenter Dieu. La vraie mystique, au contraire, c'est Dieu qui décide de parler à l'humain quand Lui, Dieu, le veut, et sur le sujet qu'Il Lui plaît d'aborder, et non l'inverse : Dieu n'est pas au service de l'humain.
Mais lisons l'épisode rapporté par le fr. Michel dans le t. II de Toute la vérité sur Fatima : "En 1940, l'abbé Ludwig Fischer interrogea la voyante sur l'avenir de son pays. Comme de coutume [...!!], Sœur Lucie chercha la lumière dans une prière plus instante : «Passant quelques heures avec Notre-Seigneur exposé au Très-Saint Sacrement, pendant quelques moments où une union plus intime s'est fait sentir et entendre à mon âme [sic], j'ai prié à plusieurs intentions, et spécialement pour l'Allemagne : "Elle reviendra à Mon bercail, mais ce moment est loin. Il s'approche, il est vrai, mais lentement, très lentement" [...???!!!]. Dans une lettre adressée au Dr Fischer, par charité et pour l'encourager, j'indiquai cette promesse de Notre-Seigneur»" (ibid., t. II, p. 480). Là non plus, il est à peine besoin de faire remarquer que la "réponse" de Notre-Seigneur confine au ridicule et à l'abracadabrantesque : manifestement, nous sommes là en plein faux mysticisme, où la voyante s'invente dans sa tête une communication-réponse de Notre-Seigneur... comme on voit tant de faux mystiques de nos jours, frappés de crétinisme, le faire ! Gageons que le pauvre P. Fischer ne dut pas beaucoup être consolé par cette "réponse allemande" de Notre-Seigneur ! Sœur Lucie s'était comportée là comme Mme Soleil, voyante extra-glucide, consultant sa boule de cristal. Mais personne, dans son entourage clérical, ne se rendit compte de cette tendance au faux mysticisme de Sœur Lucie, elle est au contraire le sujet d'une adulation voire d'une idolâtrie déplorable de la part des prêtres qui l'entourent. Tous les auteurs, souvent prêtres, qui rapportent cet épisode, citent la "réponse" de Notre-Seigneur sur l'Allemagne presque à deux genoux sinon à trois et l'encensoir à la main, à commencer par le fr. Michel, thuriféraire aveugle de Sœur Lucie dans tout son ouvrage partisan et idéologue, primairement anti-communiste, sans strictement aucun esprit critique, prenant pour oracle de sagesse divine et Parole d'Évangile cette "prophétie allemande" qui n'était hélas, en vérité, qu'ineptie déplorable, fruit d'un mysticisme d'illusion. Sœur Lucie me fait penser là à un célèbre apophtegme des anciens Pères du désert. Un jour, le grand saint Antoine, qui patronnait spirituellement toute une communauté d'anachorètes dans le désert, vit entrer en trombe dans sa tente un fr. novice qui, tout excité, lui dit : "Père ! Père Antoine ! Le fr. Exupère est en extase ! Il lévite à un mètre du sol ! Que dois-je faire ?" Et saint Antoine, qui était en train de faire une oraison simple, ascétique, sans même détourner la tête, de lui dire placidement : "Tires-le par les pieds, pour qu'il redescende" !
Pour en revenir et vider la question des deux Consécrations différentes à faire, l'une de la Russie seule, l'autre du Monde entier, on se rend compte également que c'est Sœur Lucie qui embrouille tout, ne clarifiant rien, et que là encore, elle embrouille tout... en s'appuyant, "comme de coutume" dit benoîtement le fr. Michel, sur une prétendue communication-réponse de Notre-Seigneur obtenue soi-disant dans l'oraison ! Il ne faut pas compter sur le fr. Michel pour s'en rendre compte, son adulation aveugle, idéologique et partisane, de Sœur Lucie l'en empêche radicalement. Il prend bien acte que cette question "a été embrouillée à plaisir" (ibid., t. II, p. 464), mais il se garderait bien de dire, ce qui n'est pourtant que la stricte vérité, que c'est Sœur Lucie qui l'embrouille. Alors, faisons le point sur cela, il n'est que grand'temps de pourfendre l'erreur, de mettre de l'ordre dans tout ce fatras indigne du Ciel : tout d'abord, prenons acte que la lettre de Sœur Lucie écrite au pape Pie XII fin 1940 n'est pas de son initiative personnelle ; ce sont ses directeurs spirituels qui lui ordonnent de l'écrire. "Quelles directives précises reçut-elle alors ? Tout d'abord, [d'écrire au pape] la révélation du secret. En rappelant cette lettre où le P. Gonçalves lui «ordonnait d'écrire au Saint-Père», Sœur Lucie précisera : «L'un des points qu'il m'indiquait était la révélation du Secret». On lui ordonnait sûrement aussi d'exposer les apparitions de Pontevedra et de Tuy, mais brièvement ! L'évêque de Gurza avait même précisé : Il faut que tout tienne sur une seule feuille de papier ! Surtout, il indiquait les termes de la demande essentielle : Une consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie avec mention de la Russie. Requête que Sœur Lucie n'aurait jamais formulée d'elle-même puisqu'elle n'en avait pas reçu l'ordre du Ciel, et qui, sûrement la plongea dans une grande perplexité. Mais, comme toujours [...!!], elle recourut à une prière plus instante" (ibid., p. 464). On sait maintenant, hélas, ce que veut dire une prière plus instante, pour Sœur Lucie...
