La conception liturgique pseudo-millénariste
de Mgr Arthur Roche,
préfet de la Congrégation pour le culte divin,
anticipation vaticandeuse luciférienne
d'une nouvelle économie de salut
(1)
"Ô DÉSIR DE RÉALISATION,
COMBIEN TU EN AS ÉGARÉ !"
(Pierre Leroux)
Dans ce nouvel article, je reviens sur une interview de l'actuel préfet de la Congrégation pour le culte divin, Mgr Arthur Roche, un peu passée puisqu'elle date du 24 février dernier mais nullement trépassée au niveau des idées exprimées (hélas...!). Elle est en effet extrêmement importante pour bien comprendre les motivations profondes des modernes quant à ce qu'ils veulent faire en promouvant la réforme liturgique du novus ordo, aux fins de changer la Foi elle-même des catholiques. Cette interview, réalisée au Vatican même par Christopher Lamb, journaliste à The Tablet, périodique catholique britannique libéral et très-moderne (cf. https://www.thetablet.co.uk/features/2/21572/arthur-roche-prefect -sous pression), est en effet fort révélatrice de la perversion liturgique des modernes dont on ne manquera pas de remarquer que, là encore comme pour toutes les autres déviations contemporaines gravissimes au niveau de la Foi, elle remonte à Vatican II (éh oui !, toujours Vatican II, encore Vatican II...). Ce qu'y dit Mgr Roche, qui est fondamental et très important, n'a cependant fait l'objet, à ma connaissance, d'aucune véritable analyse théologique de fond. Je vais donc m'y coller, m'y scotcher un bon moment, une fois de plus...!
Les esprits tradis conservateurs ont bien vu, par Traditionis Custodes, que les modernes, pape François en tête, ont tout-à-fait l'intention de supprimer purement et simplement le vetus ordo, la messe traditionnelle codifiée par saint Pie V, mais ils n'ont pas compris les raisons profondes des modernes pour vouloir cette suppression radicale, et c'est pourquoi ce fieffé moderne qu'est l'actuel préfet de la Congrégation pour le culte divin prend à tâche de les expliciter avec grand'soin dans son interview... on pourrait dire, presque en tapant du poing sur la table. "Basta ! Assez, de louvoyer entre la chèvre et le choux ! il s'agit maintenant de ne plus permettre que la seule Foi liturgique magistériellement confectionnée et promulguée à Vatican II dans l'Esprit-Saint pour être désormais mise en œuvre, absolument plus rien d'autre ne doit être autorisé ni exister, et je vais vous expliquer pourquoi !", pourrait résumer toute la politique liturgico-religieuse de Mgr Roche et le fond de son interview. Il s'agace presque de ce que cette nouvelle Foi liturgique promue à Vatican II ne soit encore, soixante ans après, que babillée, balbutiée, dans l'Église Universelle. Dans cet interview, on le voit souligner par exemple que le but de Traditionis Custodes est d'amener les gens "à comprendre plus près ce que le Concile exigeait [en matière liturgique]" ; à un autre endroit, il s'offusque presque que "le raisonnement qui sous-tend les réformes [liturgiques] n’est toujours pas pleinement compris" ; ce n'est pourtant pas du tout compliqué : "Le Concile a changé la façon dont nous allons de l’avant. C’est une question simple".
Et c'est pourquoi, donc, Mgr Roche prend à cœur, dans son interview, d'expliciter très-clairement en quoi consiste le fondement théologique de la nouvelle liturgie. Avouons que c'est pain bénit pour nous, catholiques, qui voulons le rester : du coup, l'hérésie des modernes apparaît nettement dans son discours, elle ne se cache plus sous des faux-fuyants ou des formules amphibologiques ouvertes sur l'erreur mais ne l'exprimant pas formellement (Vatican II en est truffé). On serait tenté de dire que c'est très-bien qu'il en soit ainsi...
... Alors, de quoi s'agit-il vraiment, entre l'ancien et le nouveau rite de la messe ? Pourquoi Mgr Arthur Roche affirme-t-il catégoriquement dans son interview qu'entre l'un et l'autre, c'est carrément "deux Églises différentes avec deux liturgies différentes", et donc deux Fois différentes ? Contrairement au pape Benoît XVI qui voyait les deux rites, vetus et novus, comme simplement deux modus d'une même liturgie, donc d'une même Église, donc encore d'une même Foi ? Que faut-il donc bien comprendre de la pensée des modernes en matière liturgique, que Mgr Roche présente d'emblée comme étant tout-à-fait radicale ?
L'actuel préfet de la Congrégation pour le culte divin, répond : "Il y a un fondement théologique profond aux récentes décisions du Pape [Mgr Roche fait là allusion à Traditionis Custodes, au couperet de guillotine que cet oukase fait tomber sur le vetus ordo]. Il ne s'agit pas de certains catholiques ayant une préférence personnelle pour le latin. Cela va au cœur de la façon dont l'Église se voit elle-même et sa mission. Il s'agit du vieil adage, lex orandi, lex credendi ― comment nous prions, c'est ainsi que nous croyons. La constitution dogmatique de Vatican II sur l'Église, Lumen Gentium, est passée d'un modèle de l'Église en tant que «société parfaite» à la notion biblique de l'Église en tant que «peuple pèlerin de Dieu». Dans le premier cas, explique Mgr Roche en faisant l'application de la doctrine de Lumen Gentium à la liturgie, c'était le prêtre qui représentait les intentions du peuple et les apportait à Dieu dans la liturgie. Vatican II a changé cela. Avec la compréhension du sacerdoce de tous les baptisés, ce n'est pas simplement le prêtre seul qui célèbre l'Eucharistie, mais tous les baptisés qui célèbrent avec lui. Cela doit certainement être la compréhension la plus profonde de ce que signifie la «participation» [«active», des simples fidèles à la messe]. Que nous ne faisons pas que lire, que nous ne faisons pas que chanter, que nous ne faisons pas que déplacer des choses dans le sanctuaire ou que nous nous occupons des enfants ou quoi que ce soit, mais que nous entrons réellement profondément dans la vie divine, qui a été manifestée à nous dans le mystère pascal" (fin de citation).
