L'obéissance et le respect
dûs aux Autorités politiques légitimes
sont-ils dûs à la République française actuelle
et aux dépositaires de son "pouvoir"...?
 
           
        ... On entend des choses bizarres, surprenantes, parfois, en chaire tradi, des applications de doctrine qui ne sont pas vraiment très-catholiques...
           
        Par exemple, on entend que la République française actuelle, démocratie post-révolutionnaire constitutionnellement athée comme elles le sont toutes de nos jours, est une société politique à laquelle le catholique devrait le respect et l'obéissance dûs aux sociétés légitimes. Donc, elle serait à rang d'égalité avec la société d'Ancien-Régime, celle de nos roys très-chrétiens, constitutionnellement basée sur le Christ quant à elle. Le devoir de respect et d'obéissance, qu'explicite saint Paul en Rom XIII quant aux sociétés politiques, serait donc soit disant dû, exactement au même titre, aux pouvoirs politiques qui sont basés sur le Christ, et aux pouvoirs politiques qui sont basés contre le Christ...!!
           
        Dans ce genre de discours scolastico-moderne, qu'hélas tous les papes modernes ont relayé, et pas seulement ceux d'après Vatican II, il y a une énorme hérésie, un énorme mensonge, une énorme lâcheté, un énorme reniement. C'est gravement tromper les âmes, de professer que le respect et l'obéissance sont dûs à la République française constitutionnellement athée actuelle, et aux détenteurs de sa soit disant "Autorité".
           
        Les sociétés politiques modernes en effet, ces fameuses démocraties qu'un Louis Veuillot appelait si justement "les filles de Babylone", ne peuvent en aucune manière se prévaloir de la moindre validité, et bien entendu, subséquemment, l'exercice de leur pouvoir, quel qu'il soit, ne peut jamais s'exercer d'une manière légitime : un pouvoir politique invalide ne peut en effet pas plus produire des actes légitimes, quand bien même le voudrait-il, qu'un mauvais arbre produire de bons fruits... C'est dire que, subséquemment, le devoir d'obéissance et de respect envers la fonction politique n'est dû en aucune manière aux détenteurs de pouvoirs politiques issus de la Révolution dont la charte fondamentale est les fameux "droits de l'homme" anti-Christ et anti-Dieu.
           
        Les scolastiques et ceux qui leur emboîtent le pas croient pouvoir opposer à ce que je viens de dire la doctrine de saint Paul dans son épître aux Romains, ch. XIII. Saint Paul, affirment-ils, nous demande d'être soumis à TOUT pouvoir politique, quelqu'il soit, constitutionnellement bon ou mauvais, parce que TOUT pouvoir "vient de Dieu".
           
        Mais, et j'en suis infiniment désolé pour eux, ce n'est pas du tout ce que nous dit saint Paul. Saint Paul nous dit même exactement le contraire de ce qu'ils voudraient lui faire dire. L'Apôtre des Nations en effet, dans ce célèbre ch. XIII qui a vu couler beaucoup d'encre, et trop souvent pas de la meilleure qualité, n'entend pas du tout intégrer dans les pouvoirs politiques dont il parle, ceux qui sont constitutionnellement mauvais. Bien au contraire, saint Paul ne parle que des pouvoirs politiques qui sont constitutionnellement ordonnés à la poursuite du Bien commun, à l'exclusion de tout autre. La démonstration en est facile à faire.
           