Donc, premier constat quant à l'affaire : ce sont des directeurs spirituels de Sœur Lucie fort mal inspirés, qui se permettent avec une audace sacrilège de mélanger indûment les deux Consécrations qui viennent du Ciel, celle de la Russie seule, celle du monde entier, concoctant humainement un fourre-tout où l'on trouve à la fois l'une et l'autre, d'où la formule adoptée "Consécration du monde, avec mention spéciale de la Russie". Or, évidemment, faire un mélange des deux Consécrations ne vient pas du Ciel, c'était en quelque sorte s'inventer un... Plan C de salut, un troisième Plan inventé par les hommes ! Sœur Lucie aurait dû être la première à le comprendre et à le dire à ses directeurs spirituels très-mal inspirés. Las ! Au lieu de cela, leur obéissant aveuglément, elle va non seulement accepter de demander à Pie XII dans sa lettre qu'il fasse la Consécration "du monde, avec mention spéciale de la Russie", ce qui, pour tout vouloir mettre ensemble, se permettant sacrilègement de toucher à l'intégrité des Plans de salut du Ciel, ne répond en définitive à AUCUNE des deux demandes de Consécrations demandées par le Ciel, mais pire encore, on va la voir encore une fois, une fois de plus, s'appuyer sur une prétendue communication mystique de Notre-Seigneur pour se permettre de le faire, que le fr. Michel ose appeler "la communication divine du 22 octobre 1940" !, et que voici :
"22.X.1940. J'ai reçu une lettre du R.P. José Bernardo Gonçalves et de l'évêque de Gurza m'ordonnant d'écrire à sa Sainteté... Dans ce but, j'ai passé deux heures devant Notre-Seigneur exposé [au Très-Saint Sacrement] : "Prie pour le Saint-Père, sacrifie-toi pour que son cœur ne succombe pas sous l'amertume qui l'oppresse [là encore, je l'ai fait remarqué plus haut, on est en pleine invention et fausseté : pendant la guerre 1939-45, Pie XII est loin de souffrir beaucoup, dans une position de "christ souffrant" la Passion, fausseté qui a trompé bien des âmes, les thèses illuministes de survivance pontificale, surtout celle de Paul VI, s'étant appuyées indûment sur ce mensonge et créant par la suite une fausse thèse de "dernier pape souffrant à la fin des temps" ; on va se rendre compte au contraire que Pie XII, loin de souffrir la mâlemort, s'excite péniblement la cervelle, dans un enthousiasme délirant et impie, sur l'illusion onusienne, dans son Noël 1944 que je vais citer tout-à-l'heure...]. La tribulation continuera et augmentera. Je punirai les nations de leurs crimes, par la guerre, par la famine et par la persécution contre mon Église qui pèsera spécialement sur mon Vicaire sur la terre [prophétie parfaitement fausse encore une fois, les papes modernes, fort loin de souffrir persécution de la part du monde, épousent au contraire sa perversité notamment par la pratique concordataire pontificale avec tout gouvernement, même athée et antichrist radical]. Sa Sainteté obtiendra que ces jours de tribulation soient abrégés s'il obéit à Mes désirs en faisant l'acte de Consécration au Cœur Immaculé de Marie du monde entier avec une mention spéciale de la Russie" (ibid., p. 464)..!!!