Et c'est ce nouveau concept de la messe mis en route à Vatican II, que le pape François veut qu'il soit désormais la seule norme pour tous les fidèles catholiques, non seulement quant à la liturgie, mais plus encore pour formater leur Foi, le pape étant désormais aidé en cela quasi manu militari par un prélat très-converti passionnellement, on pourrait presque dire rageusement, à la nouvelle gnose liturgique. Les soixante ans de l'après-concile ont trop laissé la possibilité aux catholiques de vivre de l'ancienne Foi-Liturgie, il ne doit plus être toléré et tolérable maintenant, depuis Traditionis Custodes, que la nouvelle Foi-Liturgie...
Mais Mgr Roche a trop bien dit les choses liturgiques nouvelles dans son interview, pour qu'on ne saisisse pas de ses propres mots et paroles qu'entre l'ancienne et la nouvelle liturgie, il ne s'agit rien moins, pour le moderne, que de changer une économie de salut par une autre économie de salut, radicalement aussi différentes entre elles deux que l'Ancien-Testament par rapport au Nouveau-Testament. Exprimer les choses comme il les exprime, c'est radicalement vouloir passer à une autre ère de salut. Sa formulation est théologiquement trop claire pour en douter une seule seconde : "Avec la compréhension du sacerdoce de tous les baptisés, ce n'est pas simplement le prêtre seul qui célèbre l'Eucharistie, mais tous les baptisés qui célèbrent avec lui". Nous sommes là en pleine théologie millénariste, où les hommes, assomptionnés spirituellement sur cette terre dans tout leur être, corps et âme, par un Don gratuit de Dieu lors de la Parousie, délivrés des effets du péché originel, sont tous devenus "rois et prêtres", pouvant dès lors en assumer les fonctions spécifiques, en ce compris bien évidemment celles sacerdotales, comme le prophétisent infailliblement les prophètes de Yahweh et saint Jean dans l'Apocalypse quant à la nouvelle condition spirituelle des humains dans le Millenium, Temps futur à venir, ainsi que je vais mieux l'expliciter dans la seconde partie de mon travail.
Le seul problème si je puis dire, c'est que nous n'y sommes pas, dans le Millenium, et que Dieu seul peut faire en sorte que nous y soyons (et Dieu ne donnera pas le Millenium par une solution de continuité humaine, dans l'Histoire, mais après l'Histoire, après la Parousie et une cassure universelle apocalyptique marquée par un Déluge de feu comparable au Déluge d'eau de Noé). Il y a donc péché gravissime de supplantation ecclésiale à vouloir instaurer une nouvelle économie de salut, une nouvelle Ecclesia, que Dieu n'a pas encore instaurée, comme le font les modernes, car : "Voici, Je viens bientôt ; tiens ferme ce que tu as reçu, afin que personne ne prenne ta couronne" (Apoc III, 11). Le Christ en Gloire vient bientôt, Lui, par qui tout a été fait et par qui tout sera fait, c'est Lui le dispensateur du Millenium, Il (re)vient pour nous donner le Millenium. Mais tant qu'Il n'est pas venu pour nous donner le Millenium, Il veut qu'on tienne ferme ce qu'on a reçu, c'est-à-dire l'économie de salut en cours dans laquelle Il nous a placés présentement, et c'est celle dite du Temps des nations et de Rome son centre. Ce n'est qu'à cette condition de rester ferme dans l'économie de salut en cours, que notre couronne de gloire et de salut nous sera donnée, en attendant en toute humilité et sainte-patience que le Dieu de toute dispensation nous donne le Millenium. Le Psalmiste, dans le Ps. XXXIX, exprime fort bien quelle doit être l'attitude du vrai fidèle : en attendant j'ai attendu le Seigneur, expectans expectavi Dominum, et si je sais me tenir avec fidélité dans l'attente sainte, alors, au bout, Dieu fera attention à moi, et intendit mihi, Il me donnera le Millenium. Si par contre, au rebours réprouvé du conseil divin, nous abandonnons l'économie de salut en cours pour courir dans les nuages après une autre économie de salut que Dieu n'a pas encore instaurée, et Lui seul peut le faire, alors, notre couronne risque fort de nous être prise, ôtée, au grand péril du salut éternel de notre âme. Les modernes n'ont pas conscience qu'ils encourent ce terrible risque : en n'attendant pas saintement, Dieu ne fera pas attention à eux, Il ne leur donnera pas le Millenium. C'est à cela que fait allusion Isaïe, lorsqu'il s'écrit : "Il a commis l'iniquité dans la terre des Saints, et il ne verra pas la gloire du Seigneur" (Is XXVI, 10). Ayant péché contre l'économie de salut du Temps des nations, il ne lui sera pas donné d'accéder au Millenium.