        Nous en avons la preuve formelle dans le verset trois dudit ch. XIII, qui, Lapalisse l'aurait dit, suit immédiatement les deux premiers versets, que voici : "Que toute personne soit soumise aux autorités supérieures : car il n'y a pas d'autorité qui ne vienne de Dieu, et celles qui existent ont été instituées par Dieu. C'est pourquoi celui qui résiste à l'autorité résiste à l'ordre établi par Dieu ; et ceux qui résistent attirent la condamnation sur eux-mêmes". Et saint Paul continue en disant : "Car les princes ne sont pas à craindre pour les œuvres bonnes mais pour les mauvaises. Veux-tu donc ne pas craindre la puissance ? FAIS LE BIEN, ET ELLE TE LOUERA" (v. 3). La pensée de saint Paul est claire : il nous dit là qu'à chaque et toutes les fois que je fais le bien dans l'ordre public, la puissance m'en louera, m'en récompensera. Mais, théologiquement, il est impossible qu'une puissance qui n'est pas constitutionnellement ordonnée à la poursuite du Bien commun, puisse, à tout coup, à chaque et toutes les fois, me louer pour le bien public que je fais : il ne reste en effet pas assez de grâce dans l'homme taré du péché originel, qu'il soit seul ou réuni avec ses semblables également tarés comme lui, pour pouvoir, à chaque et toutes les fois que le bien public est acté, opéré, louer celui qui le fait. Un pouvoir politique qui n'est pas constitutionnellement ordonné à la poursuite du Bien commun, pourra certes louer quelques biens publics, mais pas tous et à chaque fois. Seul un pouvoir politique chrétien-sacral constitutionnellement ordonné à la poursuite du Bien commun, c'est-à-dire basant son pouvoir politique explicitement sur le Christ, a ce pouvoir de louer tout bien public opéré par l'homme, quel qu'il soit. Il est donc clair que saint Paul n'entend parler, dans son fameux ch. XIII aux Romains, que des pouvoirs politiques qui sont constitutionnellement ordonnés à la poursuite du Bien commun, qui, eux et eux seuls, sont capables de louer celui qui fait le bien dans l'ordre public, à chaque et toutes les fois qu'il l'opère. Lorsque saint Paul dit : "Il n'y a pas d'autorité qui ne vienne de Dieu", cela ne doit être entendu que de la façon suivante : "Il n'y a pas d'autorité constitutionnellement ordonnée à la poursuite du Bien commun qui ne vienne de Dieu". Un point catholique, c'est tout. Les autres n'existent pas, pour saint Paul...
           
        C'est bien pourquoi d'ailleurs l'Apôtre des Nations continue très-logiquement son propos, dans le verset quatre, par ces mots : "CAR elle [la puissance politique] est le ministre de Dieu pour le bien". Comprenons bien là encore ce que nous dit saint Paul. Il ne dit pas, comme l'entendent très-pernicieusement les scolastiques : la puissance est le ministre de Dieu seulement quand elle poursuit accidentellement le Bien commun quand bien même elle n'y est pas ordonnée constitutionnellement, il nous dit tout au contraire qu'elle est le ministre de Dieu dans son être et son essence même qui la constitue politiquement et la fait tenir dans l'existence. D'où il s'ensuit qu'à chaque et toutes les fois que le bien est opéré dans le for public, elle le loue, car l'agir suit l'être, agere sequitur esse : puisque l'être du pouvoir politique est ordonné au Bien commun, alors, lorsque ce bien est opéré, il le loue systématiquement . Et c'est également pourquoi du reste, toujours aussi logiquement, saint Paul continue au verset quatre : "Que si tu fais le mal, crains ; car ce n'est pas sans motif qu'elle [la puissance politique] porte le glaive, puisqu'elle est le ministre de Dieu dans sa colère contre celui qui fait le mal". Notons bien comme saint Paul fait exactement le même raisonnement pour celui qui fait le mal au for public que pour celui qui y fait le bien : celui qui fait le mal au for public doit s'attendre à chaque et toutes les fois qu'il le commet, à être châtié par "la puissance", comme il dit. Or, si à chaque et toutes les fois que je fais le mal au for public, je dois m'attendre à être châtié par la puissance, c'est donc bien que ladite puissance est constitutionnellement ordonnée au Bien commun, et non accidentellement.
           
        Il est donc absolument clair et tout ce qu'il y a de plus indiscutable que dans Rom XIII, saint Paul n'entend parler que des pouvoirs politiques qui sont constitutionnellement ordonnés au Bien commun, À L'EXCLUSION FORMELLE DE TOUS LES AUTRES. Or, depuis la Révélation, c'est-à-dire depuis le passage du Christ sur la terre, le Bien commun a un Nom : celui du Christ, celui de Jésus. Tout pouvoir politique donc, depuis lors, pour être constitutionnellement ordonné à la poursuite du Bien commun sur la terre, doit être explicitement basé sur le Christ, ou, à tout le moins, sur le Dieu Un et Trine, le vrai Dieu catholique. Sous peine, tout simplement, de... ne pas exister métaphysiquement.
           