Est-il besoin de faire remarquer que nous sommes là en plein faux-mysticisme, une fois de plus, une fois encore, de la part de Sœur Lucie. Quant au fond de la question, ce n'est pas compliqué : qu'il y ait, de par la Volonté du Ciel, deux Plans de salut, un Plan A principal, la Consécration de la Russie seule, et à défaut, un Plan B, la Consécration du monde, soit, placet, c'est tout-à-fait admissible. Il faut d'ailleurs bien remarquer que le Ciel, pour révéler ces deux Plans de salut, choisit DEUX âmes mystiques différentes, ce qui signifie très-clairement que les deux Plans de salut ne doivent pas être mélangés : pour le Plan A, c'est Sœur Lucie et l'Apparition de Fatima, pour le Plan B, c'est Alexandrina Maria da Costa. Mais il est absolument proscrit qu'une des deux âmes mystiques ayant reçu un des deux Plans de salut, crée une sorte de... nouveau "Plan C de salut" de son cru en mélangeant les deux Plans ! De plus, il est quasi blasphématoire que Sœur Lucie fasse "obéir" Notre-Seigneur, dans sa fausse communication mystique du 22 octobre 1940, aux mauvaises inspirations de ses directeurs spirituels inventant cedit "Plan C". C'est un comble, tout-de-même, de supposer cela et, pire encore, que lesdites mauvaises inspirations de ses directeurs spirituels deviennent les... "désirs" de Notre-Seigneur !!! Mais Sœur Lucie n'est pas du tout rebutée de faire "obéir" Notre-Seigneur aux erreurs lamentables de ses directeurs spirituels, de les Lui faire... "désirer", même...!!! Et les prêtres sont si aveuglés par leur adulation de Sœur Lucie, qu'ils gobent à qui mieux mieux... le troisième "Plan C de salut" inventé par les hommes, approuvé par Sœur Lucie, et soi-disant... "désiré" par Notre-Seigneur !!! Voici par exemple ce qu'ose écrire le P. Alonso sur cela : "En octobre 1940, commente le P. Alonso, le Ciel accède aux désirs des supérieurs de Sœur Lucie de voir se réaliser la Consécration du monde avec une mention spéciale de la Russie. Et c'est le Seigneur Lui-même qui suggère un tel acte" (ibid., p. 465) !!! Et le fr. Michel de boire cette explication d'un crétinisme achevé et spirituellement insane, comme du p'tit lait...
Après cela, ô lecteur, comment en vouloir aux papes modernes, de Pie XII à François, de mélanger indûment, dans leurs différentes formules de Consécration, le monde, l'Église, soi-même, la Russie, etc., comme un tiercé dans le désordre et en tous cas pas dans l'ordre !! En vérité, la faute n'en est pas sur eux, les pauvres papes ne pouvaient que tout mélanger, puisque ce mélange était cautionné par la voyante de Fatima elle-même qui disait que c'était "le désir" de Notre-Seigneur de tout mélanger !!!
... Zut. En tous cas, le brouillard s'épaissit péniblement. Ce n'est même plus le fog londonien à couper au couteau, nous sommes carrément rendus dans la bouteille à l'encre. Nous verrons comment, en finale, débrouiller tout cela...
Pour l'instant, wait and see, laissons dérouler le fil du temps. La deuxième guerre mondiale se termine, quelques années s'écoulent encore, et, en mai 1952, la Sainte Vierge apparaît de nouveau à Sœur Lucie, au carmel de Coïmbra, pour lui dire : "Fais savoir au Saint-Père que j’attends toujours la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé. Sans cette consécration, la Russie ne pourra se convertir, ni le monde avoir la paix". La très-sainte Vierge pouvait bien se plaindre d'attendre en effet, car si Pie XII avait fait une Consécration au Cœur Immaculé de Marie le 31 octobre 1942, par radio-message, ce ne fut que... de l'Église et du monde entier, sans nommer aucunement la Russie. Pie XII actionnait le Plan B sans actionner le Plan A, c'était plus facile et ficelle... Pour autant, en 1952, nous avons la certitude que le nouveau message de Sœur Lucie fut bien communiqué à Pie XII en juin, et le 7 juillet 1952 le pape se décidait à publier la lettre apostolique Sacro vergente anno, consacrant la Russie au Cœur Immaculé. Cependant, cette Consécration était loin de remplir les conditions posées par la Vierge de Fatima : elle était faite sans aucune solennité, le pape n'ayant nullement donné l'ordre aux évêques du monde entier de s'unir à lui pour faire cette Consécration, et de plus, sans dire un traître mot de Fatima, Pie XII ne faisait aucune allusion à la dévotion réparatrice des cinq premiers samedis du mois, qui devait, elle aussi, et même elle en premier comme je vais l'expliquer plus loin, contribuer à obtenir de Dieu le miracle de la conversion de la Russie (... les mêmes manques invalidants, exactement les mêmes, que dans la Consécration du pape François du 25 mars dernier !, on va y revenir). Le fr. Michel est tout-à-fait fondé à commenter : "L'on a la fâcheuse impression que, dans l'esprit de Pie XII, Sacro vergente anno était en quelque sorte un coup d'arrêt" (Toute la vérité sur Fatima, t. II, p. 224). Dès l’automne 1952, Pie XII fit donner des ordres précis à la hiérarchie pour que l’on ne réclame plus cette Consécration de la Russie, qu’il voulut que l’on considérât comme faite.