La nouvelle Foi liturgique de Vatican II s'avère donc n'être pas vraiment le fruit d'un œcuménisme dévoyé, où, par exemple, il se serait juste agi de réformer la liturgie catholique en vue de gommer tout ce qui pouvait déplaire à nos "frères séparés" les protestants, comme on l'a trop dit et cru d'une manière obscurantiste chez les tradis. C'est bien autre chose que ce genre de réformes œcuménistes dont il est question à Vatican II, réformes qui ne nous feraient pas quitter l'économie de salut présente quoique nous y laissant d'une manière hétérodoxe, c'est infiniment et beaucoup plus grave, il s'agit, prenons-en bien conscience, d'abolir radicalement une économie de salut pour la remplacer par une autre économie de salut. Or, Dieu seul peut instaurer ou abolir une économie de salut particulière, en faisant, d'une manière ou d'une autre, épiphaniquement irruption dans notre monde et surtout dans l'Église. Avec les modernes, nous nous trouvons donc là véritablement devant le péché gravissime et indépassable qui sera commis par l'Antéchrist-personne lors de son règne maudit, ni plus, c'est impossible, ni, hélas, moins, péché ainsi décrit lapidairement par le prophète Daniel : "Il [l'Antéchrist-personne] pensera qu'il pourra changer les temps et les lois" (Dan VII, 25), c'est-à-dire instaurer de lui-même une nouvelle économie de salut, péché insurpassable dont le Secret de La Salette avertit qu'il "perce la voûte des cieux".
Seule donc la vision apocalyptique, eschatologique, millénariste au sens catholique du terme, donne la vue supérieure et définitive sur la problématique de la nouvelle Foi-Liturgie promue par Vatican II et les papes post-conciliaires le plus hérétiquement du monde, et même antéchristiquement. Ce détestable péché antéchristique intellectuellement très-impur et plein d'orgueil de prétendre vouloir "changer les temps et les lois", que commettent donc les modernes, a été fort bien dénoncé et décrit quant à la chose politique par Donoso Cortès (1809-1853), philosophe espagnol, en ces termes directs, virils et justes : "Notre-Seigneur Jésus-Christ est venu au monde pour constituer, en Lui et par Lui, l'unité du genre humain. De tous les péchés possibles, aucun n'égale celui par lequel l'homme veut se substituer à Dieu, ou prétend réaliser, à d'autres fins et de diverse manière, ce que Dieu s'est proposé. Deux fois, l'homme a succombé à cette tentation satanique : la première, quand il a cherché à ériger la Tour de Babel ; la seconde, pas plus tard qu'aujourd'hui, où une démocratie insensée essaie de mener à bien, pour son compte, l'unité du monde".
Et voilà justement, quant à la chose religieuse, ce à quoi Mgr Arthur Roche, en s'appuyant sur la papauté moderne dévoyée et sur l'hérésie de Vatican II, a consacré et voué toutes les forces vives de son sacerdoce : "Se substituer à Dieu en matière liturgique, en prétendant réaliser ce que Dieu s'est proposé de faire". Et, encore une fois, que s'est-Il proposé de faire dans le futur qui n'est pas le présent, notre bon Dieu, sinon d'instaurer par l'Esprit-Saint après la Parousie le Règne de la Gloire du Christ sur cette terre, encore appelé Millenium ou Règne du Saint-Esprit ou bien même IIIème Testament (ne venant nullement abolir mais accomplir le IIème Testament, comme celui-ci l'a fait du Premier Testament selon le mot du Christ en Matth V, 17), dans laquelle nouvelle économie de salut l'homme, tout homme, sera assomptionné spirituellement, ce qui lui permettra donc, de par Dieu, d'être "participant actif" à la liturgie selon l'ordo nouveau du Millenium dont je vais tâcher de faire une approche plus loin (une simple et toute humaine approche, certainement pas infaillible je le dis d'avance, car personne, jusqu'à l'instauration par Dieu en Personne du Millenium, ne peut prétendre connaître le nouvel ordo liturgique assomptionné du Millenium... et surtout pas nos modernes).
Quant aux traditionalistes, ils ont, toutes mouvances confondues et sauf rares exceptions individuelles, radicalement obscurci en eux la Prophétie apocalyptique par une scolastique desséchée anti-millénariste des plus funestes pour leur Foi (revoir à ce sujet fort important mon article https://eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/a-la-foire-aux-fous-au-pluriel-1?Itemid=191), et, subséquemment, n'ont donc pu comprendre le fond de cette perversion pseudo-millénariste des modernes. Car ils versent pour leur part, à l'opposé du spectre des modernes, dans un obscurantisme néo-pharisien des plus déplorables, idolâtrant peu ou prou l'économie de salut en cours jusqu'à s'aveugler complètement l'âme sur une autre économie de salut qui pourrait de par Dieu providentiellement la suivre... ce dont d'ailleurs, visiblement, s'agace fort Mgr Roche, qui voit très-bien que les tradis n'ont pas du tout compris le fond théologique de la réforme liturgique promue à Vatican II.