        Autrement dit, mais le lecteur l'a déjà compris, TOUS LES POUVOIRS ISSUS DE LA RÉVOLUTION, TOUTES NOS DÉMOCRATIES MODERNES CONSTITUTIONNELLEMENT ATHÉES, sont radicalement exclues du devoir de respect et d'obéissance intimé par saint Paul dans son ch. XIII aux Romains, parce qu'elles ne sont pas constitutionnellement ordonnées au Bien commun. Ce n'est même pas le catholique qui les excommunie, c'est elles-mêmes qui s'excommunient toute seules sans qu'on ait besoin de le faire : par leur principe fondamental qui consiste à rejeter du pouvoir politique la Pierre d'Angle qui est le Christ, se servant pour cela des antichristiques "droits de l'homme", elles se suicident elles-mêmes, pourrait-on dire, avant de naître ici-bas, elles font métapolitiquement hara-kiri dans le ventre de Satan leur géniteur, elles n'ont aucun droit à l'existence, c'est-à-dire à la validité de leurs institutions, et, conséquemment, à la légitimité de leurs actes politiques.
           
        C'est donc une véritable hérésie et un grand scandale que de leur appliquer le devoir de respect et d'obéissance intimé par saint Paul à tous les chrétiens UNIQUEMENT quant aux sociétés politiques constitutionnellement ordonnées à la poursuite du Bien commun.
           
        On pourrait objecter ici que saint Paul intime le devoir d'obéissance et de respect envers le pouvoir politique Romain de son temps ; or, celui-ci n'était bien sûr pas chrétien constitutionnellement. Cependant, si le pouvoir politique Romain n'est pas constitutionnellement chrétien, il est néanmoins ordonné à la poursuite du Bien commun. L'empire romain en effet, établi AVANT le Christ qu'il ignore sans faute de sa part, poursuit constitutionnellement le Bien commun, quand bien même c'est d'une manière fort imparfaite. Il y a un grand élan vers le Bien dans toute l'Antiquité, surtout plus la venue de Jésus-Christ approche, un désir de mieux en tous cas, dans tous les domaines, y compris celui sociopolitique. Il y a donc dans tous les gouvernements de l'époque, même celui de Néron qui vit au temps de saint Paul (car si lui est un chef politique très-mauvais, cela ne change pas la nature de son gouvernement qui tend vers le Bien commun), ce que les théologiens appellent une inchoation vers le Bien, c'est-à-dire un commencement même fort imparfait de Bien commun. Certes, lorsque le Romain va être interpellé par le Christ, on va le voir se raidir orgueilleusement et s'opposer à Lui, mais cela ne change rien au fait que la nature de son gouvernement prépare les voies du Seigneur.
           
        Tout le monde a remarqué la préparation géographique que constitue la civilisation romaine, pour l'établissement des grandes places du christianisme aux premiers siècles chrétiens, mais ce n'est pas seulement sur ce simple plan matériel que la civilisation romaine prépare les voies du christianisme, sur le plan sociopolitique il y a aussi, malgré de prodigieux et révoltants défauts, toute une plate-forme d'ordre que saura bien utiliser, en l'améliorant, le christianisme : c'est singulièrement évident dans la société gallo-romaine sur laquelle s'édifiera le christianisme mérovingien voire même carolingien. Je suis bien aise ici de pouvoir citer Benoît XVI, qui, dans une allocution "Actualité du Règne de Dieu", a judicieusement expliqué et rappelé qu'au temps de Jésus "le terme évangile était utilisé par les empereurs romains pour leurs proclamations ; indépendamment de leur contenu, elles étaient appelées bonnes nouvelles, c'est-à-dire des annonces du salut, car l'empereur était considéré comme le seigneur du monde et chacun de ses édits comme précurseur de bien" (Vatican Information Service du 28 janvier 2008, 18e année, n° 19). C'est précisément la doctrine professée par saint Paul en ses Épîtres, à savoir que les Républiques romaines de son temps poursuivent… le Bien commun, quand bien même, nous qui avons le recul de l'Histoire, nous sommes obligés de constater qu'ils étaient fort loin de le trouver toujours.
           