Sœur Lucie, au fond de son couvent, a vent de cette Consécration, qu'elle commente ainsi : "Je vous remercie également de la coupure de journal qui rapporte la consécration de la Russie. Je suis peinée qu’elle n’ait pas encore été faite comme Notre-Dame l’avait demandée. Patience !… Espérons que Notre-Dame, comme une bonne Mère, daignera l’accepter". Par un interrogatoire secret de Sœur Lucie fait, comme par hasard, juste dans ces mêmes moments par le P. Schweigel, jésuite, commandité expressément par Pie XII, le pape fut certainement mis au courant que la voyante ne considérait pas sa récente Consécration de la Russie comme satisfaisant aux demandes de Notre-Dame de Fatima. Il est certain qu'il en conçut un grand dépit, car il ne voulait pas aller plus loin que ce qu'il avait fait, qui était en vérité une sorte de point d'orgue en fin irrévocable de non-recevoir, et je vais en donner la très-véridique et très-peccamineuse raison dans quelques lignes. Pie XII décide alors de museler Sœur Lucie.
"En 1955, le Pape décida que «seules les personnes qui avaient déjà rencontré sœur Lucie pourraient la voir de nouveau sans autorisation expresse du Saint-Siège». Ainsi surveillée, la voyante fut dès lors presque totalement réduite au silence ; rigueurs qui furent aggravées sous le pontificat des papes suivants, à tel point que même son ancien confesseur et directeur, le Père José Apariçio, un véritable homme de Dieu, ne put obtenir la permission de s’entretenir avec elle, surtout à partir de 1960, date à laquelle le secret aurait dû être révélé au monde. Une de ses lettres, datée du 7 août 1960, en témoigne : «Demain ou plus tard, j’irai à Coïmbra. Je ne pourrai pas parler avec sœur Lucie parce qu’elle est recluse. Par ordre du Saint-Office de Rome, elle ne peut communiquer avec personne. L’évêque juge qu’il n’a pas autorité pour laisser parler la sœur». À son retour au Brésil, le Père Apariçio précisera à un correspondant : «Je n’ai pu parler avec sœur Lucie parce que Mgr l’archevêque ne pouvait pas donner la permission de la rencontrer. Les conditions d’isolement dans lesquelles elle se trouve ont été imposées par le Saint-Siège. Par conséquent, personne ne peut parler avec elle sans une licence de Rome. Mgr. l’archevêque n’a qu’un nombre très limité de ces licences» (Lettre du 24 novembre 1960)" (Apparition du 13 juin 1929 à Tuy : La demande de Notre Seigneur Jésus-Christ – La consécration de la Russie, cf. https://laportelatine.org/spiritualite/apparitions/apparition-du-13-juin-1929-a-tuy-la-demande-de-notre-seigneur-jesus-christ-la-consecration-de-la-russie).
Certes, Pie XII a agi ainsi parce qu'il ne voulait pas que Sœur Lucie puisse le contredire quant à la Consécration de la Russie non-faite par lui selon les demandes de Notre-Dame de Fatima, mais ne peut-on pas supposer que certains supérieurs de Sœur Lucie s'étaient rendus compte de sa tendance au faux mysticisme et avaient fait remonter jusqu'au pape qu'elle pouvait dire des choses fausses et très-préjudiciables pour tout le monde ? L'on peut penser que Pie XII, en imposant à Sœur Lucie une discipline très-sévère sur sa parole, outre le fait qu'il ne voulait pas qu'elle puisse le contredire quant à la Consécration de la Russie mal faite par lui, voulait aussi la protéger contre elle-même et préserver ainsi la dignité de l'Apparition de Fatima.
Quoiqu'il en soit de ce dernier point, la grande question qui se pose maintenant, est la suivante : pourquoi les papes modernes, à commencer par Pie XII, et sûrement aussi, avant lui, Pie XI, ne veulent-ils absolument pas faire la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, en y engageant toute l'Église Universelle avec eux, par l'union dans l'acte avec les évêques du monde entier ?