Autrement dit, et pour brosser rapidement la problématique de fond : les uns, modernes, veulent faire advenir par eux-mêmes, humains, le Millenium, dont ils se sont illuminés lucifériennement, c'est-à-dire en prétendant l'instaurer virtuellement eux-mêmes par leurs lumières intellectuelles sans attendre que Dieu l'instaure réellement, s'illuminant des funestes éclairs de l'ange des lumières pour ce faire ("Je monterai au ciel, j'établirai mon trône au-dessus des astres de Dieu, je m'assiérai sur la montagne de l'alliance, aux côtés de l'aquilon, je monterai sur le sommet des nues, je serai semblable au Très-Haut" ― Is XIV, 13-14), quand les autres, traditionalistes, n'ont même pas conscience que cette nouvelle économie de salut du Millenium doit prochainement advenir sur cette terre pour remplacer celle présente en cours (les signes eschatologiques tous actualisés à notre époque et à notre époque seulement, en font formellement foi) !
... Ô Seigneur ! Mais pourquoi donc voit-on tous les hommes, sauf rarissime exception ne faisant que confirmer la mauvaise règle, se jeter inconsidérément à corps et âmes perdus dans tous les errements qu'ils peuvent trouver sur cette terre, pour esquiver la Vérité de Dieu et n'en point vivre pour leur salut ? Ah !, comment donc, mon Dieu, Ta Sagesse peut-elle bien trouver à faire ses délices parmi les enfants des hommes, comme Tu le révèles dans la sainte-Écriture (Pr VIII, 31) ? C'est là vraiment un grand mystère... mystère de l'inconscience viscérale de tous les hommes face au mal qu'ils prennent pour le Bien, depuis le péché originel, souvent sans malice véritable, ce qui a fait dire au Fils de Dieu sur la croix : "Pardonne-leur, Père, ils ne savent pas ce qu'ils font".
Le fondement théologique du novus ordo enté sur Vatican II, c'est donc la "participation active" pseudo-millénariste des fidèles dans la nouvelle liturgie, comme Mgr Roche l'évoque dans son interview, et il ne faut pas s'étonner de voir Mgr Bugnini, la cheville ouvrière principale du novus ordo, le dire lui-même clairement : "La participation et l’implication active du peuple de Dieu dans la célébration liturgique sont la finalité de la réforme et l’objet du mouvement liturgique" (La Réforme de la liturgie, Annibale Bugnini, p. 23). Les fils prêtres de Mgr Lefebvre, qui, quant à eux, se rangent dans la seconde catégorie agnostique quant au Millenium, ont fort bien vu et dénoncé l'hétérodoxie de ce nouveau concept promu à Vatican II dans le décret magistériel Sacrosanctum Concilium consacré à la liturgie, que Mgr Roche, dans son interview, appelle sa grande charte en matière liturgique, sa magna carta. L'abbé Billecocq par exemple, l'un d'eux, s'est penché avec grande attention sur ce décret conciliaire, et il n'a pas manqué de remarquer ceci : "Une expression symptomatique revient assez souvent [dans Sacrosanctum Concilium]. Le texte parle très abondamment de la «participation active» des fidèles. C’est un réel problème car cette activité n’est pas définie. En réalité, en matière de sacrements, seul le ministre (le prêtre et l’évêque, en raison de leur caractère sacerdotal) ont un rôle actif. Les fidèles (le peuple de Dieu comme les appelle la constitution par deux fois) ont un rôle passif, en ce sens que ce ne sont pas eux qui «font» les sacrements : ils les reçoivent et ont un droit à les recevoir en raison de leur caractère baptismal. En ce sens, ils sont dits passifs. L’action communautaire réclamée par le texte conciliaire laisse planer une ambiguïté sérieuse et importante qui tend à mettre sur le même pied prêtres et fidèles. C’est l’amorce de la doctrine du sacerdoce commun" (Analyse de la Constitution Sacrosanctum Concilium du 4 décembre 1963, abbé Gabriel Billecocq ― https://laportelatine.org/formation/crise-eglise/vatican-ii/constitution-sacrosanctum-concilium-4-decembre-1963-par-m-labbe-gabriel-billecocq).
Sacrosanctum Concilium parle très-abondamment, en effet, de la "participation active" des fidèles dans la liturgie, fondement théologique principal, majeur, du nouveau concept liturgique pseudo-millénariste des modernes, Mgr Roche dans son interview en faisant lui-même l'aveu brutal, débarrassé de tous ronds-de-jambe diplomatiques. L'abbé Billecocq, épluchant avec soin le décret, a agrafé neuf paragraphes où cette expression, volontairement non-théologiquement définie par les Pères vaticandeux (... ce qui laisse la possibilité de l'interpréter dans le sens le plus hétérodoxe possible, à savoir celui pseudo-millénariste que Mgr Roche désenveloppe crûment et sans complexe dans son interview...), est employée, à savoir dans les §§ 11, 14, 19, 30, 31, 48, 79, 114, 121.
Nous n'allons pas perdre notre temps à les lire :
§ 11 : "Les pasteurs doivent être attentifs à ce que dans l’action liturgique, non seulement on observe les lois d’une célébration valide et licite, mais aussi à ce que les fidèles participent à celle-ci de façon consciente, active et fructueuse".