        Or, justement, ce n'est PAS DU TOUT le même cas de figure pour nos républiques post-révolutionnaires. Elles, elles ont sciemment rejeté le Christ Jésus, géniteur du Bien commun en Politique, de leurs Constitutions, c'est même la raison principale de leurs fondations et "existences" en ce monde, de par la Révolution. Et donc, elles ne sont pas constitutionnellement ordonnées à la poursuite du Bien commun. Par conséquent, on ne peut absolument pas supposer, comme pour l'antique République romaine, que les républiques post-révolutionnaires poursuivent le Bien commun, même une simple et imparfaite inchoation dudit Bien commun... Donc, puisqu'elles ne sont pas ordonnées constitutionnellement à la poursuite du Bien commun, en aucun cas on ne peut leur appliquer l'omnis potestas a Deo paulinien, saint Paul ne parlant dans son Épître que des pouvoirs constitutionnellement ordonnés au Bien commun. C'est, il faut le dire, un vrai scandale de voir la papauté concordataire & post, le faire. Ce sera par exemple tout l'angle de vue, tout le raisonnement de fond du pape Léon XIII, dans son abominable Bref Au milieu des sollicitudes, que d'assimiler frauduleusement "république romaine antique" et "république post-révolutionnaire"… alors que la première tend vers le Bien commun, et donc tend à trouver le Christ dans le for public, quand la seconde tend à expurger le Christ à toutes forces du for public, et donc le Bien commun dont Il est le géniteur (puisque "sans Moi, vous ne pouvez rien faire"). Les papes post-révolutionnaires n'ont pas vu la différence !!!
           
        ... Dieu me garde donc d'en vouloir au prêtre qui a sorti cette hérésie en chaire tradi, ainsi qu'à sa communauté qui professe cette hérésie lamentable, laquelle sous-tend, plus lamentablement encore, la très-hétérodoxe Liberté religieuse : avant lui, et bien au-dessus d'eux tous, il y a les papes modernes, et pas seulement ceux d'après Vatican II comme il est hélas trop facile de le dire, mais ceux d'avant Vatican II, par exemple les Léon XIII avec son "Ralliement" et les Pie VII avec son infâme "Concordat" napoléonien, qui l'ont professé.
           
        C'est dire, pour conclure, car dans ce simple mot je n'irai pas plus loin (si on veut le faire, on pourra consulter mon J'accuse le Concordat ! au lien suivant : http://www.eglise-la-crise.fr/images/stories/users/43/JaccuseLeConcordat.pdf), que "la crise de l'Église" a des racines qui remontent très-loin, et que les choses sont si graves, qu'elles ne sauraient plus désormais se résoudre que par le Retour du Christ glorieux dans notre univers ou Parousie.
           
        Pour l'instant, en L'attendant, expectans expectavi Dominum, sachons entretenir en nous la vraie doctrine catholiques des choses. Nous sommes au pied de la croix où est pendue, le plus lamentablement possible, cette fois-ci non plus le Christ Lui-même, mais son Épouse immaculée, l'Église.
           
        J'espère une chose : c'est que, par cette Lettre politique, j'aurai donné du COURAGE au prêtre prêcheur pour que, la prochaine fois qu'il se fendra de nous parler de Politique en chaire, il le fasse dans la Vérité de Dieu. Ou alors, il me faudra résoudre, la mort dans l'âme, à faire comme ce militaire français, aux temps de Léon XIII : "Lorsque le pape parle dogme, je suis à genoux ; lorsqu'il parle discipline, je suis debout ; lorsqu'il parle politique, je suis ASSIS"... attendant, dans la vertu d'impatience, la fin du discours mortifère...
 
En la fête de saint Pierre d'Alcantara,
ce 19 octobre 2016,
Vincent Morlier,
Écrivain catholique.
 
 
 
 
 
19-10-2016 09:17:00
Print