La réponse est simple, et Dieu sait assez combien je l'ai déjà traitée en long et en large dans beaucoup de mes écrits. Depuis le pape Pie VII et son concordat napoléonien de 1801, les papes modernes post-révolutionnaires ont matériellement péché contre les Mœurs de l'Église, entendues au sens large, en changeant le criterium de validité des sociétés politiques, attribuant à l'homme le pouvoir de créer en Politique, et ôtant ainsi, au moins implicitement, ce pouvoir à Dieu. C'était vouloir vivre dans des sociétés de l'homme, et non plus dans des sociétés théocratiquement dirigées et vivifiées par Dieu, comme toute société politique l'était, à tout le moins dans son principe constitutionnel, avant la Révolution. Les papes modernes, reconnaissant hérétiquement ces sociétés de l'homme issues de la Révolution, très-notamment par la pratique concordataire pontificale avec n'importe quelle sorte de puissances politiques, même si elles sont constitutionnellement athées ou antichrists (comme je l'ai fait remarquer au début de ces lignes à propos du concordat nazi de 1933), ce qui est exactement contraire à l'enseignement paulinien en Rom XIII, les papes modernes disais-je, vont élaborer petit à petit et de plus en plus toute une doctrine hétérodoxe pour prétendument justifier théologiquement ces sociétés de l'homme, que j'ai appelée dans mes écrits la gnose chrétienne-laïque ; l'aboutissement hérétique de cette gnose sera "la civilisation de l'amour" promue et boostée surtout par Paul VI puis par Jean-Paul II (et maintenant par François, dans Fratelli tutti). Le point principal de cette gnose, c'est que, à la manière sangniériste, la vertu morale seule de l'homme, donc purement naturelle, est censée être suffisante pour mouvoir et faire vivre cesdites sociétés de l'homme dans la vertu, et, par-là, en finale, pour mériter surnaturellement le Ciel. Pie XII, dans tous ses scandaleux Noëls de guerre 1939, 1940, 1941, 1942, 1943, 1944, va enseigner cette nouvelle doctrine aux fidèles avec un enthousiasme inouï qui fait vraiment honte, pour peu qu'on ait gardé la vraie Foi.
Or, dans cette hérétique optique, la paix du monde et des nations par exemple, n'est plus donnée aux hommes par Dieu, ce sont les hommes prétendument devenus moralement adultes qui se la donnent à eux-mêmes, dans une mise en œuvre naturelle au moyen de laquelle ils peuvent désormais, à l'intérieur de chaque nation mais encore universellement entre tous les peuples de toutes les nations, vivre ensemble tout ce qui découle de cette paix mondiale, la justice, le bon droit, la dignité humaine, la fraternité universelle, la diversité dans l'unité, l'unité dans la diversité, etc. Rien n'est plus blasphématoire envers Dieu que cette gnose chrétienne-laïque, car Dieu, et Lui seul, peut donner à l'homme la grâce de vivre sociopolitiquement en paix avec son prochain, mais voilà ce que l'homme moderne n'est absolument plus capable de comprendre, et pas plus les papes modernes, qui ont épousé sa perversion. C'est pourquoi l'Apôtre des nations fulmine violemment l'anathème sur cette prétention de l'homme de se donner la paix du monde par lui-même, qui était le péché des hommes antiques voulant ériger la tour de Babel, en ces termes : "Quand les hommes diront «Paix & Sécurité», subitement la catastrophe les saisira comme les douleurs prennent la femme qui va enfanter, et ils n'échapperont pas" (I Thess V, 3).