Le titre II des §§ 14 à 20 inclus, est significativement formulé ainsi : "II ― Recherche de la formation liturgique et de la participation active". Et pour que nul n'en ignore, le § 14 rentre franc de port dans le nouveau concept, à deux battants ouverts, ainsi :
§ 14 : "La Mère Église désire beaucoup que tous les fidèles soient amenés à cette participation pleine, consciente et active aux célébrations liturgiques, qui est demandée par la nature de la liturgie elle-même et qui, en vertu de son baptême, est un droit et un devoir pour le peuple chrétien, «race élue, sacerdoce royal, nation sainte, peuple racheté» (1 Pet II, 9 ; cf. II, 4-5). Cette participation pleine et active de tout le peuple est ce qu’on doit viser de toutes ses forces dans la restauration et la mise en valeur de la liturgie. Elle est, en effet, la source première et indispensable à laquelle les fidèles doivent puiser un esprit vraiment chrétien ; et c’est pourquoi elle doit être recherchée avec ardeur par les pasteurs d’âmes, dans toute l’action pastorale, avec la pédagogie nécessaire".
§ 19 : "Les pasteurs d’âmes poursuivront avec zèle et patience la formation liturgique et aussi la participation active des fidèles, intérieure et extérieure, proportionnée à leur âge, leur condition, leur genre de vie et leur degré de culture religieuse ; ils acquitteront ainsi une des principales fonctions du fidèle dispensateur des mystères de Dieu ; et en cette matière, ils ne conduiront pas leur troupeau par la parole seulement, mais aussi par l’exemple".
§ 30 : "Participation active des fidèles ― Pour promouvoir la participation active, on favorisera les acclamations du peuple, les réponses, le chant des psaumes, les antiennes, les cantiques et aussi les actions ou gestes et les attitudes corporelles. On observera aussi en son temps un silence sacré".
§ 31 : "Dans la révision des livres liturgiques, on veillera attentivement à ce que les rubriques prévoient aussi le rôle des fidèles".
§ 48 : "Participation active des fidèles― Aussi l’Église se soucie-t-elle d’obtenir que les fidèles n’assistent pas à ce mystère de la foi comme des spectateurs étrangers et muets, mais que, le comprenant bien dans ses rites et ses prières, ils participent de façon consciente, pieuse et active à l’action sacrée, soient formés par la Parole de Dieu, se restaurent à la table du Corps du Seigneur, rendent grâces à Dieu ; qu’offrant la victime sans tache, non seulement par les mains du prêtre, mais aussi en union avec lui, ils apprennent à s’offrir eux-mêmes et, de jour en jour, soient consommés, par la médiation du Christ, dans l’unité avec Dieu et entre eux pour que, finalement, Dieu soit tout en tous".
L'abbé Billecocq semble avoir oublié le § 50, que je cite ici :
§ 50 : "Révision de l’ordinaire de la messe ― Le rituel de la messe sera révisé de telle sorte que se manifestent plus clairement le rôle propre ainsi que la connexion mutuelle de chacune de ses parties, et que soit facilitée la participation pieuse et active des fidèles".
§ 79 : "Révision des sacramentaux ― Les sacramentaux seront révisés, en tenant pour règle primordiale la participation des fidèles consciente, active et facile, et en étant attentif aux nécessités de notre époque".
§ 114 : "Le trésor de la musique sacrée sera conservé et cultivé avec la plus grande sollicitude. Les Scholae cantorum seront assidûment développées, surtout auprès des églises cathédrales ; cependant les évêques et les autres pasteurs d’âmes veilleront avec zèle à ce que, dans n’importe quelle action sacrée qui doit s’accomplir avec chant, toute l’assemblée des fidèles puisse assurer la participation active qui lui revient en propre".
§ 121 : "Les musiciens, imprégnés d’esprit chrétien, comprendront qu’ils ont été appelés à cultiver la musique sacrée et à accroître son trésor. Ils composeront les mélodies qui présentent les marques de la véritable musique sacrée et qui puissent être chantées non seulement par les grandes Scholae cantorum, mais qui conviennent aussi aux petites et favorisent la participation active de toute l’assemblée des fidèles".
Cette "participation active" du simple fidèle dans le nouveau concept Foi-Liturgie pseudo-millénariste des modernes est si importante, que Paul VI, neuf ans après Sacrosanctum Concilium, en reprendra et développera le thème dans sa fameuse allocution du 29 juin 1972, qui n'est guère connue que quant à la dernière partie célébrissime où il parle des "fumées de Satan dans le peuple de Dieu". Mais il est bon de rappeler qu'avant ces propos désabusés où Paul VI se plaignait, grandement à tort, le plus faussement possible, que Satan avait empêché les fidèles de bien goûter les excellents fruits spirituels de son concile chéri-chéri, comme disait Thierry Le Luron (car Paul VI, en 1972, est toujours fort loin de vouloir prendre bonne conscience que "l'autodestruction de l'Église" qu'il évoquait le 7 décembre 1968 ― "L’Église se trouve dans une heure d’inquiétude, d’autocritique, on dirait même d’autodestruction ; comme si l’Église se frappait elle-même" ―, que cette "autodestruction de l'Église", cette "fumée de Satan", disais-je, a sa source et cause première dans Vatican II ; du reste, il n'en prendra et n'en voudra prendre jamais conscience, jusqu'à sa mort en 1978, comme en témoignera dans ses mémoires le cardinal Biffi, un de ses proches collaborateurs : cf. http://christroi.over-blog.com/article-la-fumee-de-satan-est-entree-dans-le-temple-de-dieu-paul-vi-61119740.html), il est bon de rappeler qu'avant ces propos désabusés disais-je, le pape du concile moderne faisait tout un exposé autour... du sacerdoce royal des simples fidèles, prenant pour socle la 1ère épître de saint Pierre. Or, c'est l'extrapolation indue que font les modernes de cette doctrine pétrinienne, que Paul VI ne va pas manquer de faire lui non plus, qui débouche automatiquement sur l'hétérodoxe "participation active" des simples fidèles dans la liturgie. Et voilà un point doctrinal capital de sa célèbre allocution qui, pour parler par euphémisme, a été un peu... "oublié".