Or donc, bien sûr, l'acte de Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie frappe de plein fouet cette gnose chrétienne-laïque par laquelle l'homme prétend se donner la paix à lui-même et à son prochain, gnose pontificalement adoptée fougueusement par les papes modernes, et très-singulièrement par Pie XII : c'est en effet un acte qui est l'expression formelle de la doctrine orthodoxe chrétienne-sacrale par laquelle c'est Dieu qui donne la grâce surnaturelle de la paix à une nation, en l'occurrence la Russie, et non pas l'homme. Alors, c'est l'un ou l'autre, soit c'est l'homme qui se donne lui-même la paix du monde (gnose chrétienne-laïque), soit c'est Dieu qui donne au monde cette paix (doctrine chrétienne-sacrale). Gnose hétérodoxe et doctrine orthodoxe sont antinomiquement opposées entre elles du tout au tout, et s'anéantissent réciproquement radicalement, ne pouvant pas plus coexister ensemble que l'eau et le feu. Pie XII comprit tout-de-suite que la Consécration de la Russie, acte chrétien-sacral, anéantissait par le fait même sa gnose chrétienne-laïque, à laquelle il adhérait ardemment et qu'il travaillait dur comme fer ou plutôt comme l'enfer, à vouloir répandre le plus possible dans le monde chrétien, avec, nous allons le voir tout-de-suite, un enthousiasme délirant et complètement déjanté. C'est pourquoi on le voit mettre un point d'arrêt brutal et se voulant définitif à la Consécration de la Russie, et ses successeurs sur le Siège de Pierre eux aussi convertis, et de plus en plus, à la gnose chrétienne-laïque, en feront autant sinon pire. De la même manière que l'évêque Cauchon était frappé de plein fouet dans son démocratisme conciliariste chrétien-laïque avant la lettre par "l'appel au pape" chrétien-sacral que sainte Jeanne d'Arc faisait de sa cause, la Consécration de la Russie, acte chrétien-sacral frappait de plein fouet la gnose chrétienne-laïque adoptée par les papes modernes à partir de Pie VII.
Mais lisons Pie XII, dans son Noël 1944, pour bien comprendre et se rendre compte à quel point son esprit est complètement infesté, infecté, de cette nouvelle doctrine, cette gnose chrétienne-laïque. Il va y appeler très-ardemment de tous ses vœux pontificaux cette paix mondiale que les hommes créent, se donnent à eux-mêmes, dans des instances internationales qu'ils érigent eux-mêmes démocratiquement et qui seront in fine le substrat du pouvoir de l'Antéchrist-personne (je tire la citation suivante de mon Traité de la religion royale française ou le vrai visage de Clovis, aux pp. 265, sq.) :
"... Pie XII, à la fin de la guerre, ne se retient plus. Dans cette dernière allocution urbi & orbi, immédiatement après un petit préambule sur l’espérance surnaturelle apportée par Noël dans les âmes, le pape ose en faire abruptement l’application à l’avènement du... nouvel ordre international, que fait miroiter la prochaine création de l’ONU dont tout le monde parle : «Aurore d’espérance.— Béni soit le Seigneur ! Des lugubres gémissements de la douleur, du sein même de l’angoisse déchirante des individus et des pays opprimés, se lève une aurore d’espérance. Dans une partie toujours croissante de nobles esprits [...?], surgissent une pensée, une volonté de plus en plus claire et ferme : faire de cette guerre mondiale, de cet universel bouleversement, le point de départ d’UNE ÈRE NOUVELLE POUR LE RENOUVELLEMENT PROFOND, LA RÉORGANISATION TOTALE DU MONDE. À cet effet, tandis que les armées continuent à s’épuiser en luttes meurtrières, avec des moyens de combat toujours plus cruels, les hommes de gouvernement, représentants responsables des nations, se réunissent pour des conversations, pour des conférences, en vue de déterminer les droits et les devoirs fondamentaux sur lesquels devrait être reconstruite une communauté des États, de tracer le chemin vers un avenir meilleur, plus sûr, plus digne de l’humanité. Antithèse étrange, cette coïncidence d’une guerre dont l’âpreté tend au paroxysme, et du remarquable progrès des aspirations et des projets vers une entente pour une paix solide et durable ! On peut bien discuter sans doute la valeur, l’applicabilité, l’efficacité de tel ou tel projet, le jugement à porter sur eux peut bien rester en suspens ; MAIS IL N’EN RESTE PAS MOINS VRAI QUE LE MOUVEMENT EST EN COURS [ce dont Pie XII ose se réjouir...]».
"Puis, on voit Pie XII exalter le principe de «l’unité du genre humain et de la famille des peuples» : «De la reconnaissance de ce principe dépend l’avenir de la paix. Si cette exigence morale trouvait sa réalisation dans une société des peuples qui saurait éviter les défauts de structure et les faiblesses des solutions précédentes [Pie XII fait là allusion à la défunte SDN], alors, la majesté de cet ordre réglerait et dominerait également les délibérations de cette société et l’application de ses moyens de sanction. Pour la même raison, on comprend que l’autorité d’une telle société des peuples devra être réelle et effective sur les États qui en sont les membres, de manière pourtant que chacun d’entre eux conserve un droit égal à sa souveraineté RELATIVE [Comprenons bien l'incroyable, l'inouï propos de Pie XII : il déclare là, ni plus ni moins, aboli l'économie du Temps des nations, et milite de toutes ses forces pour que soit mis en place ce qui doit la remplacer, une nouvelle économie pseudo-millénariste où tous les peuples se gèreront démocratiquement ensemble et entre eux, autrement dit, c'est carrément vouloir "changer les temps et les lois" comme prophétisait Daniel de ce que voudra faire l'Antéchrist-personne ; car dire de la souveraineté qu'elle ne doit plus être que relative, c'est la supprimer tout simplement, et donc supprimer la nation elle-même qui ne peut vivre et exister que par sa souveraineté absolue, sinon rien : la souveraineté en effet, comme d'ailleurs le dit très-bien l'étymologie du mot, est absolue ou... n'existe pas ; parler d'une souveraineté relative, c'est un oxymore puissant mais surtout absurde ; mais Pie XII, dans tous ses Noëls de guerre, est tellement enthousiasmé et entiché de sa gnose chrétienne-laïque, nouvelle économie de salut politique internationale basée sur un pseudo-Millenium de nature antéchristique, qu'il ne voit même plus l'absurdité de son propos...]. C’est seulement de cette manière [... donc : en supprimant la souveraineté pleine et entière des États-nations !!] que l’esprit d’une saine [!!!] démocratie pourra pénétrer également dans le domaine vaste et épineux de la politique extérieure».
"Et Pie XII de conclure le radio-message de Noël 1944, par ce que l’on peut appeler son idée fixe en matière de politique internationale, à laquelle il se dit attachée... plus que personne : «Formation d’un organisme commun pour le maintien de la paix.— Les décisions connues jusqu’ici des Commission internationales [celles qui aboutiront, suivez le guide pontifical, aux... très-maçonniques accords de Yalta !] permettent de conclure qu’un point essentiel de tout aménagement futur du monde serait la formation d’un organisme pour le maintien de la paix ; d'un organisme investi de commun accord d’une autorité suprême [... Comme s'il était au pouvoir de l'homme de s'autorevêtir d'une autorité légitime suprême pour régler la paix du monde, pouvoir qui n'appartient qu'à Dieu et à Lui seul !!! Et c'est le pape qui ose s'accoupler à un tel projet impie qui était celui des hommes de la tour de Babel et qui sera demain celui de l'Antéchrist-personne lui-même !!!] et qui aurait aussi dans ses attributions d’étouffer dans son germe toute menace d’agression isolée ou collective.
"PERSONNE ne pourrait saluer cette évolution AVEC PLUS DE JOIE que celui [le pape Pie XII ici veut se nommer] qui a défendu DEPUIS LONGTEMPS le principe que la théorie de la guerre comme moyen apte et proportionné de résoudre les conflits internationaux, EST DÉSORMAIS DÉPASSÉE [… Ah bon ?! Nous sommes donc, ô pape inconséquent et irréfléchi, dans une nouvelle économie de salut ?? Là encore, comme pour l’unité des peuples, la paix universelle entre les peuples est une réparation des effets du péché originel que SEUL Dieu peut opérer en instaurant le Millenium... SEUL Dieu peut engendrer une nouvelle économie de salut où les effets collectifs du péché originel seront abolis dans l’humanité : voyez comme les gens de la tour de Babel ont été punis d’avoir voulu réparer par eux-mêmes les effets du péché originel ! Il y a donc là, dans ces propos pontificaux incroyables, un orgueil et une impiété inqualifiables, inconcevables, de la part d’un… pape !!!, qui épouse carrément l'impiété et l'orgueil qui sera celui de l'Antéchrist-personne, avec un enthousiasme affiché dont se glorifie impudemment l'indigne pape, mettant sa gloire dans ce qui fait sa honte, qui fait frémir de sainte-colère, de la part d'un... pape :], (...) PERSONNE ne saurait souhaiter plus ardemment plein et heureux succès à cette collaboration commune, qui est à entreprendre avec un sérieux d'intention inconnu jusqu'ici, que celui [Pie XII] qui s'est employé consciencieusement à amener la mentalité chrétienne et religieuse à réprouver la guerre moderne et ses monstrueux moyens de lutte. (...) Et si s’ajoute la menace d’une intervention juridique des nations et d’un châtiment infligé à l’agresseur par la Société des États, en sorte que la guerre se sente toujours sous le coup de la proscription et toujours sous la surveillance d'une action préventive, alors l’humanité pourra sortir de la nuit obscure où elle est restée si longtemps submergée [... quel lyrisme châteaubriandesque !] ; elle pourra saluer l’aurore d’une nouvelle et meilleure époque de son histoire.