Paul VI invite "à écouter comme adressée par saint Pierre lui-même à son auditoire d'aujourd'hui, à l'immense communauté catholique" (Documentation Catholique n° 1613, 16 juillet 1972, p. 657, 1ère col.), sa 1ère lettre, parce que, dit-il, elle contient un enseignement doctrinal "et le récent Concile l'a utilisée dans l'une de ses doctrines caractéristiques". Le pape Paul VI veut enseigner cette doctrine pétrinienne à tous les catholiques contemporains du post-concile, à... nous aussi, donc, catholiques de 2022, ce que, justement, Mgr Arthur Roche a par trop bien saisi : "Et vous-mêmes [simples fidèles chrétiens], comme des pierres vivantes, soyez posés sur Lui [le Christ] pour former une maison spirituelle, et un sacerdoce saint, qui offre des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus-Christ" (I Pet II, 5) ; quelques versets plus loin, le premier pape, de préciser plus encore : "Mais vous, vous êtes la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, un peuple acquis, afin que vous annonciez les vertus de Celui qui vous a appelés des ténèbres à Son admirable lumière ; vous qui autrefois n'étiez pas un peuple, mais qui maintenant êtes le peuple de Dieu" (I Pet II, 9-10).
S'appuyant sur ce sacerdoce royal du peuple de Dieu, Paul VI, dans cette célèbre allocution, s'engage très-loin, beaucoup trop loin, vers un véritable pouvoir sacerdotal que possèderait le simple fidèle chrétien, de sacraliser le temporel. Certes, Paul VI commence son discours par bien réaffirmer la doctrine catholique en la matière, à savoir que le simple fidèle ne saurait user du sacerdoce sacramentel, il jouit uniquement d'un sacerdoce spirituel, il l'exprime ainsi : "Mais le Concile nous dit, et la tradition l'avait déjà enseigné, qu'il existe un autre degré du sacerdoce, le sacerdoce ministériel, qui a des prérogatives et des pouvoirs particuliers et exclusifs [c'est vrai : Lumen Gentium le dit clairement en son § 10 : "Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique, s'ils diffèrent essentiellement, et non pas seulement en degrés, sont cependant ordonnés l'un à l'autre puisque l'un comme l'autre participe à sa façon de l'unique sacerdoce du Christ" ― cependant, on doit préciser que ces propos conciliaires sont déjà un amoindrissement de la vérité en la matière, car ils ne disent pas que ce sacerdoce royal des simples fidèles est seulement intérieur à l'âme et intime, ad intra, et non extérieur, ad extra, comme pouvant s'exercer en équiparité, en parallèle, avec celui ad extra ministériel sacramentel des prêtres]" (ibid., col. 2).
Mais c'est juste pour simple mémoire que Paul VI évoque le sacerdoce ministériel, car immédiatement après, il met le projecteur avec une lumière aveuglante qui néantise tout le reste sur le seul sacerdoce royal des simples fidèles... comme s'il n'y avait plus que lui à avoir de l'importance désormais, voire à exister, dans l'Église post-conciliaire : "Mais, continue le rédacteur de la Documentation catholique rapportant de manière indirecte cette allocution, ce qui intéresse tout le monde, c'est le sacerdoce royal [des simples fidèles], et le Pape s'est arrêté sur le sens de cette expression. Sacerdoce veut dire capacité de rendre un culte à Dieu, de communiquer avec Lui, de Lui offrir dignement quelque chose en son honneur, de dialoguer avec Lui, de Le chercher toujours dans une profonde nouveauté, une découverte nouvelle, un amour nouveau. Cette aspiration de l'humanité vers Dieu, qui n'est jamais suffisamment atteint ni suffisamment connu, c'est le sacerdoce de celui qui est inséré dans le Christ, l'unique prêtre dans le Nouveau Testament. Celui qui est chrétien jouit par le fait même de cette prérogative de pouvoir parler au Seigneur en termes vrais, de fils à Père.
"Sacraliser également les choses temporelles... ― Audemus dicere, nous osons dire. Oui, nous pouvons vraiment célébrer devant le Seigneur, a dit le Pape, un rite, une liturgie de la prière commune, une sanctification de la vie, même profane, qui distingue le chrétien de celui qui ne l'est pas. Ce peuple est distinct, même s'il est perdu au milieu de l'immense marée de l'humanité. Il a des caractéristiques qui le distinguent, et font qu'il ne peut être confondu avec aucun autre. Saint Paul dit qu'il est «mis à part» du reste de l'humanité, précisément parce qu'il a des prérogatives et des fonctions que n'ont pas ceux qui ont le bonheur et l'honneur immenses d'être membres du Christ. Par conséquent, a dit Paul VI, les fidèles qui sont appelés à être fils de Dieu, à participer au Corps mystique du Christ, qui sont animés de l'Esprit-Saint et deviennent temple dans lequel Dieu est présent, doivent exercer ce dialogue, cette conversation avec Dieu dans la religion, dans le culte liturgique, dans le culte privé. Ils doivent étendre le sens du sacré également à leurs actes. «Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, dit saint Paul, que ce soit pour la gloire de Dieu». Et il le dit à plusieurs reprises dans ses lettres, comme pour rappeler au chrétien qu'il peut apporter quelque chose de nouveau, éclairer, sacraliser également les choses temporelles, extérieures, passagères, profanes.