"(...) Il y a une chose que Nous savons, c’est que le moment viendra, et peut-être plus tôt qu’on ne pense, où les uns et les autres reconnaîtront que, tout considéré, il n’y a qu’un moyen de sortir du réseau embrouillé dans lequel la lutte et la haine ont enlacé le monde, c’est le retour à une solidarité trop longtemps oubliée, à une solidarité ne se limitant pas à tels ou tels peuples, mais universelle, fondée sur la connexion intime de leurs destinées et sur les droits qui appartiennent également à chacun d’eux [... Mon Dieu, mon Dieu !, mais quelle fougue ! mais quel enthousiasme ! mais quelle ferveur non-dissimulée ! mais quel éclat illuminé dans cet œil pontifical FIXÉ SUR LA CHIMÈRE DU RÈGNE DE L'ANTÉCHRIST-PERSONNE]" (fin de citation).
Et hélas, ce Noël 1944 n'est pas, de la part de Pie XII, une sorte de lapsus calami, un enthousiasme délirant de passage dû au soulagement que procurait le sortir de l'atroce deuxième guerre mondiale, hélas non, c'est exactement tout le contraire qui est vrai : dans ce point d'orgue du Noël 1944, Pie XII ne faisait que dire sans voile ce qu'il suggérait déjà dans TOUS ses Noëls de guerre 1939, 1940, 1941, 1942, 1943 et donc 1944, comme étant sa pensée la plus profonde, six allocutions péniblement humanistes et déjà pro-antéchristiques, proposant aux peuples, à toutes les nations, d'ériger par voie juridique internationale et dans l'entente cordiale de tous, une Société de justice et de paix, pure création humaine sans le Christ au fronton de l'édifice humain ainsi créé, à la première place. D'ailleurs, on vient de le lire, le pape Pie XII ne manque pas d'insister lui-même sur le fait que c'est "depuis longtemps" qu'il milite pour une nouvelle économie de salut sociopolitique internationale où la paix humaine sera garantie par voie... humaine, juridique et morale (pour un approfondissement de la perversion des idées pontificales quant à la gnose chrétienne-laïque, cf. l'exposé détaillé que j'en ai fait, de Benoît XV à Paul VI, aux pp. 27 à 56 de mon article L'Antéchrist-personne devant clore notre fin des temps sera-t-il... le dernier pape LÉGITIME de l'Église catholique ?, au lien suivant : http://eglise-la-crise.fr/images/pdf.L/AntechristDernierPapeLEGITIMEMisEnForme.pdf).
L'on peut beaucoup mieux comprendre, à présent, pourquoi le pape Pie XII éprouva une véritable haine idéologique mortelle contre la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, acte éminemment chrétien-sacral qui pourfendait d'outre en outre, par le fait même, ipso-facto, la gnose chrétienne-laïque du pape, qu'il avait pris à mauvaise tâche de mettre en oeuvre dans le monde...
Mais, après une percée jusqu'en 1952, reprenons à présent le fil chronologique de l'Histoire, et profitons-en pour faire le point. La première période de la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie demandée par Notre-Dame de Fatima, qui se déroule de 1917 jusqu'en 1945, fin de la deuxième guerre mondiale, est maintenant définitivement close. Elle se subdivise en trois parties, 1917-1929, 1929-1939, 1939-1945, et toutes les trois ont pour cadre la deuxième guerre mondiale comme seul objet formel de la Consécration : de 1917 jusqu'à 1939, c'est pour l'"empêcher", puis, une fois déclenchée en 1939, c'est, jusqu'en 1945, pour la raccourcir.
Nous allons maintenant rentrer dans la période suivante, étudier ensemble une toute autre période où la Consécration demandée n'a plus du tout pour objet d'empêcher ou de raccourcir la deuxième guerre mondiale, puisqu'aussi bien elle est désormais passée et trépassée, mais de sauver la Russie et, subséquemment, le monde entier derrière elle. C'est la période qui s'étale de 1945 jusqu'en 1989, c'est-à-dire depuis la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu'à la chute du mur de Berlin qui voit l'effondrement de l'URSS soviétique, viscéralement marxiste-léniniste, période dite de la guerre froide.
À suivre, dans la seconde page :
La Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie :
Une demande désormais obsolète, dépassée ?
À laquelle la paresse spirituelle des chrétiens continue à croire,
papes modernes y compris ?
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