"... Et contenir la marée de la désacralisation ― Nous sommes invités à donner au peuple chrétien qui s'appelle l'Église, le véritable sens du sacré. (...) L'Église, et aujourd'hui saint Pierre, appellent le peuple chrétien à prendre conscience de ce qu'il est. Ils lui disent qu'il est le peuple élu, distinct, «acquis» par le Christ, un peuple qui doit avoir un rapport particulier avec Dieu, exercer un sacerdoce avec Dieu" (ibid., pp. 657, 2ème col. & 658, 1ère col.).
J'arrête là ma citation, nous tombons après sur la finale de l'allocution et les fameuses "fumées de Satan dans le peuple de Dieu", qui n'ont pas de rapport à proprement parler avec la doctrine pseudo-millénariste développée dans le début de l'allocution. Je crois pouvoir dire, et mon lecteur ne pourra que le constater comme moi après lecture de ce que vient de dire le pape du concile moderne, qu'il n'y a pas pensée plus confuse et confusionnelle que celle du pape Paul VI. Il y a péniblement de tout dans ce qu'il exprime, on peut y discerner, inextricablement mêlé et mélangé, de l'orthodoxe et de l'hétérodoxe, et peut-être, par tempérament intellectualiste personnel, ne pouvait-il pas faire autrement que d'exprimer la Foi ainsi. Je me rappelle d'une bonne chrétienne ayant pris à cœur de bien vivre sa Foi en Église, mère d'un religieux que j'ai connu, qui, pour suivre au plus près ce que disait le pape de son temps, Paul VI, s'était religieusement abonnée aux Chroniques du mercredi qui reproduisaient intégralement les diverses allocutions de Paul VI dans ses audiences du mercredi. Après quelques années fort assidues où elle s'astreignit par dévotion envers le pape et l'Église à tout lire de A à Z ses homélies et autres allocutions, elle finit, complètement découragée, par abandonner, et se désabonna. Le discours sur la Foi de Paul VI était trop intellectualiste, confus, compliqué, abstrait, et elle ne voyait pas ce que cela apportait pour sa vie de Foi. C'est triste à dire, mais c'est ainsi, et je fais là un témoignage qui remonte aux années 1974.
Quoiqu'il en soit de cette difficulté de Paul VI à exprimer simplement la Foi, il n'en reste pas moins, hélas, de cette première et importante partie de l'allocution vespérale qu'il fit le 29 juin 1972 (plus importante, doctrinalement parlant, soit dit en passant, que la seconde partie finale qui évoque "les fumées de Satan dans le peuple de Dieu" qui auraient soi-disant empêché cedit peuple de Dieu de goûter les inestimables perles de Foi dans son concile chéri-chéri...!), une chose certaine : Paul VI se fend là d'une conception pseudo-millénariste du caractère sacerdotal des simples fidèles. Le moins qu'on puisse dire de son propos, c'est que le pape du concile moderne flirtait avec la conception pseudo-millénariste d'une "participation active" du simple fidèle à l'acte sacerdotal, voulant que le sacerdoce royal dont jouit le simple fidèle puisse réellement sacraliser jusqu'au temporel. Paul VI, en effet, va beaucoup plus loin que Sacrosanctum Concilium, qui limite l'activité sacerdotale du simple fidèle exclusivement à la liturgie, dans son allocution il élargit cette dite activité sacerdotale du simple fidèle jusqu'à sacraliser le temporel.
Or, vouloir que le simple fidèle puisse sacraliser le temporel est là aussi un autre aspect de la doctrine millénariste : lorsque l'homme, par une Geste divine, sera mis, après la très-apocalyptique Parousie et le Déluge universel de feu qui la précèdera immédiatement (un feu divin qui détruira les impies et leurs œuvres mais qui épargnera les justes, cf. Sg XVI & XIX), dans la nouvelle économie de salut du Millenium, il sera tellement élevé dans l'ordre spirituel qu'il pourra effectivement rendre un authentique culte sacral à Dieu de toute la création terrestre, seul ou avec ses semblables (une création terrestre qui sera elle-même remise dans l'état édénique). Et c'est précisément ce que cherche à nous dire le pape Paul VI dans la première partie de son allocution, mais... en enseignant hérétiquement que le simple fidèle peut déjà vivre et mettre en oeuvre cet aspect sacerdotal de la nouvelle économie de salut du Millenium dans notre actuelle et présente économie de salut... qui n'est pas celle du Millenium. Il y a donc là une véritable et très-grave anticipation luciférienne d'un ordo nouveau que Dieu n'a pas instauré encore, comme l'exprime le titre de mon présent article.
L'abbé Gleize, autre fils prêtre de Mgr Lefebvre, s'est penché sur cette célébrissime allocution de Paul VI du 29 juin 1972. Sans vouloir ni sans doute pouvoir prendre conscience du pseudo-millénarisme des modernes, à cause de sa formation lefébvriste trop classique au mauvais sens aloge du terme, il se focalise sur le mélange indû fait par Paul VI entre le sacerdoce sacramentel proprement dit et celui simplement spirituel des simples fidèles. Il remarque bien, lui aussi, que Paul VI établit effectivement le principe d'une distinction entre les deux sacerdoces, mais en ne professant qu'une différence de degré entre les deux, alors que la doctrine catholique enseigne qu'il s'agit d'une différence de nature, essentielle. Serait-ce un simple lapsus calami de la part de Paul VI, qu'il serait pharisien d'épingler ? Malheureusement, ce que le pape du concile moderne explicite de sa pensée sur le sujet dans son allocution rend totalement impossible une telle hypothèse. L'abbé Gleize l'a bien compris, à partir de l'objet cultuel attribué par le moderne audit sacerdoce royal des chrétiens :
"Ce sacerdoce commun [des simples fidèles, vu par Paul VI] se définit lui-même en fonction d’un culte, qui n’est plus seulement, comme jusqu’ici, un acte sacré portant sur une matière sacrée, l’acte de la prière liturgique et l’acte du sacrifice eucharistique. Pour Vatican II et Paul VI, l’acte sacerdotal du Peuple de Dieu a pour objet propre non seulement le sacré, mais aussi le profane. Cette idée se trouve déjà dans le n° 34 de la constitution Lumen gentium, au chapitre IV : «Les laïcs, en vertu de leur consécration au Christ et de l’onction de l’Esprit Saint, reçoivent la vocation admirable et les moyens qui permettent à l’Esprit de produire en eux des fruits toujours plus abondants. En effet, toutes leurs activités, leurs prières et leurs entreprises apostoliques, leur vie conjugale et familiale, leurs labeurs quotidiens, leurs détentes d’esprit et de corps, si elles sont vécues dans l’Esprit de Dieu, et même les épreuves de la vie, pourvu qu’elles soient patiemment supportées, tout cela devient offrandes spirituelles, agréables à Dieu par Jésus Christ (cf. I Pe II, 5), et dans la célébration eucharistique, rejoint l’oblation du Corps du Seigneur pour être offert en toute piété au Père. C’est ainsi que les laïcs consacrent à Dieu le monde lui-même, rendant partout à Dieu par la sainteté de leur vie un culte d’adoration».
"Il y a là une nouveauté sans précédent. L’acte du sacerdoce se définit en effet, selon l’étymologie, comme l’acte où l’on donne des choses sacrées, c’est-à-dire comme l’acte d’un médiateur, qui intervient entre Dieu et le peuple des fidèles, pour donner au peuple les bienfaits divins et offrir à Dieu la prière du peuple (Pie XII, Mediator Dei du 20 novembre 1947 ; Saint Thomas d'Aquin, Somme théologique, 3a pars, qu. 22, article 1). Le sacerdoce a pour objet d’exercer «les actes de religion ordonnés à la sanctification des hommes et à la glorification de Dieu, suivant les exigences de l’économie surnaturelle» (Pie XII, ibidem, dans AAS, 1947, p. 539 : «ad legitimos illos religionis actus eliciendos, quibus et homines sanctitudine imbuuntur et debita Deo tribuitur gloria, secundum normas ac præscripta divinitus data»). Le concile Vatican II et Paul VI en font l’acte du peuple tout entier, qui «consacre à Dieu le monde lui-même». Ici encore, Paul VI va plus loin que Vatican II. Le Concile se contente en effet de dire (ce qui constitue une équivoque déjà grave) que tout fidèle est prêtre en raison de la sainteté de sa vie, qui accomplit un culte d’adoration. Paul VI affirme en outre que cet acte sacerdotal du Peuple de Dieu consiste aussi à «dialoguer» avec Dieu, à «Le chercher toujours dans une profonde nouveauté, une découverte nouvelle, un amour nouveau». Ce n’est plus seulement l’acte de la sainteté de vie ; c’est l’acte d’une recherche sincère. Recherche d’un Dieu, précise encore le Pape, «qui n’est jamais suffisamment connu»" (Les fumées de Satan, abbé Jean-Michel Gleize ― https://laportelatine.org/formation/crise-eglise/rapports-rome-fsspx/les-fumees-de-satan-par-labbe-j-m-gleize-21-mars-2018).
On ne saurait d'ailleurs s'étonner que le pape du concile moderne rentre dans la perversité liturgique du novus ordo, car, révèle l'actuel préfet de la Congrégation pour le culte divin en tapant une fois de plus du poing sur la table, il a supervisé au plus près la confection de la nouvelle liturgie : "Mgr Roche s’en prend également à l’affirmation des critiques selon laquelle les réformes liturgiques ont été imposées par un comité qui n’a pas respecté les souhaits des pères du Concile. Il qualifie cette affirmation de «ridicule» et me dit que les archives de sa congrégation montrent que Paul VI parcourait les nouveaux textes liturgiques «page par page» de 21 heures à 23 heures, semaine après semaine" (fin de citation).
À suivre, dans la deuxième page :
La conception liturgique pseudo-millénariste de Mgr Arthur Roche,
Préfet de la Congrégation pour le culte divin,
anticipation vaticandeuse luciférienne d'une nouvelle économie de salut
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